2.4.2.2 Les
défis relevés
Dans leur étude, Fleury, Sedikides et Lunsford (2001)
mentionnent la stratégie de« se tester » et de défier
ses propres « barrières personnelles ». Les défis sont
soit de nature physique comme la faiblesse, soit de nature
psycho-émotionnelle comme le mal-être, la peur surtout d'une
rechute, l'incertitude reliée au statut physique et aux résultats
de la thérapie (Bergman & Berterô, 2001; Fleury, Sedikides,
& Lunsford, 2001). Des défis d'ordre socio-relationnel comme le
changement de l'image de soi, de mode de vie, des valeurs et des rôles
peuvent aussi se présenter. La reprise des responsabilités et de
l'activité professionnelle est également exprimée comme
étant un défi (Fleury, Sedikides, & Lunsford, 2001).
2.4.2.3 Les
stratégies déployées
Plusieurs chercheurs ont étudié les
étapes du processus de rétablissement décrites comme une
suite de stratégies personnelles déployées pour faire face
à l'épilepsie, tout en mobilisant des ressources et en faisant
émerger des résultats ou des compétences
développées en rapport avec des apprentissages acquis.
Une étude qualitative, ayant comme objectif la
compréhension du rôle de la personne dans son processus de
rétablissement, a été menée par des chercheuses
américaines, Fleury, Sedikides et Lunsford (2001), auprès de 13
femmes, et ce, en moyenne huit mois après l'événement
épileptique. Les résultats démontrent que le processus de
rétablissement psychosocial après une crise d'épilepsie
inclut dans sa structure la recherche de sens, la « création de la
maîtrise » de la situation et l'acceptation de soi. Les
thèmes centraux qui émergent de cette recherche sont la connexion
avec les personnes significatives, une amélioration des facteurs
émotionnels et un changement des comportements en vue de réduire
le risque lié aux crises (Fleury, Sedikides, & Lunsford, 2001).
Ainsi, la recherche de sens permet à ces femmes une structuration des
nouveaux défis, une réflexion sur le caractère
éphémère de la vie, une exploration des solutions de
rechange, un réexamen des buts personnels pertinents et une prise de
conscience de sa propre détermination et de ses forces
intérieures. Selon les participantes, « la création de la
maîtrise » de la situation signifie la découverte de
nouvelles sources de capacités physiques et émotionnelles, la
concentration sur son propre potentiel, les efforts déployés pour
augmenter ses activités physiques, la revalorisation de ses rôles
sociaux, la création et la motivation pour instaurer et maintenir un
changement de comportements de santé. Ces femmes apprennent à
faire confiance à leurs propres capacités, ont des attentes plus
réalistes et adoptent une nouvelle définition de leur propre
utilité et beauté (Fleury, Sedikides, & Lunsford, 2001).
Par ailleurs, l'étude qualitative de Fleury, Kimbrell
et Kruszewski (1995), menée
auprès de 30 participantes, mentionne aussi le
patterning balance comme modèle de croissance à travers
les défis et l'incertitude reliés à
l'événement épileptique. Les auteurs évoquent ce
modèle comme étant la création de nouveaux défis
par la reformulation des buts personnels; la commémoration des
possibilités avec une ouverture d'esprit vis-à-vis des
différents choix disponibles; l'acceptation de soi qui se reflète
par l'auto respect, la confiance et le « prendre soin » de soi;
enfin, « l'autonomisation des autres » incluant l'investissement
émotionnel, et ce, en partageant l'expérience et en guidant les
autres malades dans le processus de guérison (Fleury, Kimbrell, &
Kruszewski, 1995).
Les résultats de l'étude de Bergman et
Berterô (2003) vont dans le même sens que les études
précédentes. En effet, cette étude qualitative
réalisée auprès de six femmes et de sept hommes
suédois qui avaient subi une crise épileptique depuis moins de
douze mois, fait ressortir à la fois les stratégies «
motivatrices » pour faire face à cette expérience et les
compétences développées. Parmi les stratégies et
les compétences les plus utiles, l'étude présente le fait
de prendre conscience de la fragilité de la vie. Les participants ont
procédé à une recherche d'informations afin de mieux
comprendre les causes et les conséquences de la maladie. De plus, cette
stratégie visait la recherche de moyens pour trouver des façons
plus saines de prendre sa vie en mains. Dans cette étude, la prise de
conscience de sa propre responsabilité envers sa santé et la
participation active à la prise de décision sont
énoncées comme étant des nouvelles compétences
personnelles développées. Elles sont qualifiées de«
vitales », surtout quand elles sont associées à une
disponibilité discrète de la part des membres de la famille, pour
assurer au besoin présence et aide (Bergman & Berterô,
2003).
L'étude qualitative de Condon et McCarthy (2006),
menée en Irlande auprès de dix participants six semaines
après leur sortie de l'hôpital, met en évidence une
motivation et une détermination à effectuer des changements dans
leur mode de vie, surtout en début de rétablissement, l'objectif
étant le retour à une vie sociale normale (Condon & McCarthy,
2006). Cependant, la tâche semble plus ardue que prévue (Condon
& McCarthy, 2006). En effet, le changement dans les comportements de
santé est en relation avec la perception de la personne quant aux causes
de la maladie, le plus souvent imputées à un stress causé
surtout par une surcharge de travail et de responsabilités (Condon &
McCarthy, 2006; Jensen &Petersson, 2002). Toutefois Jensen et Petersson
(2002) soutiennent que la personne construit sa propre opinion concernant les
habitudes de vie après avoir reçu des avis médicaux.
Les solutions de rechange à l'ancien mode de vie qui
sont adoptées et qui sont les plus souvent mentionnées dans les
écrits sont de diminuer le travail, de trouver l'occasion et
l'énergie de pratiquer un passe-temps favori jusqu'à
présent négligé, de partager du temps avec la famille et
les amis juste pour le plaisir (Bergman & Berterô, 2003) et de
pratiquer des activités de groupe comme l'entraînement physique,
la danse, le vélo et la marche (Bergman &Berterô, 2003;
Buselli & Stuart, 1999). Une autre stratégie citée est
d'adopter une diète plus saine (Bergman &Berterô, 2003). De
même, l'autosuggestion pour se libérer des mauvaises habitudes
comme le tabagisme constitue une stratégie de choix (Bergman
&Berterô, 2003; Condon & McCarthy, 2006). Il est à noter
que les changements dans les habitudes de vie peuvent affecter la vie sociale
(Condon & McCarthy, 2006) et entraîner un changement dans le mode de
vie de toute la famille, d'où l'importance de considérer l'impact
du réseau et du soutien familial et social.
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