2) L'ETAT MEMBRE.
Parler de l`Etat membre revient vraisemblablement à
analyser la qualité de membre et sa portée pour l`Etat. Le statut
de membre implique l`appartenance et la participation de l`Etat à une
association ou à un regroupement supranational ayant pour but la
convergence de certains intérêts.
6 La commission d`arbitrage pour la Yougoslavie
dans son avis N°1 du 29 novembre 1991, cité par NGUYEN QUOC DINH,
DAILLIER (P) ; PELLET (A) ; et FORTEAU (M), Droit international
public, LGDJ, 2009, 8e édition p 450.
7 KAMTO (M), La volonté de l'Etat en
droit international, cours de l`Académie de droit international de
la Haye, tome 310, 2004, p 25.
8 Ibid. p 27.
9 COMBACAU (J) et SUR (S), Droit international
public, 3e édition, Paris, Montchrestien, 2009, p
221.
10 KAMTO (M), La volonté de l'Etat en
droit international, cours de l`académie de droit international de
la Haye, tome 310, 2004, p 27.
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Recherches sur l'Etat membre de la Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale
La qualité de membre dans les projets
intégratifs est reconnue généralement, et exclusivement
aux Etats, dès lors qu`ils adhèrent à un traité
établissant un ordre juridique11 supranational à
l`instar de la CEMAC. Ce statut est précédé d`un certain
nombre de conditions que l`Etat candidat à l`adhésion devra
remplir pour accéder au traité institutif. Etre membre
entraîne de facto certaines conséquences pour l`Etat : la
reconnaissance d`un nouveau pole de décisions sur des domaines bien
précis, et l`appartenance de la population nationale à une
communauté d`intégration. De jure, le statut d`Etat
membre implique une nouvelle identité juridique liée, à la
réception au sein de l`ordre normatif interne des Etats des
règles de droit communautaire. Des conséquences de la
reconnaissance à l`Etat du statut de membre, l`on peut déceler
des droits et des obligations, inhérents à la qualité de
membre de la communauté d`intégration. Les obligations
liées aux projets intégratifs sont généralement
contraignantes, bien plus qu`au niveau international. Parce que le droit de
l`intégration est plus un droit de subordination qu`un droit de
coordination. C`est dans ce sens que la cour de justice, dans l`arrêt
Costa contre Enel précisera que « [l']
intégration au droit de chaque pays membre, de dispositions qui
proviennent de sources communautaires , et plus généralement, les
termes et l'esprit du traité, ont pour corolaire l'impossibilité
pour les Etats de faire prévaloir contre un ordre juridique
accepté par eux sur une base de réciprocité, une mesure
unilatérale ultérieure qui ne saurait lui être
opposable[...] issue d'une source autonome, le droit né du traité
ne pourrait donc en raison de sa nature spécifique originale, se voir
judiciairement opposer un texte interne quel qu'il soit, sans perdre son
caractère communautaire.... »12. Cet arrêt
suscite des interrogations allant au-delà de la primauté de
l`ordre juridique communautaire. Des interrogations sur ce qui reste de
l`identité de l`Etat, membre de la Communauté
d`intégration13. Autrement dit, que devient l`Etat nation
souverain dès lors qu`il adhère à un projet communautaire
? La force juridique du droit communautaire impose une certaine
réadaptation, non négligeable, transformant autant
l`institutionnel que le normatif de l`Etat. Il nous revient alors, de prendre
avec plus de sérieux l`article 44 du traité révisé
de la CEMAC qui stipule que «les actes adoptés par les
Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la
Communauté pour la réalisation des objectifs du présent
Traité sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute
législation nationale
11 L`on peut entendre par ordre juridique «
l`organisation d`un système plus ou moins complexe de normes et
d`institutions destinées à s`appliquer effectivement aux sujets
constitutifs d`une communauté déterminée »
cité par DUPUY (P-M), « L'unité de l'ordre juridique
international », cours général de droit international
public(2000), recueil des cours de l`Académie de droit international de
la Haye, tome 297, 2002, P66.
12 Cité par PELLET (A), Les fondements
juridiques internationaux du droit communautaire, cours de
l`académie du droit européen, volume 5, livre 2, 1997,
P193-271.
13 MARTIN (S), « L'identité de
l'Etat dans l'union européenne : entre « identité nationale
» et « identité constitutionnelle », RFDC,
2012/3 N°91, P 13-44.
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Recherches sur l'Etat membre de la Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale
contraire, antérieure ou postérieure
»14. On aurait pu s`attendre à la modification des
constitutions au sein des Etat membres de la CEMAC, pour recevoir la norme
communautaire et aussi dans le but d`organiser les rapports qui naîtront
entre certaines institutions étatiques et communautaires. De toute
évidence, l`appartenance et la participation à la
Communauté ouvrent la voie au questionnement classique sur la fin de
l`Etat-nation et sur l`entrée à l`ère de l`Etat
post-souverain15. Cependant obligation est faite à la
communauté de respecter l`identité nationale des Etats
membres.
De ce qui précède, l`on peut dire que l`Etat
membre est une entité structuro-juridique souveraine, membre d`une
organisation d`intégration. Cela ne signifie pas l`existence de deux
ordres juridiques au sein de l`Etat, mais au contraire, une réception,
une insertion et une accommodation des normes communautaires dans l`ordre
juridique interne des Etats. Grosso modo, l`Etat membre est une
entité juridique souveraine, une nation et un membre d`une organisation
supranationale à l`instar de la CEMAC. Comment se présente alors
la CEMAC ?
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