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La nouvelle gouvernance financière en zone CEMAC et les droits budgétaire et comptable de la république centrafricaine


par Serge Steeve Thierry TENGUEDET
Université de Yaoundé 2 - Master 2 Recherche en Droit Public 2018
  

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B- Le Choix des indicateurs de suivi, évaluation des actions axées sur les résultats voulu par l'UEAC en zone CEMAC

Pour mieux suivre et évaluer les actions axées sur la performance des résultats, il faut qu'il y'ait des indicateurs qui doivent être considérés comme des indicateurs clés, des indicateurs simples, pertinents et objectivement vérifiables en termes de résultats d'activités et de moyens. A cet effet, la chaîne d'impacts se distingue à plusieurs niveaux de suivi-évaluation ainsi que de leurs relations causales. Pour qu'un programme donné puisse avoir un impact sur un objectif de développement ou un groupe cible donnés, le point de départ doit mettre en place les intrants adéquats. Ensuite, au fur et à mesure de la mise en oeuvre du programme, les activités doivent être suivies par le gestionnaire du programme. Les résultats directs du programme sont des extrants c'est à dire de biens et services rendus disponibles aux groupes cibles. Ces extrants sont supposés se traduire en résultats pour les groupes cibles du programme. Ces résultats quant à eux sont souvent mesurés en termes d'accès et/ou d'utilisation par le groupe cible des biens et services produits. Finalement, à moyen et à long terme, une fois que tous les effets directs et in directs ont eu lieu, l'on peut s'attendre à ce que le programme ait un impact en termes de contribution à l'atteinte des objectifs de politiques publiques et du développement plus globaux au niveau du pays.

Au fur et à mesure que l'on se déplace vers la droite de manière évolutive, le long de la chaîne d'impact, le contexte social, économique, environnemental et politique national voire international (contexte ou facteurs exogènes) a de plus en plus d'influence sur les indicateurs de résultats. En outre, les indicateurs de résultats et d'impact peuvent être influencés par une combinaison de politiques macro-économique, sectorielles, et de programmes. C'est ce que l'on appelle l'influence des facteurs endogènes.

Quant à l'aménagement de l'obligation d'exécution intégrale du budget, stipulé dans les dispositions de l'article 3 de la directive relative aux finances publiques qui exigent aux Etats

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membres la communautarisation de leurs normes relatives aux lois de finances présente une double particularité. D'une part, il s'inscrit dans une dynamique antérieurement impulsée par les bailleurs de fonds et expérimentée dans les Etats membres depuis plusieurs années. D'autre part, il marque une volonté de réappropriation ou d'endogénisation133 des normes orthodoxes de gestion budgétaire pour une meilleure adhésion à leurs prescriptions. De manière générale, les directives communautaires engagent les Etats quant aux résultats à atteindre, en leur laissant les moyens d'y parvenir.

Ensuite, s'agissant de la gestion rationnelle des finances publiques au sein de la CEMAC, l'adoption d'un certains nombres directives sur tous les moyens concourant à cet objectif, notamment (la nomenclature budgétaire, la comptabilité publique, le plan comptable, le tableau des opérations financières, la TVA et le code de transparence et de bonne gouvernance financière,...) semble ne pas laisser le choix aux Etats membres de l'intégrer. Bien plus, toutes ces directives entrent en vigueur immédiatement134 dans l'ordre juridique national. L'on s'attendait à la détermination des délais de transposition et d'entrée en plein régime d'application au plan national. Mais, ces formalités sont dans ce cas, presque vidées de leur portée. Puisque, la plupart de ces dispositions avaient été prescrites dans les mêmes termes aux Etats et figuraient déjà dans les législations internes. L'on peut même dire qu'elles préexistaient donc à leur communautarisation, et, ne fait que collectiviser une source de même nature pour un meilleur ancrage de celle-ci dans sa mise en oeuvre.

Enfin, l'aménagement de l'obligation d'exécution intégrale du budget stipulée à l'article 3 de la directive CEMAC relative aux lois de finances, dispose à la troisième phrase du premier alinéa que : « L'ensemble des ressources de chaque collectivité publique est affecté au financement de l'ensemble de ses charges». En effet, couramment compris comme la règle de non affectation de certaines recettes à des dépenses particulières, cet énoncé relu à l'aune de la gestion axée sur les résultats, délivre les modalités d'aménagement de l'obligation d'exécution intégrale du budget à mobiliser l'ensemble des recettes pour couvrir l'ensemble des dépenses des personnes publiques.

133 MEDE Nicaise, « Réflexion sur le cadre harmonisé des finances publiques... », op.cit., p.1.

134 Voir l'article 82 de la directive relative aux lois de finances qui en fixe la procédure : signature et insertion au journal officiel de la communauté et à la diligence des autorités nationales, à ceux des Etats membres.

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Or, la couverture de l'ensemble des dépenses est une particularité des finances publiques qui réside sur le fait qu'autant leur collecte est pénible, autant leur utilisation est délicate. Dans le but de prévenir toute prévarication, la dépense publique a été entourée par la directive d'un formalisme strict pour sa réalisation. Il a paru nécessaire de spécialiser les crédits et de séparer les ordonnateurs et les comptables. Les uns devant assurer l'exécution administrative, procédant de l'engagement, la liquidation et l'ordonnancement. Les autres s'occupant de l'exécution comptable qui consiste à vérifier la régularité des opérations et des pièces préalablement à tout paiement. Ils sont chacun en ce qui le concerne responsables personnellement et même pécuniairement de leur gestion. Ces règles étant du reste fort connues dans les Etats de la sous-région. Cependant, la dépense publique des pays membres de l'UEAC est aussi difficilement maîtrisée, qu'elle soit étroitement encadrée. Elle paraît même être la préoccupation majeure dans la gestion des finances publiques du fait de manque de compétence des fonctionnaires en matière du droit budgétaire et comptable communautaire et national. L'on a beau espéré que les efforts de maximisation de la mobilisation des recettes puissent produire de bons résultats, mais l'inquiétude demeure quant à la gestion qui en est faite lorsqu'elles sont réunies.

A propos du rôle renforcé des acteurs qui participent à l'élaboration du budget, le pilotage des finances publiques qu'impose la directive communautaire relative aux lois des finances s'est accompagné d'un renforcement du rôle de chacun des organes participant à l'élaboration du budget dans le cadre de la modernisation du cadre des finances publiques définit comme suit.

Premièrement, le Parlement ou Assemblée Nationale, tout d'abord est compétente pour voter l'intégralité des crédits et chacune des missions fait l'objet d'un vote. Il ou elle a donc une totale visibilité sur l'ensemble des crédits. Les budgets annexes et les comptes d'affectation spéciale sont votés budget par budget et compte par compte. Ensuite, les évaluations de recettes et de charges de trésorerie, présentées dans un tableau de financement, font l'objet d'un vote unique, comme les plafonds d'emplois ventilés par ministère et présentés sous la forme d'un tableau synthétique. Le plafond d'emplois des opérateurs de l'État fait désormais l'objet d'un vote. Enfin, l'Assemblée Nationale dispose d'un pouvoir d'amendement et de contrôle. Il peut créer, modifier ou supprimer un programme à la condition de ne pas modifier la somme totale des crédits de la mission. Le Parlement peut donc désormais prendre l'initiative de majorer les crédits d'un programme, à la condition de ne pas augmenter le total de ceux de la mission dont il relève. La

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Loi des finances facilite la mission de contrôle dévolue à l'Assemblée Nationale. Ces programmes sont assortis pour chacun d'eux d'un projet annuel de performance. A posteriori, l'Assemblée Nationale contrôle au moment du vote de la loi de règlement grâce au rapport annuel de performance. Cette mission de contrôle est aussi réalisée au moyen de différents leviers importants à savoir :

- le contrôle sur les mouvements de crédits en gestion; puis

- l'élargissement des pouvoirs d'investigation des commissions des finances ; et enfin

- une définition plus précise de la mission d'assistance du Parlement confiée à la Cour des comptes.

Deuxièmement, la Cour des Comptes assiste l'Assemblée Nationale dans sa mission de contrôle de l'exécution et d'évaluation de la loi de finances. La Cour des Comptes certifie la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes de l'État chaque année. Ce contrôle se traduit par le dépôt, d'une part, d'un rapport du gouvernement sur l'orientation des finances publiques permettant de mieux appréhender les contraintes de la mise en oeuvre des politiques publiques et, d'autre part, d'un rapport sur l'exécution des lois de finances comportant une analyse pour chaque programme.

Troisièmement, les gestionnaires des crédits ont vu leur responsabilité accrue et des objectifs mesurables leur sont fixés. Ils s'engagent sur ces objectifs et rendent compte des résultats obtenus ainsi que des dépenses. Les lois de finances déterminent pour un exercice la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'État, ainsi que l'équilibre budgétaire qui en résulte. Le projet annuel de performances précise la présentation des actions, des coûts associés, des objectifs poursuivis, des résultats obtenus et attendus pour les années à venir, mesurés au moyen d'indicateurs précis afin de vérifier la réalisation de ces objectifs. Un rapport annuel de performance est fourni en corrélation avec les objectifs et les résultats obtenus.

Prenons l'exemple de la France qui a une expérience avancée par rapport à l'instauration d'une démarche de performance instaurée par la LOLF. Elle vise à changer profondément la logique de gestion et garantir une meilleure productivité de l'Etat même si, certaines limites sont

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à signaler. Les enjeux de la gestion axée sur la performance en France par l'adoption de la logique de performance au sein de l'administration publique française répondent à l'un des enjeux liés aussi bien au renouveau de la culture managériale qu'à la productivité de l'Etat. Ce renouveau de la culture managériale avec la responsabilisation des gestionnaires sur la performance de leur service ou de la politique dont ils ont la charge, l'objectif de gestion devient la réalisation d'un programme d'activité dans le cadre d'un budget donné et l'atteinte d'objectifs de performance déclinés au plan territorial.

Mais, en dépit des avancées indéniables, un constat est partagé aujourd'hui dans la littérature en management public sur le fait que le mouvement d'introduction des exigences de performance et de transparence contenues dans la LOLF n'a pas pour autant fait disparaitre totalement, « dans les organisations publiques, les logiques de gestion qui prévalaient avant les dernières quinze années».135 Il y'a encore des écueils de la gestion axée sur la performance du fait des pratiques habituelles depuis des périodes. Aujourd'hui, la plupart des organisations publiques sont confrontées à la coexistence de rationalités conflictuelles et paradoxales liées aux logiques professionnelles, logique de gestion, logique de management et de performance. Ces logiques sont, souvent, en conflit.

En conséquence, la recherche de la performance dans l'utilisation des ressources publiques conduit donc à doter les organisations d'un ensemble d'outils de gestion et d'indicateurs dont la fonction n'est pas de servir l'action collective, mais bien plus, de nourrir des processus de collecte d'information en direction d'un système d'information agrégé servant les programmes et l'Etat. Ces indicateurs finissent par devenir des machines de gestion qui « éloignent un peu plus les dits managers de leur rôle de manager ».136 Par ailleurs, malgré l'appropriation des gestionnaire de la logique de performance, les attitudes de «méfiance, voire de défiance réciproque entre l'administration du budget et les gestionnaires ont perduré ».137 En définitive, les informations des rapports de la Cour des Comptes sont « peu utilisés par le gouvernement comme par le

135 DAMART Sébastien. « Le manager en mode LOLF ou les nécessités du retour du manager intégratif ». Revue française des finances publiques N°137-2017 p26.

136 Ibid. p27

137 MIGAUD Didier. Allocution d'ouverture Revue française des finances publiques N°137-2017 p4.

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parlement, pour prendre les décisions qui pourraient découler plus facilement, plus naturellement d'une telle évaluation des résultats effectifs».138

Au demeurant, la déclinaison au niveau local des objectifs et indicateurs décrits dans les projets annuels de performances et les rapports annuels de performances risque de ne pas être adapté à la réalité du terrain. La performance dans la gestion nécessite que «les priorités stratégiques, les objectifs à atteindre soient définis et déclinés en fonction des priorités territoriales »139. En somme, la procédure budgétaire n'a pas encore tiré suffisamment profit de cet esprit de la LOLF qui invitait à s'intéresser davantage aux résultats. A contrario, elle est restée un exercice très largement formel, qui se concentre davantage sur les annonces que sur les résultats.

In fine, le passage du budget de moyen au budget programme est un exercice difficile qui requiert beaucoup d'efforts, d'engagements, de persévérance et de patience. Tous les intervenants directs dans l'élaboration, l'exécution et le suivi du budget programme doivent recevoir une formation appropriée. La mise en place d'un système du suivi et d'évaluation du budget programme est indispensable pour la crédibilité de l'exercice parce que ce sont les résultats du suivi et de l'évaluation qui permettent de s'assurer que l'on est sur la bonne voie et d'apporter des corrections nécessaires au besoin. Pour les gouvernants politiques et principaux responsables Ministériels, le budget programme est un instrument qui peut leur permettre de mieux suivre les activités menées sous leur responsabilité et le rendement de leurs collaborateurs.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld