SECTION II. DES SOURCES DU DROIT ISSU DE L'OHADA
Les sources formelles sont celles par lesquelles les
normes juridiques tirent leur existence. Celles de l'OHADA sont comprennent,
d'une part, les sources constitutives (Paragraphe 1) et, d'autre part, le droit
derive des Actes uniformes (Paragraphe 2).
PARAGRAPHE I. SOURCES CONSTITUTIVES
Les sources constitutives de l'OHADA sont le Traite et
les Reglement.
A. Le Traité
L'article 2, alinea I, litera A de la Convention de
Vienne sur le droit des Traites definit le Traite comme etant g un accord
international conclu par ecrit entre Etats et regi par le droit international
qu'il soit consigne dans un ecrit unique ou dans deux ou plusieurs instruments
connexes et quelle que soit sa denomination particuliere N.
Le Traite est destine a produire les effets de droit.
Ce faisant, les Etats ne sont tenus par un Traite que lorsque ceux-ci ont
definitivement exprime leur consentement a etre lies par ses dispositions. Ici,
il s'agit de l'apprehension, au sens strict, de la conclusion d'un
traite.17 Aussi, au sens large, la conclusion d'un traite renvoie a
l'ensemble des phases successives de la procedure des conclusions des traites,
qui constituent les modes d'expressions du consentement a etre lie. Il existe
plusieurs manieres d'exprimer le consentement a etre lie.
- La signature ;
16 Roger MASAMBA MAKELA,
Modalités d'adhésion de la RDC au Traité de
l'OHADA, Volume I, Numéro spécial,
Rapport final de Copirep, Kinshasa, 2005
17Synthèse
des travaux, Harmonisation du droit des
affaires dans la zone Franc, p.25 et S.
- La ratification ;
- L'adhésion ;
- L'acceptation ;
- L'approbation ;
- La notification.
En ce qui concerne l'OHADA, nous examinons successivement
la signature, la ratification et l'adhésion.
a. La signature
C'est le 17 octobre 1993, a Port-Louis que fut
signé le Traité instituant l'OHADA par les quatorze Etats membres
de la zone Franc. Il est a noter que la signature de l'avant-projet de ce
traité élaboré par le Directoire et préalablement
soumis aux ministres des finances et de la justice de la zone Franc constitue
la pierre angulaire de la mise en oeuvre du projet d'harmonisation du droit des
affaires.
b. La ratification
Elle concerne les traités dits en forme
solennelle. Contrairement a l'accord ou traité en forme
simplifiée qui engage l'Etat par la seule signature de son
représentant sans recours a d'autres procédures de droit interne,
le traité en forme solennel exige la signature et la ratification pour
qu'il engage un Etat.18
Dans le cas d'espéce, la ratification du
traité de l'OHADA est régie par l'article 52. En effet, le
traité est soumis a la ratification des Etats conformément a
leurs procédures constitutionnelles. Ici, l'abandon de la
souveraineté législative est au coeur des procédures de
ratification. Cette question n'a nullement été un frein a la
ratification par tous les Etats signataires. Pour preuve, le traité est
entré en vigueur le 18 septembre 1995,
18Jean SALMON, Dictionnaire de droit
international public, PUF, Paris, 2001, P.15
24
soit soixante jours apres le depot des instruments de
ratification19 qui s'effectue aupres du gouvernement du
Senegal20, Etat depositaire du Traite. Au 31 decembre 2000, seize
Etats ont signe et ratifie le Traite de l'OHADA.
Pour la RDC, la loi constitutionnelle revisant la
Constitution du 18 fevrier 2006 prevoit des procedures speciales lui permettent
de ratifier le traite en consentant un abandon de souverainete partiel ou total
en vue de la realisation de l'unite africaine.
Par ailleurs, le Traite de l'OHADA n'admet pas de
reserves21. La reserve est une declaration unilaterale faite par un
Etat laquelle en vue de modifier, pour lui-meme, les effets juridiques de
certaines dispositions d'un traite a l'egard duquel il s'apprete a s'engager
definitivement par la signature, la ratification, l'approbation ou
l'adhesion.22
Selon le paragraphe I, litera B de l'article 2 de la
Convention de Vienne sur le droit des traites, « l'expression reserve
s'entend d'une declaration unilaterale, quelle que soit son libelle ou sa
denomination faite par un Etat quand il signe, ratifie, accepte ou approuve un
traite ou il adhere par laquelle il vise a exclure ou a modifier l'effet
juridique de certaines dispositions du traite dans leur application a cet Etat
D.23
Par rapport a un engagement international, les
reserves peuvent etre prevues, tout comme elles peuvent ne pas l'9tre, ce qui
revient a dire qu'elles sont admissibles ou non admissibles, tout comme, enfin,
un engagement international peut prevoir rien que les reserves expressement
indiquees, precisees. Mais, on peut se trouver devant une situation non
prevue.
Quels sont les effets des reserves ?
Une reserve est porteuse d'un effet positif pour son
auteur d'autant plus qu'elle lui permet de retailler a sa mesure certaines
dispositions du
19 Article 52 du Traité de
l'OHADA du 17 octobre 1993
20 Article 57,idem
21 Article 54, idem
22 Pierre Marie DUPUY, Droit
international public, Précis Dalloz, Paris, pp.
253-259
23 Article 2.1.b de la Convention de
Vienne sur le droit des traitésdu 23 MAI
1969,
traite avant d'y adherer ; en me-me temps, elle permet
l'extension de ce texte aux Etats qui refuseraient d'e-tre lies par lui. Mais
cela n'est pas toujours sans poser problemes car a trop admettre des
derogations singulieres, on en vient a ruiner l'integrite du texte
conventionnel ; ce qui revient a dire qu'un grand nombre d'engagements des
Etats sont respectes mais au prix d'une denaturation du texte
d'origine.
Sachons, enfin, que c'est pour eviter cette
denaturation que les redacteurs du Traite de l'OHADA ont ecarte toute
reserve.
c. Adhesion au Traits 1. Conditions
d'adhésion
La seule condition fondamentale est la qualite de
membre de l'Organisation de l'Unite Africaine(OUA), devenue l'Union
Africaine(UA). Toutefois, l'article 53 du Traite permet a tout Etat membre de
l'UA non signataire du traite d'y adherer. Aucune condition de fond ou de forme
n'est requise pour une adhesion de ce genre ; ce revient a dire que l'OHADA est
ouverte a tout Etat membre de l'UA.
Aussi, tout autre Etat non membre de l'UA peut devenir
membre de l'OHADA s'il est invite a y adherer de commun accord par tous Etats
Parties24. Cette disposition n'est applicable qu'aux Etats africains
non membres de l'UA. Quid d'un Etat non africain et non membre de l'UA
?
L'article 53 est muet a ce sujet. Nous estimons, pour
notre part, qu'un Etat non africain et non membre de l'Union africaine n'est
pas concerne par le Traite instituant l'OHADA car n'etant pas geographiquement
situe sur le continent africain, de ce fait, il n'existe pas pour lui un droit
inherent a participer a l'OHADA. De plus, le nom me-me de
l'organisation consideree, Organisation pour l'harmonisation en Afrique du
droit des affaires, est tres clair lA- dessus. Seul le continent africain est
concerne.
24 Article 53 du Traité de l'OHADA
du 17 octobre 1993
Encadré n°1 : Articles 53 et 54 du
Traité de l'OHADA
Article 53
Le présent traité est, dès
son entrée envigueur, ouvert a l'adh ésion de tout Etat membre de
l'OUA et non signataire du Traité. )l est également ouvert a
l'adh ésion de tout Etat non membre de l'OUA invité a y adh
érer du commun accord de tous les Etats Parties.
A l'égard de tout Etat adhérent le
présent Traité et les Actes uniforme adoptés avant l'adh
ésion entreront en vigueur soixante jours après la date du d
épot de l'instrument d'adh ésion.
Article 54
Aucune réserve n'est admise au présent
Traité.
25
2. Effets des traités
Ici, de fagon générale, en droit
international, le principe est simple : Pacta sunt servanda, c'est
dire, les traités doivent être respectés de bonne
foi.26 En plus, les dispositions de droit interne ne peuvent pas
empêcher ces effets.27
Notons que l'adhésion au Traité de
l'OHADA a pour conséquence de rendre applicable aux Etats le
traité tel qu'amendé et complété les
Réglements, les Actes uniformes déjà adoptés et
tels que modifiés avant l'adhésion. Le traité de l'OHADA
n'admettant aucune réserve, il s'en suit que les effets sont
immédiats dés l'écoulement du délai de soixante
jours
25Traité de l'OHADA du 17
octobre 1993
26Article 26 de la Convention de Vienne
sur le droit des traités du 23 mai 1969
27Article 27
26
d. Interpretation du traite
1. Ratio legis
L'interpretation joue un role capital dans
l'ensemble du droit international et, principalement, du droit des traites
parce qu'elle conditionne son application dans une large
mesure28. Elle peut avoir pour objet la precision du
sens et de la portee des dispositions du traite ou soit la precision des
notions que visent implicitement ou explicitement ces dispositions. Dans une
autre hypothese, il peut etre question de determiner les actes ou les faits
juridiques qui sont regis soit par le droit international, soit par le droit de
l'OHADA ou a indiquer a partir de quel moment une disposition est applicable,
ceci revient a preciser les effets de ladite disposition dans le temps.
L'interpretation peut se faire sur le plan interne tout comme elle peut
egalement se faire au niveau communautaire. De toute facon, celle faite au
niveau des juridictions communautaires prime sur celle faite par les
juridictions des Etats membres.
2. Organes compétents pour interpréter
Il n'y a pas de polemique possible par rapport a
l'organe competent pour interpreter le traite de l'OHADA car, a ce sujet,
l'article 14 leve le voile et designe de maniere claire la Cour commune de
justice et d'arbitrage, CCJA en sigle, comme le seul organe
competent.
Cependant, les contentieux relatifs aux Actes
uniformes relèvent, en première instance et en appel, de la
competence des juridictions nationales29 ; les contentieux du traite
est de la seule competence de la CCJA. D'oa le role unificateur de la
CCJA.
28 J. ISSA SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE,
op. cit, p. 101
29 Article 13 du Traité de l'OHADA
du 17 octobre 1993
Encadré n°2 : Articles 14 et 56,
alinéas Idu Traité de l'OHADA
Article 14
La Cour Commune de Justice et d'Arbitrage assure
dans les Etats Parties l'interprétation et l'application communes du
présent Traité, des reglements pris pour son application et des
Actes uniformes.
@
Article 56
Tout différend qui pourrait surgir entre
les Etats Parties quant a l'interprétation ou a l'application du
présent traité et qui, ne serait pas résolu a l'amiable
peut etre porté par un Etat partie devant la Cour commune de Justice et
d'Arbitrage.
31
e. Révision du Traité
Un traité est une oeuvre humaine, a ce titre,
il n'est pas parfait et peut, de fil en aiguille, faire l'objet d'une
révision. La possibilité de révision du Traité de
l'OHADA est donnée par l'article 61 en ces termes : g Le présent
Traité peut e-tre amendé ou révisé si un Etat
Partie envoie a cet effet une demande écrite au Secrétariat
permanent de l'OHADA... N. Le me-me article précise la
procédure a suivre pour la révision et indique que celle-ci doit
e-tre adoptée dans les me-mes formes que le Traité. Le
traité OHADA n'interdit pas l'introduction d'une demande de
révision avant l'expiration d'une période définie. Bien
plus, il ne restreint pas les modifications a certaines
dispositions32.
31Traité de l'OHADA du 17
octobre 1993
32 J. ISSA SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE,
op. cit, p. 102
28
f. Dénonciation du Traité
33
Encadré n°3 : Libellé de l'article
62 du Traité de l'OHADA
Article 62
Le présent Traité a une durée
illimitée. llne peut, en tout état de cause, être d
énoncé avant dix années a partir de la date de son
entrée en vigueur.
Toute d énonciation du présent
Traité doitêtre notifiée au gouvernement d
épositaire et ne produira d'effet qu'une année après la
date de cette notification.
A la lumiere de l'article ci haut enonce, le traite de
l'OHADA prevoit la possibilite de sa denonciation ; mais cette possibilite
n'est pas sans conditions : il faut, d'une part, l'ecoulement de dix ans apres
l'entree en vigueur du Traite, d'autre part, il faut une notification au
gouvernement depositaire.
Le commun des mortels pourrait se demander le pourquoi
de l'observation de ce delai si long. C'est simple. Tout d'abord, cela trouve
son fondement dans le fait que l'OHADA est creee pour une duree indeterminee,
ce qui suppose tout naturellement que l'appartenance a l'OHADA est definitive.
De surcroit, l'objectif recherche etant l'integration africaine, cela revient a
dire que les Etats adherent de maniere irreversible et
longue.34
La denonciation ne produit d'effets qu'une annee apres
sa notification au gouvernement depositaire. Des lors que l'auteur de
la
33 . . ,
Tratte de l OHADA du 17 octobre 1993
34 J. ISSA SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE,
op. cit, p. 103
dénonciation n'est plus lié par le
Traité, deux hypothéses apparaissent : soit la caducité
automatique de ces textes, a moins que l'Etat concerné décide de
les maintenir ; soit leur maintien automatique suivi ou non d'abrogation ou de
modification.
B. Règlements
Il ressort de l'article 4 du traité que «
des reglements pour l'application du présent Traité seront pris
chaque fois que de besoin, par le Conseil des Ministres, a la majorité
absolue N.
Les reglements sont, autant que le Traité,
impératifs, d'application directe et obligatoire dans leur
globalité. Leur objet différe selon qu'il s'agit des
différents domaines d'application. Les prescriptions des reglements sont
générales et impersonnelles. En application du traité de
l'OHADA, cinq reglements ont été pris. Il s'agit de :
- Réglement de procédure de la CCJA
;
- Réglement d'arbitrage de la CCJA ;
- Réglement financier des institutions de
l''OHADA ;
- Réglement portant statut des fonctionnaires et
régime applicable au personnel de l'OHADA35.
35 J. ISSA SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE,
op. cit, p. 104
30
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