Chapitre1
Trajectoire d'évolution du taxi communal
«bleu»
Aujourd'hui incontestablement en émergence, le taxi
collectif woro-woro sert désormais à désigner une
variété de pratiques modales et d'usages collectifs de
l'automobile qui restent fortement attachés à des moments de
forte contrainte de la mobilité (accroissement de la ville, insuffisance
de l'offre publique formelle etc.). Ce n'est pourtant pas une pratique
nouvelle. Le mot est ancien et l'histoire de l'usage du taxi collectif
décrit un long parcours, depuis ses premières apparitions pour
évoquer durant la période coloniale l'idée d'un
véhicule ordinaire sans couleur précise qui prenait les passagers
d'un lieu fixe vers un autre ou en cours de route vers une direction fixe,
jusqu'à son emploi à Yopougon à partir de 1972 comme
transport de banlieue. Ensuite, avec l'introduction des taxis compteurs
«fatigués» à partir de 1974-1975, les transporteurs ont
donné à ces taxis le nom de woro-woro pour évoquer
l'idée d'un mode de transport particulier.
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L'offre de ces taxis à mesure qu'elle s'étoffait
ainsi avec la reconversion des taxis compteurs et d'autres véhicules
particuliers, s'est alors progressivement détachée des ses
anciennes pratiques. De transport informel et non prévu à
l'avance qu'il représentait, l'offre de woro-woro apparaît
désormais profondément organisée.
Depuis 1980, à côté des usages anciens en
sont apparus de nouveaux, popularisés particulièrement par la
mairie.qui prend comme prétexte les propositions de l'exhortation des
mairies dans la mobilisation des ressources budgétaires. La mairie
élabore à cet effet toute une série de
réglementations à l'échelle strictement local (Ori 1997).
Avec comme objectif le contrôle du secteur des taxis collectifs à
travers la perception de certaines recettes (Piveteau 2004; Lombard 2006). La
décentralisation consiste à prendre en considération les
initiatives des populations à un niveau local, afin de leur
reconnaître des droits sur l'utilisation des ressources qui leur
permettent de participer à la définition et à la mise en
oeuvre des politiques de développement (Kabedi 2007). Outre les accords
qui ont été conclus pour la taxation des taxis collectifs, ce
sont les transporteurs qui se sont établis au niveau local qui ont de
toute évidence permis la formalisation de ces taxis en taxi communal.
L'un des points majeurs de ce processus est l'attribution de la couleur bleue
à partir de 1996.
1.1. Le taxi bleu, une évolution qui part du
lointain
Dans la ville de Yopougon, si l'année 1972 marque le
point de départ du taxi collectif dans les déplacements des
populations, c'est, la couleur bleue, adoptée depuis l'année 1996
qui confirme incontestablement le succès de ce taxi collectif en tant
que transport local établi. Le schéma suivant est une figure
récapitulative des processus amenant au changement dans l'usage du taxi
collectif aussi bien dans la mobilité des populations.
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Schéma 4 : Chronologie des contextes
socio-économiques favorables à l'évolution des taxis
collectifs
(1996): la libéralisation des
importations des (V.O) le secteur des taxis largement
bénéficiaire. Apparition des choix des couleurs de taxis par les
autorités municipales pour les distinguer des intercommunaux
(banalisés).
(1994): dévaluation de FCFA:
renchérissement du coût de la vie, difficultés dans le
renouvèlement du parc auto et la ruée vers les «France-au
revoir» qui profitent au woro-woro
(1993): fort affaiblissement de l'offre formelle
et début de glissement des taxis communaux en taxis intercommunaux
(1980): établissement de
réglementation d'un mode de taxi local
(1979): ouverture de la voie express est-ouest,
création d'une liaison vers la prison civile et expansion des taxis
collectifs à Yopougon
(1972): première vague d'habitation
moderne et apparition de premiers taxis collectifs à Yopougon
Source: nos entretiens
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