1.2 Les écrits à caractère
militaire
La chasse civile et militaire constitue une occasion pour les
militaires occidentaux de peindre leurs aventures par le biais de la fiction.
L'écriture devient pour ces derniers une sorte d'exutoire, de
distraction pendant les factions. La narration des histoires de guerres et de
protection des populations constitue un très bon ensemble
d'écriture de l'espionnage et de la chasse civile ou
guerrière.
72
La faune par sa diversité intéresse les
européens sur le sol africain, qu'ils soient militaires ou civils
d'autant plus que la protection des animaux n'est pas l'affaire d'État
sous ce soleil en période coloniale. Le roman de Nimir de Louis
Courtek (Paris, Dauphin, 1951), Mirages au Tchad de Germain Chambost
(Paris, Jean Picollec, 1991), Rush sur Faya de Baudouin Chailley
(Paris, Fleuve-Noir, Espionnage, 1990) et La Citadelle du désert
de Jean Bourdier (Paris, Presses de la cité, 1986) illustrent cet
état de chose.
Louis Courtek est un colonel qui a la chance de
découvrir l'Afrique dans ce qu'elle a de plus grandiose et de plus
captivant, la brousse et parmi toutes les brousses l'une des plus sympathiques
: celle du Tchad. Le roman de Nimir : panthère du Tchad
rapporte ses observations, ses aventures. L'auteur signale que cela s'est
passé à l'époque où les allemands firent leur
passage. Mais laisse-t-il de côté la guerre : « J'ai
estimé cependant que les choses de la nature étaient trop belles,
trop pures pour y mêler l'histoire de la folie des hommes. Que le lecteur
ne s'étonne pas si je n'ai pratiquement pas parlé de la guerre :
c'est un oubli volontaire » (Courtek, 1951 :10). Tout au long du
livre, girafes, gazelle, dama, antilopes, panthères, oryx,
phacochères côtoient les villageois, les distraient, les animent,
les surprennent, les écoeurent, mais l'image de la panthère reste
fascinante, amicale et nostalgique aux yeux de l'écrivain vu le titre et
le contenu de l'oeuvre. Le roman se ferme sur un adieu à Nimir
(Panthère en arabe) : « Pressons-nous! Ces moments-là,
comme tous les moments d'adieux doivent être écourtés le
plus possible [...] Adieu Nimir, à jamais ! » (Courtek, 1951 :
170-171)
A côté de cette description civile, Chambost,
Bourdier et Baudouin adjoignent un objectif militaire.
Germain Chambost est un ancien pilote militaire, grand
reporter au Sud-ouest et président de l'association des
journalistes de l'aéronautique et de l'espace. Étant membre de
l'académie nationale de l'air et de l'espace, il écrit
Mirages au Tchad. Il s'agit de quatre pilotes qui font la guerre au
Tchad, montant des factions avec pour mission : empêcher l'invasion
libyenne au Tchad. Ils attendent l'adversaire tout en obéissant aux
ordres militaires et politiques. Sous ce lainage militaire, l'auteur ne laisse
pas de côté les jeux de l'amour, les états d'âmes et
les sentiments des pilotes. Ces éléments « donnent envie
à l'homme blanc de quitter ses oripeaux de civilisé »
(Chambost, 1991 : 10). Le texte se ferme sur une déception
française lors d'une fête. À cause d'Isabelle, la
dulcinée de Laurent, l'un des pilotes, le Général
président vocifère : « ce soi, nous, nous réglons
nos affaires d'hommes à l'homme»
73
(Chambost, 1991 : 190). Est-ce cela qui est à l'origine
du départ annoncé de l'armée française dans le
texte ? Rien ne le dit. Mais, cela a inspiré Chambost pour
l'écriture du roman.
Jean Bourdier est journaliste écrivain, auteur de
plusieurs autres ouvrages d'histoires militaires contemporaines. Dans La
citadelle du désert, il est question de la pacification du
territoire militaire du Tchad après sa conquête en 1906. Si Samory
et Rabah ont été vaincus, d'autres conquérants peuvent se
préparer pour la relève. Le personnage de Laurent Boutier en est
convaincu. Cette folle aventure qu'il engage au nom de l'honneur, en allant
monter faction dans une citadelle à Bouaké au Borkou, au Nord du
Tchad manquera de lui coûter sa carrière, sa vie, mais lui fera
aussi connaître des amours inattendues.
Dans cet élan réaliste, Baudouin Chailley
écrit un roman d'espionnage : Rush sur Faya. Ce texte secret
présente des faits réels qui se déroulent en 1988 au
Tchad, lit-on à la quatrième de couverture. Après Faya
Largeau, les forces libyennes ont perdu un matériel considérable
et plusieurs « conseillers » soviétiques se trouvent en
fastidieuses postures. Montclar, agent du Service « Action »
réussira-t-il à exfiltrer un de ces « conseillers »
avant qu'il ne soit capturé par les forces tchadiennes ? Telle est la
question qui trouve sa réponse dans le roman.
Les multiples guerres ont poussé les auteurs tchadiens
à maîtriser ce langage militaire pour décrire les
événements. Nimrod, Moustapha, N'Djékéry et A.
Haggar se sont spécifiés en cela dans leurs oeuvres romanesques.
La chasse a également fait l'objet d'un traitement chez ceux-ci. J. B.
Seid, enfin a préféré des personnages animaliers pour
critiquer les moeurs.
|