B- Une organisation comptable à rénover
et des défis de pilotage à relever en République
Centrafricaine à partir des directives communautaires de 2011.
Le cadre du système budgétaire et comptable de
la République Centrafricaine a longtemps été
encadré par une ordonnance de 1960, portant son règlement
financier, avant d'évoluer sous plusieurs régimes des
ordonnances, les Lois des finances et les principes fondamentaux des droits
budgétaire et comptable. A ceux-ci, s'ajoutent les textes d'application
en raison de son évolution constitutionnelle très
mouvementée. Ce système budgétaire et comptable,
malgré les références à une «
comptabilité générale et patrimoniale », est
resté une comptabilité de caisse sans une dimension patrimoniale.
Depuis la réforme budgétaire et comptable entamée depuis
les directives de la CEMAC en 2011, la RCA s'est confrontée à un
problème, celui de l'adaptation de son organisation comptable en place
et à des difficultés de pilotage. A cet effet, Elle a donc
internalisé par Décret n° 19.091 portant Règlement
Générale sur la Comptabilité Publique, la Directive de la
CEMAC de 2011 en matière du Règlement Générale sur
la Comptabilité Publique.
La récente réforme budgétaire et
comptable s'inscrit dans le cadre d'une initiative communautaire
d'harmonisation de la gestion des finances publiques des Etats membres, qui a
abouti à un nouveau cadre juridique budgétaire et comptable
interne. Le processus d'internalisation des directives de la CEMAC a mis au pas
ses Etats membres. Ainsi, les règles fixées présentent les
mêmes enjeux que nous avons déjà soulignés, sauf sur
la question de la certification des comptes. En effet, conformément aux
dispositions en vigueur, la Cour des Comptes donne son avis sur le
système de contrôle interne, sur la qualité des
procédures comptables et des comptes. Elle n'a donc pas formellement
intégré la pratique de certification des comptes publics de la
RCA conformément aux standards internationaux.
Quant à l'organisation actuelle de la fonction
comptable, la tenue de la comptabilité générale est
assurée par les services du Trésor Public sous la tutelle de la
Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité
Publique (DGTCP), dans une relation classique avec les autres acteurs
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de la fonction financière. Par ailleurs, il convient de
noter l'inexistence d'une Comptabilité Matières ayant pour
objectif « le recensement et le suivi comptable de tout bien meuble et
immeuble propriété ou possession de l'Etat et des organismes
publics». Ainsi, auprès de chaque ordonnateur devrait se
trouver un comptable matière chargé de la tenue comptable de ses
matériels.
Alors, adopter une démarche pragmatique basée
sur l'expérimentation, la République Centrafricaine pourrait s'en
inspirer par exemple des travaux relatifs au bilan d'ouverture et aux
adaptations organisationnelles. Pour le bilan d'ouverture, le processus
consisterait à choisir quelques ministères pilotes pour effectuer
le recensement et la valorisation du patrimoine, et généraliser
par la suite les procédures arrêtées. Quant à la
réorganisation des services, il s'agira de créer dans un premier
temps des structures à périmètre et attributions
limités121 et ensuite de renforcer leurs
compétences.
Définir une trajectoire soutenue par une
démarche progressive d'amélioration continue du cadre
budgétaire et comptable doit tenir compte de l'ampleur des travaux et du
calendrier réglementaire contraignant. Il est indispensable de se fixer
des objectifs à moyen et long terme, concernant certains chantiers de la
réforme. A cet effet, la fiabilisation du bilan d'ouverture, le
déploiement du contrôle interne et la production des états
financiers doivent s'inscrire dans cette logique et de manière
régulière. La production du premier bilan d'ouverture doit
être guidée par le caractère significatif et les enjeux
financiers des éléments patrimoniaux à recenser.
S'agissant du déploiement du contrôle interne, il est d'abord
primordial de mettre en place les référentiels indispensables
(cartographies des procédures et des risques, référentiel
de contrôle interne comptable...) et le cadre d'animation qui s'impose.
Cette animation étant assurée par les services du Trésor,
ces derniers doivent être prioritairement outillés pour venir en
aide aux gestionnaires des crédits publics.
Enfin, les états financiers produits dans les
premières années ne pourront contenir que les
éléments significatifs des travaux d'inventaires en attendant
leur maîtrise par les différents acteurs. Par ailleurs, il
convient de noter l'importance d'adosser à la démarche de
trajectoire l'élaboration,
121 cf. processus de création des SCBCM en France
la mise en oeuvre et le suivi d'un plan d'action pour la
réalisation des objectifs planifiés. Les structures de pilotage
doivent veiller à cette exigence.
Quant au choix d'un cadre institutionnel de préparation
et de mise en oeuvre de la réforme conformément aux bonnes
pratiques, il est préférable que la DGTCP soit l'opérateur
technique de la réforme comptable. Il lui revient donc de s'organiser en
interne d'abord avant de mobiliser les autres acteurs dont le concours est
indispensable à la réalisation des objectifs escomptés.
Comme le souligne le Pr Michel Bouvier122, à défaut
d'une véritable structure de pilotage, la mise en oeuvre de la
réforme se résume à des relations informelles entre les
acteurs et ne permet pas de clarifier la stratégie d'action choisie.
In fine, avec les choix méthodologiques
efficaces et une organisation adaptée des services, constitueront les
gages de la réussite du passage à une comptabilité
conforme en droits transposé en République Centrafricaine.
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122 La conduite de la réforme budgétaire dans les
pays en développement : réflexions méthodologiques.
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