B - LE CONCEPT DE « FORMATIONS POLITIQUES »
EN DROIT CAMEROUNAIS
L'article 3 de la Constitution du 18 janvier 1996 informe sur
l'existence d'une autre forme d'association à vocation politique, la
formation politique, apparemment distincte du parti politique, mais concourant
au même titre que ce dernier à l'expression du suffrage. L'absence
de définition de ce concept (1), conduit cependant à une absence
de régime juridique (2).
1 - L'absence de définition de la « formation
politique » en droit camerounais
Le droit positif camerounais se limite à affirmer
l'existence des « formations politiques ».Il ne définit pas ce
concept comme c'est le cas pour le parti politique. Curieusement, à la
suite du constituant, le législateur reconnaît également
leur existence. En effet, outre la Constitution108,
deux autres lois font référence à cet type de groupement
politique, à savoir la loi du 21 avril 2004 relative au statut des
membres du Conseil constitutionnel, qui interdit à ces derniers
d'occuper un poste de responsabilité au sein d'une formation
politique109 ; et la loi de 2006 relative à ELECAM, dont
l'article 13 interdit au Président, au Vice - Président et
à tout membre du Conseil électoral d'appartenir à un
groupe de soutien à un parti politique110.
Au regard de cette dernière disposition, l'on pourrait
penser que les formations politiques dont il est question sont des groupes de
soutien aux partis politiques. Mais
107 Cette remarque est faite par Alain Didier OLINGA, qui
démontre que le constituant et à sa suite le législateur
camerounais contre toute attente opère une distinction entre parti
politique et formations politiques en droit camerounais. Voir Alain
Didier OLINGA, La Constitution de la République du
Cameroun, Yaoundé, Presses de l'UCAC/Terre Africaine, 2006, pp.179
- 189.
108 Dont l'article 3 dispose que : « les partis et
formations politiques concourent à l'expression du suffrage... »
109 Le troisième tiret de l'alinéa
1er de l'article 5 de la loi n° 2004/005 du 21 avril 2004
fixant le statut des membres du Conseil constitutionnel dispose en effet que
les membres du conseil constitutionnel sont interdits « d'occuper au sein
d'un parti ou d'une formation politique, d'une association partisane ou
syndicale, tout poste de responsabilité ou de direction et de
façon plus générale, de faire apparaître de quelque
façon que ce soit leur appartenance politique ou syndicale ».
110 Voir article 13 de la loi n° 2006 - 11 du 29
décembre 2006 portant création, organisation et fonctionnement
d'ELECAM.
Le pluralisme au Cameroun
comment un groupe de soutien, qui de surcroît ne
possède pas de régime juridique défini pourrait-il
concourir à l'expression du suffrage ?
2 - L'inexistence de régime juridique propre aux
« formations politiques »
A la lecture de l'article 3 de la Constitution du 18 janvier
1996, l'on note que la formation politique est une modalité
institutionnelle en vertu de laquelle les citoyens peuvent s'organiser
politiquement 111.Or la loi n° 90/056 s'intéresse
uniquement aux partis politiques. Doit-on de ce fait appliquer à ces
groupements toute la loi du 19 décembre 1990 relative aux associations?
Cela paraîtrait incongru, vu que les formations politiques sont des
associations spéciales comme les partis politiques, en ce sens qu'elles
concourent également à l'expression du suffrage.
A première vue, le citoyen a donc la possibilité
de choisir d'adhérer à un parti politique ou à une
formation politique. Mais en réalité ce choix n'existe pas, car
ces énoncés ne sont pas encore porteurs d'une pratique
institutionnelle112.Malgré cet imbroglio
créé par le constituant et relayé par le
législateur, le multipartisme ou du moins l'activité des partis
politiques est soutenue par l'existence d'un pluralisme des moyens de
communication.
|