A - Le constat d'un faible impact sur les prix et sur
l'emploi
Si la baisse de la TVA dans la restauration se
révèle inefficace, c'est d'abord en raison des comportements de
marge des entreprises opérant dans ce secteur, et qui rendent difficile
la baisse escomptée des prix (1). Mais c'est aussi parce que cette
mesure n'est pas la plus indiquée pour améliorer l'emploi dans ce
secteur (2).
1) Une baisse des prix rendue difficile par le
comportement de marge des entreprises
Les baisses ciblées de TVA visent à stimuler
l'emploi par le canal de la demande. Ils sont en principe d'autant plus
efficaces que la baisse des coûts se répercute dans les prix de
vente. Or, il arrive souvent qu'une partie du coüt soit accaparée
par le comportement de marge des entreprises, limitant ainsi
l'efficacité de la mesure par rapport à l'objectif de baisse des
prix. Le CPO juge ainsi que, parmi les secteurs bénéficiant de
taux réduits de TVA, le comportement de marge des entreprises est
très élevé pour les hôtels-cafés-restaurants
(HCR) et faible en matière de construction de logements194.
Ainsi s'explique-t-il qu'aucune baisse sensible des prix pratiqués n'ait
été enregistrée dans le domaine de la restauration depuis
l'adoption du taux réduit, pas plus d'ailleurs qu'une évolution
de l'emploi dans le secteur.
2) Un impact peu significatif sur l'emploi pour un
coût élevé
Toujours d'après le CPO dans son rapport 2010, l'impact
des baisses ciblées de TVA sur l'emploi est moindre que celui des
allègements généraux de charges, pour un méme
coüt. A titre d'illustration, l'emploi marchand non agricole
s'accroîtrait de 1,7 % pour les allègements généraux
de charges contre 0,8 % pour une baisse de TVA. De plus, le coût brut par
emploi créé ou sauvegardé suite à une baisse de la
TVA serait au moins trois à quatre fois plus élevé que
pour les allègements généraux de charges et serait compris
entre 80 000 et 135 000 euros par emploi.
Par ailleurs, l'impact d'une baisse de TVA varierait selon les
domaines auxquels elle s'applique. Ainsi, alors qu'un taux réduit de TVA
dans l'entretien et l'amélioration du logement créerait un nombre
d'emplois compris entre 30 000 à 50 000 emplois, l'impact potentiel d'un
taux réduit de TVA sur la restauration pourrait être compris entre
10 000 et 50 000 emplois créés, selon l'estimation de la
direction de la prévision en 2003195. Au regard de
194 Synthèse du Rapport 2010 du CPO, Entreprises et
niches fiscales et sociales, op. cit. p. 20.
195 Ibidem. Il s'agit bien évidemment ici d'une
évaluation ex ante. Le CPO reconnaît qu'ex post, l'impact de
la baisse ciblée de la TVA sur la restauration demeure incertain.
Compte tenu de ces effets limités et incertains sur
cet impact limité et incertain sur les prix et l'emploi,
une réorientation de la mesure s'avère nécessaire.
B - La nécessaire réorientation de la
mesure vers plus d'efficacité ou moins de coût
Les effets sur l'emploi de la baisse de la TVA étant
plus incertains que ceux constatés dans le secteur du logement, et la
part du coût de la mesure accaparée par le comportement de marge
des entreprises se révélant beaucoup plus importante que dans les
autres secteurs, deux solutions alternatives pourraient être
envisagées.
La première est une solution d'efficacité ; elle
consisterait, sur le fondement de l'analyse du CPO qui précède,
à supprimer le taux réduit de TVA dans la restauration pour le
remplacer par de simples allègements généraux de charges
en faveur des restaurateurs. Les effets, notamment en termes d'accroissement de
l'emploi dans le secteur, seraient sans doute plus perceptibles.
La deuxième solution va dans le sens de la limitation
du coüt d'une mesure aux effets incertains. Il s'agirait d'exploiter la
possibilité, offerte par le droit communautaire, d'appliquer deux taux
réduits de TVA, en instituant un taux intermédiaire. Ce dernier
s'appliquerait à certains biens et services, notamment ceux de la
restauration, actuellement soumis au taux réduit de 5,5 %. Le CPO estime
que pour une réduction significative du coût de la baisse de la
TVA dans la restauration, le nouveau taux ne devrait pas être
inférieur à 10 ou 12 %196.
Comme celles de sédentarisation des grosses fortunes,
les solutions fiscales françaises de soutien à la consommation et
à l'emploi sont donc à la fois non pertinentes et inefficaces. Il
en est de même des mesures fiscales camerounaises de soutien à la
consommation et au financement long de l'économie. Les unes et les
autres pourraient, en cela, être remaniées tel que
déjà proposé.
Au total, au Cameroun comme en France, certaines des mesures
fiscales adoptées depuis 2007 par le législateur sont, soit
pertinentes dans leur principe mais mitigées dans leurs résultat,
soit carrément non pertinentes pour une inefficacité alors
clairement avérée. Dans le premier cas, se trouvent les mesures
fiscales de soutien à l'investissement, à la recherche et au
travail. Il en
l'emploi par rapport aux allègements
généraux de charges sur les bas salaires, il considère que
les baisses ciblées de TVA ne peuvent être, au plus, que des
mesures additionnelles en matière d'emploi.
196 Ibidem, p. 21.
est ainsi, pour le cas du Cameroun, du régime du
réinvestissement et du régime fiscal particulier des projets
structurants. Il en est de même, en France, du renforcement du
crédit d'impôt recherche et de la défiscalisation des
heures supplémentaires.
Dans le deuxième cas, sont essentiellement
concernées les mesures de soutien au financement de l'économie,
à la consommation et à l'emploi, ainsi que celles relatives
à l'imposition de la fortune et des revenus. Il s'agit, pour le
Cameroun, de la mise en place d'un régime fiscal du secteur boursier, de
l'allègement de la fiscalité applicable au secteur bois, de la
baisse de la fiscalité sur les produits de première
nécessité. Il s'agit aussi, en France, de la baisse de la TVA
dans la restauration, mais aussi du renforcement du bouclier fiscal.
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