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Influence de la communication interne sur l'apprentissage organisationnel des salariés dans les PME camerounaises.


par GUIDKAYA ZAMBA
Université de Ngaoundé - Master de Recherche en Sciences de Gestion 2014
  

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B. Mise en évidence de la relation qualité de l'interaction entre les salariés / apprentissage organisationnel

La communication s'affiche, au fil des années, comme une valeur stratégique au sein de l'entrepriseet commence à être perçue comme un véritable outil du management. La tendance actuelle desentreprises à s'intéresser à la communication managériale correspond aux besoins de plus en plusvitaux de redonner un "sens" et des valeurs à des managers qui "n'y croient plus" et à des salariés"égarés". L'implication de l'encadrement s'avère indispensable pour faire comprendre et faireadhérer les équipes à des décisions stratégiques, très souvent inintelligibles, paradoxales, ou pireencore, en contradiction avec les valeurs affichées.

1. Le passage de l'action individuelle à l'interaction collective

La collaboration au sein d'une entreprise consiste au partage de l'information entre acteurs du même métier ou appartenant à la même communauté de pratiques, les acteurs pouvant être localisés dans des départements différents de l'organisation. Ces échanges contiennent d'une part un aspect organisationnel et d'autre part un aspect dit « métier ». Le premier aspect permet de coordonner les acteurs au niveau d'un projet et de partager les informations nécessaires à la réalisation de ce projet. Le second aspect concerne une dimension de partage intermédiaire qui permet de créer un espace d'échange entre acteurs d'un même métier à l'intérieur d'une organisation (Ihadjadene, 2010). La contribution de la communication interne à la création et au partage des valeurs de l'organisation est très remarquée dans la mesure où les salariés passent d'une connaissance individuelle (reçue par l'éducation, la formation académique et la société) à une connaissance collective (du fait de l'interaction entre les salariés).

La vision « action » : elle met en avant la communication interne en tant qu'instrument de gestion. Le communicateur diffuse un message (souvent des décisions de la direction) à ses collègues par les moyens de communication appropriés. L'objectif est de développer des canaux de communication pour accomplir la mission d'information. Ici, l'information transmise n'intervient que pour assister le salarié à la réalisation d'une tâche quelconque. Le salarié agit donc isolement dans l'appropriation des connaissances en rapport au travail qu'il effectue (Da Silva et St-Hilaire, 2004).

La vision « interaction » : elle accentue davantage le caractère bilatéral de la communication interne où le dialogue et le sens occupent une place centrale. Le concept de base est que chacun, et donc pas uniquement les spécialistes « officiels », a des compétences communicationnelles. Tous les collaborateurs sont responsables du contenu qualitatif de leur message. Les spécialistes soutiennent les dirigeants et les collaborateurs afin qu'ils envoient la bonne information aux personnes concernées et selon le mode de communication adéquat. Selon la vision « interaction », la collaboration joue un rôle essentiel dans l'efficacité de la communication interne et le partage des savoirs et d'expériences (Gagné et al., 200). Le communicateur est surtout considéré comme celui qui fournit les moyens de communiquer, alors que dans la vision « interaction », il est davantage perçu comme un conseiller en communication intervenant de plus en plus tôt dans le processus décisionnel. L'interaction relève de la vision de l'organisation et pas uniquement de la communication interne.

La transition d'action à interaction n'est pas immédiate et chaque service ou organisation l'opère à son propre rythme. Tout dépend, en effet, de la culture et de la mentalité de l'entreprise. Les entreprises qui élargissent leur communication commencent d'abord par développer des médias internes grâce auxquels elles peuvent relayer l'information vers leurs collaborateurs. Une fois la qualité de ces supports jugée satisfaisante, elles rationalisent la communication interne et adoptent une approche plus méthodique. C'est à ce moment que les communicateurs combinent action et interaction. Une organisation fait souvent appel à la communication interne pour faire connaître sa politique ainsi que ses décisions. Les objectifs poursuivis sont d'une part, la sensibilisation des collaborateurs et d'autre part, l'échange des informations. Le communicateur intervient dans ce processus en tant que « facilitateur » et recourt aux canaux les plus adéquats en fonction des messages et des groupes cibles. Girin (2001) relève aussi ce double aspect de la communication, qui présente des actes de communication « principalement orientes vers l'activité » et des actes « principalement orientes vers l'ordre social ». Les interactions de travail répondent ainsi aux deux besoins distincts que sont transmettre des consignes pour assurer le fonctionnement des opérations et inscrire les employés dans un cadre social. C'est donc ce deuxième volet qui va constituer la base des lignes qui suivent.

2. La construction de l'identité organisationnelle

L'identité organisationnelle est au coeur de la réflexion stratégique (Giroux, 2002) parce que l'avantage compétitif qu'une entreprise peut avoir sur ses concurrents dépend notamment de la capacité des acteurs dans l'organisation à construire collectivement l'identité de l'organisation. L'identité organisationnelle résulte d'un « processus organisant » (Weick, 1969) au terme duquel l'action collective et concertée est consubstantielle au partage des représentations et valeurs de toutes les parties prenantes qui trouvent ainsi dans cette construction leur réalité sociale (Berger et Luckman, 1996). Le concept d'identité sert donc à classifier l'organisation par rapport à d'autres entreprises et facilite les liens intra-organisationnels (Giroux, 2002) et les réseaux d'échanges d'informations et de ressources (Nkakleu et Kern, 2003). Pour cela, la construction sociale de l'identité de l'organisation apparaît comme un enjeu majeur de la résultante des effets d'une harmonieuse cohésion entre les salariés de l'organisation (El Akremi et al., 2009).

Pour Schein (1993), l'adoption d'un processus dialogique et socialisant (Nonaka, 1993) permet de canaliser les représentations des individus de façon à trouver des traits d'identification. L'identité organisationnelle découle ainsi d'un processus d'élaboration qui incorpore les discours et les représentations des individus (Searle, 1995 et Giroux, 2002) qui vont créer l'identité de l'organisation sur la base de leur perception de la vie en société et de leurs attentes. Selon Brun et Dugas (2002), L'identité organisationnelle peut être définie comme une configuration autour de laquelle les parties prenantes s'identifient, se connaissent, partagent leur perception de la vie en société et leur imaginaire social, se font confiance mutuellement et ont confiance dans le groupe d'identification qu'est l'organisation. Cette co-construction de l'identité procure à l'organisation une personnalité et une réalité sociale (Lazzeri et al., 2004) qui sont légitimées par les salariés dès lors qu'ils croient au maintien de la qualité de leurs relations les uns des autres et en la capacité de l'organisation de répondre à leurs attentes, de protéger les intérêts de tous les membres, et de sanctionner les comportements opportunistes (Finegan, 2000). Le salarié va donc être d'autant plus réceptif et coopératif s'il partage avec les autres membres de l'organisation des valeurs communes, et a confiance dans les règles, les codes et les conventions édictés par l'organisation et qui fondent l'action collective.

La construction de l'identité organisationnelle sociale recouvre les échanges, relations et dialogues entre les individus dans l'organisation. A ce niveau, plusieurs études montrent que le partage de l'identité et des valeurs d'une organisation recouvre trois dimensions qu'il convient d'analyser en mettant en évidence la contribution de la qualité de l'interaction entre les salariés.

Dimension structurelle de l'identité organisationnelle

Pour Ryan (2010), la qualité de la configuration des relations interpersonnelles dans l'organisation est nécessaire. Par l'appropriation des liens affectifs entre les acteurs, cette configuration facilite le transfert d'informations (Coleman, 1988) et par la même occasion, l'apprentissage organisationnel (Fischer et White, 2000), et l'exécution des activités dans l'organisation (Shah, 2000). Bolino et al. (2002) soulignent quant à eux que le transfert d'informations et de connaissances se fait plus aisément et sans biais lorsque les employés sont interconnectés dans l'organisation. En outre, l'exécution des activités dans l'organisation est plus efficiente lorsque les employés se connaissent, et partagent collectivement des représentations et des valeurs auxquelles ils s'identifient. Cette identification crée ainsi une connexion plus facile qui va orienter les actions des individus vers l'échange d'informations et de ressources dans le sens des intérêts de tous les membres de l'organisation et de l'organisation elle-même.

Dimension relationnelle de l'identité organisationnelle

Cette deuxième dimension de l'identité organisationnelle se caractérise par un fort degré de confiance, de normes et de perception d'obligations partagées, et par l'identité commune. Créplet et al. (2002) dénotent de cette caractérisation que les individus se sentent d'autant plus en confiance et animés par la réciprocité qu'ils partagent ensemble des valeurs communes, entretiennent des relations affectives et sont insérés dans une même structure d'identification. Cette structure d'identification renforce en retour leur sentiment et leur désir d'appartenance à l'organisation. La conceptualisation de Nahapiet et Ghoshal (1998) de l'identité relationnelle se rapproche de la notion des "liens forts" utilisée par Granovetter (1973) pour décrire la confiance, la réciprocité et l'intensité émotionnelle dans les relations interpersonnelles. Il apparaît que la dimension relationnelle de l'identité organisationnelle se construit par la qualité de l'interaction entre les salariés (Koys, 2001) et concerne les relations affectives entre ces derniers. Ainsi, les groupes de travail au sein desquels les membres possèdent des représentations partagées, s'adaptent plus facilement au changement de l'environnement, sont plus flexibles et donc plus performants (Bolino et al., 2002).

La dimension cognitive de l'identité organisationnelle

Selon Nahapiet et Ghoshal (1998), la compréhension mutuelle entre les employés se fait au travers des langages et des récits partagés. Ainsi, les employés peuvent résoudre sereinement les problèmes qui se posent sur leurs lieux de travail ou en dehors, s'échanger les idées, s'aider mutuellement et partager les connaissances. La dimension cognitive de l'identité organisationnelle incorpore non seulement les langages et les récits communs, mais également une vision partagée qui permettent aux membres de l'organisation de percevoir et d'interpréter les événements de façon similaire (Bolino et al., 2002). Puisque ces représentations et vision partagées sont inscrites dans leur mémoire collective (Weick et Roberts, 1993), les employés peuvent alors anticiper et prédire plus facilement les actions des autres. Dans une certaine mesure, cette « vision partagée » des relations de travail stables et saines favorise l'émergence d'une connaissance organisationnelle (Créplet et al., 2002) ; à certains égards, l'aspect cognitif du capital social induit la cohésion intra-organisationnelle nécessaire à la performance de l'entreprise. Nous soutenons que l'identité organisationnelle renforce la dimension cognitive de l'apprentissage en ce sens qu'elle contribue à la mise en commun des routines collectives, à la production et à l'échange des connaissances.

En raison de ce qui précède, l'identité organisationnelle concourt à l'efficacité du fonctionnement interne de l'organisation. Elle est donc à la base d'un processus de socialisation des individus. C'est ce qu'ont souligné Adler et Kwon (2002) dans leurs analyses du fonctionnement économique des organisations. En effet, l'interaction de qualité fait partager la vision et les valeurs de l'entreprise et contribue à la création d'une identité de l'organisation par laquelle les acteurs s'identifient à elle à travers des représentations communes (Zaoual, 1996). Il s'établit alors entre eux une confiance mutuelle qui va garantir l'action collective et la socialisation organisationnelle de ces derniers.

3. Socialisation organisationnelle et amélioration de l'apprentissage organisationnelle

Les recherches sur le l'interaction sociale considèrent essentiellement la socialisation comme un processus d'apprentissage, les domaines d'apprentissages étant ceux qui sont « nécessaires à tout nouvel arrivant » (Schein, 1988). Plusieurs auteurs proposent, à partir d'une revue de la littérature existante, une typologie des domaines d'apprentissage. Fisher et al.(2000) distingue les « valeurs, objectifs, culture de l'organisation », les « valeurs, normes et relations avec le groupe de travail », les « compétences requises pourfaire le travail », et le « changement personnel lié à l'identité, l'image de soi, et la structuremotivationnelle ». De la même façon, Guiroux (2002) propose une « taxonomie desapprentissages »pour le développement des nouveaux collaborateurs, autour des mêmes domaines que Fisher et al.(2000). Toutefois, ce qui relève du domaine individuel demeure plus une conséquence de la socialisation (Dowling, 1995), qu'un élément à part entière de sa définition.Helfer et al. (2000) adoptent une vision transversale du concept de la socialisation organisationnelle. Selon eux, chacune desdimensions de l'identité organisationnelle contribue à la socialisation organisationnelle et à l'acquisition des connaissances sur les différents aspects du fonctionnement de l'organisation.

Pour Kim (1993), la "collectivisation" des connaissances, leur généralisation à l'organisation et leur inscription dans des procédures, dans des pratiques et des valeurs partagées est la résultante d'une socialisation organisationnelle qui, elle-même ressort du partage de l'identité organisationnelle qui se construit. Il s'agit alors de considérer la gestion des connaissances, non plus comme un intérêt porté à la connaissance elle-même, mais plutôt à « qui détient la connaissance ? » et à « comment localiser le détenteur de la connaissance ? ». Cette approche se base sur l'hypothèse que l'acquisition et le partage des connaissances sont des processus sociaux, qui se réalisent plus efficacement grâce aux interactions directes entre les membres d'une communauté de pratiques et à l'identification des membres de la communauté à ces pratiques. Dans cette même perspective, un ensemble d'auteurs (Duncan et Weiss, 1979 ; Shirvastava, 1983 ; Nicolini et al., 1995) pensent qu'une considération de la socialisation organisationnelle comme résultante de la communication harmonieuse entre les salariés améliore la maîtrise des activités de l'entreprise est souvent nécessaire pour le partage des valeurs et d'expériences.

Les analyses précédentes montrent la communication et l'interaction harmonieuse entre les salariés sont génératrices de partage et assimilation des visions et valeurs de l'entreprise. Ce partage des visions et valeurs va contribuer à la mise en oeuvre des connaissances collectives qui vont ainsi coordonnées les actions des individus et constituées une références pour toute prise de décisions. De plus, la construction des valeurs partagées par une interaction de qualité conduit à une socialisation des salariés favorisant un apprentissage de qualité. Ces analyses nous conduisent à formuler l'hypothèse suivante dans le contexte camerounais :

: Le degré d'apprentissage organisationnel des salariés est fonction de la qualité de l'interaction existante entre eux.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams