B-2- la place de l'homme dans la théorie
physiologique des organisations
Tout comme la théorie de la gestion
administrative qui réduit l'homme à un simple instrument
d'action, la théorie physiologique des organisations traite l'homme au
travail comme une véritable machine qui doit répéter les
mêmes gestes, à l'infini, huit heures par jour et les mains
attachées à un système synchronisé par des
courroies pour le servir toutes les quelques secondes. D'ailleurs,
d'après ses tenants, l'individu est dépourvu de toute initiative
et la seule motivation est l'argent. En peu de mots, les partisans de cette
théorie ont une vision pessimiste sur lui et leurs études se
limitent aux aspects physiologiques de la personne et cela afin de l'exploiter
d'une manière scientifique.
Cependant des critiques ont été
apportées à cette théorie du fait qu'elle a une vision
mécaniste de l'Homme au travail. C'est-à-dire il est
considéré comme une machine.
C'est à ce juste titre que les
conséquences s'avueraient néfastes sur le côté
psychologique des théories (turnover, absentéisme
etc.).
1-4-1-2- La théorie
néo-classique
Dans l'analyse de l'équilibre
général et dans la plupart des modèles d'équilibre
partiel, l'organisation ne constitue qu'une boucle parmi d'autres. Les
néo-classiques lui appliquent une approche en termes de «boite
noire (1) », dont le contenu est totalement
négligé par une raison ou une autre. De ce fait, elle est
réduite à une simple fonction technique de production qui
consiste naturellement à transformer les flux d'entrées
(matières premières, main-d'oeuvre) en flux de sorties (produits
finis, produits semis finis, services). Les tenants de cette théorie
assimilent l'entrepreneur à l'entreprise qu'il possède et qu'il
gère. D'après eux, l'entrepreneur prend les décisions sur
la base des flux d'informations qu'il reçoit et ne se fixe comme
objectif que la maximisation de son profit. Dans cette approche
l'élément humain, est ni plus ni moins un facteur comme tous les
autres facteurs (capital et technologie) entrant dans le choix de la
combinaison optimale de production. D'autre part, la main-d'oeuvre est
complètement substituable et son prix relève
(1) KOENIG. G, Les
théories de la firme, ECONOMICA, Paris, 1993. p. 07.
Chapitre I : Emergence et développement de la
Fonction Ressources Humaines
15
du marché du travail c'est-à-dire du jeu
de l'offre et de la demande du travail. Enfin, en tant que propriétaire
de l'organisation, l'entrepreneur a le droit d'accroître ou de
réduire la force de travail en résiliant des contrats ou en
passant de nouveaux accords. Dans cette école de pensée,
l'ouvrier est complètement occulté et négligé. Ses
auteurs le mettent en même rang que les autres facteurs de production qui
s'achètent et se vendent sur le marché. Ceci est loin
d'être juste car l'entreprise ne peut pas s'approprier lu salaire comme
elle peut s'approprier les matières premières et les
équipements. C'est une véritable communauté humaine qui se
trouve à son intérieur et non pas seulement des machines, des
objets et des murs.
Voici en bref le contenu successif des théories
traditionnelles présentant les théories modernes dans le point
suivant.
1-4-2 Les théories modernes
Nous allons traiter ici la théorie des
relations humaines ainsi ses apports et ses limites ensuite la théorie
des ressources humaines qui vient juste après la première
école.
1-4-2-1- La théorie des relations
humaines
Cette nouvelle approche des problèmes humains
dans l'organisation trouve son origine dans les études et les
expériences réalisées par Elton MAYO, entre 1927 et 1932,
dans les usines de Hawthorne à la Western Electric Company aux
USA.
Par la suite, ses successeurs comme Kurt LEWIN et R.
LIKERT ont développé des nouvelles idées sur les effets
des styles de commandement utilisés par l'encadrement.
Les hypothèses qui sont derrière les
expériences d'Elton MAYO sont Tayloriennes. La première suppose
que les meilleures conditions matérielles de travail améliorent
le rendement. Donc, un meilleur éclairage est censé causer une
productivité plus accrue. La seconde prétend que la seule
motivation de l'Homme au travail est uniquement l'argent. La dernière
hypothèse est plutôt abstraite. D'après celle-ci, il y a
une bonne organisation et une seule.
Chapitre I : Emergence et développement de la
Fonction Ressources Humaines
16
A cause des résultats qui ne confirment pas les
postulats de départ de cet auteur, les chercheurs en sciences sociales
venant après lui ont émis de nouvelles hypothèses sur le
comportement de l'individu au travail. Selon ces dernières (les auteurs
cités):
- chaque ouvrier veut se sentir utile et
important dans l'entreprise ;
- chaque salarié désire se
sentir intégré et être reconnu comme individu ;
- certains besoins motivent et incitent
l'individu à travailler beaucoup plus que le gain financier
(l'argent).
Voici quelques éléments auxquels nous
attacherons un intérêt particulier à ce présent
travail que nous tenterons de vérifier.
A)- La valeur de la théorie des relations
humaines
Les auteurs de l'école des relations humaines
apportent un enrichissement considérable dans la connaissance et la
compréhension du comportement humain au travail. A travers ses
expériences, E. MAYO montre les effets possibles des interactions entre
les subordonnés sur le rendement de l'atelier ou de l'usine. Par contre,
ses successeurs parlent de l'impact de la nature des rapports entre chefs et
subordonnées sur la productivité de ces derniers. En d'autres
termes, les retombées des systèmes de management sur le moral des
ouvriers et, par conséquence sur leur motivation au travail.
B)- Les limites de la théorie des relations
humaines
Sans doute, dans les années 1930, la
théorie des relations humaines a remporté une très vif
succès à cause du caractère optimiste de ses postulats de
départ et par le fait que parallèlement à l'idée se
démocratie qu'elle véhicule, la théorie affirme le respect
de la personne humaine et du principe de la liberté.
Cependant, elle a fait l'objet de violentes critiques.
Quelques unes sont peut être de nature méthodologique. Un petit
nombre d'auteurs critique la méthode de sélection des
salariés utilisée par Elton MAYO à l'usine de Hawthorne
ainsi que les différents tests d'éclairage qui ne visent,
d'après eux, qu'à montrer le rôle ou l'importance d'une
bonne ambiance et d'un bon moral au travail.
Kurt LEWIN, quant à lui, il lui est
rapproché d'avoir fait des expériences sur des mineurs et non pas
sur les gens majeurs car la psychologie des enfants est totalement
différentes de celle des adultes. Au-delà, de cette limite se
situent des critiques de fond. Les
Chapitre I : Emergence et développement de la
Fonction Ressources Humaines
17
économistes « ridiculisent »
l'abandon du stimulant matériel qui est l'argent. De plus, selon les
tenants de la théorie de la contingence, le meilleur style de leadership
n'existe pas en lui-même. Il dépend des circonstances auxquelles
on doit s'adapter.
1-4-2-2 Les théories des ressources
humaines
Avec les théories des ressources humaines, on
s'écarte un peu des idées de la théorie des relations
humaines et très nettement des conceptions de l'école classique
d'organisation. En premier lieu, les individus sont considérés
comme des ressources en majeure partie inexploitées. En second lieu, la
réalisation des objectifs de chaque organisation passe
nécessairement par la satisfaction des besoins du personnel et par le
développement de chaque membre au sein de chacune d'elles. En
conséquence, les dirigeants sont invités non seulement à
partager l'information avec les salariés afin d'améliorer leur
moral mais, à satisfaire également leur différents besoins
pour qu'il adhérent de leur plein gré aux objectifs de
l'organisation. En dernier lieu, les dimensions ignorées sur la nature
de l'Homme depuis longtemps sont mises en exergue dans le cadre de cette
approche.
Il s'agit donc bien d'une nouvelle appréhension
des problèmes humains dans l'entreprise. Les principaux auteurs de cette
école de pensée sont MASLOW. A, HERZBERG, F et D. MC.
GREGOR.
Bien que différentes dans leur
développement, les théories de ressources humaines reposent sur
les mêmes postulats de départ :
- Le travail n'est pas principalement
déplaisant ou ennuyant. Les individus désirent participer
à la réalisation des objectifs compréhensibles qu'ils ont
eux-mêmes aidé à fixer ;
- La plupart des individus peuvent faire preuve de
beaucoup plus d'initiatives, de créativité, d'autonomie et de
sens des responsabilités qu'il ne leur est demandé dans leur
travail ;
- Les individus sont capables de
s'auto-contrôler et de s'auto-diriger ;
- Les ressources ne sont pas utilisées de
façon optimale dans les entreprises.
Partant de ces principaux fondements avancés
par plusieurs auteurs comme E. MAYO ; K. LEWIN et d'autres, par rapport
à cette approche théorique de la fonction ressources humaines
nous distinguons par comparaison entre les deux différentes
théories, les conclusions suivantes :
Chapitre I : Emergence et développement de la
Fonction Ressources Humaines
18
La première, selon Elton MAYO, dans sa
théorie des relations humaines, « ...les meilleures conditions
matérielles de travail améliorent le rendement des individus
», il poursuit dans sa théorie « ...que la seule motivation de
l'Homme au travail est uniquement l'argent »
La deuxième, et contrairement à la
théorie des relations humaines, l'Homme est considéré
comme une ressource en majeure partie inexploitée dans cette seconde
théorie des ressources humaines. Est donc l'objectif de toute
organisation la satisfaction de son personnel par le développement de
chaque membre de sa ressource humaine.
A)- La théorie des besoins de
MASLOW
MASLOW. A, a été un des premiers
psychologues à se pencher sur les motivations de l'Homme au travail. Il
place des besoins de l'individu au centre de l'organisation. C'est pourquoi ses
idées, en partie, sont à l'origine du mouvement pour
l'amélioration de la qualité de la vie au travail.
Selon ce chercheur les besoins de tout être
humain peuvent être regroupés en cinq catégories (1) : les
besoins psychologiques, de sécurité, sociaux, d'estime et de
développement personnel.
Cette approche par les besoins a conduit des milliers
de managers à se pencher et à réfléchir sur
l'importance des besoins et sur le rôle de la motivation dans le
rendement de toute organisation.
B)- La théorie de HERZBERG
La principale découverte de HERZBERG. F
(2) fut que les circonstances qui menaient à la satisfaction
dans le travail étaient de nature différente de celles qui
causaient une non satisfaction. Les facteurs de satisfaction ou de motivation
sont liés au développement de la personne elle-même. Par
contre, les facteurs de non satisfaction se rapportent plutôt aux
conditions d'hygiène et à l'ambiance générale au
travail.
(1) Jean Pierre GRUERE et J. TABES, Traité des
organisations, PUF, Paris 1982, p. 24 et André LABOURDETTE,
Théorie des organisations, Presse Universitaire de France, Paris, 1992,
p. 30.
(2) Nicole AUBERT, J. P. GRUERE, J. JABES,
Hervé LAROCHE et Sandra MICHEL, « Management : Aspects humains et
organisations », PUF, Paris, 1991, pp. 197 -180.
Chapitre I : Emergence et développement de la
Fonction Ressources Humaines
19
C)- Les théories de « X » et «
Y » de Douglas Mac GREGOR
En s'appuyant sur la classification des besoins de
MASLOW, il pense que deux conceptions de l'Homme peuvent être
envisagées : la théorie « x » et la théorie
« y » (1).
· La théorie « x »
Jusqu'à présent, les principes
d'organisation employés par la grande majorité des entreprises
sont ceux de l'école classique de l'organisation. Elle est fondée
sur un ensemble de croyances sur la nature de l'Homme. Selon cette conception
:
- l'Homme éprouve une aversion innée
pour le travail et il va faire son possible pour l'éviter ;
- la plupart des individus ne feront pas les efforts
requis pour permettre à l'entreprise d'atteindre ses objectifs s'ils ne
sont pas forcés, contrôlés, dirigés et
menacés de punitions ;
- l'être humain préfère être
dirigé et souhaite éviter toute responsabilité ; -
l'Homme n'a que peu d'ambitions et désir sa sécurité avant
tout ;
- les buts personnels de l'individu sont
étrangers des buts de l'organisation.
Pour tous ces motifs, les organisations adaptent
souvent des systèmes de management de type autoritaire ou paternaliste
qui mettent l'accent surtout sur la contrainte et le
contrôle.
· la théorie « y »
Compte tenu de l'évolution de l'environnement
aujourd'hui, GREGOR estime que la conception « x » de l'Homme est
incapable de répondre à la fois aux objectifs des individus et de
l'organisation. La validité de la théorie et de plus en plus
contredite par les faits car elle ignore presque tous les besoins de l'Homme.
De plus, certains managers se retranchent toujours derrière la mauvaise
nature de l'Homme pour justifier leur échec dans la gestion. Pour toutes
ces raisons, il propose la théorie « y » qui repose sur les
idées suivantes :
- l'effort physique et mental dans le travail est aussi
naturel que le jeu ou le repos ; - le travail n'est pas en soi
déplaisant et désagréable ;
- le contrôle et la menace ne sont pas les seuls
moyens d'amener les employés à contribuer aux objectifs de
l'organisation ;
(1) P. BARANGER, J-P. HELFER,
J. ORSONI et J-M. PERETTI, Gestion : Les fonctions de l'entreprise, Vuibert,
Paris, 1985, p. 60.
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Fonction Ressources Humaines
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- l'homme est capable de se diriger et de se
contrôler lorsqu'il accepte les objectifs de son travail ;
- placé dans de bonnes conditions l'être
humain, et celui-ci apprend non seulement à accepter mais rechercher
également les responsabilités ;
- dans le travail l'Homme peut faire preuve de
beaucoup d'habilités et de créativités que l'on imagine
;
- dans l'organisation industrielle moderne, les
capacités intellectuelles du travailleur moyen sont
sous-utilisées.
Ce type de conception de l'Homme au travail encourage
la direction de l'organisation à promouvoir un « management
participatif » (1) basé sur la délégation de
l'autorité et des responsabilités au niveau inférieure de
la hiérarchie et libère de ce fait toutes les forces vives de
celle-ci.
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