PARAGRAPHE II : Les conditions ultérieures à
l'acquisition du statut de membre de la CEMAC.
Il s`agit essentiellement des conditions liées au
traité révisé de la CEMAC, à savoir des adaptations
du traité constitutif (A) et de l`obligation
d`association aux acquis communautaires(B) par le nouvel Etat
membre de la CEMAC.
A / Les adaptations du traité instituant la
CEMAC pour l'admission du nouvel Etat membre
On parlera de l`adaptation du traité CEMAC à la
langue officielle du nouvel Etat membre (1) et des
prérogatives inhérentes à sa qualité de membre
telle que la dénonciation du traité institutif CEMAC
c`est-à-dire le principe de non appartenance définitive à
la CEMAC(2)
69 Article 25 de la convention
régissant le parlement communautaire signé a Yaoundé au
Cameroun le 25 Juin 2008 « le parlement peut être
consulté sur les projets d'actes additionnels, de règlements et
de directives. Cette consultation est obligatoire dans les domaines suivants
:
- Adhésion de nouveaux Etats
membres... »
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1) L'adaptation à l'adhésion :
l'adaptation linguistique des instruments communautaires au nouvel Etat membre.
C`est généralement un aménagement
communautaire consistant à insérer la langue ou les langues
officielles du nouvel Etat ayant adhéré la communauté.
Elle se manifeste par une insertion textuelle c`est-à-dire une
reconnaissance solennelle de la langue du nouvel Etat membre de la
communauté comme une langue parmi tant d`autres de travail de la
communauté. Le traité révisé CEMAC est clair en son
article 59 qui stipule que « les langues de travail dans la
communauté sont le français, l'anglais, l'espagnol et l'arabe
». L`insertion de la nouvelle langue peut aussi être faite pour
permettre que le traité instituant la CEMAC soit traduit dans la
nouvelle langue. Cependant la reconnaissance et l`insertion de nouvelles
langues officielles comme langues de travail dans la communauté
soulèvent la question de l`éventuelle égalité des
différentes langues manifestées comme langues de travail dans la
communauté. Il est évident qu`aucun texte ne reconnaît
explicitement une égalité entre les différentes langues de
travail dans la communauté. Cependant, en reconnaissant dans l`article
59 du traité instituant la CEMAC le français, l`anglais,
l`espagnol et l`arabe comme langues de travail dans la communauté, l`on
peut tirer de cette disposition une proclamation implicite de
l`égalité des différentes langues composant les langues
d`exercice de la CEMAC. Mais il s`agit d`une proclamation
rédhibitoire70 dans la mesure où l`article 64 en
stipulant que « le présent traité est
rédigé en exemplaire unique en langue française,
espagnole, arabe, et anglaise ; le texte français faisant foi en cas de
divergence d'interprétation » met explicitement le
français en exergue par rapport aux autres langues de travail de la
communauté et annule implicitement l`égalité entre les
différentes langues d`exercice de la CEMAC. A cet effet on peut oser,
à la lecture de cet article, affirmer que le français est en
quelque sorte prééminente sur les autres langues de travail de la
CEMAC. Cela est constaté dans l`énoncé de l`article 64.
L`adaptation linguistique du nouvel Etat à la
communauté fait partie des prérogatives inhérentes
à la qualité de membre, comme c`est le cas du droit de
dénonciation du traité instituant la CEMAC.
70 « Le constitutionnalisme
rédhibitoire...commence quand certaines dispositions d'une loi
fondamentale réduisent a néant d'autres dispositions explicite ou
implicite. » voir J. OWONA, « l'essor du constitutionnalisme
rédhibitoire en Afrique noire : études de quelques «
constitutions Janus », mélanges offerts à P-F GONIDEC,
LGDJ, 1985, PP 235-243.
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2) L'adaptation au retrait : le droit de
dénonciation du traité instituant la CEMAC : le principe de non
appartenance définitive à la CEMAC.
Le principe de l`appartenance définitive à la
communauté signifie, que le traité constitutif n`aborde pas dans
ses dispositions des possibilités de retrait71de la
communauté. Mais exceptionnellement la seule possibilité est
l`exclusion de la communauté. Dans le cas de la CEMAC, l`article 58 du
traité révisé stipule que « le traité de
la CEMAC peut être dénoncé par tout Etat membre ».
Le droit communautaire CEMAC reconnaît un droit de retrait à
tout Etat membre désirant mettre fin à son appartenance à
la communauté. Le traité constitutif de la CEMAC organise
à la suite du retrait d`un Etat membre la cessation des
prérogatives s`appliquant à sa qualité de membre. Et cet
article 58 précise qu`il « cesse d'avoir effet à
l'égard de celui-ci le dernier jour du sixième mois suivant la
date de notification à la conférence des Chefs d'Etats. Ce
délai peut cependant être abrégé d'un commun accord
entre les Etats signataires ».
Le droit de dénonciation est reconnu à tout Etat
membre désirant se retirer de la CEMAC. Pour que ce retrait soit
effectif le traité constitutif de la CEMAC prévoit une
procédure dite normale qui revient à ce que des normes
communautaires cessent définitivement d`avoir effet sur celui-ci le
dernier jour du sixième mois suivant la date de notification à la
conférence des Chefs d`Etats. Cependant la procédure normale peut
être abrégée d`un commun accord entre les Etats
signataires. Il faut également signaler que le traité instituant
la CEMAC ne prévoit pas dans ses dispositions une exclusion d`un Etat
membre de la CEMAC. Par conséquent, une appartenance définitive
est exclue dans le traité révisé de la CEMAC. Le droit de
dénoncer le traité CEMAC est reconnu à tout Etat membre
désirant se retirer de la communauté, Toutefois dans le strict
respect de l`article 58 du traité révisé
CEMAC72. Il est de notre intérêt de tirer la conclusion
qui s`impose, à savoir que le traité constitutif CEMAC rend
possible le retrait unilatéral pour tout Etat membre. Uniquement dans le
but de permettre la continuité du projet intégratif. Cette
précision est nécessaire par ce qu`auparavant au sein de l`union
européenne, l`interdiction juridique du retrait
unilatéral73 d`un Etat membre (principe d`appartenance
définitif) était généralement
71 ISAAC (G) et BLANQUET, Droit
général de l'union européenne, Sirey
université, 9e édition, 2006, P 33.
72 L`article 58 du traité
révisé CEMAC signé en 2008 stipule que : « Le
Traité de la CEMAC peut être dénoncé par tout Etat
membre. Il cesse d'avoir effet à l'égard de celui-ci le dernier
jour du sixième mois suivant la date de notification à la
Conférence des Chefs d'Etat. Ce délai peut cependant être
abrégé d'un commun accord entre les Etats signataires
».
73 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit
général de l'Union Européenne, Sirey
Université, 9e édition, 2006, p34.
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source d`obstacle au fonctionnement des communautés
européennes. Car, comme l`affirme Guy ISAAC et Marc BLANQUET, un Etat
qui veut se retirer mais se trouve empêché, peut faire obstacle au
fonctionnement de celles-ci par la pratique de la « politique de la
chaise vide »74. La posture des textes constitutifs de
l`union européenne peut se justifier, comme une envie d`éviter
l`éternel retour à la case départ dans le processus
d`intégration européenne. Ainsi pour résoudre le
problème de l`éventuel blocage d`un Etat membre, l`Union
Européenne a préfère une intégration
différentielle. « Schématiquement ces dérogations
correspondent aux concepts de l'Europe à plusieurs vitesses
»75, ou de l` « Europe à
géométrie variables »76. Et depuis
l`entré en vigueur du traité de Lisbonne, il a été
inséré une clause de retrait volontaire dans le TUE.
L`intégration différentielle n`est pas reconnue au sein de la
CEMAC. Il est mis en avant dans le processus de communautarisation les
principes d`unanimité, c`est-à-dire le consensus dans la prise de
décision. Mais cela entraine inéluctablement une évolution
lente et subordonnée à l`humeur des Etats membres77.
autrement dit un Etat membre, pas en phase avec la CEMAC, ralentira
l`évolution significative du processus d`intégration ou pire, la
bloquera. Il est louable l`initiative du traité CEMAC de permettre un
retrait unilatéral de tout Etat membre désirant se retirer. Cela
démontre la volonté des législateurs communautaires
d`éviter des blocages dans le fonctionnement de la CEMAC. L`on peut tout
de même reprocher au traité CEMAC de n`avoir pas prévu dans
ses énoncés la possibilité d`exclure un membre de la
communauté pour entrave au processus évolutif communautaire, ou
bien la possibilité, comme dans l`Union Européenne, d`avoir une
différenciation dérogatoire entre les Etats membres. quid de
l`obligation de l`association du nouvel Etat aux acquis communautaire.
74 C`est la politique consistant à refuser
de siéger dans les institutions et en particulier au conseil comme ca
été le cas de l`Etat français entre juin 1965 et
février 1966 qui entraina la communauté européenne dans
une léthargie proche de l`asphyxie. Citez par ISAAC (G) et BLANQUET (M),
Droit général de l'union européenne, op cit
p34.
75 « Plusieurs vitesse »
c`est-à-dire que la « dérogation est passagère et
limitée, d'entré de jeu, dans le temps : ainsi des
périodes de transition consenties dans les traités
d'adhésion pour permettre aux nouveaux membres de reprendre
progressivement l'acquis communautaire » ou encore du statut d`
« Etats membres faisant l'objet d'une dérogation
organisé » par les textes constitutifs de l`union
européenne. Citer par ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit
général de l'union européenne, op cit pp 35-36.
76 Il s`agit d`une volonté de certains Etats
membres de bénéficier d`une réglementation
dérogatoire qui leur permet de laisser inappliquée la
règle commune.
77 Comme cela a été le cas lors de la
mise en oeuvre de la libre circulation des personnes prévue normalement
le 1er janvier 2014, qui fut rejeté sans véritable raison
valable, par le Gabon et la Guinée Equatoriale.
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