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La nouvelle gouvernance financière en zone CEMAC et les droits budgétaire et comptable de la république centrafricaine


par Serge Steeve Thierry TENGUEDET
Université de Yaoundé 2 - Master 2 Recherche en Droit Public 2018
  

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CONCLUSION DU CHAPITRE PREMIER

En définitive, la problématique de l'analyse de forme et de fonds des nouveaux paradigmes de gestion axée sur la performance et les acteurs budgétaires en République centrafricaine a été soulevée et développée dans ce chapitre. Nous l'avons analysé à travers le cadre de l'élaboration et d'exécution du budget et la gestion axée sur les résultats. C'est-à-dire, l'on a développé depuis les différentes phases de préparation jusqu'à celles d'exécution comparativement avec le système qui se pratique en France. Le nouveau cadre du système financier harmonisé tel que voulu par le conseil des ministres de l'UEAC en zone CEMAC se résume par le nouveau régime d'élaboration et de gestion du budget connu sous l'appellation (le budget programme). Nous avons aussi développé les principes de séparation de pouvoirs des ordonnateurs et comptables, ainsi que les rôles renforcés de l'Assemblée Nationale et de la Cour des Comptes...

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CHAPITRE SECOND : LA RESPONSABILISATION DES GESTIONNAIRES DE

CREDITS PUBLICS LE NOUVEAU PARADIGME DU CADRE FINANCIER EN RCA.

Pour mieux analyser le concept de la responsabilité des gestionnaires de crédits publics, instituée par les directives de la CEMAC de 2011 relatives à l'harmonisation du cadre communautaire des finances publiques et transposées dans l'ordre juridique national en RCA, il faut remonter son historique dans le temps. En effet, le régime financier de la RCA est la résultante du système colonial hérité du système de la révolution française de 1789. Ensuite il est repris dans l'ordonnance du 02 janvier 1959. Trois règles définissaient la gestion des finances publiques en France à savoir : l'unité143, l'universalité144 et l'annualité budgétaire145. Ce cadre réglementaire qui se voulait égalitaire et juste va présenter de nombreuses limites notamment le déséquilibre des pouvoirs entre l'exécutif et les assemblées démocratiques, la lourdeur et la complexité du système comptable, la multiplication des niveaux de décision et de contrôle, etc. Pour pallier à ces lacunes, dont les effets paralysants ont été largement démontrés depuis des années146 dans des revues scientifiques et rapports administratifs, la Loi Organique relative aux Lois de Finances (LOLF), votée en août 2001 et mise en place en janvier 2006, constitue une réponse à ces insuffisances sus relevées et marque une évolution importante en innovant sur deux plans.

D'abord sur le plan politique, la LOLF participe à l'évolution des traits du système de pouvoir à travers le renforcement du rôle du Parlement dans l'élaboration, le contrôle et le suivi des lois de finances147. Puis, sur le plan économique et gestionnaire, la LOLF met l'accent sur le fait que tout acteur public, État compris, doit démontrer son efficacité148. Pour répondre à cette double finalité, la LOLF introduit une nouvelle dynamique centrée sur une logique de gestion par

143 Qui se traduit par la production d'un seul document à soumettre au Parlement pour proposer l'ensemble des dépenses et recettes de l'État.

144 Admettant deux niveaux : une inscription budgétaire formelle de toutes les recettes et dépenses sans possibilité de contraction ni de compensation entre ces dernières, et une logique de transversalité de l'intérêt général selon laquelle toutes les recettes ne peuvent être affectées à une dépense donnée.

145 Impliquant que la loi des finances prévoit et autorise pour chaque année l'ensemble des ressources et des dépenses de l'État suite au vote du Parlement.

146 ALBERTINI Jean Benoît, « Réforme administrative et réforme de l'État en France - Thèmes et variations de l'esprit de réforme de 1815 à nos jours ». Economica, Paris. 2000

147 HOCHEDEZ Daniel, La formation de la loi organique du 1er août 2001 : l'élaboration de la proposition de loi organique. Revue Française de Finances Publiques p.86. 2004

148 BARILARI André et BOUVIER Michel, « La nouvelle gouvernance financière de l'État », LGDJ-Systèmes, 2004

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les résultats conformes aux principes du New Public Management (NPM)149. A l'instar de l'ensemble des réformes NPM opérées dans d'autres pays, la LOLF fait évoluer le cadre global de l'action publique pour se centrer davantage sur les performances des organisations publiques en termes d'efficience et d'efficacité dans la gestion des politiques économique et sociale150. Aussi, si les principes du NPM ont été beaucoup étudiés, peu de travaux ont porté sur les conditions organisationnelles et institutionnelles de leur mise en oeuvre. Plus particulièrement, l'évolution du rôle et des missions des hauts fonctionnaires a été peu étudiée151. Ceci est également une réalité pour le cas français dans la mesure où les travaux sur la réforme LOLF se sont davantage concentrés sur les principes mêmes de la gestion par les résultats et du NPM d'un point de vue technique et/ou politique.

Dans le contexte de notre étude, nous aurons à traiter le cas de la responsabilité des hauts fonctionnaires, responsables d'exécution des crédits publics, nommés par leurs Ministres de rattachement pour assurer le pilotage, la mise en oeuvre des politiques publiques et d'en rendre compte conformément au nouveau cadre harmonisé des finances publiques de la République Centrafricaine. Nous nous intéressons plus spécifiquement à l'exercice de leur responsabilité managériale et nous présenterons la question des marges de manoeuvre dont ils disposent. Notre démarche empirique est fondée sur une recherche documentaire mobilisant différents rapports publics et plus particulièrement le rapport bilan de la LOLF établi par la Cour des Comptes de la France. L'analyse effectuée nous conduira à mettre en évidence les facteurs limitatifs de l'exercice de la responsabilité managériale tels que le chevauchement des périmètres d'action, de compétences et d'autorité, de l'insuffisance des marges d'action pour l'animation des échelons inférieurs ainsi que les lacunes en matière d'incitations à rendre compte et à faire l'objet de sanctions au regard de la nouvelle législation du système financier centrafricain de 2019.

149 POLLITT Christopher and BOUCKAERT Geert., «Public Management Reform. A Comparative Analysis» 2nd Ed. Oxford University Press, Oxford. (2004).

150 MAZOUZ Bachir & MATHAIS Daniel., « Nouvelle gouvernance, nouvelles compétences. Revue Internationale de Gestion 29 (3), p.82-92, 2004

151 LODGE Martin and HOOD C., «Competency, Bureaucracy and Public Management Reform: a Comparative Analysis. Governance» 17 (3), p. 313-333. 2004

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Nous montrerons qu'en introduisant la dimension intermédiaire qui est la dimension managériale, entre le politique et l'administratif, sans réellement remettre en cause le modèle préexistant, le nouveau cadre appelle une clarification des modes de partage des responsabilités et des dispositifs de reddition des comptes. Notre recherche sera structurée en deux sections. Dans une première, nous analyserons d'abord les principes de la gestion par les résultats, puis, la diversité des approches selon les pays enfin, nous mettrons l'accent sur les implications en matière de responsabilité managériale pour dégager une grille d'analyse en (Section 1). Dans une seconde phase, nous expliciterons les spécificités de la réforme introduite par le nouveau cadre harmonisé ainsi que le rôle des responsables de programme y compris les implications comparatives avec le système français la LOLF en tant que réforme avancée (Section 2).

Section 1: Le principe de gestion par les résultats et responsabilité des managers publics selon le nouveau cadre harmonisé des finances publiques.

Bien que les vocables employés diffèrent entre la gestion par les résultats, le management par les résultats ou encore gestion par la performance ou management par la performance. Ces concepts reviennent très souvent dans le nouveau cadre harmonisé des finances publiques. La doctrine du NPM demeure similaire. Il s'agit ici de mettre les résultats des organisations publiques au coeur de leur fonctionnement pour en évaluer la performance à différents niveaux. Par cette démarche, l'on attend évaluer d'un point de vue politique, social et économique. La notion de la performance englobe les résultats en termes de qualité des services rendus (efficacité), puis, en termes de qualité de la gestion des dépenses publiques (efficience) et enfin, en termes de qualité des décisions prises (transparence) des processus de décision. Tandis que, la gestion par les résultats obéit ainsi à un certain nombre de fondements et principes qui, sans être universels, présentent des points de convergence multiples et mobilisent des outils comparables ainsi que le contrôle de gestion, les indicateurs de mesure de la performance, l'évaluation et la contractualisation, etc. Ce qui nous amènera à voir la position de la doctrine commune et les approches diverses (Paragraphe 1), puis, les relations politico-administratives et partage des responsabilités (Paragraphe 2)

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Paragraphe 1 : Une doctrine commune avec des approches diverses

Le but consiste à orienter les organisations publiques vers une intégration accrue en diffusant des normes communes qui visent à relativiser les spécificités sectorielles, organisationnelles, locales et professionnelles. Cependant, la mise en pratique dépend du contexte politique, sociétal et économique du pays l'accueillant des réformes. Ces réformes sont menées dans les différents pays au monde en général et en zone CEMAC plus particulièrement en RCA qui ont adopté une doctrine commune (A), avec des approches diverses (B).

A- Une doctrine commune adoptée par nombres d'Etats.

Au Royaume-Uni par exemple, la démarche de l'efficacité dans la gestion des deniers publics est basée sur le modèle marchand procédant par comparaison public/privé152. En effet, la gestion par les résultats est articulée autour de la mise en concurrence des différents acteurs publics et/ou privés avec l'assouplissement des structures publiques. La démarche, ou du moins ses principes de fonctionnement, sont au centre de la gestion publique et se matérialise par une pratique poussée de la délégation via les mouvements de privatisation et d'externalisation de certains secteurs de l'action publique.

Ensuite, aux Pays-Bas. La gestion par les résultats est orientée selon un modèle de gouvernance par réseaux avec une séparation nette entre les niveaux opérationnel et stratégique153. Les décisions sont décentralisées afin de mieux répondre aux besoins d'intérêt général en accordant aux acteurs publics une plus grande autonomie d'action et une plus grande flexibilité. En contrepartie, les responsables publics sont tenus d'assumer pleinement la responsabilité de leurs décisions et de leurs performances, car l'évolution de leur carrière en dépend.

En outre, le Canada par exemple. La gestion par les résultats est acceptée dans sa dimension organisationnelle intégrée avec une approche systémique et multidimensionnelle de la performance. L'accent est davantage mis sur le principe d'autonomie et sur la simplification des

152 POLLITT Christopher. and BOUCKAERT Geert., «Public Management Reform. A Comparative Analysis» 2nd Ed. Oxford University Press, Oxford. (2004).

153 LE GALÈSE Patrick, « La réforme de l'État et la nouvelle gestion publique : mythe ou réalité ». Revue Française d'Administration Publique p.105-106, 2003.

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processus aussi bien sur l'assouplissement des structures154. La notion d'engagement est cruciale, qu'il s'agisse d'engagements contractuels formels ou non, et qu'il s'agisse de partenaires internes ou externes au domaine public.

France par l'adoption d'abord de la Rationalisation de Choix Budgétaire (RCB), puis elle est améliorée par la suite par la réflexion engagée au Parlement, à la fin des années 1990, autour de la question de l'efficacité de la dépense publique et du rôle des assemblées en matière budgétaire et qui ont finalement fait naître un consensus politique sur la nécessité de moderniser les règles de la gestion budgétaire et comptable. Le vote de la loi organique relative aux lois de finances (la LOLF), le 1er août 2001, a donné quatre années aux administrations pour se préparer à ce nouveau cadre. Ces réformes ont introduit une démarche de performance pour améliorer l'efficacité des politiques publiques qui permet de faire passer l'État d'une logique de moyens à une logique de résultats. Après plus de quatre années de travaux pour sa mise en oeuvre pratique, elle entre pleinement en application le 1er janvier 2006.

Enfin, dans la zone CEMAC, la gestion par les résultats est instituée par le Conseil des ministres de l'Union Economique de l'Afrique Centrale (un organe de la CEMAC) qui a adopté six importantes Directives Communautaires en 2011, en s'inspirant des exemples réussis ou semi-réussis de certains Etats ou communauté d'intégration au monde pour stabiliser les Finances publiques de ses Etats membres.

La RCA a souscrit à ces directives communautaires harmonisant le cadre des finances publiques en zone CEMAC et les a transposés dans son ordre juridique national. La mise en oeuvre des nouvelles normes financières publiques a changé l'architecture et la méthode d'élaboration du budget qui passe d'une approche de moyen à une approche de résultat. Elle a mis en perspective l'action du Parlement et de la Cour des comptes qui doivent mettre la veille à l'efficacité de la dépense publique au coeur de leurs actions.

154 MAZOUZ Bachir. & MATHAIS Daniel., « Nouvelle gouvernance, nouvelles compétences. Revue Internationale de Gestion 29 (3), p.82-92, 2004.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius