2.3 LA PROFESSION ENSEIGNANTE
2.3.1 Profil de carrière
chez les enseignants
Les caractéristiques personnelles des enseignants
déterminent de façon fondamentale les relations sociales, les
activités et les finalités de l'école. Comment sont
choisis les enseignants ? Comment sont-ils formés ? Nous
allons ici rappeler certains aspects des origines et de la personnalité
des enseignants, et des effets de la formation professionnelle sur leur
technique, leur capacité et leur attitude.
Les enseignants subissent généralement deux
formes d'influence (MORRISON, 1975 :34).
-le processus de sélection qui implique à la
fois la décision de l'individu de devenir enseignant et les moyens
institutionnels qui leur permettent d'accéder à la formation
professionnelle et plus tard de considérer qu'il a satisfait aux
exigences de cette formation.
-Les effets que produisent chez les élèves
enseignants, un enseignement prolongé et une formation professionnelle
spécialisée.
Dans les sociétés occidentales, la profession
d'enseignant est très sélective. En Angleterre par exemple,
l'accès à cette formation exige un niveau culturel minimum, ce
qui revient à dire que la grande majorité des enseignants passe
par le filtre d'une éducation secondaire sélective.
Au début du siècle, l'enseignement
représentait la profession « bourgeoise » la plus
accessible aux enfants doués issus de familles ouvrières
favorisant ainsi de façon non négligeable la mobilité
sociale. FLOUD et SCOTT que cite
MORRISON (1975) estiment qu'en 1920, 68.7% des enfants de la
classe ouvrière qui allaient à l'école jusqu'à
l'âge de 17 ans continuaient leurs études avec l'intention de
devenir enseignant. C'est suite à ces principes du métier que
l'enseigne construit progressivement son identité professionnelle qui
est une identité sociale caractérisée par l'articulation
entre deux transactions, l'une interne à l'individu, l'identité
pour soi, l'autre externe, l'identité pour autrui. Selon DUBAR
(1996), l'identité pour soi, relevant du processus
biographique, est une transaction «subjective» entre
l'identité héritée et celle qui est visée, et que
la personne revendique comme sienne. L'identité pour autrui, relevant du
processus relationnel, est une transaction «objective» entre les
identités attribuées par autrui et les identités
incorporées. L'identité sociale est composée des deux
identités. Pour qu'un individu la reconnaisse comme sienne,
l'identité professionnelle doit être intégrée
à l'identité qu'on peut appeler globale de la personne
(GOHIER, 1997 b, 1998). L'identité professionnelle de
l'enseignant est une identité négociée en fonction des
contraintes de l'environnement professionnel et des intérêts de la
personne. Celle-ci essaie de faire face à ces contraintes en utilisant
diverses stratégies, qui vont de leur refus à leur
intériorisation totale, mais résultent souvent en un
«compromis stratégique» impliquant un mélange
d'ajustement intériorisé et de redéfinition
stratégique qui permet au sujet d'atteindre ses buts partiellement
redéfinis (SIKES, MEASOR ET WOODS, 1985, p. 236). Il
s'agit là de la dimension interactionniste de l'approche identitaire
professionnelle. TAP (1996) cité par
GOHIER et all (ibid.) identifient six caractéristique
dans la construction et la dynamique de l'identité :
v la continuité,
v la cohérence du moi,
v l'unicité (singularité),
v la diversité (plusieurs personnes dans une même
personne),
v l'action
v la réalisation de soi.
Le processus de constitution et de transformation de
l'identité professionnelle de l'enseignant apparaît comme un
processus dynamique et interactif de construction d'une représentation
de soi en tant qu'enseignant, mû par des phases de remise en question,
générées par des situations de conflit (internes ou
externes à l'individu) et sous-tendu par les processus d'identisation et
d'identification.
Nous allons aussi aborder la construction identitaire de
l'enseignant dans notre étude en termes de la
« prise », l' « emprise » et la
« déprise ».
La prise ici renvoie à tout ce qui donne l'envie de
travailler chez l'enseignant, dans ce cas l'enseignant a la maîtrise des
situations. On dit «avoir prise» sur une situation. C'est dans ces
occasions que le plaisir au travail est le plus fort. Le cours se passe
normalement « comme il faut », les élèves
progressent, l'enseignant a la capacité de décision
d'organisation. La prise sur les situations correspond à des moments
forts qui sont plutôt du coté du plaisir et de la motivation au
travail.
L'emprise quant- à elle fait face lorsque l'engagement
exigé dans le travail est très important sans qu'il ait pour
autant un sentiment de maîtrise sur la situation. C'est plutôt le
sentiment d'être écrasé par le poids du travail, qui domine
et peut conduire à un certain désengagement. Par ailleurs dans
les conditions pragmatiques de l'enseignement il est difficile de se
désengager totalement.
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