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Le contrôle de l’état sur les actes budgétaires des collectivités locales au Gabon.


par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI
Université Omar Bongo de Libreville (Gabon) - Master 2 Professionnel en gestion financière des collectivités locales 2014
  

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Paragraphe 2 : Le contrôle a priori du représentant de l'Etat sur les actes
budgétaires locaux

Le représentant de l'Etat, en principe24 le Préfet, exerce un double contrôle sur les documents budgétaires locaux : il examine leur légalité (A) et procède à un contrôle budgétaire spécifique (B). Il s'agit d'un contrôle, a priori, varient intervenant lors de l'élaboration et lors de l'exécution des différents actes budgétaires locaux, vus précédemment.

A- L'examen de légalité des actes budgétaires

Le contrôle exercé par le représentant de l'Etat consiste à détecter, ce que René CHAPUS appelle « les vices susceptibles d'affecter la légalité des actes administratifs »25. L'objet étant d'encadrer juridiquement l'action publique locale, en veillant à ce que les décisions financières prises par les collectivités locales soient conformes à la règle de droit et compatibles avec les intérêts généraux de l'Etat26.

Conformément aux articles 357, 358 et 362 de la loi organique 001/2014 du 15 juin 2015 relative à la décentralisation, tous les actes budgétaires des collectivités locales sont transmis au représentant de l'Etat, au niveau local, dans les huit jours francs suivant leur adoption, lequel en délivre aussitôt accusé de réception. La preuve de la réception de l'acte peut être rapportée par tout moyen.

Cette transmission de l'acte budgétaire local est obligatoire. En effet, selon l'article 280 alinéa 2, le projet de budget de la Collectivité locale « est transmis pour approbation au représentant de l'Etat qui dispose d'un délai de quinze (15) jours, à compter de la date de dépôt du projet de budget, pour faire ses observations ». Ce n'est qu'après les observations de la tutelle que l'acte budgétaire local est rendu exécutoire par arrêté du président du conseil de la collectivité locale concernée (article 281).

Aussi longtemps qu'ils n'accomplissent pas la formalité de la transmission leurs actes ne sont ni exécutoires, ni opposables. C'est en réalité l'exécution de cette obligation de transmission et l'approbation qui s'ensuit qui impriment aux actes budgétaires locaux leur caractère exécutoire. Selon Jacques Moreau, cette transmission constitue « une mesure de publicité originale imposée aux exécutifs locaux pour certains des actes juridiques les plus importants au nom de la collectivité locale qu'ils administrent »27.

24 Toutefois la pratique montre que ce sont plutôt les services centraux qui jouent ce rôle de contrôle. Les élus locaux étant amenés à se déplacer personnellement, avec tous les risques que cela comporte, au ni vea u de la tutelle central pour le dépôt de leurs actes et leurs suivis.

25 Cf. R. CHAPUS, Droit administratif, op.cit. p.26.

26 Comme le dit Ismaila Madior FALL, « la finalité du contrôle est par conséquent d'assurer le respect de la loi par les collectivités locales. Cette soumission à la règle de droit étant, dans un Etat unitaire, la condition de l'Etat de droit au plan local ».

27 J.MOREAU, « Bilan jurisprudentiel du contrôle administratif de légalité », in AJDA, 1993, spécial, p.50.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 22

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

Le représentant de l'Etat procède uniquement aux vérifications des éléments de légalité de l'acte budgétaire et des délibérations qui l'accompagnent, en s'interdisant toute appréciation de son opportunité. Ainsi, les moyens tirés de la légalité externe pouvant affecter les actes financiers locaux sont : l'incompétence de l'auteur de l'acte28 et, les vices de forme29 et de procédures30. Par contre, ceux tirés de la légalité interne sont : le détournement de pouvoir31, la violation directe de la loi32, l'erreur de droit33, l'erreur sur l'exactitude matérielle des faits34, et le contrôle de la qualification juridique des faits35. Il examine en particulier :

- la tenue au sein du conseil de la collectivité locale, dans le mois précédent l'examen du budget primitif, d'un débat sur les orientations budgétaires ;

- la préparation du projet de budget ainsi que sa présentation devant l'assemblée locale par l'organe exécutif de la collectivité locale (Président du Conseil départemental, Président du Conseil municipal) ;

- la transmission du projet de budget, avec les rapports correspondants, aux conseillers de la collectivité locale quinze (15) jours avant l'ouverture de la première réunion consacrée au budget ;

- le vote du projet de budget par l'assemblée locale conformément à la nomenclature budgétaire et au plus tard le 31 mars de l'exercice en cours, sauf exception36;

- la transmission conjointe du budget et de tous les documents permettant au Représentant de l'Etat de s'assurer de l'adoption dudit budget et d'avoir une appréciation exhaustive de la situation administrative et comptable de la collectivité locale.

28 Lorsque l'auteur de l'acte budgétaire local n'avait pas l'aptitude juridique pour l'adopter. On parle soit d'incompétence matérielle, soit d'incompétence territoriale, soit d'incompétence temporelle.

29 Le vice de forme concerne la présentation externe de l'acte budgétaire local et peut s'agir de l'absence d'une signature.

30 Lorsqu'il y a violation d'une règle organisant la procédure d'élaboration des décisions budgétaires et financières locales, exemple lorsque l'autorité de l'exécutif local n'a pas solliciter une délibération du conseil pour procéder à un virement de crédit de chapitre à chapitre comme prévu par les textes.

31 L'illégalité tient ici au mobile de l'acte budgétaire pris : l'Administration locale a usé de ses pouvoirs en vue d'un objectif autre que celui pour lequel ces pouvoirs lui ont été confiés. En outre, toute décision financière locale doit poursuivre un intérêt général local certain.

32 Ici, le contenu lui-même de l'acte budgétaire est contraire aux prescriptions des textes composant le bloc de légalité auquel doit être soumis toute décision locale.

33 L'illégalité tient aux motifs de droit qui fondent l'acte budgétaire de la collectivité locale : exemple l'application d'un texte erroné par l'autorité locale.

34 C'est l'hypothèse dans laquelle les faits avancés par l'Administration locale, pour motiver sa décision financière, sont erroné.

35 Lorsque les faits invoqués par l'Administration locale ne sont pas de nature à justifier juridiquement sa décision financière.

36 Lorsque le conseil n'a pas reçu les informations indispensables au vote du budget.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 23

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

Le représentant de l'Etat dispose d'un délai de quinze jours pour se prononcer, à compter de la date de l'accuse de réception. Ce délai peut être ramené à huit jours en cas d'urgence et à la demande de l'autorité locale. Au terme de ces délais, les actes sont réputés approuvés tacitement par l'autorité de tutelle.

En cas d'irrégularité, le représentant de l'Etat ne peut annuler l'acte depuis la réforme de 1996 et confirmée par celle de 2015. Par contre il peut refuser de l'approuver. Dans ce cas, le président de la collectivité locale concernée peut, dans le délai de huit jours francs à compter de la notification du refus d'approbation, saisir la juridiction compétente aux fins d'annulation de la décision de la tutelle. L'annulation de celle-ci est synonyme d'approbation dès la notification de la décision juridictionnelle à la collectivité locale.

En somme, l'examen de légalité consiste à vérifier le respect d'une exigence de conformité et de légalité des budgétaires. Si le contrôle de conformité porte sur la présentation c'est-à-dire l'effectivité de certaines mentions obligatoires37, la légalité au contraire, porte sur le contrôle de subsidiarité. Autrement dit, la question est de savoir si l'acte budgétaire local est juridiquement correcte, au regard de la légalité administrative. Il s'agit de vérifier si la collectivité locale à statuer sur un objet relevant de son domaine de compétences, la qualité de l'auteur de l'acte, le respect de sa procédure de mise en oeuvre, le but poursuivi qui, doit être un but d'intérêt public local.

Les contrôles effectués par le représentant de l'Etat se poursuivent tout au long de l'exécution du budget par la transmission obligatoire de tous les actes d'exécution du budget au représentant de l'Etat.

En outre, lorsque « l'autorité de tutelle estime l'acte budgétaire illégal, elle invite l'autorité locale à la mettre en conformité, en lui notifiant les motifs de l'illégalité. En cas de non-exécution des orientations de la tutelle dans un délai de quinze (15) jours, cette dernière défère l'acte querellé devant la juridiction compétente et en informe aussitôt le président du conseil »38. Autrement dit le représentant de l'Etat disposent du pouvoir de saisir le juge compétent afin de faire annuler les actes budgétaires des autorités locales décentralisées non conformes aux lois. Leur mission ne se résume qu'à la seule saisine de la juridiction territorialement compétente, car « l'autorité de tutelle ne peut, par elle-même, ni suspendre, ni annuler les actes d'une collectivité locale... », depuis la réforme de 1996.

Ce recours de l'autorité de tutelle, dénommé « déféré tutélaire »39, quoique de même nature que le recours pour excès de pouvoir, présente quant à lui des traits

37 Il s'agit de vérifier que d'un point de vue formel l'acte budgétaire comporte bien le pays, la devise, les armoirie de la collectivité locale, le timbre, le titre et le numéro d'enregistrement, l'auteur de l'acte, le préambule, les visas, la réalisation du quorum, le dispositif, le lieu et la date d'établissement, la signature et le cachet.

38 Cf. selon l'article 359 alinéa 2 de la nouvelle loi organique sur la décentralisation suscitée.

39 L'expression « déféré », utilisée pour désigner le recours de l'autorité de tutelle afin de contester la légalité d'un acte local notamment budgétaire, est surtout usité en doctrine et en jurisprudence, justement, pour le distinguer du recours pour excès de pouvoir dont il est très proche. Sur ce, la doctrine française, dans une lancée d'assimilation des deux recours, est allée jusqu'à le qualifier d' « une simple modalité du recours pour excès de pouvoir » (Cf. M. GOHIN, Institutions administratives, op.cit., p.596).

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 24

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

spécifiques40. Il peut être assorti d'une demande de sursis à exécution de l'acte attaqué41. L'autorité de tutelle dispose également de la possibilité d'introduire un référé précontractuel afin de demander la suspension ou différer la signature d'un contrat, par exemple en matière de commande publique locale.

Mais le représentant n'exerce pas sur les actes budgétaires locaux qu'un contrôle de légalité. Celui-ci est complété par un contrôle dit budgétaire.

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