Chapitre 1
Les woro-woro, une structuration en rapport avec la
réglementation et les performances de l'offre publique
formelle
Renforcées après l'indépendance notamment
en 1961 et 1964, les lois sur les transports collectifs remontent à
l'époque coloniale. En partie liée à la création de
la SOTRA, la réglementation sur les transports collectifs d'Abidjan a
évolué entre
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interdiction et tolérance comme on peut le constater dans
les différentes mesures prises depuis l'avènement de la SOTRA.
1.1. Les woro-woro, une bataille de reconnaissance de
longue date
Les mesures d'interdiction contre les modes de transport
africains remontent à l'année 1953. Il faut donc attendre les
années 1996-1997 pour que le secteur des transports publics soit
libéralisé à Abidjan67.
1.1.1 Les mesures de 1953: la matrice d'exclusion des
woro-
woro
Le quartier de Plateau était le siège de la
ville européenne et de l'administration. Il s'y reproduisaient avec
quelques nuances près les principales préoccupations
urbanistiques des villes des métropoles, comme l'hygiénisme, le
souci sécuritaire et le rejet des «classes dangereuses» vers
les périphéries (Antoine, Dubresson et al. 1987; Goerg 2006). Les
mesures concernant les transports imposent à tous les véhicules
proposant un service de transport dans le périmètre de la ville,
l'équipement d'un compteur enregistrant le temps écoulé et
la distance parcourue pour déterminer le coût du service.
«Dès le 1er septembre 1953, un arrêté de la ville
prescrit «l'emploi obligatoire du taximètre pour toutes les
voitures automobiles de place, circulant sur la zone urbaine». Ce que
ne possèdent pas les modes de transport africain qui se voient alors
exclus de la ville.
1.1.2 Des mesures d'exclusion renforcées à
l'indépendance
67 En Côte d'Ivoire, la politique du
président F. Houphouët-Boigny reste fermement opposée au
développement des transports «informels». Puisque ceux-ci sont
aux yeux des autorités des symboles d'un recyclage stigmatisant pour la
construction nationale. Ils développent à cet effet une
législation contraignante jusqu'à la fin des années1980,
assurant la défense des autobus de la SOTRA et des taxis compteurs.
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Dès l'accession de la Côte d'Ivoire à
l'indépendance, les autorités ont estimé que pour une
ville de la taille d'Abidjan et en raison de l'ambition de faire d'elle un
modèle en Afrique subsaharienne, les transports de faible
capacité (fourgonnettes du genre «1000 kg», taxis-collectifs
de 4 à 8 places assises...) ne devraient plus être de mise. Le 18
Août 1960, un protocole d'accord est signé avec le groupe
français Renault-Saviem suivi de la création, le 16
décembre 1960, de la Société des Transports Abidjanais
(SOTRA), avec des missions bien définies. Il s'agit des missions de
service public de transport collectif à travers toute la ville, avec un
renforcement de la desserte dans les quartiers-centres. Pour le succès
de cette convention de concession de monopole des transports collectifs
à la SOTRA, l'Etat décide de mettre les autres modes de transport
(gbaka et woro-woro), hérités de la colonisation, dans la
clandestinité. Cette situation, oblige les gbaka à se rabattre
alternativement sur l'interurbain (Dabou, Anyama et Bingerville) et sur le
suburbain (Abobo, Yopougon et certains villages Ebrié de la ville
d'Abidjan). Quant aux taxis collectifs (woro-woro), ils ont été
confinés dans le périmètre de certaines communes
(Koumassi, Marcory et Port-Bouët).
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