Les critères du procès administratif equitable en droit positif camerounais( Télécharger le fichier original )par Jean Duclos Ngon a moulong Universités de Yaoundé 2 soa - Master 2 2012 |
a- Les problèmes juridiques et matériels.L'autorité de chose jugée d'une décision juridictionnellerevêt une valeur presque législative631(*). Elle doit donc recevoir exécution. Mais les difficultés surviennent généralement lorsqu' il s'agit d'une décision de justice prononçant une annulation contentieuse donc l'exécution passe par des formalités administratives particulières. La reconstitution de carrière est souvent alors dans ce cas un exemple type. En effet, l'acte administratif annulé est censé n'être jamais intervenu. De ce fait, l'administration a comme une obligation de remettre les choses en état et cela de façon rétroactive. C'est le cas précisément, lorsqu'il s'agit d'un agent public illégalement sanctionné, celui-ci doit être réintégré dans le poste même d'où il avait été évincé ;sa carrière administrative doit être reconstituée de manière qu'il puisse se retrouver dans la situation qui aurait été la sienne au moment de l'annulation s'il n'avait été l'objet de cette sanction. Le Conseil d'Etat français avait déjà relevé cette complexité dans un rapport relatif à l'exécution des décisions des juridictions administratives632(*). De même Les jurisprudences administrativescamerounaises sont constantes sur la question633(*). Par ailleurs, un autre problème à l'exécution des décisions de justice par l'administration peut résulter parfois aux montants excessifs des réparations. Ainsi, devant une insuffisance ou la non inscription de crédits budgétaires devant couvrir de tels préjudices, les condamnations pécuniaires prononcées par le juge administratif conservent un caractère purement platonique et fictif634(*). Àce propos, la cour européenne des droits de l'homme a souligné dans l'affaire Burdov c. Russie, qui concernait l'absence d'exécution d'un jugement ordonnant le versement d'une indemnisation au requérant en réparation de son exposition à des émissions radioactives que, les difficultés financières auxquelles un Etat était confronté ne sauraient justifier le non-acquittement par ce dernier d'une dette résultant d'une décision de justice635(*). b- L'inertie de l'administrationLe principe veut que, lorsque l'administration a reçu notification d'un jugement rendu à son encontre, elle doit s'exécuter dans un délai raisonnable, ce qui est rarement le cas. En effet, dans la pratique, le retard dans l'exécution constitue l'abus le plus fréquent commis par la personne publique. C'est généralement le cas dans les procédures d'exécution des décisions de justice qui impliquent l'intervention du ministère des finances auquel aboutit toutes les décisions d'annulation ou de réparation à incidence pécuniaire. À ce propos, il convient de préciser que, les décisions de justice administrative doivent transiter, pour agrément, par l'autorité habilitée à recevoir les recours gracieux préalables. De même, l'inexécution peut résulter quelques fois de la complexité de la sentence prononcée par le juge. Dans ce cas, « il se contente de constater la responsabilité de l'administration et puis s'en rapporte à celle-ci pour fixer le montant dû, ce qui « déjudiciairise » en quelque sorte la procédure quitte au plaignant de ressaisir le juge en cas de mécontentement »636(*). Dans le cas d'une annulation de la radiation d'un fonctionnaire, le ministère de la fonction publique prend à nouveau un arrêté portant réintégration de l'intéressé à son ancien cadre637(*). Le ministère de l'administration territoriale sert de boite à lettres entre le ministère des finances et le palais de justice. Ce « long marathon judiciaire »638(*)est illustré dans l'affaire Baba Youssoufa c/Etat du Cameroun ou, Etat Fédéré c/ Baba youssoufa. * 631 Son rattachement au bloc de légalité, se manifeste, lorsque l'administration active refuse de se conformer à une décision de la juridiction administrative, le juge administratif, saisi de nouveau, la sanctionnera pour illégalité, par une assimilation de la violation de la chose jugée à la violation de la loi. * 632« Les difficultés, se présentent surtout dans le domaine des conséquences des annulations pour excès de pouvoir et du contentieux de la fonction publique, en raison de la complexité des affaires en cause et alors mêmeque l'administration est disposée à exécuter ».Voir Rapport du CE sur l'exécution des décisions des juridictions administratives, RFDA 1990, juillet -août, 4-6, p.489. * 633Jugements n°11/CS/CA du 19 décembre 1975 SAMBA EBEDE Théodore ; Jugement n°27/CS/CA du 29 janvier 1976 DIWOUTHA Loth Martin ; Jugement n°36/CS/CA du 26 mai TEUGUIA Gabriel. Cité par NGOLE NGWESE (P) et BINYOUM (J), Eléments de Contentieux administratif camerounais, Paris, L'Harmattan, 2010, p.105. * 634Ibid. * 635 Burdov c. Russie, 7 mai 2002, paragraphe 35, la non-exécution d'une décision définitive peut également relever de l'article 1 du protocole n°1, puisqu'une dette résultant d'une décision de justice est considérée comme un bien au sens de ce même article * 636NGWA NFOBIN (E), « Le problème d'inexécution des décisions du juge administratif au Cameroun », Revue Africaine des Sciences Juridiques n°2011, FSJP, Université de Yaoundé, p.311. * 637 CFJ/ Tsala Mekongo Germain contre Etat du Cameroun. * 638 Voir OWONA (J), le Contentieux Administratif de la République du Cameroun, op.cit., p.131. |
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