4) LA RECIPROCITE DANS L'ACCOMPAGNEMENT
Je me suis appuyée sur le livre de Norbert Alter «
donner et prendre » (1) pour comprendre la réciprocité dans
l'accompagnement au sein de l'entreprise.
Norbert Alter ne travaille pas dans le cadre du coaching, il
est un spécialiste de l'innovation et du changement en entreprise.
Il nous explique se fonder sur les perspectives
développées par les anthropologues à propos des dons et
contres dons des sociétés dites « primitives » ; il les
a superposé avec le monde des entreprises d'aujourd'hui et a pris compte
des similitudes. Il a également pris en compte les analyse de Marcel
Mauss (né le 10 mai 1872 à Épinal et mort le 1er
février 1950 (à 77 ans) à Paris), ethnologue, et
généralement considéré comme le « père
de l'anthropologie française » et Bronisaw Kasper Malinowski (Clan
Jastrzebiec, né le 7 avril 1884 à Cracovie, et mort le 14 mai
1942 à New Haven), anthropologue, ethnologue et sociologue polonais dont
les propos lui ont semblé précieux et plus précis sur ce
sujet.
A. LA COOPÉRATION
Dans un premier temps, Norbert Alter met en avant la notion de
coopération: coopérer c'est donner: « Donner quelque
chose de précieux à quelqu'un permet de sceller une relation dans
un endettement mutuel » (page 11).
Il explique que cet endettement permet l'échange social
qui permet de créer des alliances et donc de la coopération.
Dans la relation de coopération s'installe alors le
don, le contre don et le « rendre » (la gratitude). Cette gratitude
assure la durée et la stabilité des échanges.
La répétition des échanges rend complices
et la complicité permet la pérennité des
échanges.
Norbert Alter nous précise alors que le don est un
cadeau (donc non obligatoire), le contre don est une reconnaissance de ce don
et le « rendre » est la gratitude d'avoir été
reconnue.
Concrètement Norbert Albert développe comment
cela se passe dans le monde de l'entreprise. Chaque collaborateur fait des dons
à l'entreprise, ce qui n'est pas « compris dans la fiche de poste
», ce que l'on appelle le « travail invisible ».
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Il donne comme exemple que la procédure n'est pas
suffisante pour la finalité du travail. S'il y a un problème sur
une machine, le collaborateur a le choix de suivre la procédure et le
temps que cela prend (appeler la maintenance, remplir la fiche d'intervention,
etc) ou de faire appel a un collaborateur plus expérimenté qui va
prendre de son temps de travail pour réparer la machine. Ce
collaborateur va alors faire un don. Le problème va se régler
plus vite et à ce moment là cela va créer un endettement
de la part du demandeur qui, au moment ou ce sera utile, viendra
également en aide à celui qui l'a aidé (le contre don), ce
dernier en sera reconnaissant et se sentira reconnu et viendra à nouveau
l'aider (le rendre, la gratitude). La coopération s'est mise en place.
L'entreprise y gagnera en temps et en argent.
Seulement l'entreprise ne reconnaît pas ce don que font
les salariés. Si le collaborateur dit qu'il a du finir tard car il a
aidé son collègue, on lui répondra qu'il y avait une
procédure à suivre. L'entreprise ne reconnaitra pas que cela a
permis un gain de temps et un gain de production.
Effectivement cela fait écho à une
expérience personnelle lorsque j'étais secrétaire
salariée dans une maison de retraite. Il n'existait aucune
procédure et pour pallier certains conflits entre des membres du
personnel, le directeur a décidé d'écrire une
procédure pour chaque résident et a bien insisté
auprès des salariés sur l'obligation de suivre ces
procédures à la lettre (qui fait quoi, comment et avec qui). La
procédure du « coucher des résidents » avait
été oublié pour un résident: ce dernier a donc
passé la nuit dans la salle à manger. Il n'était pas
mentionné dans la procédure du « coucher des
résidents » et le personnel suivant la procédure à la
lettre... en a perdu son autonomie de réflexion et de jugement.
Il a été reproché au personnel une faute
professionnelle avec sanction.
A ce moment là, l'entreprise ne reconnaissant pas le
don ne s'est pas remise en question. La mise en place de procédures trop
rigides a entrainé la fin de la coopération.
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