B - LE RESPECT DES IDENTITES LINGUISTIQUES
Il convient de préciser d'entré de jeu que les
groupes protégés dans le contexte camerounais sont exclusivement
des groupes ethniques et non linguistiques ou religieux210.Le
respect des différences linguistiques réside en effet dans
l'instauration d'un bilinguisme égalitaire (1) et dans la promotion et
la protection des langues nationales (2).
1 - Le bilinguisme égalitaire
A la différence des ses homologues de 1961 et de 1972,
le constituant de 1996 introduit l'égalité entre les deux langues
officielles211.Par l'instauration de ce bilinguisme
égalitaire, il n'existe plus une langue minoritaire anglaise au
Cameroun, puisque celle - ci est désormais « en situation de co
- majorité avec le français »212 .
206 James MOUANGUE KOBILA, La protection
des minorités et des peuples autochtones au Cameroun, op.cit.,p.
105.
207 Jérôme Francis WANDJI K..,
« La décentralisation au Cameroun, entre rupture et
continuité. Réflexions sur les réformes engagées
entre 1996 et 2009 », Janus, 5ème année,
n° 3, décembre 2010, pp.105 - 156 (spéc .p.143).
208 Voir Rapport Hilarion ETONG,
op.cit., p. 4.
209 Jérôme Francis WANDJI K..,
« La décentralisation au Cameroun, entre rupture et
continuité. Réflexions sur les réformes engagées
entre 1996 et 2009 », op.cit., supra, note 203.
210 Voir Rapport Hilarion ETONG, op.cit.,
supra, note 202.
211 Voir alinéa 3 de l'article 1er de loi
n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du
2 juin 1972.
212 James MOUANGUE KOBILA, La protection
des minorités et des peuples autochtones au Cameroun, op.cit., p.
106.
Le pluralisme au Cameroun
Outre, la promotion du bilinguisme faire partir des missions
de l'Etat213. Cela s'observe sur plusieurs plans. Sur le plan
gouvernemental, l'instruction générale du 4 juin 1998 donne pour
mission au Premier ministre, aux membres du gouvernement et aux responsables
des pouvoirs publics d'oeuvrer chacun à son niveau au
développement du bilinguisme214. La circulaire du 16
août 1991 rappelle par ailleurs que les documents officiels
publiés par les services publics et parapublics et destinés au
public - discours, avis, actes réglementaires etc. - le soient dans les
deux langues officielles. Il faut préciser que depuis l'ordonnance du 26
août 1972, tous les actes législatifs et réglementaires
doivent être publiés en français et
anglais215.En plus, la Constitution du 18 janvier 1996
précise à l'alinéa 3 de son article 31 que la publication
des lois est effectuée au Journal officiel en français et en
anglais.
Sur le plan de l'éducation, la loi d'orientation de
l'éducation dispose en son article 3 que l'Etat du Cameroun «
consacre le bilinguisme à tous les niveaux de l'enseignement comme
facteur de paix et d'intégration »216. Cette
disposition est reprise par la loi du 16 avril 2001 portant orientation de
l'enseignement supérieur en son article 5217.L'institution
d'une semaine nationale du bilinguisme218 s'inscrit dans cette
logique de protection des langues officielles, sans pour autant de faire
ombrage aux langues locales.
2 - La protection et la promotion des langues
nationales
A côté des deux langues officielles, le Cameroun
compte 284 langues nationales - bakaka, banen, bassa, eton, duala,
medjumba, etc -.Dans le cadre de la décentralisation, les
ressources financières transférées par l'Etat aux
collectivités territoriales doivent concourir à la protection et
la promotion de des langues nationales dans leurs ressorts territoriaux. La loi
de 2004 relative aux régions et celle relative aux communes organisent
une promotion axée
213 Voir second considérant de l'alinéa 3 de
l'article 1er de loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant
révision de la Constitution du 2 juin 1972.
214 Voir article 38 de l'instruction générale du
4 juin 1998.Voir également circulaire n° 001/CAB/PM du 16
août 1991 relative à la pratique du bilinguisme dans
l'administration publique et parapublique.
215 Voir article 2 de l'ordonnance n° 72 - 11 du 26
août 1972 relative à la publication des lois, ordonnances,
décrets et actes réglementaires.
216 Il s'agit de la loi n° 98/004 du 4 avril 1998
d'orientation de l'éducation au Cameroun.
217 Loi n° 005 du 16 avril 2001 portant orientation de
l'enseignement supérieur au Cameroun. 218Par une note du 28
octobre 2002 du ministre de l'Education Nationale.
Le pluralisme au Cameroun
sur l'investissement des langues nationales dans la presse
parlée et écrite219 et sur la participation aux
programmes locaux de promotion de ces langues220.
Le système éducatif camerounais prend
désormais en compte les langues locales en les intégrant aux
enseignements. En effet l'une des résolutions des états
généraux de l'éducation tenus en 1999 a été
l'insertion des langues nationales dans le système éducatif. En
2008, un département et un laboratoire des langues et cultures
camerounaises ont été crées à l'Ecole Normale
Supérieure de Yaoundé, avec pour mission de former des
professeurs de langues nationales. A ce volet ethnolinguistique s'ajoute le
volet religieux de l'expression différentielle.
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