Paragraphe 2 : Le principe qui régit
l'exécution du budget
L'origine et la justification du principe de la
séparation des ordonnateurs et des comptables émanent du nouveau
cadre du droit budgétaire Centrafricain qui l'énonce. Il clarifie
plus précisément le principe de la séparation des
fonctions de l'ordonnateur et les fonctions du comptable public. Ce principe
est l'un des principes fondamentaux qui a été institué
d'abord par la France au XIVe siècle dans le décret du 31 mai
1862 sur la Charte de l'organisation de la comptabilité publique. En
République Centrafricaine, le principe a été adopté
les anciens textes hérités de la colonisation portant
régime financier de la RCA. Repris dans le nouveau cadre
règlementaire de 2019 et spécifie que « les fonctions de
l'ordonnateur sont incompatibles avec celles du comptable ». Ensuite,
il affirme que « les comptables du trésor sont chargés
d'assurer la garde et la gestion des fonds et valeurs de l'Etat... »
Et enfin, il dispose que « un comptable du trésor ou son
conjoint ne peut assumer les fonctions ni de l'ordonnateur de l'Etat, ni
d'ordonnateur de la personne morale publique auprès de laquelle il
exerce ses fonctions ». Ainsi, nous verrons les principes de la
séparation des acteurs (A) et la responsabilité
(B)
113
A- Le principe de la séparation des acteurs
La justification de ce principe sous-entend la
séparation des agents et des rôles qu'ils remplissent dans le
cadre de l'exécution de la loi des finances. En effet, cette
impossibilité de cumul des tâches ne vaut pas seulement pour la
même personne, aussi bien pour les conjoints. Il en est de même
pour les ascendants et les descendants d'un de ces organes qui ne peuvent
assumer concomitamment l'autre série de tâches. Ce qui
intéresse le législateur centrafricain, ce n'est pas seulement la
division du travail, mais c'est aussi d'être sûr que ces deux
agents qui sont censés se contrôler mutuellement ne seront pas
tentés par des malversations qui pourraient être favorisées
par leur proximité. D'un autre côté, la
spécialisation voulue par le droit pour chaque organe va donc
entraîner une autre distinction au niveau des responsabilités
encourues. Il serait en effet aberrant qu'en vertu du principe, ces deux agents
voient leur responsabilité engagée de la même
manière ou encore que l'un d'eux endosse la responsabilité qui
incombe à l'autre. Cette seconde distinction est donc une
conséquence logique de la première.
Ce principe a également pour but de permettre un
contrôle efficace de l'exécution du budget et par la même
occasion, d'éviter les risques de fraudes. Le principe est
aménagé aujourd'hui comme par le passé mais, son maintien
de nos jours implique un certain nombre de tempéraments. Non seulement
les organes sont distincts et indépendants mais, de plus les fonctions
exercées par ces organes le sont aussi. Le principe se traduit par une
double séparation.
Quant au contenu du principe, il renvoie à une
séparation des acteurs qui sont chargés de la réalisation
des opérations de dépenses et de recettes contenues dans le
budget. Cependant, l'innovation majeure du principe, ce n'est pas d'avoir
distingué les différentes phases de la concrétisation de
ces prévisions budgétaires, mais de les avoir confiées
à des agents différents. Cette distinction implique que chacun de
ces agents, en ce qui le concerne, soit responsable de cette
concrétisation à la hauteur des opérations qui lui ont
été confiées. Autrement dit, si le principe entend
répartir les tâches, il prévoit aussi une
répartition de la responsabilité de l'exécution du budget
à la lumière de cette division des rôles.
114
Au niveau de la séparation des fonctions, l'on note la
séparation de fonction en matière de dépense. Les
opérations de dépenses sont exécutées en deux
phases, l'une relevant de l'ordonnateur pour la phase administrative et l'autre
au comptable pour la phase comptable.
S'agissant de la phase administrative, elle se
décompose en trois temps comme suivent :
- Premièrement, l'engagement qui est
l'acte par lequel un organisme public crée ou constate à son
encontre une obligation dans laquelle résultera une charge.
Concrètement, il peut s'agir d'une commande, d'un contrat. La
dépense est engagée dans la limite du crédit ouvert
correspondant à la nature des dépenses à engager.
- Deuxièmement la liquidation qui,
quant à elle «a pour objet de vérifier la
réalité de la dette et d'arrêter le montant de la
dépense». Elle est réalisée au vu des titres et
des pièces justificatives qui permettent d'attester «le service
fait» et de calculer très rapidement le montant de la
dépense ; et
- Troisièmement, l'ordonnancement ou le
mandatement qui se présente comme l'acte administratif donnant,
conformément aux résultats de la liquidation, l'ordre de payer de
la dette de l'organisme public. Il se traduit par une ordonnance de paiement
quand l'ordonnateur est un ministre et par un mandat de paiement dans tous les
autres cas.
Quant à la phase comptable, dans
celle-ci, le comptable exerce successivement deux fonctions.
- D'abord, la fonction de payeur. Elle se
traduit par l'exercice de contrôles. Comme le rappelle les dispositions
en vigueur, « le comptable d'une commune, d'une préfecture ou
d'une région ne peut subordonner ses actes de paiement à une
appréciation de l'opportunité des décisions prises par
l'ordonnateur».
Mais, d'une part, en application de la jurisprudence, le
comptable ne peut se faire juge de la légalité des
décisions administratives. Plus précisément le comptable
vérifie la présence des pièces justificatives
prévues dans les nomenclatures établies par le ministre des
finances conformément aux textes en vigueur. D'autre part, il
vérifie le caractère exécutoire des actes
locaux. Cela signifie qu'il s'assure non seulement que les
actes sous-tendant les dépenses ont bien fait l'objet de transmission au
représentant de l'État, mais que de plus ces mêmes actes
n'ont pas fait l'objet d'une annulation contentieuse. Enfin, il exerce les
contrôles énoncés en qualité de l'ordonnateur,
exacte imputation des dépenses aux chapitres qu'elles concernent,
disponibilité des crédits, validité de la créance,
c'est à dire vérification du service fait et des calculs de
liquidation. S'il apparaît une irrégularité par rapport
à l'un ou l'autre de ces points, le comptable suspend le paiement et en
informe l'ordonnateur.
Quant à la fonction de caissier, le
comptable procède au règlement de la dette en payant le
bénéficiaire. C'est à dire le créancier
lui-même, sinon le paiement n'aura pas de caractère
libératoire, de plus le comptable s'assure qu'il n'existe pas
d'opposition au paiement.
Au sujet de la séparation des fonctions en
matière de recettes, là encore la procédure
d'exécution se décompose en deux phases. Dans la phase
administrative, l'établissement des recettes, la loi
prévoit:
- D'abord, la constatation des droits. Elle
permet de vérifier la réalité des faits
générateurs de la recette ;
- Ensuite, la liquidation. Elle permet de
calculer le montant de la recette ;
- En outre, la mise en recouvrement. Elle se
traduit par l'établissement d'un titre de recettes et par l'inscription
sur un bordereau récapitulatif aux fins d'enregistrement dans la
comptabilité administrative. Pour finir, le bordereau est envoyé
au comptable avec les pièces justificatives.
- Enfin, s'agissant des créances de la
collectivité émanant d'une décision de justice
l'ordonnateur est tenu d'intervenir dans les deux mois. En cas de
défaillance le
représentant de l'État dispose d'un pouvoir de mise
en recouvrement d'office.
115
Quant à la phase comptable relative aux
contrôles, l'on a d'abord :
116
- le comptable après avoir réceptionné le
titre de recette, contrôle l'identification du débiteur, examine
les pièces justificatives, vérifie la régularité de
la recette. Ensuite, il doit notamment vérifier la
régularité des réductions et des annulations des ordres de
recettes. Enfin, il prend en charge la recette, c'est à dire qu'il
procède à son enregistrement comptable. Il envoie alors au
débiteur l'avis des sommes à payer et encaisse le
règlement du débiteur par remise d'espèces, d'un
chèque bancaire ou postal ou encore par virement.
- Puis, le recouvrement, en cas de
difficultés, le comptable a la possibilité de procéder
à l'exécution forcée d'office contre le débiteur,
sauf contestation du bien-fondé de la créance devant la
juridiction compétente.
Dans un délai de deux mois, le
débiteur peut contester le bien-fondé de la créance ou la
régularité formelle de l'acte de poursuite devant les
juridictions compétentes. Au bout de quatre ans, l'action en
recouvrement est prescrite. Le comptable est tenu de faire, toutes les
diligences nécessaires pour faire entrer les fonds dans la caisse
publique. Il engage en effet sa responsabilité personnelle et
pécuniaire. Si la recette se révèle irrécouvrable
à la suite par exemple, de la disparition ou de l'insolvabilité
des débiteurs l'admission en non-valeur de la créance peut
être demandée.
|