2.5. Déviance
Le concept de « déviance » pourrait
être défini selon les dimensions juridique, psychologique et
sociologique.
Dans la conception juridique, la déviance est
perçue en termes de caractère, d'attitude, de comportement qui
s'écarte de la norme communément admise.
Pour Lionel (2006), la déviance caractérise ce
qui dévie, se détourne ou est détourné de la voie
ou de la direction normale. Il affirme qu' « elle peut être
appréhendée simplement comme un écart marqué
à la règle ou à la norme ». Autrement, la
déviance apparait comme la position d'un individu ou d'un groupe qui
conteste, transgresse et qui se met à l'écart de règles et
de normes en vigueur dans un système social donné.
Partant de ce fait, la déviance suppose la
réunion de trois éléments : l'existence d'une norme, un
comportement de transgression de cette norme et un processus de stigmatisation
du déviant. Le déviant n'est ici identifié comme tel que
s'il transgresse d'une part une norme communément admise et d'autre part
s'il est étiqueté déviant par la société.
Dans cette même orientation, Lemert (1996) distingue
deux types de déviances : primaire et secondaire. La première
s'intéresse à la transgression de la norme et la seconde,
à la reconnaissance et la qualification de cette déviance par une
instance de contrôle social.
Cette classification binominale de la déviance met en
exergue d'une part l'attitude de transgression des éléments du
rôle social assigné à l'individu et d'autre part,
l'action
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d'étiquetage social.
Ainsi formulée, la conception juridique parait
simpliste pour expliquer ce concept dans sa totalité. Elle a toutefois
le mérite de simplifier le problème en écartant de
nombreuses questions de valeurs sociales qui surgissent
généralement quand on étudie la nature de la
déviance.
Dans la perspective psychologique, Morasz (2002)
considère la déviance comme la résultante d'un processus
dynamique constitué en six phases distinctes (activation,
intensification, crise, récupération, stabilisation et
élaboration).Pour lui, la contenance de cette déviance
nécessite non pas une intervention au niveau de la crise, mais
plutôt une intervention à un triple niveau: avant
(prévenir), pendant (contenir) et après (élaborer).
Dès lors, la déviance dans la perspective Moraszienne,
résulte d'unprocessus de dégradation progressive de
l'appréhension d'un individu qui aurait une vision négative du
monde extérieur et des acteurs le composant.
Contrairement à Morasz qui s'attarde sur les
différentes phases du processus débouchant sur la
déviance, Kohlrieser (1986)conditionne la déviance des individus
au manque d'attachement. Ainsi, pour lui, « l'une des
caractéristiques fondamentales d'une personne violente est le manque
d'attachement et le sentiment ressenti de vulnérabilité. Elle
considère l'autre non plus comme une personne, mais comme un objet et la
traite comme telle ».Dès lors, la déviance apparait
pour l'auteur comme une résultante, non pasdu processus
dégénératif comme le voudrait le précédent
auteur, mais plutôt comme celle découlant d'une absence de liens
(attachement à la famille, à des êtres chers). L'individu
déviant extérioriserait son manque de liens affectifs par la
volonté délibérée de poser des actions
s'écartant des standards sociaux.
Dans cette même veine, Koudou, O. (2002)bien que
s'inscrivant dans la démarche familiale de son
prédécesseur, va plus loin pour révéler l'impact
environnemental corrélé au manque d'affection familiale de
Kohlrieser pour favoriser la déviance chez certains individus. Ainsi, il
pense que la déviance n'est ni génétique encore moins
atavique et naîtrait des effets conjugués des rejets familiaux, de
l'intolérance du milieu social et de ses acteurs, du rôle des
pairs marginaux et de la représentation du soi négative chez le
sujet. De ce fait, le sujet serait un candidat potentiel à la
déviance s'il notait une hostilité voir un rejet affectif de sa
famille, de son environnement proche et de pairs jugés peu
fréquentables ; ce qui impacterait négativementsur sa
perception
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de lui-même et de ceux qui le rejettent.Partant de
là, la déviance se définirait selon Koudou, O. (2002)par
l'ensemble des transgressions sociales commises de façon
incrémentale par un sujet en raison des rejets familiaux et
environnementaux dont il se serait senti victime.
Dans un autre regard, Selosse (1984) penche sur le
caractère passif de la déviance. Pour lui,on ne peut
définir la déviance que par la prise en compte des deux
pôles (actif et passif) du concept. Ainsi, même s'il existe une
catégorisation hétéroclite d'actes de déviance qui
consistent en des actions actives d'individus, force serait de reconnaitre
selon l'auteur que la déviance prend aussi en compte les actions
passives.En ce sens, Selosse nous invite, dans la définition de la
déviance, à privilégier ce qu'il nomme déviances
passives. Il affirme que« le fait de l'indifférence, de laisser
pour compte, d'ignorer, de rester dans son quant à soi en ne voulant pas
savoir ce qui dérange notre tranquillité, notre confort... Le
fait de ne pas prêter attention à ceux qui sont hors normes. Le
fait de ne pas vouloir les entendre correspond à un véritable
drame qui est celui de la mort sociale ». Dès lors, dans la
perspective Selossienne, les inactions, l'indifférence face à une
réalité sociale dérangeante constitueraient des formes de
déviance. Pour lui, elle consisterait a priorien des actions
(écart aux normes admises), mais a fortiori en des inactions
(indifférence, négligence, manque d'attention).
Cette approche reste partielle dans la définition de ce
concept puisqu'elle omet la prise en compte des standards sociaux, moraux ou
culturels qui régissent la société. Cette faille nous
amène à analyser une conception sociologique du terme.
La déviance, sur le plan sociologique se
définit-elle comme une manière d'être, de penser ou de se
conduire qui s'écarte des standards sociaux, moraux, culturels et
religieux d'un individu ou groupe consciemment ou inconsciemment.
En effet, deux points de vue alimentent la
compréhension sociologique du terme. D'un point de vue individuel, la
déviance apparait comme un comportement non conforme aux conventions
collectives résultant d'un conflit entre valeurs et normes, qui aboutit
à l'exclusion volontaire ou non de certains individus hors du
système de règles établies, système auquel ces
individus semblent vouloir échapper en affichant des conduites et des
opinions hétérodoxes.
A un niveau plus global, c'est une situation d'interaction au
travers de laquelle un
La littérature sur des conflits fonciers et leurs
différents mécanismes de gestion est prolixe. Devant ce champ
vaste des contributions antérieures, il serait prétentieux
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groupe parvient à réguler l'application de ses
propres normes par l'exercice de pressions qui visent à
réinsérer les « déviants » dans des
limites tolérables par le groupe.
Au sens large, Sissoko (2007) pense que la déviance
recouvre l'ensemble des comportements inadaptés parce que jugés
comme tels par les représentations collectives. « En ce sens,
la notion de déviance ne se réduit pas aux seuls comportements
criminels. Elle repose plus largement sur une analyse globale des conduites
antisociales ou asociales, les unes entrant dans la sphère du droit
répressif, les autres restants hors d'atteinte de la sanction
pénale bien qu'elles suscitent la réprobation. ».
Autrement, être déviant suppose adopter un comportement antisocial
ou asocial pouvant faire l'objet de réprobation tant pénale que
morale, culturelle ou religieuse.
Elle peut aussi s'apparenter selon l'auteur «
à un simple malaise, à une difficulté d'être pour
laquelle la sanction n'est pas nécessairement la réponse la mieux
adaptée, en ce sens que l'épanouissement de la déviance
peut, précisément, constituer le moyen de faire prendre
conscience au déviant de sa marginalité».
Relativement à Sissoko, Ogien (1983), mettant en
évidence l'évolution spatio-temporelle du concept, pense que
« la déviance est relative car elle diffère selon les
sociétés et les époques ». Elle se
présente pour lui, comme une attitude ou un comportement non conforme
aux normes et valeurs véhiculées par une société
donnée durant une période donnée.
Au regard de ces appréhensions du concept, nous optons
pour une définition socio-juridique qui s'appuierait à la fois
sur l'écart par rapport aux normes légale de la conception
juridique et sur la transgression des valeurs culturelles, sociales et
religieuse de la vision sociologique.
Par déviance, nous voudrions évoquer tout
comportement de transgression des normes légales, sociales, morales,
culturelles et religieuses dans une société donnée et
pendant une période déterminée.
III- Revue de littérature
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