B - LA REPRESSION ADMINISTRATIVE ET
JURISPRUDENTIELLE
Le non respect de l'exigence de prise en compte de la
composition sociologique fait d'ores et déjà l'objet de sanction,
en l'occurrence la disqualification de la liste incriminée (1).Ce qui
constitue une avancée pour l'efficacité normative des
énoncées constitutionnels et législatifs relatifs à
cette exigence (2).
1 - La disqualification de la liste
incriminée
Pour l'administration, la sous représentation d'une
composante sociologique dans une liste de candidats s'assimile à sa non
représentation et la sanction c'est le rejet de ladite liste. Cette
pratique s'est illustré par la positon du représentant de l'Etat,
en l'occurrence le Préfet du département du Moungo, qui dans sa
correspondance L/C16/SP dans le cadre de l'affaire NJOUME Victor (Commune
Rurale de Melong) c. Etat du Cameroun (MINATD, défendait
déjà cette idée324. Une telle position ne
manquait pas de précédent. En effet, selon le
procès-verbal de la Commission Communale de Supervision daté du 6
juin 2006, il était indiqué que: « la composante
sociologique de la liste MDP ne peut être attaquée dès lors
qu'elle comprend deux allogènes et que la loi ne définit aucune
proposition de dosage ethnique »325.
Le juge électoral n'hésite pas non plus à
sanctionner les partis qui se sont rendus coupables du non-respect de cette
exigence, comme le prouve l'affaire NGOH AJONG DOBGINA v. State of Cameroon
(Minatd) 326.Dans cette affaire, le juge soutient que la
circonscription concernée, celle de Bali est constituée de trois
principaux ethnies (Bali nyonga, Bawock et Widikum) et d'une ethnie
minoritaire les Fulani. Or, au regard de la présentation des 35
candidats qui composaient la liste du SDF, l'ethnie Bawock
était absente. Il faut préciser que les Bawock sont
les Bamilékés, mais dans cette région ils sont
minoritaires.
323 Voir alinéa 2 de l'article 6 de la loi n° 2006
- 11 du 29 décembre 2006 portant création, organisation et
fonctionnement d'ELECAM.
324 Voir note 249.
325 James MOUANGUE KOBILA, « La
participation politique des minorités et des peuples autochtones au
Cameroun », op.cit., p. 635.
326 Voir note 192.
Le pluralisme au Cameroun
Ce raisonnement du juge, démontre que la règle
de prise en compte de la composante sociologique vise véritablement
à établir un équilibre dans la représentation,
puisqu'elle ne concerne pas que les petits groupes, mais aussi les grands
groupes dès lors qu'ils se trouvent en situation de minorité dans
une circonscription. Malgré tout, dans son rôle d'architecte
social, le juge électoral se doit de préserver le pluralisme,
puissant facteur d'équilibre social327.
2 - Une avancée pour l'efficacité normative
des énoncés constitutionnels et législatifs
Sans l'action du juge, la loi resterait lettre morte. C'est
grâce à l'action de celui-ci que les énoncés
normatifs sont efficaces, dans la mesure où leurs violations ou
non-respect entraineraient des sanctions. La pratique administrative et
jurisprudentielle de la disqualification de la liste irrespectueuse de la
règle relative à la prise en compte de la composante
sociologique, marque une avancée pour l'efficacité des
énoncés constitutionnels et législatifs qui la
contiennent328. Le juge rappelle fort opportunément que
malgré la controverse qu'elle a fait naître au sein de la doctrine
camerounaise, elle demeure une obligation dont la méconnaissance est
sanctionnée.
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