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Socio-histoire d'une offre alternative de transport urbain: etude du cas des «woro-woro» de yopougon (abidjan, cote-d'ivoire)


par Yerehonon Jean Zirihi
Université Alassane Ouattara (Ex Université de Bouaké) - Doctorat  2015
  

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3.3.2 Le rallongement des distances

«À partir de 1974, Nouveau quartier, Niangon n'existaient pas sauf Lokoua, Kouté village et Béago. De la gare à la SICOGI en R4 le prix

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du trajet était de 25f. Je suis parti à Marcory en 1975, je suis revenu en 1978, le transport est passé à 100 f. Il y avait maintenant SIDECI, Nouveau quartier, Toit Rouge. Après, c'est passé à 125 f et à 150 f en 2000. De 150 f en 2000, il est passé à 200 f en 2005. Aujourd'hui le prix est à 250 f.» (P. N. 19. 05. 2009)

La commune de Yopougon a connu au plan spatial un développement rapide. De 65 hectares en 1965, l'espace habité est passé à 3335 hectares en 1989. Soit 20,88 % de la superficie totale de la ville d'Abidjan en 1989 contre 1,76 % en 1965 et Yopougon demeure la commune ivoirienne la plus étendue. Cette extension spatiale a eu pour corollaire direct, l'allongement des distances entre les différents sous- quartiers d'une part, et entre les habitations, les lieux de travail et d'activités d'autre part. La complémentarité des moyens formels de transport et l'offre alternative apparaît comme une nécessité qui s'impose actuellement aux populations.

Comme le carburant, la contrainte liée à l'allongement de la distance semble également jouer un rôle important dans l'augmentation du prix du trajet. Aussi, certains utilisateurs des taxis collectifs ont-ils avoué se déplacer plutôt d'abord en gbaka pour ensuite terminer en woro-woro afin de limiter les dépenses liées au transport. Dans plusieurs quartiers de la commune de Yopougon l'augmentation du prix du trajet des woro-woro est vécue comme une conséquence de l'insuffisance de services de base dans les nouvelles aires périphériques d'habitation. Le manque d'infrastructures viaires ou le cas échéant, l'état dégradé de celles-ci, notamment en périphérie et en saison de pluies, ne permettent pas l'accès facile de tous les véhicules de transport collectif, sauf à certaines conditions (prendre le taxi en course ou motiver le chauffeur par une revue à la hausse du prix habituel du trajet)

3.3.3 L'augmentation de la demande sociale de mobilité

Le développement des initiatives alternatives de mobilité est une réponse individuelle à la conjonction d'une triple pénurie: de véhicules privés, de services de transport public et enfin, d'infrastructures routières (Diaz Olvera, Plat et al.

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2007). De plus, des travaux ont montré que concernant, la commune périphérique de Yopougon, les infrastructures et les services de base n'ont pas suivi le développement spatial de cette cité dortoir (Diahou 1981; Bonnassieux 1987). Cette situation a rendu l'offre de transport très insuffisante par rapport à la demande. Dans ces conditions, les offres alternatives qui sont régies par des mécanismes de fonctionnement internes65 procèdent à des stratégies diverses pour profiter de la hausse de la demande. De manière générale, avec une urbanisation accélérée en périphérie, on assiste à une augmentation incontrôlée des distances et un accroissement des besoins de déplacements. L'accroissement de la demande sociale de mobilité doit être pris comme un facteur d'augmentation du coût de trajet au cours de ces dernières années.

En effet, l'éloignement de Yopougon par rapport aux quartiers anciens, les quartiers centraux, notamment Treichville, Marcory et le quartier de Plateau, le centre administratif et des affaires qui concentrent l'essentiel des équipements et services de la ville, met en difficulté les offres classiques de transport dont l'évolution ne suit pas la demande. Cela constitue une opportunité pour les modes alternatifs qui sont régis par des règles spécifiques de fonctionnement et vis-à-vis desquels la loyauté n'est pas toujours de rigueur (Lombard, Sakho et al. 2004). Différents exemples éclairent ce processus permettant aux chauffeurs des woro-woro de réaliser un nombre quotidien de courses suffisant pour dégager des revenus. La tarification officielle est contournée par des voies différentes selon les chauffeurs et surtout aux heures de pointe (entre 06h 30 et 08 30, pour la matinée et en soirée, entre 17 h 30 et 19h 30). Le chauffeur du véhicule (woro-woro) procède par le fractionnement des trajets, notamment aux heures de pointe où la demande est très forte. La stratégie consiste pour le chauffeur à obliger les usagers à reprendre pour une nouvelle course soit le même véhicule ou un autre pour la suite du voyage, une fois, la destination improvisée est atteinte. Parfois, et toujours en liaison avec la forte demande, mais sous le prétexte d'un embouteillage, d'autres chauffeurs s'adonnent au marchandage pour revoir à la hausse le prix de la course. Un trajet réalisé en une seule fois habituellement par

65 Ces transports ont leurs propres règles de fonctionnement qui fondent leur réputation.

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un même véhicule est alors sectionné en deux, voire trois étapes par le chauffeur et avec un paiement exigé à chaque fois à l'usager. Ainsi, pour un trajet au tarif de 900 FCFA entre Yopougon et Port-Bouët, le fractionnement en deux courts trajets sous prétexte d'un embouteillage rapporte, à un même chauffeur 1200 FCFA au lieu de 900 FCFA (soit 300 FCFA de plus).

De toute évidence, c'est la liberté dans la fixation des coûts des trajets ainsi que la progression massive des opérateurs qui sont à l'origine de la connexion de multiples enjeux pour le contrôle de ce secteur. La plupart des auteurs s'accordent à dire que les conflits de compétence, les rivalités entre les différentes échelles d'autorité qui interviennent dans ce secteur des transports ont aidé à la structuration des woro-woro. Pour Jérôme Lombard «dans le transport urbain, la recomposition entre secteur public et secteur privé exacerbe la compétition pour la mainmise sur les espaces porteurs, sur les espaces ressources où le secteur privé est présent et avec lesquels les pouvoirs publics, centraux et locaux, comptent pour affirmer leur politique(Lombard 2006).La question des enjeux abordée permet pour ce faire d'amorcer le processus de structuration des woro-woro.

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Troisième partie

Analyse de la structuration des woro-

woro

Surgi dans la plus complète «informalité» dès les années 1972, lorsque les premiers propriétaires de véhicules particuliers de la commune naissante ont entrepris d'exploiter l'absence des transports publics formels. Les taxis collectifs sont restés embryonnaires jusqu'en 197966. Mais comme tout élément urbain, ces transports se sont transformés avec le temps, ils ont assimilé les changements socio-économiques du moment en adaptant leur offre à l'évolution de l'espace

66 C'est en 1979 que l'autoroute du nord qui relie à Abidjan à Yopougon comme principale voie de communication a été ouverte. Du point de vue démo-spatial, en 1979 Yopougon connaît ses premières valeurs fortes. La population fait un bond qualitatif et passe de 99000 habitants en 1975 à 219000 habitants pendant que l'espace urbanisé passe de 1185 hectares à 2245 hectares. Cela a permis à Yopougon d'être intégrée en 1980 à l'ensemble urbain abidjanais comme l'une des dix communes qui composent l'agglomération.

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urbain de Yopougon. Aujourd'hui, ils constituent une part importante de l'offre de transport collectif et justifient cette place grâce à des dessertes locales couplées de services de mobilité domicile-travail. En 2002, le rapport du district d'Abidjan, structure qui sert à l'élaboration des projets de développement de la ville d'Abidjan, estimait à 8315 le nombre des woro-woro en circulation. Le tableau suivant indique l'évolution du nombre de véhicules banalisés au cours de cette dernière décennie.

Tableau 9 : Evolution du nombre des véhicules banalisés

2002

2003

2004

2010

2334

2559

2512

4000

Source: Bnetd, AGETU, mairie

Dans cette partie du travail, on s'attachera à comprendre comment le processus d'acceptation des woro-woro s'est effectué. Il s'agira alors pour nous de montrer comment les nouvelles relations de pouvoir issues du contexte de la décentralisation agissent sur la structuration des woro-woro.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand