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La nouvelle gouvernance financière en zone CEMAC et les droits budgétaire et comptable de la république centrafricaine


par Serge Steeve Thierry TENGUEDET
Université de Yaoundé 2 - Master 2 Recherche en Droit Public 2018
  

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B- La conformité du nouveau cadre budgétaire et comptable de la RCA aux Directives de la CEMAC de 2011

L'amélioration des documents budgétaires est l'un des aspects importants des réformes relatives à la gestion des finances publiques qui se déroulent depuis bientôt une décennie par les Etats en zone CEMAC. Ainsi, le nombre des aspects à réformer dans ces textes juridique s'est progressivement accru. En outre, cette multiplication des directives s'est accompagnée de mesures tendant à améliorer leur caractère informatif et leur lisibilité afin de répondre aux normes communautaire de gestion financière moderne. Mais, faut-il encore que les nouvelles mesures juridiques se traduisent effectivement par un enrichissement des exigences communautaires souhaitées. C'est pourquoi, après avoir évoqué la transposition de directives budgétaires et comptables nouvelles, nous apprécierons leur impact sur l'information financière.

1- La conformité des principes budgétaires et comptables.

En effet, elle se ramenait, pour l'essentiel, aux avant-projets de budgets préparés annuellement par les ministères et institutions publiques. L'avant-projet de loi de finances, préparé par le Ministère en charge des Finances et qui devient le projet de loi de finances quand le Gouvernement le dépose sur le bureau de l'Assemblée Nationale et qui l'adopte. Selon la Loi Organique n°18.013 du 13 Juillet 2018, relative aux lois de finances de la RCA, ce document budgétaire, qui est la traduction financière de la politique gouvernementale pour l'année à venir, devait être accompagné d'un certain nombre d'annexes contenant diverses informations. Dans la

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pratique, les taxes parafiscales ont progressivement disparu des documents budgétaires alors que seulement quelques comptes spéciaux du Trésor accompagnent le projet de loi de finances.

Quant aux autorisations de programmes, elles n'ont, pour ainsi dire, jamais été prévues et autorisées dans un projet de loi de finances malgré la transposition de ces exigences. En définitive, le projet de loi de finances se ramenait au texte dudit projet auquel sont joints un ensemble de tableaux donnant les détails des autorisations de recettes suivant la nature de celles-ci et la répartition des crédits budgétaires par titre, section, chapitre et article selon la nature ou la destination de la dépense. La transposition en droit interne et la mise en oeuvre des Directives de la CEMAC relatives aux lois de finances d'une part, et la réglementation de la comptabilité publique d'autre part, ont bouleversé quelque peu cette pratique mais cette dernière suit son chemin encore.

Par ailleurs, la nouvelle loi organique de 2018, relative aux lois de finances prescrit de nouvelles mesures qui viennent compléter celles existantes. Ainsi, outre le « rapport définissant l'équilibre économique et financier, les résultats connus et les perspectives d'avenir », le projet de loi de finances doit désormais être accompagné de deux catégories d'annexes explicatives : celles obligatoires et celles facultatives.

- Les annexes obligatoires comprennent, à côté des quatre documents explicatifs classiques, « un état développé des restes à payer » et un autre pour les restes à recouvrer de l'Etat ;

- les annexes considérées comme facultatives sont constituées de documents jusqu'alors

inconnus dans le droit budgétaire du pays : bilan financier de l'Etat, tableau de financement synthétique de l'Etat et du secteur public administratif, plan de trésorerie prévisionnel et mensualisé de l'exécution du budget de l'Etat et les normes prévisionnelles de régulation des crédits.

Ainsi, ces annexes portent sur divers aspects du budget et laissent présager d'un

enrichissement corrélatif de l'information budgétaire. L'enrichissement appréciable de l'information budgétaire quant à lui résulte d'abord de la mise en oeuvre de la Directive du 19 décembre 2011 portant nomenclature budgétaire de l'Etat. Elle (nomenclature) se distingue par la recherche de la précision qui a présidé à son élaboration. Alors que l'ancienne nomenclature retenait le paragraphe comme la plus petite unité de crédits budgétaires, celle désormais en vigueur

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prévoit la subdivision de celle-ci en unités encore plus réduites93, afin d'informer plus précisément sur la nature ou la destination des crédits affectés aux postes de dépenses.

En outre, elle a été mise en cohérence d'une part, avec le Plan comptable de l'Etat, d'autre part, aligné sur les données de la Comptabilité Nationale afin de fournir les informations les plus pertinentes pour les analyses financières. C'est ensuite par l'accroissement du nombre de documents budgétaires que l'information sera davantage enrichie. Notons que, ces nouveaux textes permettent de renseigner les acteurs des processus budgétaires sur des aspects du budget non encore révélés et dont la connaissance devrait améliorer leurs interventions.

Au sujet des états développés des restes à payer et des restes à recouvrer, si les données contenues dans ces états étaient fiables, ils fourniraient au Gouvernement et au Parlement une image fidèle de l'exécution du budget précédent et éclaireraient la prise des décisions sur le projet de budget. Car ils sont indicateurs de la fiabilité des instruments de prévision. Ils donneraient aux décideurs des informations sur le niveau réel d'exécution des autorisations budgétaires, permettant de formuler des politiques budgétaires réalistes.

Il en est de même pour le plan de trésorerie mensualisé et des normes prévisionnelles de régulation des crédits qui l'accompagnent. Le plan de trésorerie mensualisé anticipe sur les recettes susceptibles d'être recouvrées au cours des mois à venir et procède à leur répartition sur l'ensemble des dépenses autorisées en conformité avec les priorités gouvernementales.

La régulation budgétaire c'est le mécanisme qui est prévu lorsque, (malgré la discipline budgétaire), le niveau de recouvrement des recettes n'est pas à la hauteur de celui des dépenses en instance de paiement. Pour guider les gestionnaires dans le choix des dépenses, les normes de régulation sont communiquées à l'avance. Elles reposent sur la distinction entre dépenses obligatoires (exclues des régulations) et dépenses non obligatoires, susceptibles d'être régulées .Ainsi, sont notamment insusceptibles de régulation les dépenses dites de souveraineté et celles

93 Directive n°O4/11-UEAC-190-CM-22 du 19 décembre 2011 portant nomenclature budgétaire de l'Etat, internalisée par un décret n° 19.094 du 27 mars 2019.

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exécutées en guise de contreparties nationales aux projets et programmes de développement conformément à des engagements pris vis-à-vis des Partenaires Techniques et Financiers.

Quant à la lisibilité approximative des documents budgétaires, elle demeure une lisibilité limitée. Cela tient, d'une part, aux lacunes de la nomenclature budgétaire qui ne permet pas de restituer une information complète sur la politique budgétaire, d'autre part, cela tient au caractère technique même de cette information et à l'absence de commentaires appropriés.

En fin de compte, les limites inhérentes à la nomenclature budgétaire en vigueur issue de la Directive de la CEMAC, reste malheureusement dans la pratique une nomenclature destinée à une présentation budgétaire classique, c'est-à-dire celle d'un budget de moyens. Elle n'informe que sur la nature des dépenses (personnel, matériel, transfert...) et leur destination, c'est à dire la structure qui en est bénéficiaire. Ainsi, le titre, l'article, le paragraphe et la rubrique budgétaires sont des niveaux de regroupement des crédits qui renseignent sur la nature de la dépense. La section et le chapitre, quant à eux, informent sur la destination de la dépense.

2- Une définition insuffisante des enjeux et objectifs

La ligne conductrice définie par le régime financier de la RCA fait la part belle à une politique financière dominée par une augmentation des autorisations budgétaires allouées aux ordonnateurs dans une préférence des moyens plutôt que des résultats. Prévu par la loi l'organique relative aux lois de finances, et les lois de finances annuelles, le budget est structuré par nature de dépenses autour de chapitres qui constituent le cadre de la spécialité budgétaire. Seule importe ici la régularité au regard de la réglementation. C'est la prééminence de «la rationalité juridique au détriment de la rationalité managériale »94.

Les mesures budgétaires basées sur cette approche quantitative, favorisent le volume des crédits, leur taux d'évolution et leur taux de consommation. Cependant, il est paradoxal de constater que l'augmentation des lignes de crédits n'a pas abouti à un réel impact dans la vie des citoyens. En effet, les gestionnaires de crédit n'ont pas à justifier de la pertinence de leur choix budgétaires. Les contraintes de gestion reposent uniquement sur le respect des imputations

94 Chevalier Jacques et Loschak Daniel, rationalité juridique et rationalité managériale dans l'administration française, Revue française d'administration publique n°24 , 1982.

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budgétaires. Le budget de l'Etat est en nette augmentation depuis quelques années suite à l'embellie de l'économie. Plusieurs crédits ont été ouverts et consommés sans qu'aucun objectif quantitatif ni qualitatif n'ait été atteint. Or, un bon budget n'est pas forcément un budget qui connaît des augmentations. C'est aussi un budget qui « permet de réaliser des objectifs déterminés avec un montant de ressources minimal, et donc, qui caractérise une action efficace, efficiente et économe des deniers de l'Etat »95.

L'absence d'une démarche de performance et la recherche de la performance sont au coeur du management des politiques publiques dans les administrations modernes. La nouvelle gestion publique en fait un credo essentiel de l'action des autorités. La recherche de la performance est à cet égard, au coeur de l'action des responsables publics. Pour cela, un cadre normatif et institutionnel est nécessaire à mettre en oeuvre. A l'inverse de ce qui a été entrepris dans certains pays et récemment en France à travers la LOLF, le système financier de la République Centrafricaine n'a pas dans son dispositif actuel du budget, une conceptualisation de la démarche de performance.

Aucune des fonctions essentielles qui recouvrent la recherche de la performance n'est prépondérante dans le régime financier de la République Centrafricaine, du moins dans son acception actuelle. Concernant la fonction d'explication des finalités et des objectifs des politiques publiques et de l'action administrative, cette fonction est quasi inexistante. La forte personnalisation du pouvoir politique autour des différents chefs de l'Etat qui arrivent au pouvoir en Centrafrique ne favorise sans doute pas l'expression des finalités et des objectifs à atteindre.

Les responsables politiques ou administratifs atrophiés, ne peuvent prendre aucune initiative dans ce sens. Il n'est d'objectifs que ceux qui viennent du sommet de l'Etat. Les circulaires de préparation budgétaires que signe le Président de la République ou le Premier Ministre au moment de la préparation de la loi des finances remplissent cette mission de façon imparfaite. La circulaire présidentielle précisait en matière de dépenses «la nécessité de promouvoir le bien être de la population» avec en priorité des choix budgétaires «orientés vers les dépenses de qualité, résultant de stratégies sectorielles, d'une programmation budgétaire

95 Rapport du Sénat français sur l'état d'avancement de la mise en oeuvre de la LOLF, n° 338, juillet 2002, P.21

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rigoureuse et de la définition d'objectifs assortis d'indicatifs » avec un budget moyen sans indicateurs. La fonction de définition des normes de performance de l'administration associée aux objectifs à atteindre n'en fait pas mention.

D'abord, la fonction d'information par le d'un système d'information intégrateur assurant le reporting de l'action publique est inachevée. L'entrée en vigueur en 2019 de la nouvelle nomenclature budgétaire de l'Etat n'a pas changé sensiblement la situation. Ensuite, la souplesse de gestion accordée aux responsables de l'action publique dans l'esprit de de la loi organique relative aux lois de finances qui consacre le ministre des finances, le seul ordonnateur du budget de l'Etat. De même, l'architecture du budget empêche toute marge de manoeuvre entre chapitres et lignes budgétaires. En outre, la possibilité de virement est extrêmement limitée d'une part et l'intégration des données de performance dans les procédures budgétaires, l'abondance des services votés ne permet pas de justifier de l'utilisation à partir du premier franc d'autre part. En fin, la transformation des modalités d'audit et de contrôle ne prévoit pas d'audit des comptes de l'Etat. Les contrôles internes sont mous.

Les audits sont rares et lorsque ceux-ci sont effectués, ils le sont à la diligence des partenaires au développement. L'absence pendant plus de trente ans d'une juridiction des comptes sanctionnant les comptes des comptables et des ordonnateurs illustre bien que la démarche de performance n'a été une priorité actuelle dans le droit budgétaire de la République Centrafricaine. Par ailleurs, la timidité de l'Assemblée Nationale dans la définition du droit budgétaire est caractéristique du fonctionnement de l'Etat et de ses finances publiques.

3- Autres imperfections

La gestion budgétaire est un processus fait d'une succession d'étapes au cours desquelles interviennent divers acteurs. On peut distinguer globalement l'élaboration de la loi de finances, ensuite son exécution et enfin, son contrôle. Alors, son élaboration et son exécution restent entièrement dominer par le Gouvernement en outre, les contrôles administratif, juridictionnel et politique ne font l'objet que d'une publicité limitée.

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a- L'élaboration du budget dominée par le Gouvernement

Si le Parlement est un partenaire incontournable du Gouvernement dans l'élaboration de la loi de finances, c'est le Constituant Centrafricain lui-même qui a obligé le Gouvernement à déposer chaque année devant l'Assemblée Nationale son projet de loi de finances afin d'obtenir des députés l'autorisation nécessaire pour recouvrer les ressources et effectuer les dépenses engendrées par la mise en oeuvre de son programme de développement économique et social. Toutefois, l'Assemblée Nationale n'intervient que tardivement dans l'établissement de la loi de finances de l'année. Quant aux organisations de la société civile et au public, leur absence est remarquable dès ce stade du processus.

Pour cette intervention tardive de l'Assemblée Nationale dans l'élaboration de la loi des finances, il n'est pas exagéré de dire que, la préparation du projet de loi des finances est réalisée par le Gouvernement en vase clos. Il (Gouvernement) conduit, sans intervention d'acteurs extérieurs, le processus qui va de la production des prospectives budgétaires à la confection du projet de loi des finances après les ultimes arbitrages du Conseil des Ministres. Alors, l'on peut remarquer qu'il n'existe pas encore, l'équivalent des Débats d'Orientation Budgétaire qui se déroulent dans certains pays à l'exemple de la France96 et qui permettent aux parlementaires d'être informés des grandes lignes de la politique budgétaire de l'année à venir aux fins de mieux assumer leur rôle d'autorité budgétaire. En effet des étapes importantes de la phase de préparation de la loi de finances comme celle des cadrages macro-économiques ou celle des arbitrages en Commission Technique budgétaire qui sont des moments privilégiés de discussion sur les orientations gouvernementales et où s'opèrent des choix importants échappent aux parlementaires.

Du reste, le temps réellement consacré aux débats budgétaires ne permet pas son examen de manière intégrale. Puisse que, les quatre-vingt-dix jours théoriques que dure la deuxième session parlementaire ne sont pas entièrement consacrés aux seules questions budgétaires. La Constitution leurs réserve soixante jours, ce qui paraît, a priori, suffisant. En outre, concernant les « députés qui n'ont pas souvent la formation requise en finances publiques pour s'approprier rapidement du contenu de documents97 », ils se distinguent par leur caractère technique et l'absence de commentaires. Ce constat doit être mentionné. Au demeurant, la plupart des députés

96 Michel BOUVIER et BARILARI A., La nouvelle gouvernance financière de l'Etat, Paris, LGDJ, 2004, p. 40.

97 C'est la prise de conscience de ce phénomène qui explique la mise en place d'un Projet de Renforcement des Capacités de l'Assemblée Nationale.

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s'en remettent au rapport issu des travaux de la Commission des Finances et du Budget pour les orienter et votent suivant les consignes de leur groupe parlementaire.

Si l'Assemblée Nationale Centrafricaine est loin d'être évincée de la procédure d'élaboration de la loi des finances, son intervention tardive la contraint à un rôle d'approbation du projet gouvernemental. Quant aux organisations de la société civile et au public, leur absence au processus budgétaire passe inaperçue sous leurs yeux que nous verrons dans la partie suivante. Mais, pour nous les chercheurs et la communauté scientifique, ce manquement ne passe pas inaperçue.

b- L'absence remarquable des organisations de la société civile et du public dans le processus budgétaire

De prime à bord, si la société civile manifeste constamment un intérêt croissant sur les questions de gestion de la politique publique, c'est pour l'amélioration de sa condition de vie sociale. Or, la question de l'élaboration et de l'exécution budgétaire doit les préoccuper le plus en particulier. Il en relève de ses compétences dans une société qui se veut au service du Peuple. Les organisations qui la représentent doivent prendre conscience de l'importance du budget comme déterminant des politiques publiques et doivent de plus en plus rechercher d'informations budgétaires aux fins d'apporter leurs critiques d'une part et d'autre part, faire le suivi des réalisations publiques et de les évaluer.

Pour y parvenir, elles doivent se former en finances publiques puis, renforcer leurs capacités en collecte et analyse de l'information budgétaire. A court, moyen et long terme, elles pourraient contribuer à ouvrir le débat budgétaire objectif lorsqu'il se déroule à l'Assemblée et, dans une certaine mesure, vulgariser les informations au grand public par le canal de la presse ou des réunions publiques. Par leurs critiques et leurs analyses indépendantes, elles éclaireraient les citoyens contribuables sur les choix budgétaires des gouvernants, contribuant ainsi à plus de transparence dans la gestion publique et au renforcement de la mobilisation des ressources et l'exécution du budget. Le Gouvernement lui-même ne semble pas favorable à une telle évolution des choses sinon, il aurait pu promouvoir cette initiative. Malgré qu'il est fait mention dans la loi portant Code de transparence et de bonne gouvernance en RCA adoptée en 2017. C'est pourquoi,

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le citoyen doit connaître, de manière transparente, l'affectation des deniers publics recouvrés, les objectifs de la dépense publique, l'accès à l'information budgétaire et comptable doit apparaître comme l'un des premiers droits du citoyen que les gouvernants doivent satisfaire.

Au demeurant, dans la pratique, très peu de mesures concrètes traduisent l'information budgétaire et comptable dans la réalité. Il n'existe aucun cadre institutionnalisé permettant aux organisations de la société civile, la communauté scientifique qui le souhaitent, de formuler leurs critiques ou propositions sur la politique budgétaire menée par le Gouvernement, avec l'espoir qu'elles soient prises en compte dans la mise en oeuvre des politiques publiques par les autorités décideurs.98

A travers nos multiples recherches documentaires, nous avons relevé à mette reprises l'absence d'un programme visant à assurer l'appropriation de la loi des finances. Dans le même sens, l'exécution du Budget de l'Etat en faveur des différents publics cibles reste encore un tabou. La presse, les partenaires techniques et financiers, les Directeurs de l'Administration et des Finances, ceux des Etudes et de la Planification, des Ressources Humaines ou encore les Personnes responsables des marchés publics et institutions, les chefs d'entreprises n'en savent rien du tout. Pareillement l'on note l'absence d'initiative et de volonté politique du Gouvernement de vulgarisé les détails de loi des finances au public à travers les canaux et supports tels que : manuel ou prospectus, exposés débat, conférences, émissions télévisée et radiodiffusée, en langue accessible au grand public et surtout la langue nationale « le Sangô ». Tout se passe comme si, l'élaboration, exécution et contrôle du budget implique que le Gouvernement et reste que son affaire ainsi que de ses services administratifs et techniques. L'exécution qui s'en suit ne fait pas non plus l'objet d'une plus grande ouverture et de publicité au public nonobstant les dispositions constitutionnelles en vigueur et la loi portant Code de transparence et de bonne gouvernance en RCA adoptée en 2017.

Quant à l'exécution budgétaire alloué aux départements ministériels, aux collectivités publiques, elle ne fait l'objet d'aucune publicité ni en interne des services, ni au public extérieur.

98 On peut noter cependant les rencontres périodiques Gouvernement /secteur privé qui permettent aux opérateurs économiques d'évoquer avec les autorités politiques notamment des questions de fiscalité.

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Il y'a lieu aussi de relever qu'il n'existe aucun mécanisme de suivi budgétaire qui donne lieu à l'établissement de rapports divers. Ceux-ci ne font pas l'objet d'une large diffusion à l'extérieur de l'Administration des finances ni dans les départements concernés. De même, l'attribution et l'exécution des marchés publics sont caractérisées à un traitement spécifique (de gré à gré, soit en faveur des personnalités influentes du parti au pouvoir), méritent un examen particulier. La publication limitée des rapports de contrôle, d'exécution budgétaire et de l'information sur l'exécution des politiques publiques présente quant à elles des enjeux vicieux à divers niveaux. Tout d'abord, elle obscurcie les actes du gestionnaire qui pourraient, le cas échéant, prendre toute mesure imposée par la conjoncture. En réalité, pour un pays comme la RCA qui fait face souvent aux crises à répétition, la présentation, l'élaboration et l'exécution du budget devraient répondre aux voeux du Parlement, de la société civile et du Gouvernement qui ont besoin d'avoir de données fiables sur l'exécution budgétaire et jouer, chacun en ce qui le concerne, leur fonction de veille à l'efficacité des dépenses publiques.

Du reste, la diffusion de cette information relève de l'obligation de rendre compte qui pèse sur tout gestionnaire public. Le Gouvernement dispose, a priori, des moyens pour s'en acquitter. L'un des systèmes de suivi budgétaire les plus éprouvés est, sans conteste, le Contrôle Financier. En effet, représenté auprès de tous les administrateurs de crédits et ordonnateurs99, il assure le suivi de l'exécution du budget en apposant son visa sur les principaux actes budgétaires et de s'enquérir du respect de procédures y relative. Disposant ainsi d'une vision d'ensemble sur le budget, il joue également le rôle de conseiller auprès du Ministre en charge des finances qu'il informe régulièrement par des rapports écrits100. De même, une bonne comptabilité publique mise en oeuvre par le Trésor Public assure aussi une fonction d'information plus systématique qui se renforce mais uniquement pour les autorités compétentes.

99 Il était également programmé la réalisation des actions de communication suivantes : traduction du budget de l'Etat dans les langues nationales, confection et diffusion de dépliants sur le budget de l'Etat, publication du budget sur les sites web de toutes les structures du ministère des finances, publication consacrée au budget. A la fin de chaque trimestre, le Contrôle Financier élabore et transmet au ministre chargé des finances un rapport d'ensemble sur la situation financière de l'Etat

100 En réalité l'insuffisance de ressources humaines ne permet pas encore de désigner un Contrôleur Financier pour chaque Institution, Ministère, Collectivité locale et Etablissement Public. Ainsi, au niveau territorial, un seul Contrôleur Financier peut assurer le contrôle de quatre ou cinq budgets.

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La réforme objective que devrait engager l'Administration à peine à contribuer à l'adoption d'outils de gestion modernes, facilitant l'enregistrement des opérations budgétaires et de trésorerie. Dans le même sens, l'installation d'un comptable centralisateur distinct parmi les trois comptables principaux de l'Etat pourrait permettre un meilleur suivi de la situation de trésorerie et l'établissement à tout moment de situations comptables d'ensemble101.

Ces mécanismes de suivi de l'exécution administrative et comptable du budget donnent lieu à deux types de rapports: ceux réalisés en cours d'exécution et ceux réalisés a posteriori. - Les rapports du premier type donnent une situation quasi instantanée du budget exécuté et ne font pratiquement pas l'objet d'une publicité. Produits dans un but de suivi interne de la gestion, ils ne sont communiqués qu'à un nombre restreint d'utilisateurs.

- Les rapports du second type évoquent des opérations de budgets entièrement exécutés et sont diffusés dans un cercle plus élargi même si, dans la pratique, seuls quelques spécialistes en connaissent l'existence et s'en procurent102.

Alors, si les rapports sur l'exécution du budget sont donc produits avec une certaine régularité, ce pendent ils restent dans l'ensemble, difficilement accessibles103. Ainsi, qu'en est-il des rapports périodiques sur l'exécution de la loi des finances voire des situations hebdomadaires ou mensuelles de trésorerie104? A cet égard, il n'existe pas un dispositif institutionnel qui assurerait la communication systématique à l'Assemblée Nationale de ces rapports pour les besoins de son contrôle.

Quant au traitement accordé dans l'attribution des marchés publics, il paraît déroger à cette situation générale. Pour le cas particulier de l'exécution des marchés publics, les enjeux qui s'attachent à l'exécution des marchés publics sont évidents. En effet, ne représentent-ils pas les

101 La Balance Générale des Comptes du Trésor est produite régulièrement.

102 Outre la Balance Générale des Comptes on peut citer, les Rapports d'activités annuels du Trésor, le rapport public de la Cour des Comptes auxquels vient de se joindre le Rapport sur les finances. Enfin, il faut ajouter les rapports particuliers établis à la demande des Partenaires Techniques et Financiers pour les besoins de suivi de leurs interventions.

103 Une des lacunes du système de contrôle des finances publiques qui entache sa transparence est, sans conteste, les difficultés de la Cour des Comptes à apurer les Comptes des trois Comptables principaux de l'Etat.

104 Les rapports périodiques sur l'exécution de la loi de finances sont examinés en Conseil de Ministres comme en témoigne les comptes rendus.

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dépenses publiques les plus importantes financièrement105 ?. Aussi, au-delà des montants, la sélection des offres se présente souvent comme un choix politique à réaliser. D'où l'intérêt de tous les partenaires sociaux pour cette catégorie de dépenses publiques.

Les marchés publics doivent être l'un des secteurs du budget les plus touchés par les réformes de modernisation que connaît l'Administration financière. C'est dans ce sens que, le domaine des finances publiques se doit des normes plus modernes de gestion telles que celles de l'efficacité, de la légalité, de la transparence, de la performance et des résultats doivent connaitre une consécration juridique nouvelle. Ces nouveaux principes introduisent une certaine ouverture dans les procédures de passation et d'exécution des marchés et tranchent avec l'opacité qui entoure souvent l'exécution des autres opérations budgétaires. Du reste, la Direction Générale des Marchés Publics doit disposer un site web pour publier les données fiables et accessibles au public.

Toutefois, cette recherche de transparence, de l'efficacité, de la sincérité, de la performance, de la responsabilité et des résultats est entachée par la persistance, à travers les réformes, de certaines lacunes réglementaires en matière de gestion budgétaire et comptable nonobstant les obligations faites aux Etats membres de la communauté de toute législation nationale contraire, antérieure et postérieure. Ainsi, notre étude nous a conduit à nous rendre compte que la volonté de lutter contre la corruption et les fraudes de tout genre ne peut aboutir si les réglementations trop complexes, difficiles d'application sont encore en vigueur. En outre, les mauvaises pratiques développées par la routine doivent être enrayées à tout prix. Aussi, nous relevons que les mesures tendant à assurer la publicité des actes dans les procédures de gestion des marchés publics doivent être claire, facilement interprétables, complétées par un effort de simplification et de clarification de la réglementation dans le sens de lisibilité facile. Enfin, des actions de formation ou de renforcement des capacités doivent être organisées au profit des gestionnaires de toutes les structures de l'Administration afin qu'ils mettent en oeuvre les meilleures pratiques d'exécution du budget et du respect des normes nationale, communautaire et internationale.

105 La réglementation générale des marchés publics et des délégations de service public ne retient plus le montant des engagements financiers comme critère de définition des marchés publics mais comme élément de détermination de la procédure de passation du marché.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry