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Formation en informatique. Ouverture sociale et sexisme. Le cas Epitech.

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par Clémentine Pirlot
Université Paris VII Diderot - Master II Sociologie et Anthropologie option genre et developpement 2013
  

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5. Catégorisation racisante

Mes recherches et entretiens ne recherchaient pas de catégorisation racisante, aucune question n'était donc posée à ce sujet, cependant, quelques exemples montrent qu'une exclusion et des discriminations racisantes existent à Epitech.

Voici l'extrait d'un email d'un des directeurs de l'école (envoyé à tous les élèves) posté sur le forum interne, dans la section « délation » :

« Certains étudiants sont confrontés à du racisme gratuit de la part d'autres étudiants.

C'est inadmissible et ce comportement va à l'encontre des vos responsabilités et carrières futures. » Un élève de couleur répond et confirme les accusations : « True story ! »

Dans l'email original, la dénonciation de cas de racisme est faite entre une annonce générale et un paragraphe sur des élèves se plaignant de bruit, ce qui semble indiquer le sérieux avec lequel l'administration prend la chose. Les élèves ne semblent pas y accorder plus d'importance au vu des nombreuses réponses « humoristiques » comme par exemple un élève qui demande si les personnes discriminées ont demandé des crédits en compensation. Un élève de couleur remarque que l'expression « racisme gratuit » semble indiquer qu'il y aurait un racisme justifié mais il est le seul à prendre la chose au sérieux, dans les autres messages on retrouve le fameux « second degré » censé justifier les pires propos (comme par exemple « Jle ferais bien [du

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racisme payant], mais les juifs ne se sentiraient pas concernés et faut être impartial avec les sous races autres

gens »).

On peut trouver un autre exemple de catégorisation racisante sur le forum (dans la rubrique « général » cette fois): un élève rapporte sur le forum interne s'être fait agressé par des « racailles » qui voulaient lui voler son ordinateur. Un autre répond:

« Si on passe pour les victimes du sud de Paris (parce que c'est bien ce qu'ils doivent se dire entre eux hein) c'est vraiment pas à cause du manque de flics... C'est juste parce que petit a petit, tout ensemble, on accepte le fait d'être soumis à la populasse locale. Donc quitte à ne pas avoir les noms des rebeus, donne au moins ceux des témoins n'ayant pas bougé ! (mes italiques) »

Epitech n'est pas située vraiment dans Paris, mais à cheval entre Paris et le Kremlin Bicêtre, banlieue toute proche dont la population au XXème siècle était principalement composée d'ouvrier.e.s vivant d'abord dans un habitat très précaire jusqu'à la construction de logements sociaux dans les années 1920. Aujourd'hui, la majorité de la population est toujours modeste, la population de cadres du Kremlin Bicêtre en 2009 n'était que de 16,9%, la majorité étant des employé.e.s (21,6%) et des personnes sans activité professionnelle (18,6) (source Insee). Si l'on passe de « racaille » à « rebeu » dans le discours de certains élèves, c'est par la catégorisation et les stéréotypes partagés qui assimilent la population locale à des hommes maghrébins délinquants. Un raccourci qui permet de recourir à des catégories partagées, et qui n'est pas remis en question par les autres élèves.

Lors des entretiens, très peu de personnes ont parlé de catégorisation raciale, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de racisme à Epitech, comme nous l'avons vu plus haut il existe bien. Guillaume montre une croyance à la catégorie « asiatiques » et au stéréotype des asiatiques comme meilleurs en informatique : « on a un regard sur les Asiatiques qui dit qu'ils sont toujours capables de trucs énormes que c'est des débugueurs et dans notre groupe il y en a un qui est asiat il représente un peu ça dans le groupe pas niveau technique mais niveau débugue. » Le seul qui présente une catégorisation plus poussée serait Matthieu, qui a grandit dans le 93 et qui rejette toute existence de rapports sociaux, pour n'analyser les choses qu'individuellement :

« en fait quand tu me parles d'origine sociale j'ai une idée en tête c'est les ethnies, les gens qui vivent dans les banlieues plutôt racailles comparés aux gens qui vivent dans des endroits respectables. L'origine sociale n'est pas pour grand-chose mais c'est la mentalité de la personne. Je sais que la mentalité de la personne se fait par rapport à son environnement mais bon t'es le maître de ton monde, de cette partie-là en fait. C'est nous qui supervisons la construction de notre mentalité à mon avis. Même s'il avait un environnement dur s'il en est arrivé à avoir une mentalité de racaille c'est parce qu'il est faible moi par exemple je suis dans le 93 et c'est pas pour ça que je suis arrivé à Epitech en ayant un mental de faible qui travaille pas. »

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L'utilisation de l'expression « endroit respectable » semble suggérer que d'autres endroits ne méritent pas de respect, et par extension les personnes qui y vivent, sauf, d'après sa logique, si ces personnes opèrent une mobilité sociale comme lui qui grâce à Epitech sera cadre.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon