Et au paragraphe 2 de completer :
g Les immunites ou regles de procedure speciales qui
peuvent s'attacher a la qualite officielle d'une personne, en vertu du droit
interne ou du droit international, n'empechent pas la Cour d'exercer sa
competence a l'egard de cette personne D.
Autrement dit, la qualite officielle d'une personne ne
constitue pas un obstacle a la mise en oeuvre de la sanction penale
internationale. Mieux encore, la levee de l'immunite de juridiction penale est
une condition de forme a l'application de la sanction penale internationale.
Cette condition
288 Voir Proces des grands
criminels de guerre devant le Tribunal militaire international, op.cit.,
P.234.
28 9 Voir Doc. Distribue
sous la cote A/CONF.183/ 9, en date du 17 juillet 1 998, et amende par les
procés verbaux en date des 10 novembre 1 998, 12 juillet 1 999, 30
novembre 1 999, 8 mai 2000, 17 janvier 2001 et 16 janvier 2002. Le Statut est
entre en vigueur le 1er juillet 2002.
n'est pas indispensable a l'application de la sanction
aux autorites non etatiques.
B- Les conditions de forme relatives a la sanction des
autorites non etatiques
La sanction penale internationale peut aussi frapper
les autorites non etatiques. Dans cette mesure, les conditions de forme liees a
l'application de la sanction sont toutes aussi importantes. Celles-ci tiennent
a l'appartenance a une organisation criminelle (1) et au statut d'executant
(2).
1- La sanction des individus a ppartenant a une
organisation criminelle
Tl est bien etabli aujourd'hui que l'appartenance a
une organisation criminelle constitue un delit2 90. En effet, la
participation aux activites menees par une organisation criminelle est un fait
generateur de la responsabilite penale du participant. Bien entendu, il doit
s'agir d'une g organisation criminelle D. La notion d'organisation, d'une part,
renvoie a un groupe presentant un certain niveau de coherence et de
hierarchie2 91. La notion d'organisation fait aussi reference a
celle de planification c'est-A-dire A des actes premedites. Autrement dit, la
notion d'organisation inclut un element organique (groupe) et un element
materiel (actes).
D'autre part, le caractere criminel de l'organisation
renvoie aux moyens mis en ceuvre afin d'atteindre un but determine. Si
me-me ce but peut etre legitime, les methodes pour y arriver sont
constituees de violations massives des droits de l'homme.
2 90 Voir MATSON
Rafaëlle, La responsabilité individuelle ..., op.cit.,
PP.301-312.
2 91 Voir LA ROSA Anne-Marie
et WUERZNER Carolin, * Groupes armes, sanctions et mise en ceuvre du droit
international humanitaire *, op.cit., PP.2-3.
10
Ainsi, une organisation criminelle est un groupe qui
opere par des moyens criminels pour atteindre un but2 92. Cela dit,
le lien organique, mieux encore le lien de connexite entre l'activite
individuelle et l'activite de l'organisation, justifie l'application de la
sanction penale internationale a un individu appartenant a une organisation
criminelle. C'est dans ce sens que l'article 25 du Statut de la CPI dispose a
son paragraphe 3d :
g Aux termes du present Statut, une personne est
pénalement responsable et peut etre punie pour un crime relevant de la
competence de la Cour si :
(...)
d) Elle contribue de toute autre maniere a la
commission ou a la tentative de commission d'un tel crime par un groupe de
personnes agissant de concert. Cette contribution doit etre intentionnelle et,
selon le cas :
i) Viser a faciliter l'activite criminelle ou le
dessein criminel du groupe, si cette activite ou ce dessein comporte
l'execution d'un crime relevant de competence de la Cour ; ou
ii) Etre faite en pleine connaissance de l'intention du
groupe de commettre ce crime ;
(...) N.
En fin de compte, nous pouvons dire a la suite du
Professeur Rafaëlle MAISON que le lien organique est la condition de la
competence des juridictions pénales internationales2 93.
L'individu est alors sanctionné du fait de ce lien, ou me-me,
du fait de l'ordre supérieur.
2 92 C'est le cas en
l'occurrence du terrorisme international qui procéde par des meurtres
massifs pour défendre leur cause.
2 93 Voir MATSON
Rafaëlle, La responsabilité individuelle ..., op.cit.,
P.312.
2- La sanction des individus en position
d'exécutants
Il s'agit de l'un des plus importants acquis des
procés de Nuremberg et de Tokyo : l'ordre du superieur hierarchique ne
peut plus Itre invoque comme moyen de defense2 94. Toutefois,
l'ordre superieur pouvait Itre regarde comme un motif de diminution de la peine
si le tribunal decidait que la justice l'exige2 95. Le Tribunal de
Nuremberg a introduit comme critére de la culpabilite la notion du g
choix moral D. Il a declare dans son jugement ce qui suit :
g Le vrai criterium de la responsabilite penale, celui
que l'on trouve sous une forme ou sous une autre dans le droit criminel de la
plupart des pays, n'est nullement en rapport avec l'ordre recu. Il reside dans
la liberte morale, dans la faculte de choisir, de l'auteur de l'acte reproche
D2 96.
En d'autres termes, l'ordre superieur ne constitue
point une excuse absolutoire. La faculte de choisir et la liberte morale sont
les seuls criteres determinants pour la mise en oeuvre de la sanction penale
internationale. Ceci represente une grande avancee dans l'application de la
sanction penale internationale. Comme l'ecrit le Professeur Jaroslav ZOUREK, g
cette liberte que possede l'individu de refuser sa participation individuelle a
un crime international est l'une des plus grandes conquetes de l'esprit
humain D2 97.
Ainsi, les individus ayant agi sous le statut
d'executants sont consideres comme des "complices''2 98 des
violations des droits de l'homme et sont punis en tant que tels. Mais,
l'article 33 du statut de la CPI a apporte davantage de clarifications en ce
qui concerne l'ordre hierarchique et l'ordre de la loi. Elle dispose dés
lors que :
2 94 Voir article 8 du
Statut de Nuremberg et article 6 du Statut de Tokyo. Le Tribunal de Nuremberg
declare : * Les dispositions de cet article (article8) sont conformes au droit
commun des Etats. L'ordre recu par un soldat de tuer ou de torturer en
violation du droit international de la guerre n'a jamais ete regarde comme
justifiant cet acte de violence D, Proces des grands criminels de guerre devant
le Tribunal militaire international, op.cit., PP.235 et 236.
2 95 Voir article 8 in fine
du Statut de Nuremberg et article 6 in fine du Statut de Tokyo.
2 96 Voir Proces des grands
criminels de guerre devant le Tribunal militaire international, op.cit., PP.
235-236.
2 97 Voir ZOUREK Jaroslav,
L'interdiction de l'emploi ..., op.cit., P.87.
2 98 Voir MATSON
Rafaëlle, La responsabilité individuelle ..., op.cit.,
P.354.
g 1. Le fait qu'un crime relevant de la competence de
Cour a ete commis sur ordre d'un gouvernement ou d'un superieur, militaire ou
civil, n'exonere pas la personne qui l'a commis de sa responsabilite penale, a
moins que :
a) Cette personne n'ait eu l'obligation legale d'obeir
aux ordres du gouvernement ou du superieur en question ;
b) Cette personne n'ait pas su que l'ordre etait illegal
; et
c) L'ordre n'ait pas ete manifestement
illegal.
2. Aux fins du present article, l'ordre de commettre un
genocide ou un crime contre l'humanite est manifestement illegal D.
C'est autrement dit que la notion du "choix moral'' a
cede place a celle d' "ordre legal''. Cette mutation a pour principale
consequence de placer l'executant a l'abri de la sanction car l'ordre superieur
est a nouveau considere comme une excuse absolutoire. Cela procede de l'idee
selon laquelle l'individu en position d'executant n'a en realite pas une
liberte de choix. Malgre cela, il n'en demeure pas moins que sa responsabilite
demeure intacte pour l'accomplissement de certains actes de violation des
droits de l'homme, ceux commis en obeissance a un ordre g manifestement illegal
D299.
En bref, comme le souligne le Professeur Emmanuel
DECAUX, g en ecartant l'immunite du chef d'Etat et l'exoneration de
l'obeissance due, le droit penal a brise un cercle vicieux. Chacun est
desormais pleinement responsable, en conscience comme en droit, et doit assumer
ses actes D300. Bien entendu, c'est en respect des principes
generaux du droit penal international que les sanctions seront mises en
oeuvre.
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