La protection des consommateurs en droit positif congolaispar Espérance Diswekamu Kutetama Université de Kinshasa - Graduat 2017 |
b. La répression des clauses abusivesAu-delà de la répression des abus de situation, le législateur et la jurisprudence de notre pays devraient s'employer à combattre énergiquement les clauses abusives. La fréquence de celle-ci dans les contrats d'adhésion, provoque systématiquement la rupture de l'équilibre contractuel et porte souvent des graves atteintes aux intérêts des consommateurs. L'attitude de nos juridictions en ce domaine relève d'un archaïsme inquiétant.Ainsi pour la Cour d'Appel de Kinshasa : « Aucune considération d'équité, justifiée soit-elle, ne peut autoriser les juges soit d'office soit à la demande de l'une des parties à modifier la teneur d'une convention »46(*). La Cour d'Appel de Lubumbashi a infirmé le jugement par lequel le Tribunal de (grande) instance de Lubumbashi avait sanctionné une clause pénale manifestement excessive et abusive : « Attendu que la clause pénale qui permet à l'intimé de garder par devers lui, les acomptes à lui versés en qualité de vendeur et à l'appelant de bénéficier des loyers perçus, en cas de rupture fautive de la vente dans le chef de l'acheteur est licite, parce qu'elle est l'expression de la volonté des parties et n'a rien de contraire à la loi »47(*). D'une façon générale, le législateur congolais ainsi que la jurisprudence semblent se préoccuper davantage de la stricte application de la « lexcontractus » que du souci de rechercher un certain équilibre dans les relations contractuelles à travers la lutte contre les clauses abusives et la modération des clauses pénales excessives. c. La réparation des vices cachés et des dommages causés par la chose vendue1. La réparation des vices cachés Le souci d'équilibre contractuel se trouve également à la base de la théorie des vices cachés. Apparent lors de la conclusion du contrat, l'équilibre disparaît au moment de l'exécution par la découverte d'un vice caché rendant la chose impropre à sa destination. S'il avait eu « au départ, le consommateur victime du vice caché aurait renoncé au contrat ou se serait engagé dans des conditions différentes. Les opérateurs économiques sont tenus d'attirer l'attention des consommateurs qui s'adressent à eux sur les défauts cachés (ou les risques éventuels) de leurs produits. Il s'agit d'une obligation de résultat à la charge des professionnels, irréfragablement réputés connaître les vices de leurs produits. Cependant, dans la réparation qui s'impose face à un vice caché, il importe de « rechercher un juste équilibre entre la nécessaire protection des consommateurs et une responsabilité des fabricants qui laisse à ces derniers la faculté d'entreprendre et d'innover indispensable au progrès de l'humanité »48(*). En vertu de l'article 318 du Code civil, Livre III : « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ». Seul le vice caché, celui que ne peut découvrir le « bonus pater familias » après un examen normal de la chose, est sanctionné. Il appartient donc au consommateur de se montrer suffisamment attentif à l'égard des vices apparents au moment de la conclusion du contrat afin d'être à même de s'engager en pleine connaissance de cause49(*). 2. La réparation des dommages causés par la chose vendue Les commerçants sont tenus d'une obligation de sécurité à l'égard des consommateurs. L'importance de cette obligation est d'autant plus grande que le contrat a pour objet un produit dangereux ou susceptible de le devenir50(*). L'opérateur économique concerné doit mettre le consommateur en garde contre les risques inhérents à la chose qui fait l'objet du contrat. Lorsque, par suite d'un usage normal, la chose vendue cause un dommage au consommateur-contractant ou au consommateur-tiers, un droit à réparation doit être reconnu à la victime, conformément à la théorie de la responsabilité civile51(*). En principe, au nom de l'effet relatif des contrats, le consommateur contractant ne pourra agir que contre son cocontractant. Dans la perspective d'une meilleure protection de la victime, les systèmes juridiques qui ont inspiré notre législateur en matière contractuelle, reconnaissent au demandeur le droit de poursuivre directement tous ceux qui ont détenu la chose avant le vendeur. Enfin, si le consommateur-tiers ne dispose que de l'action en responsabilité délictuelle (ou aquilienne), le consommateur contractant a le choix entre l'action en responsabilité contractuelle et l'action en responsabilité délictuelle, lorsque la faute contractuelle constitue une infraction pénale ou un dol (ou faute lourde). En dehors de cette hypothèse, l'action contractuelle s'impose au consommateur contractant. * 46 Affaire opposant sieur Koulibali à Madame NadegeMwingi au degré d'appel devant la Cour d'Appel de Kinshasa/Gombe, du 20/05/1994. * 47 Propos recueilli dans l'ouvrage dePINDI-MBENZA KEFU, Op.cit, p.204. * 48DEKEUWER DEFOSSEZ F., Droit commercial : activités commerciales, commerçants, fonds de commerce, concurrence, consommation, 2e éd., Montchrestien, Paris, 1992, p406. * 49 CHRISTOPHE N. et CARON S., « Les clauses abusives dans les contrats de vente de véhicules automobiles neufs », in RT D, volume 2, n°12, 14 novembre 2007, pp.10-56. * 50 CHRISTOPHE N. et CARON S., Op.cit, p.22. * 51PINDI-MBENSA KIFU G., Op.cit, p.172. |
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