2- L'effet direct de la directive communautaire
Les juges des Cours de Justice de CEMAC et UEMOA n'ont pas
encore eu à se prononcer sur l'effet direct des directives
communautaires, c'est pourquoi la solution retenue ici est celle
développée par la CJCE, notamment à partir de
l'arrêt Van Duyn du 4 décembre 197462.
La CJCE établit des conditions à remplir par les
dispositions de la directive concernée pour bénéficier de
l'effet direct. Seules les dispositions suffisamment « précises et
inconditionnelles » des directives produisent un effet direct et peuvent
être invoquées par le justiciable « à
défaut de mesures d'application prises dans les délais à
l'encontre de toute disposition nationale non conforme à la directive,
ou encore en tant qu'elles sont de nature à définir des droits
que les particuliers sont en mesure de faire valoir à l'égard de
l'Etat »63.
Est notamment précis ce qui « énonce
une obligation dans les termes non équivoques »64,
et inconditionnelle « l'obligation qui n'est assortie d'aucune
condition ni subordonnée, dans son
61 Malgré l'harmonisation en zone CEMAC des
législations des Etats membres en matière de TVA, on note :
- l'augmentation unilatérale du taux de TVA (25%), par
rapport à la fourchette de taux fixée par la
directive communautaire (12 à 18%) ;
- le non-respect des privilèges ou avantages
accordés aux institutions et organes internationaux par
certaines conventions internationales ou sous régionales et accords
de siège ;
- la limitation unilatérale de la liste communautaire des
produits exonérés ;
- le non remboursement ou la non déductibilité des
crédits de TVA.
62 SAURON Jean-Luc, « L'application du
droit de l'Union Européenne en France », édition La
documentation française, Edition La documentation Française,
collection « Réflexe Europe », 2ère
édition, 2000, p.44.
63 CJCE 19 janvier 1982, Ursula Becker, aff 8/81, Rec.
p. 53.
64 CJCE 23 février 1994, Comitato di
coordinamento per la difesa della cava, aff. 236/92, Rec. p. 497.
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exécution ou dans ses effets, à
l'intervention d'aucun acte soit des institutions de la communauté, soit
des Etats membres »65. Ces définitions laissent une
marge d'interprétation large au juge communautaire. En effet, le
critère déterminant du caractère d'effet direct des
dispositions de la directive concernée est l'étendue de la marge
d'application que la directive laisse aux Etats membres.
La jurisprudence de la CJCE se fondant sur l'effet utile des
directives, reconnait alors à certaines dispositions de celles-ci
l'effet direct vertical ascendant, mais ne reconnait ni l'effet direct vertical
descendant, ni l'effet direct horizontal. L'effet direct vertical ascendant
signifie que les justiciables peuvent se prévaloir envers les
autorités publiques nationales des dispositions d'une directive non
transposée. En effet, dans son arrêt du 26 février
1986, M.H Marshall c. Southampton et South-West Hampshire Area Health Authority
(Teaching), Demande de décision préjudicielle, Court of Appeal,
Royaume-Uni. La CJCE consacre la solution de « l'effet direct
vertical ascendant » des dispositions précises et inconditionnelles
d'une directive, et n'admet aucunement l'effet direct horizontal (en faveur
d'un particulier à l'encontre d'un particulier), dans la mesure
où la directive ne crée en aucun cas directement de droits et
obligations dans le chef des particuliers66, le caractère
contraignant de la directive ne vaut qu'à l'égard des Etats
membres ; une justification qui vaut également pour le refus de la CJCE
d'admettre l'effet direct vertical descendant (en faveur de l'Etat à
l'encontre des particuliers).
Cette solution de la CJCE relativise ainsi la
nécessité de la transposition, pour que la directive produise des
effets directement dans le champ des particuliers, toutefois elle reste
subordonnée à l'écoulement du délai de
transposition. Il est également important de préciser que cette
solution ne remplace aucunement l'obligation de transposition qui seule
intègre matériellement les objectifs de la directive
communautaire en droit national. On ne peut qu'espérer tout de
même, que le juge CEMAC au regard des réformes engagées
depuis 2008, s'alignera sur la position de la CJCE afin de baliser de
manière efficace l'usage au sein de la sous-région de cet acte,
qui peut être appelé à se multiplier davantage, eu
égard à la signification que revêt l'obligation de
transposition pour les Etats membres.
65 CJCE 3 avril 1968, Molkerei-Zentrale, aff.
28/67, Rec. p. 211.
66 Conseil d'Etat français 22 décembre
1978, aff Conhn-Bendit, Rec. p. 80.
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