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Le pluralisme au Cameroun.


par William Aurélien BAKONG NKWANé
Université de Douala - Faculté des sciences juridiques et politiques - Master 2 en Droit public, Option : Droit public interne 2015
  

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B - LE PRINCIPE DE LAICITE

D'origine lointaine228, la laïcité « condition pour vivre une démocratie effectivement pluraliste »229,est consacrée en France par la loi du 9 décembre 1905 et étendu au Cameroun en application de l'article 7 de la Convention de mandat, puis du décret du 28 mars 1933230.Ce principe suppose d'une part l'absence de religion d'Etat (1) et d'autre part la neutralité de l'Etat vis -à-vis des religions (2).

1 - L'absence de religion d'Etat au Cameroun

Au Cameroun, il n' ya pas de religion officielle. La séparation de l'église de l'Etat est officialisée par le préambule de Constitution du 18 janvier 1996 qui proclame le caractère laïc et l'indépendance de l'Etat camerounais vis - à - vis des religions231. L'Etat camerounais est non confessionnel : ni musulman, ni catholique, ni protestant. Il a de ce fait l'obligation d'assurer l'égalité des citoyens, quelle que soit leur appartenance religieuse, car comme le

226 Il ressort en effet de l'article 23 de la loi 053/90 du 19 décembre 1990 relative à la liberté d'association que « toute association religieuse doit être autorisée ».

227 Conformément à l'article 30 de la même loi, toute association religieuse peut être suspendue pour trouble à l'ordre public.

228 Probablement biblique, notamment la célèbre formule de JESUS contenu dans l'évangile selon Luc : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », Voir Guy HERMET et al, Dictionnaire de science politique et des institutions politiques, op.cit., p. 138.

229 Georges THILLS, « La religion dans un Etat démocratique pluraliste », Rapports du Colloque «La Croix-l'Événement», ainsi que du Colloque organisé par le Centre Sèvres avec le Centre Georges-Pompidou, Nouveaux enjeux de la laïcité, Paris, Centurion, 1990, pp.728 - 743 (spéc.p.730).

230Bernard MOMO, « La laïcité de l'Etat dans l'espace camerounais », Les cahiers du droit, vol. 40, n° 4, 1999, pp. 821 - 847 (spéc.p. 821).

231Le préambule de la loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 2 juin 1972 dispose que « L'Etat est laïc. La neutralité et l'indépendance de l'Etat vis - à - vis de toute les religions sont garanties ».

Le pluralisme au Cameroun

constate Gabriel GROSSELIN, « derrière l'affirmation de différence religieuse se constitue [...] une revendication de l'égalité»232.

A la lecture des différentes Constitutions du Cameroun, l'on se rend compte que depuis la Constitution du 4 mars 1960 jusqu'à celle du 18 janvier 1996 en passant par celle du 1er septembre 1961, le constituant camerounais ne cesse d'accorder une importance particulière au principe de la laïcité qu'il situe toujours au fronton de celles - ci233.En plus de ne professer aucune opinion religieuse, l'Etat camerounais doit adopter une attitude de sa neutralité à l'égard des religions.

2 - La neutralité de l'Etat à l'égard des religions

La neutralité renvoie à l'impartialité, l'absence de parti pris de l'Etat pour une confession religieuse. Ce premier aspect du principe de la laïcité ne joue qu'à l'égard des associations religieuses enregistrées et autorisées234.Pour préserver cette impartialité, le préambule de la Constitution de 1996 interdit toute discrimination fondée sur l'appartenance religieuse235.Cette neutralité de l'Etat trouve application dans la fonction publique à travers le décret de 1994 portant statut de la fonction publique en son article 23, qui interdit de porter toutes mentions relatives aux convictions religieuses dans le dossier d'un fonctionnaire236.

La neutralité et l'indépendance de l'Etat vis - à - vis des religions a deux implications. Premièrement, l'État ne privilégie et n'aide financièrement aucune religion. Il se borne à s'assurer qu'elles sont dûment enregistrées et exercent leurs activités en respectant l'ordre public. Deuxièmement, il garantit à chacun le droit de pratiquer sa religion, et ne doit pas empêcher à ses agents d'exprimer leur foi dans les justes limites. De l'ethnie à la religion en passant par les langues, l'expression différentielle, désormais protégée et promu en droit camerounais ne va pas sans incidences.

232 Gabriel GROSSELIN cité par James MOUANGUE KOBILA, La protection des minorités et des peuples autochtones, op.cit., p. 62.

233 Le principe de la laïcité est en effet contenu dans l'article 1er des 4 Constitutions que le Cameroun a connu.

234 Bernard MOMO, « La laïcité de l'Etat dans l'espace camerounais », op.cit., p. 830

235 « Nul ne peut être inquiété en raison [...] de ses opinions ou croyances en matière religieuse... ».Voir préambule de la Constitution du 18 janvier 1996.

236 L'alinéa 2 de l'article 23 du décret n° 94/199 du 7 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique, précise qu'il ne devra figurer dans le dossier d'un fonctionnaire « aucune mention, ni documents relatifs à ses opinions ou convictions religieuses ».

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