§2. Voie testamentaire
L'auteur peut décéder en ayant tout prévu
dans un testament. Dans ce cas il y aura dévolution testamentaire compte
tenu du choix qu'aura fait le de cujus. Il choisira un exécuteur
testamentaire. C'est l'exécuteur testamentaire qui est
désigné en premier lieu parce que, évidement, nul n'est
mieux placé que l'auteur pour choisir qui défendra son droit
moral.
Le ou les exécuteurs testamentaires peuvent être
des personnes physiques(I) mais aussi de personnes morales (II), telle une
société d'auteurs ou une fondation: cette solution a l'avantage
de permettre une défense quasi perpétuelle du droit moral.
I. Cas des personnes physiques
En effet, l'auteur a intérêt à ce que son
droit moral soit respecté de son vivant et même après sa
mort. Nous pouvons dire que l'auteur a le libre choix de quelqu'un qui veillera
à ce que ses droits moraux soient respectés s'il ne sera plus.
112 H.DESBOIS, Op. cit, pp. 577- 581
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Il a même le droit de choisir quelqu'un en dehors de sa
famille s'il estime que c'est bien lui qu'il faut.
L'auteur peut choisir parmi ses amis proches musiciens qui
sont mieux placés dans le monde musical.
Cependant, le choix d'une personne physique est soumis
à un obstacle: la durée limitée de la vie de la personne.
Puisque l'individu n'est pas immortel, le problème qui se pose est de
savoir qui veillera au respect du droit moral après sa mort.
La doctrine donne une réponse à cette question
en accordant une possibilité à l'auteur de prévoir un
exécuteur testamentaire, ou bien un ami, ou un homme de la loi. Toute
liberté lui est laissée pour donner confiance à qui lui
paraîtra la mériter. L'auteur peut investir, soit l'un des
successibles, auquel le législateur fait appel en l'absence ou
après la mort de l'exécuteur testamentaire, soit un ami, soit un
homme de la loi113.
Il faut pourtant retenir que les individus seront toujours
limités par le facteur temps114.
Le droit moral, dans sa perpétuité, peut
être protégé par une succession de personnes mais le
contrôle deviendra difficile au fur du temps.
« L'auteur peut transmettre le droit moral à
un héritier qu'il désigne, puis celui-ci fera de même et
ainsi de suite. Cependant, en ce cas, l'auteur ne maîtrise rien
jusqu'à la deuxième
génération115.»
Par conséquent il est conseillé de confier la
protection du droit moral à une personne morale.
II. Cas des personnes morales
La solution de choisir une personne morale comme
exécuteur testamentaire a l'avantage de permettre une défense
quasi perpétuelle du droit moral.
113 H.DESBOIS, Op. cit, p.574
114 Nous voulons dire que la vie d'une personne physique est
de courte durée par rapport aux personnes morales qui peuvent durer au
delà de la succession des générations et des
générations
115 P.Y.GAUTIER, Op. cit, p.479
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Selon la doctrine française, l'auteur peut avoir le
choix d'une simple association chargée de défendre son
oeuvre116. Ici au Burundi, nous estimons que l'AMB est une
association pour les Musiciens qui peut être confiée de la gestion
des droits moraux si l'auteur en a confiance.
Il pourra aussi confier la défense de ses droits moraux
à une fondation: « Le de cujus peut se garantir un exercice
perpétuel du droit moral par la création d'une fondation...: soit
il fera procéder de son vivant, à la création d'une
fondation à laquelle il transmettra le droit moral, lors de la
confection de son testament ou par tout autre écrit soit il
procédera à la nomination d'un légataire universel qui
constituera la fondation puis lui transmettra le droit
moral.»117
Ici au Burundi, une fondation nommée Fondation CANJO
Hamissi a été érigée à Gitega. Il faudra
savoir si la mission de la fondation ne se limite pas seulement à
célébrer les anniversaires tous les 06 Avril. Au delà de
ça, une fondation a une importante mission qui consiste à militer
pour le respect de ses droits moraux. En ce qui concerne le respect des droits
moraux, les héritiers du de cujus doivent bénéficier d'un
soutien important de la part de la fondation.
Les droits moraux peuvent aussi être gérés
par des sociétés de gestion collective. Selon Pierre Yves GAUTIER
«le de cujus peut choisir comme exécuteur testamentaire une
société d'auteurs, du genre auquel appartient son patrimoine
artistique118.» Au Burundi, la Société de
gestion collective compétente est l'OBDA. Celui-ci n'a pas vocation
qu'à percevoir et repartir les redevances entre ses adhérents.
L'article 40 de la loi n°1/021 du 30 décembre 2005 portant
protection du droit d'auteur au Burundi et l'article 1 du décret-loi
n°100/237 du 07 septembre 2011 portant création de l'OBDA dans son
al.1 lui confèrent la défense des droits moraux.
Ainsi compte tenu de la complexité de gérer le
droit moral dans une dimension spatio-temporelle il est conseillé de
confier la gestion à une personne morale. C'est en raison des devoirs
assez lourds qu'il a semblé nécessaire de confier le droit moral
après la mort de l'auteur aux personnes paraissant les plus capables de
comprendre et d'accomplir ce devoir. Explique COLOMBET119.
116 P.Y.GAUTIER, Op. cit, p. 480
117 Idem, pp. 479-480
118 Idem, pÀ79
119 C.COLOMBET, Propriété Littéraire et
artistique, DALLOZ, Paris Cedex05, 1976, p.216
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D'après DESBOIS une telle désignation aurait
l'avantage de prolonger la mission de l'exécuteur au delà de la
durée d'une génération humaine120.
Pour bien comprendre l'importance du rôle de l'OBDA dans
la défense du droit moral de l'auteur, nous avons jugé bon
d'analyser à la loupe le décret-loi n°100/237 du 07
septembre 2011 portant création de l'Office Burundais du Droit d'auteur
et des droits voisins.
Le chapitre II du décret-loi a été
consacré à l'objet et à la mission de l'OBDA.
Selon l'article 1, al.1, «l'office assure sur le
territoire national et à l'étranger, la défense des
intérêts professionnels, matériels et moraux des auteurs
d'oeuvres littéraires et artistiques burundais ou étrangers
domiciliés au Burundi ou de leurs ayants droit.»
Nous considérons que les auteurs peuvent
désigner l'office pour les représenter dans la défense de
ses intérêts moraux quand ils ne seront plus.
L'article 5, al.1 énumère à titre non
exhaustif des prérogatives que l'office a mission de gérer sur le
territoire national ou par voie d'accords de réciprocité à
l'étranger. Les alinéas 2,3,4,6,7 reconnaissent à l'office
les missions d'agir comme intermédiaire exclusif pour la conclusion des
contrats, concéder, pour le compte et dans l'intérêt des
titulaires des droits, de licences et des autorisations pour l'exploitation des
oeuvres , percevoir auprès des utilisateurs de ces oeuvres des
redevances et les répartir entre auteurs.
Nous remarquons que bien que l'article 1 de ce
décret-loi lui confère la défense et des
intérêts matériels et des intérêts moraux,
l'office a plus, selon le texte, la tâche dans la seule dimension
patrimoniale.
Les auteurs sont alors fondés de céder à
l'OBDA la défense de leur droit moral en lui confiant la tâche
d'exécuteur testamentaire121. L'OBDA, dans ses actions, doit
militer à ce qu'il n'y ait pas d'atteinte aux droits moraux des auteurs
décédés.
120 H. DESBOIS, Op. cit, p.574
121 En vertu de l'article 1 du
décret-loi n°100/237 du 7 septembre 2011 portant création de
l'office burundais du droit d'auteur et des droits voisins
121 H.DESBOIS, Op. cit, p.563
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