2. Les problèmes de droit international que pose
la hausse des températures.
A la lumière de ce qui précède, il n'est
pas difficile de constater que la hausse
moyenne des températures, ainsi que les
conséquences qui vont avec, pourraient avoir des implications
tant politiques qu'économiques qui affecteront les
relations interétatiques. Cependant,
elles pourraient aussi avoir des implications concernant
directement le droit international.
A titre d'exemple, l'élévation du niveau moyen
des eaux fait peser une menace
sur l'existence même des Etats. En effet, la
première conséquence juridique de ce phénomène
serait la perte partielle ou totale d'un élément
constitutif de l'Etat, le territoire. Nombre
d'Etats possédant des deltas tropicaux ou subtropicaux
sont effectivement menacés par la disparition
d'une partie de leur territoire.
Alors que la perte partielle n'est que peu
problématique, puisque l'Etat conserve
une assise territoriale, en revanche la perte totale poserait
un nouveau problème de droit
international. En effet qu'adviendrait-il de l'Etat dont le
territoire disparaîtrait ?
Cette question n'est pas une hypothèse d'école
dans la mesure où elle concerne
de nombreux groupes récifaux des océans
Pacifique et Indien. Les scientifiques estiment que
80% des atolls risquent d'être engloutis sous la mer
dans l'hypothèse moyenne d'une montée
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d'un demi mètre, tels que les Maldives ou certaines
îles de la Polynésie. Comment le droit international
appréhendera t-il la disparition de l'assise
territoriale d'un Etat dans ce contexte
précis ?
En outre ces modifications physiques du territoire
entraînent des conséquences
sur un autre élément constitutif de l'Etat,
la population. En effet la disparition de territoires,
de même que la dégradation des conditions de vie
dans certaines régions de la planète, risquent
de générer d'importants flux migratoires.
Le PNUE, dès 1985, a évoqué la notion de
« réfugié de l'environnement » pour
désigner : « des personnes qui ont
été forcées de quitter leurs habitations traditionnelles
de
façon temporaire ou permanente, en raison d'un
dérangement environnemental majeur (naturel
et/ou engendré par les humains) qui a mis en danger
leur existence et/ou qui a endommagé
sérieusement la qualité de leur vie ».43
Comme le note Hervé Raimana Lallemant : «
...l'apparition de cette notion
de réfugié climatique pose un problème de
droit international. Faut-il aller vers un élargissement
des catégories de personnes déplacées
susceptibles de recevoir une aide internationale et
pouvant bénéficier du statut de
réfugié dans les pays d'accueil ? »44
Se pose également la question de savoir si certains
Etats ont une responsabilité
et par conséquent, l'obligation d'accueillir les
réfugiés climatiques. Cette question est apparue
tout récemment à l'occasion de la revendication
d'une ONG samoane à l'égard de l'Australie.
En raison de son importante production de gaz à effet
de serre, l'Australie s'est vue demander
la reconnaissance du statut de réfugié de
l'environnement aux ressortissants des îles Samoanes
présents sur son territoire, au motif que ceux-ci
auraient été victimes du réchauffement
climatique.
Enfin, ces questions posent également des
problèmes de relations internationales
et de sécurité internationale, dans la mesure
où les territoires aux conditions climatiques
favorables risquent de devenir un nouvel enjeu de luttes
armées.
43 EL -HINNAWI (E.), Environnemental
refugiées, UNEP, Nairobi, cité par ALLARD (P.), «
Malaise dans la climatisation,
le changement climatique et la sécurité des
Etats », in AFRI, p. 948.
44 RAIMANA LALLEMANT (H.), « l'apatride climatique et
la disparition de l'Etat dans le Pacifique Sud », in
Revue
juridique polynésienne, n°15, 2009, p.
83
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Il semble donc qu'en raison de la dimension planétaire
de la menace climatique,
mais aussi parce qu'elle a fait surgir des problèmes de
droit international, la communauté
internationale se devait de s'intéresser aux
conséquences que la modification du temps
peut exercer sur le plan international.
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