SECTION 2 : LES SANCTIONS AUX VIOLATIONS DES DROITS DE
L'HOMME PRISES PAR LES ETATS : LES CONTRE-MESURES
DEVELOPPEMENT PRELIMINAIRE : Les fondements juridiques
du recours aux contre-mesures en cas de violation des droits de
l'homme
Face a l'universalité des victimes des
violations des droits de l'homme122, le droit international a
consacré les réactions décentralisées des Etats
comme de véritables sanctions internationales. En effet, chaque Etat est
juridiquement fondé a prendre des mesures de contrainte a l'encontre
d'autres Etats qui bafouent les droits de l'homme. Cela est rendu possible tant
par la nature de l'obligation internationale de respecter les droits de l'homme
que par la pratique internationale initiée par l'ancien Président
américain Jimmy CARTER dans sa politique extérieure en
matiére de droits de l'homme.
D'une part, la nature de l'obligation internationale
de respecter et protéger les droits de l'homme a été
précisée par la CIJ dans de nombreuses affaires qu'elle a eues a
connaitre. Il s'agit d'une obligation erga omnes. Ainsi, dans son avis
consultatif sur les Réserves a la Convention des Nations Unies du 9
décembre 1 948 pour la prévention et la répression du
crime de génocide, la CIJ souligne que : g La convention a
été manifestement adoptée dans un but purement humain et
civilisateur(...). Dans une telle Convention, les Etats contractants n'ont pas
d'intérêts propres ; ils ont seulement, tous et chacun, un
intérêt commun, celui de préserver les fins
supérieures qui sont la raison d'être de la Convention
N123.
Elle en déduit que g les principes qui sont a
la base de la Convention sont des principes reconnus par les nations
civilisées comme obligeant les
122 Voir COHEN-JONATHAN
Gérard, * Les droits de l'homme, une valeur internationalisée *,
Droits fondamentaux, n°1, Juillet-décembre 2001, P.157.
123 Voir Reserves a la
Convention pour la prevention et la repression du crime de genocide, avis
consultatif, Rec.C.I.J., 1 951, P.23.
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Etats meme en dehors de tout lien conventionnel
*124. Il s'agit sans l'ombre d'un doute d'une obligation erga omnes.
Toutefois, c'est en 1 970 que la CIJ évoque formellement la notion
d'obligation erga omnes. Elle précise alors qu'
g Une distinction essentielle doit (...) etre
établie entre les obligations des Etats envers la Communauté
internationale dans son ensemble et celles qui naissent vis-a-vis d'un autre
Etat dans le cadre de la protection diplomatique. Par leur nature meme, les
premieres concernent tous les Etats. Vu l'importance des droits en cause, tous
les Etats peuvent etre considérés comme ayant un intérIt
juridique a ce que ces droits soient protégés ; Les obligations
dont il s'agit sont des obligations erga omnes *125.
Elle parlait ainsi des obligations g concernant les
droits fondamentaux de la personne humaine *126
D'autres décisions vont entériner celles-ci
tout en renforgant l'obligation erga omnes de respecter et de protéger
les droits de l'homme127.
D'autre part, en 1 977, la nouvelle administration
américaine a fait passer les droits de l'homme d'une fagon spectaculaire
sur le devant de la scene internationale. Le Président d'alors, Jimmy
CARTER, a introduit la g Moralpolitik * comme un élément central
de sa politique étrangére128. Ainsi, dans un discours
tenu devant l'Assemblée générale des nations unies, le
Président a soutenu g qu'aucun membre des Nations Unies ne peut
prétendre qu'un mauvais traitement infligé a ses citoyens ne
regarde d'autre que lui. De me-me, aucun membre ne peut
échapper a ses responsabilités
124 Voir ibid.
125 Voir Affaire Barcelona
Traction, Light and Power, Limited, arrêt du 5 févier 1 970,
Rec.C.I.J., 1 970, P.32, paragraphe 33.
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