Socio-histoire d'une offre alternative de transport urbain: etude du cas des «woro-woro» de yopougon (abidjan, cote-d'ivoire)par Yerehonon Jean Zirihi Université Alassane Ouattara (Ex Université de Bouaké) - Doctorat 2015 |
3.1.3 Le réseau de clientèle ou le «Guantanamo» Selon (Ferréol, Cauche et al. 2004) la clientèle désigne,«des rapports de dépendance mutuelle, de nature asymétrique. Une protection ou des avantages sont accordés (de manière le plus souvent tacite ou informelle) en échange d'un certain nombre de prestations ou d'engagement déterminés par la coutume». C'est essentiellement une stratégie d'échange dans laquelle le don, l'aide, la faveur, le service rendu, deviennent un moyen de se faire des obligés, des créanciers. Dans la stratégie clientéliste, chacun, patron comme client, cherche dans l'échange à valoriser, et à monnayer ses ressources au maximum (Medard 1976). C'est ce qui permet l'appropriation tolérée des espaces publics par les entrepreneurs du secteur des woro-woro. Le clientélisme permet également une pacification des rapports sociaux lorsque les bénéfices de la rente spatiale sont équitablement répartis entre tous les acteurs concernés (pouvoirs publics, caciques syndicaux, entrepreneurs privés sous contrat), à charge pour eux de redistribuer à 186 leurs clientèles sociales. Cette privatisation des espaces est à la base de la création de petites gares dans les rues, aux abords des marchés, aggravant la congestion des agglomérations. La puissance de ces syndicats et les relations de clientèle qui se s'établissent entraînent une mutualisation de gains illicites au sein des forces de l'ordre, des gestionnaires de la ville et des chefs syndicats. C'est cette «somme d'argent», quotidiennement dégagée et remise aux autorités pour «laisser faire» que les entrepreneurs du secteur des woro-woro nomment ironiquement le «Guantanamo». Ainsi, le Guantanamo désigne dans le milieu des woro-woro, une cotisation avec des systèmes de quotas reversés tout au long de la chaîne de la hiérarchie en charge de contrôler la légalité. De ce point de vue, le «Guantanamo» participe du registre de la légitimation de l'illégal. Il permet également aux conducteurs de bénéficier d'une relative impunité89 quelque soit l'indiscipline routière et cela en référence à toutes les violations des droits humains sur l'île de «Guantanamo» érigée en zone de non droit par les Etats Unis au lendemain du terrible attentat de 200190 Toutefois, dans le secteur des transports, l'accès aux avantages liés au contrôle des espaces où s'exercent de telles pratiques n'est jamais acquis a priori. L'accès à de tels espaces suscite toujours des luttes de positionnement au sein des différents groupes d'entrepreneurs. 89 Selon la règlementation, les véhicules de transport en commun et les taxis compteurs doivent effectuer deux visites techniques annuelles. Mais cette règlementation est habilement contournée. «Même avec des papiers en règle, les doutes subsistent, certains propriétaires louent des pièces neuves à la journée pour s'assurer de ne pas recevoir d'amendes. Près de la moitié des véhicules en circulation ne sont pas en règle et plus de 70 % des taxis collectifs n'ont jamais été contrôlés.» Lejeal, F. (1998). "Automobile. En marge du "Mondial de l'Automobile" à Paris: une situation des marchés africains." marchés Tropicaux: 2081 à 2096. 90 Au matin du mardi 11 septembre 2001, dix-neuf terroristes détournent quatre avions de ligne. Deux avions sont projetés sur les tours jumelles du World Trade Center (WTC) à Manhattan (New York) et un troisième sur le Pentagone, siège du Département de la Défense, à Washington DC, tuant toutes les personnes à bord et de nombreuses autres travaillant dans ces immeubles. Les deux tours dont les toits culminent à un peu plus de 415 m de hauteur s'effondrent moins de deux heures plus tard, provoquant l'anéantissement de deux autres immeublesLe quatrième avion, volant en direction de Washington, s'écrase en rase campagne à Shanksville, en Pennsylvanie, après que des passagers et membres d'équipage ont essayé d'en reprendre le contrôle ( fr.wikipedia.org /wiki/Attentats du 11 septembre 2001). 91 La libéralisation devient alors la liberté accordée aux transporteurs privés d'assurer un certain nombre de lignes dans le périmètre actuellement réservé à la SOTRA (Contamin 1997). 187 |
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