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Socio-histoire d'une offre alternative de transport urbain: etude du cas des «woro-woro» de yopougon (abidjan, cote-d'ivoire)


par Yerehonon Jean Zirihi
Université Alassane Ouattara (Ex Université de Bouaké) - Doctorat  2015
  

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3.3.3 L'apport des taxis compteurs «fatigués»

Au cours de la période 1975-1985, il y a eu une augmentation de la population et l'usage de la ville dû à l'accroissement de l'espace urbain n'est supportable que grâce à l'utilisation des taxis collectifs. Bien que l'offre de taxis locaux soit insuffisante, la demande de mobilité a pu être satisfaite grâce à l'introduction des «taxis compteurs fatigués» qui ont joué un rôle essentiel dans la satisfaction de la demande. De fait, les taxis compteurs «fatigués» n'étaient rien d'autres que les taxis compteurs de la ville d'Abidjan qui totalisaient un nombre important d'années d'usage et dont l'état vétuste n'attirait plus véritablement la clientèle parfois très exigeante sur l'état mécanique du véhicule. Les taxis compteurs «fatigués», sans antenne s'utilisaient alors comme des taxis collectifs woro-woro ou taxis de relais au taxi compteur parallèlement à leur rôle de transport individuel

51 Les chauffeurs en enlevant l'antenne «taxi» se donne des chances de se camoufler et ainsi échapper au contrôle de police. Ce qui leur permet de faire le «woro-woro», un service de proximité avec des coûts relativement bas.

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et élitiste52. L'imagination des chauffeurs de taxi compteurs qui s'improvisent «collectifs» à certaines heures correspond, en réalité, à une innovation qui a contribué au développement des taxis collectifs au niveau de Yopougon comme le confirment les propos suivants:

«C'est du sabotage quoi. Les véhicules qui étaient fatigués dans le compteur là, fatigués là même, ne pouvant plus faire le compteur, ils venaient maintenant pour ramasser les gens. Ils disaient 30 f, 30f. Donc on les a nommés en même temps woro-woro. De 30 f, c'est venu à 50, puis 75 f ainsi de suite. Le woro-woro avait la même couleur avec le taxi compteur. Pour ne pas que les gars aient peur, croyant que c'est un compteur, c'est les transporteurs eux-mêmes qui ont attribué ce nom. Woro-woro lô! Seul ou à deux ou même à trois, ils chargent. Lorsqu'ils font un aller-retour ça devient une ligne. Ceux qui ont eu l'initiative, créent, un bureau, avisent les responsables qui leur donnent des cartes et confirment la ligne» (Y. C. 12-02- 2013).

Progressivement et en relation avec la croissance de la ville, les taxis ont étendu leur réseau de desserte aux différents quartiers qui se sont créés. C'est l'intensification du réseau qui a permis en 1980, avec l'arrivée des autorités municipales à établir pour la première fois, une réglementation spécifique aux taxis de Yopougon. À la fin des années 1990, l'offre des autobus de la SOTRA et celle des taxis compteurs éprouvent des difficultés à satisfaire la demande sociale de mobilité. Ces insuffisantes s'observent à deux échelles: celle de l'espace urbain central de la ville d'Abidjan où circulent exclusivement les bus de la SOTRA et les taxis compteurs et celle de certains territoires communaux où l'offre formelle publique partage le marché des dessertes avec les transports alternatifs. Mais le succès des taxis collectifs tiré de l'expérience des communes de Marcory,

52 À Abidjan deux types de taxi circulent: le Taxi compteur avec sa couleur rouge et le Taxi communal appelé communément woro-woro. Se déplacer en taxi compteur est symbole d'aisance car le prix affiché à l'écran après une course est non négociable. Vous pouvez facilement dépenser au bas mot entre 1500 (2,25 €) et 5000 f CFA (7,75 €) en fonction des kilomètres que vous avez parcourus. Certaines distances fixes entre deux quartiers peuvent faire l'objet d'un «arrangement» entre passagers et chauffeurs. Là encore il faut souvent débrousser entre 1000 (1,50 €) et 2500 f CFA (3,75 €) pour regagner un point de la capitale. Ceux qui ne peuvent pas se payer le luxe

«d'écraser la tomate» roule en woro-woro, la deuxième catégorie de taxi Abidjanais.

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Koumassi et Port-Bouët53, inspire les taxis collectifs de Yopougon qui se sont constitués tout au long des années 1980-1990.

53 Malgré l'application de la loi de monopole, les communes, de Marcory et Koumassi et Port-Bouët faisaient déjà l'objet d'une complémentarité des modes de transports collectifs par une

autorisation spéciale de l'autorité centrale d'alors (la ville d'Abidjan).

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DEUXIEME PARTIE

Reconstitution du processus d'évolution

des woro-woro

L'incorporation des woro-woro à la mobilité interne des populations s'est faite de manière lente et suivant des étapes qui correspondent à des moments de grands changements dans le fonctionnement de la structure urbaine de Yopougon. On distingue trois étapes principales: la première (1972-1975) est caractérisée par la faible incidence de l'offre publique à la mobilité des habitants de la cité naissante et par une timide incorporation des initiatives individuelles à la mobilité interne. La seconde débute dans les années 1980, elle est marquée par la première irruption et diffusion des véhicules privés (taxis) dans la mobilité interne et externe des populations de Yopougon et par le caractère subsidiaire que va avoir l'offre de l'Etat. La troisième étape (1990 à nos jours), est marquée par une offre de woro-woro durablement caractérisée par une expansion géographique dans les dessertes. Comme l'indique le schéma suivant.

Début d'extension de Yopougon, apparition de nouveaux quartiers et apparition de liaison internes de taxis (1972)

Extension urbaine incontrôlée, Yopougon devient commune en (1980) et domination des taxis collectifs

Extension urbaine très limitée au centre (Yopougon gare)

A partir de1992,déficit accentué de la SOTRA

Source: nos entretiens

Modes de transport complémentaires depuis le début des années 1994

Autobus SOTRA+taxi compteur+ gbaka+ taxi communal+taxi collectif intercommunal

Système mixe : autobus+ taxis villes+gbaka de 1969 à 1972

Apparition des taxis collectifs (woro-woro) intercommunaux sur les lignes de la SOTRA et des taxis compteurs et se positionnent en concurrents

1969 : première ligne de la Sotra en direction de Yopougon

Autobus+taxi ville+ gbaka+taxi collectif (1972 à 1980)

Reconnaissance des taxis collectifs comme taxis

communaux

Des origines jusqu'à 1960: marche+ portage+ quelques taxis villes rares+ des gbaka en partance pour Dabou

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Schéma 3: Schéma d'évolution des transports alternatifs de Yopougon

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L'ensemble de ces transformations indiquées peuvent être caractérisées à trois niveaux marqués par des contextes spécifiques. Il s'agit notamment de l'introduction de nouvelles couleurs et de nouvelles marques de véhicules à mettre en rapport avec les politiques de communalisation et d'ouverture sur l'extérieur initiées à partir des années 1980. Le deuxième niveau d'analyse concerne les modifications dans l'occupation de l'espace observées dans l'offre de ces taxis depuis le milieu des années 1990. Quels sont les éléments d'analyse du passage de l'offre communale des taxis collectifs à une offre intercommunale? Le troisième et dernier élément d'analyse est relatif aux modifications constatées dans la structure de fonctionnement de cette offre de transport. Comment expliquer les transformations observées dans les prix au niveau de ces transports? Qu'est-ce qui explique les évolutions dans la typologie des acteurs de ce secteur?

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery