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Le contrôle de l’état sur les actes budgétaires des collectivités locales au Gabon.


par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI
Université Omar Bongo de Libreville (Gabon) - Master 2 Professionnel en gestion financière des collectivités locales 2014
  

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Remerciements...

Avant de commencer, je tiens tout d'abord à remercier toutes les personnes sans qui ce mémoire n'aurait pu aboutir et qui ont su me conseiller, m'orienter et m'épauler tout au long de mes recherches. Je pense aux différents responsables administratifs, dont les noms suivent :

Au niveau du Ministère de l'Intérieur, de la Sécurité Publique, de l'Immigration et de la Décentralisation (MISPID) :

V' Monsieur Michel ONDO NDONG, Conseiller technique chargé de la

décentralisation et des Collectivités locales ; encadreur professionnel du présent mémoire.

V' Madame Nicole MOUSSAVOU et Monsieur Hans Emérie Fabrice

DICKARADO, Directeurs de la tutelle des Collectivités locales.

Au niveau du Ministère du Budget et des Comptes Publics (MBCP) :

V' Monsieur KOUMBA KOUMBA, Contrôleur Budgétaire de la Province de

l'Estuaire ;

V' Monsieur Axel OGNAGNA OKANGA, Receveur Municipal de Libreville.

Par ailleurs, toute ma gratitude revient naturellement à Monsieur Paul NGOME AYONG (Secrétaire Général Adjoint 1 au Ministère de l'Intérieur), pour son soutien et ces précieux conseils. Il a été une grande source d'inspiration dans le choix de la formation entreprise.

Enfin, j'adresse mes très sincères remerciements à Monsieur Télesphore ONDO, pour avoir accepté de diriger ce travail malgré ses multiples occupations et pour son sens de l'écoute et sa disponibilité constante.

Je ne saurais oublier l'ensemble des enseignants et étudiants de la première promotion du Master AGFCL.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 8

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

« Nous ne pouvons résoudre les problèmes difficiles que nous rencontrons en demeurant au niveau de réflexions où nous nous trouvions lorsque nous les avons créées ».

Albert EINSTEIN

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 9

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Si les collectivités locales jouissent de l'autonomie financière5 leur permettant de poursuivre, au côté de l'Etat, les objectifs de développement économique, social et culturel, cette autonomie ne peut s'exercer que dans le strict respect des règles budgétaires et comptables. C'est en application du principe de l'indivisibilité de l'Etat unitaire que l'Etat surveille la gestion financière des Collectivités locales gabonaises. D'où il a institué des organes extérieurs aux collectivités locales chargés d'assurer, de manière périodique ou ponctuelle, la régularité et l'optimisation des fonds publics locaux. Ce contrôle exogène est confié à une pluralité d'acteurs. C'est ainsi qu'on a des acteurs administratifs marqués par leur diversité et des acteurs juridictionnels.

Il convient préalablement à l'objet de notre étude de définir brièvement quelques généralités de notre thématique.

D'abord, le concept de « contrôle ». Étymologiquement, le contrôle serait le « contre-rôle », la liste nominative qui permettrait de vérifier une première série de noms portés sur un état et de procéder éventuellement à un contre-appel. Cette idée de vérification est essentielle à la notion de contrôle, que le Pr. EISENMANN définit comme «l'opération qui consiste à vérifier si des objets concrets sont conformes ou ne sont pas conformes au schéma idéal, d'un objet correct, tel que le dessine une norme de contrôle - autrement dit à confronter les objets aux schémas auxquels ils doivent être conforme pour établir si, effectivement, ils le sont ou non. Un contrôle c'est essentiellement une vérification de conformité de la conformité ». Par conséquent, contrôler c'est non seulement vérifier la régularité juridique, la légitimité ou l'opportunité des actes, mais aussi assurer le fonctionnement économique et cohérent de la machine administrative et de ses diverses parties, surveiller la réalisation effective des programmes, évaluer les résultats, voire les coûts et rendements6.

À partir de ce qui précède, « le contrôle de l'Etat » vise à assurer à titre essentiel la légalité et la régularité dans la conception et la mise en oeuvre des budgets des collectivités locales. La légalité vise à garantir la conformité des documents et des opérations budgétaires aux lois nationales. Quant à la régularité, elle repose aussi sur l'idée de conformité mais, de manière spécifique, par rapport aux règles applicables en la matière.

5 Les collectivités locales jouissent d'une autonomie d'action en vertu du principe de la libre administration énoncé par la Constitution (art. 112 al. 2) et repris sous la forme de libre gestion par la loi organique n°001/2014. Cependant, la libre administration est limitée par la nécessité de préserver le respect du principe de légalité républicaine par les autorités locales.

6 Employé dans une acception large en fonction de l'orientation choisie, le concept de contrôle permet souvent d'opposer le contrôle hiérarchique au contrôle de tutelle. Le premier désigne l'exercice du pouvoir hiérarchique du supérieur sur le subordonné. Le second renvoie au contrôle de l'Etat sur les collectivités décentralisées.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 10

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

Ensuite, l'expression générique « acte budgétaire local ». Elle désigne les différents actes juridiques des Collectivité locale qui prévoient les ressources et les charges de la Collectivité locale pour un exercice annuel donnée ; qui en modifient ou exécutent l'affectation des ressources ou charges, et qui en constatent ou en font le bilan. L'expression est généralement synonyme de « budgets locaux », de « comptes publics locaux » ou de « documents budgétaires locaux ».

Enfin, la notion de « Collectivité locale ». Elle nécessite que soit au préalable levée toute ambiguïté entre les notions de collectivité territoriale et de collectivité locale. L'Etat, collectivité territoriale n'est évidemment pas qualifiable de collectivité locale, ni de collectivités territoriales décentralisées. Mais, abstraction faite de l'Etat, les collectivités territoriales sont très exactement les Collectivités locales. Aussi, ferons-nous usage dans le cadre de ce travail de l'une et l'autre expression.

Au sens de l'article 3 de la nouvelle loi organique n°001/2014 du 15 juin 2015 relative à la décentralisation, les collectivités locales7 sont « toute collectivité territoriale qui pourrait être dotée par la loi de la personnalité juridique et de l'autonomie administrative et financière ». Autrement dit, il s'agit des entités de droit public correspondant à des groupements humains géographiquement localisées sur une portion déterminée du territoire national, auquel l'Etat a conféré une existence juridique distincte de la sienne et le pouvoir de s'administrer librement par des autorités élues localement. Sont des collectivités locales au Gabon, la commune et le département.

Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires locaux, objet de notre étude, n'est pas récent au Gabon.

En effet, sous l'époque coloniale, le contrôle des opérations financières des colonies était assuré par la métropole, soit par l'administrateur de la colonie ou ses représentants, conformément au décret du 30 décembre 1912 fixant le régime financier des colonies françaises. Dès leur accession à l'indépendance, les pays africains mettront en place leurs propres législations financières adaptées à leurs besoins, desiderata, aspirations politiques et à leur réalité sociale. Le Gabon, qui au lendemain de l'indépendance comptait à peine six communes dont deux de plein exercice et quatre de moyen exercice8, n'échappe pas à ce mouvement. Ainsi, l'article 47 de l'ordonnance n°24/PR/MI-TC du 6 avril 1963 portant organisation des municipalités gabonaises et déterminant leurs règles de fonctionnement énumère limitativement les actes du conseil municipal soumis à approbation préalable de la tutelle. Il s'agit particulièrement des actes de nature financière.

Sous le parti unique, le caractère centraliste de la gestion des affaires publiques conférait aux organes du parti le contrôle de l'ensemble des opérations financières du pays. Le régime juridique du contrôle des finances locales reposait alors sur les dispositions du

7 Les collectivités locales de la République gabonaise sont les Communes et les Départements. Les premières citées sont « une agglomération urbanisée dont les habitants sont unis par des intérêts socio-économiques communs ». Les secondes « comprennent tous les espaces situés en dehors de la commune ».

8 En 1960, les commune de plein exercice sont Libreville et Port-Gentil ; et de moyen exercice : Bitam, Lambaréné, Mouila et Oyem.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 11

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

décret n°993/PR du 12 septembre 1972 portant régime financier et comptable des collectivités secondaires et sur celles de la loi n°5/85 du 27 juin 1985 portant règlement général sur la comptabilité publique de l'Etat, applicables aux collectivités locales.

On peut aussi citer le décret n°2041/PR/MINECOFIN-PART du 6 décembre 1985 précisant le régime général du contrôle financier de l'Etat fixé par le décret n°1377/PR/MINECOFIN-PART du 24 décembre 1977 portant attributions et organisation du ministère de l'économie et des finances. De même que le décret n°540/PR/MJ du 25 mai 1979 fixant l'organisation, le fonctionnement et les règles de procédure de la Chambre des comptes. Tous ces différents textes ressortent, en ces temps déjà, le souci des gouvernants de protéger le patrimoine financier de l'Etat et ses démembrements. Toutefois, le cadre monolithique de l'époque étant défavorable au développement de la décentralisation, l'existence d'un véritable contrôle des finances publiques locales était illusoire.

C'est en fait dans une dynamique d'évolution9, et comme plusieurs Etats africains longtemps gérés selon un système fortement centralisé, que le Gabon amorce dès les années 1990 une nouvelle forme de gestion des affaires publiques. En partenariat avec les institutions de Brettons Wood, il va s'engager à accentuer le processus de décentralisation, commencé bien avant l'indépendance en 196010. Au regard des défis posés par le nouvel environnement socio-politique et économique, la décentralisation est ainsi devenue nécessaire en matière de restructuration et de modernisation de l'administration publique gabonaise11.

9 «l'Etat en tant que forme politique institutionnalisée, est un produit historique de l'évolution des sociétés ; et comme toute institution, il est caractérisé par une dynamique permanente d'évolution résultant de l'action des forces de changement » (Pr. Jacques CHEVALLIER)

10 Cf. KOMBILA - IBOANGA Fidèle, »l'influence de la constitution française de 1958 en matière de territoire en Afrique : l'exemple de la politique de la décentralisation au Gabon», Association française de droit constitutionnel, 7ème Congres français de droit constitutionnel, Paris, pp.25-27, Septembre 2008.

Ce dernier affirme qu'«historiquement, la constitutionnalisation du statut des collectivités locales date de l'époque coloniale... Le Gabon, colonie faisant partie de l'ensemble colonial de l'AEF, connaît alors sa première expérience de décentralisation sous la colonisation française avec la loi française de 1955 relative à la réorganisation municipale en Afrique équatoriale française, au Togo, au Cameroun et à Madagascar. Colonie française, le Gabon fait alors partie de l'ensemble colonial AEF. Cette loi érige les localités de Libreville et Port Gentil en commune de plein exercice ».

Il ajoute par ailleurs, qu' « à la veille de l'indépendance du pays, une loi n°26/59 du 22 juin 1959 est adoptée. Elle porte création des collectivités rurales et détermine les règles de leur fonctionnement. La période post-indépendance est marquée par un courant centralisateur dans la politique comme dans l'administration du pays. Les lois de décentralisation ne sont pas appliquées. Ainsi, l'ordonnance n° 24/PR-MI-TC du 6 avril 1963 crée des communes de plein exercice (conseil et municipalité élus) et des communes de moyen exercice (conseil élu, maire nommé sur proposition du conseil. Le décret n° 00993/PR du 12 septembre 1972 vient fixer le régime financier et comptable des collectivités locales ».

11 Précisons qu'en 1996, suite aux différentes vagues de contestations du pouvoir centrale et de la monté florissante des élites intellectuels, et l'avènement du multipartisme qui secoue le pays et l'Afrique en général, le gouvernement Gabonais opte pour une politique de décentralisation. Il en a résulté l'adoption des politiques d'ajustement structurel (P.A.S), lesquelles mettaient en exergue les politiques de décentralisation comme piliers importants des réformes institutionnelles plus larges.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 12

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

Cette ouverture démocratique qui aboutit à l'instauration du multipartisme en 1990, suite à des évènements socio-politiques tumultueux, conduira à la constitutionnalisation en 1991 du principe de la libre administration des collectivités locales par des conseils élus dotés de compétences et ressources propres. Mais se trouve également consacré le principe de l'unité et de l'indivisibilité de la République qui implique le contrôle de l'Etat sur les Collectivités locales.

Ces contrôles sur les actes budgétaires locaux sont actuellement prévu par les dispositions de la nouvelle loi organique n°001/2014 du 15 juin 2015 relative à la décentralisation, ainsi que par plusieurs textes règlementaires. C'est par le truchement de ses contrôles que l'Etat s'assure que l'exercice de l'autonomie financière des entités décentralisées ne serve pas de prétexte à la gabegie financière et aux détournements des deniers publics locaux.

L'étude de la présente thématique est d'un enjeu important, pour un pays tel que le Gabon qui a opté depuis peu pour la bonne gouvernance de ses finances publiques, au regard des multiples détournements des crédits budgétaires et autres gabegies financières au sein de l'administration publique en générale, d'une part et du manque de réalisation de projets d'investissements publics locaux décrié par les populations, nonobstant l'importance des fonds alloués par le gouvernement, d'autre part12.

L'exploration du contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des collectivités locales gabonaises va donc au-delà d'un effet de mode. L'actualité du sujet étant marquée, dans le cadre de la réforme de notre administration publique, par l'adoption récente de la loi organique n°20/2014 du 21 mai 2015 relative aux lois de finances et à l'exécution du budget (LOLFEB) qui transpose trois (3) directives communautaires13.

Le sujet nous a intéressés, à ce titre, pour qu'à travers son traitement, nous puissions mieux appréhender non seulement les mécanismes et organes de contrôle externe

12 En effet, plus de vingt ans après l'enclenchement du processus de décentralisation dans notre pays, le développement des entités territoriales décentralisées sur le plan administratif, économique et social n'a toujours pas été engendré. Au contraire, l'enclavement de nos localités s'est aggravé au point qu'aujourd'hui, l'exode rural et l'éradication de la pauvreté sont devenus une situation d'urgence dans la politique nationale.

13 Il s'agit des directives de la CEMAC et notamment les directives 11-UEAC-190-CM-22 du 19 décembre 2011 n° 01 relative aux lois de finances ; n° 02 relative au règlement général de la comptabilité publique et n°06 relative au code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques des Etat membres.

Cette loi détermine les nouvelles règles relatives à la nature, au contenu, à la procédure d'élaboration, de présentation et d'adoption des lois de finances, ainsi qu'à l'exécution et au contrôle du budget de l'Etat. Cette réforme des finances publiques gabonaises, amorcée dès 2002 et institue la budgétisation par objectifs de programme (BOP), a été imposée par deux facteurs :

- Le respect des engagements pris dans le cadre de la CEMAC, visant à harmoniser les normes de

gestion des finances publiques en son sein ;

- La nécessité de mettre en place une administration moderne et performante dotée d'une culture
centrée sur les résultats et non plus sur les moyens.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 13

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

des budgets locaux au Gabon mais aussi mettre en pratique « le savoir-faire et le faire-savoir » appris tout au long de notre cursus universitaire14.

Quels sont les procédures et les organes des différentes modalités de contrôles ? Peut-on conclure à une efficacité de ces contrôles de l'Etat central sur les actes budgétaires locaux, au regard de la gestion financière actuelle de nos collectivités locales ?

Afin de répondre à cette double problématique, l'architecture retenue de notre travail reposera d'abord sur l'étude du régime des différentes modalités de contrôle des services de l'administration d'Etat central sur les actes budgétaires des Collectivités locales (Partie 1) ; avant d'envisager, ensuite, la portée desdites modalités de contrôles (Partie 2).

14 Pour réaliser ce travail, nous avons eu des entretiens avec des responsables administratifs, tant a u ni vea u des administrations centrales que des unités déconcentrées. Nous avons consulté plusieurs textes juridiques en rapport avec notre objet d'étude et nous les avons analysés et interprétés dans la mesure du possible. Puis, nous avons collecté le support documentaire doctrinal relatif à notre thème de mémoire que nous avons analysés au regard de la pratique gabonaise du contrôle externes des actes budgétaires, par le biais de deux stages pratiques effectués dans les principaux services de l'administration d'Etat intervenant en la matière.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 14

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon