B- Les défaillances du système coercitif
Les défaillances du système coercitif peuvent
être relevées à plusieurs niveaux.
103 Espèce de fleur protégée, souvent
utilisée en Suisse comme un emblème national.
104 V. JAWORSKI Op.cit p.911.
D'abord, la technicité des textes entraîne leur
appréhension difficile par les autorités habiletés
à lutter contre la criminalité environnementale ceci fait en
sorte que le droit de l'environnement soit une discipline peu accessible.
Parfois, les services de police judiciaire ne disposent pas les
compétences techniques et les moyens matériels adéquats
pour exercer leurs fonctions en toute sérénité.
Ensuite, l'on note un manque d'harmonisation et de
coordination des procédures pénales car les administrations
chargées du contrôle des activités polluantes en
matière ICPE sont réparties de façon inégale et
inopérante (mairie, préfecture, ministère de
l'environnement etc.).
Enfin, le recours aux modes alternatifs de règlement
des conflits entraîne très souvent l'abandon des poursuites. En
effet, la transaction est souvent employée par le Ministère
public pour contrecarrer les lenteurs judiciaires notamment en matière
de pollution des eaux, des infractions commises dans les parcs nationaux et
dans le domaine de la pêche. Cet état de choses entraîne une
faiblesse du contentieux car selon un rapport du Ministère de la Justice
en 2003 sur sept paquets d'Ile de France, le taux de classement sans suite des
affaires dites « poursuivables » était de 53% en
matière environnementale contre 32% pour le contentieux pénal
général. Ceci « explique qu'un nombre modeste de
condamnations pénales sanctionnent les atteintes à
l'environnement »105.
De tout ce qui précède, il ressort que l'arsenal
juridique mis en place par le législateur français se heurte
à de nombreuses entraves tant dans sa mise en oeuvre que dans la
répartition inégale des sanctions pénales. Pour y
remédier, le rapport NEYRET propose des axes.
Paragraphe II : Le rapport NEYRET : lueur d'espoir du droit
pénal de l'environnement
Baptisé « rapport NEYRET » en raison de son
nom, le Professeur Laurent NEYRET a rédigé un rapport qui a
été remis au Ministère de la Justice Garde des Sceaux Made
Christiane TAUBIRA le 17 septembre 2013. Ce rapport qui fait l'objet de ce
paragraphe a le mérite de présenter les limites du droit
pénal français de l'environnement et propose des solutions pour y
remédier (A), ce qui a valu son adoption par le législateur
français (B).
105 CHAUMONT, Op.cit, p.146.
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A. Le contenu du rapport NEYRET
Le rapport NEYRET fait l'état du droit pénal de
l'environnement en insistant sur ses faiblesses. Le rapport NEYRET note une
défaillance manifeste du droit pénal français de
l'environnement dans la lutte contre la criminalité environnementale.
Ainsi, le manque d'accessibilité et de lisibilité des textes, les
peines rarement dissuasives et la timidité des juges constituent les
principales faiblesses du droit pénal français de l'environnement
selon le professeur NEYRET. Bien plus, le rapport note une disparité des
sanctions en matière de criminalité environnementale. Face
à cette situation déplorable, le professeur NEYRET propose un
éventail de solutions.
Le rapport NEYRET propose ainsi une harmonisation des
sanctions pénales entre les Etats du monde, la création d'un code
pénal des délits de mise en danger et d'atteinte à
l'environnement, la création d'un réseau national
dédié à la sécurité environnementale, le
renforcement des contrôles des autorités chargées de
veiller à la sauvegarde de l'environnement. En outre, pour pallier
à la timidité des juges, le rapport propose l'instauration d'une
cour pénale et d'un procureur international de l'environnement et
propose d'octroyer au juge la possibilité d'accroître les peines
d'amende encourues par les entreprises auteurs d'infractions environnementales
à un taux de rentabilité de 10% du chiffre d'affaire moyen annuel
de ces entreprises auteurs de troubles écologiques.
Bien plus, l'un des plus remarquables travaux du professeur
NEYRET est sans doute la proposition de l'intégration du
préjudice écologique dans le code civil, ainsi que
l'élévation de l'écocide au rang de crimes contre
l'humanité106.
De tout ce qui précède, il ressort que le
rapport NEYRET peut être considéré comme l'expression du
« ras le bol » des populations françaises en ce qu'il donne
une piste de solutions afin de résoudre le problème de la
délinquance environnementale qui ne cesse de gagner du terrain, c'est
d'ailleurs ce qui a valu sa présentation aux membres du parlement
français. Il convient néanmoins d'analyser la portée.
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