II- POLITIQUES ECONOMIQUES
ET STRATEGIE DES IED
Le Gouvernement burkinabé a initié dans les
années 1990 une réforme en profondeur de ses politiques
économiques au travers d'un programme d'ajustement structurel, qui a
représenté la fin de l'interventionnisme économique et la
libéralisation de l'économie. Le programme a engendré la
privatisation d'une partie des entreprises publiques, la libéralisation
de la plupart des secteurs commerciaux, la réforme du système
bancaire, un contrôle plus strict des dépenses publiques, un
programme d'augmentation des recettes fiscales, et des initiatives pour
encourager le développement du secteur privé.
Aujourd'hui le principal objectif du Burkina Faso est
d'atteindre une croissance durable qui engendre une réduction de la
pauvreté. Le Gouvernement s'est engagé à réformer
ses politiques économiques et sociales de manière à mieux
soutenir le processus de développement du pays en favorisant
l'émergence d'un secteur privé dynamique et compétitif et
en approfondissant l'intégration régionale. Bien que la politique
économique attribue une importance primordiale aux mesures visant
à promouvoir le développement du secteur privé, le
Gouvernement n'a pas encore réellement établi de stratégie
spécifique visant à promouvoir les IED et à maximiser leur
impact positif sur l'économie. Les autorités ont cependant
décidé de créer une agence de promotion des
investissements étrangers, même si ses contours et son
environnement stratégique restent à définir.
1) Cadre stratégique
de lutte contre la pauvreté
Le Burkina Faso a été un des premiers pays
à préparer un Cadre stratégique de lutte contre la
pauvreté (CSLP). Lancé en 2000 et mis à jour en 2003, le
CSLP détermine les objectifs prioritaires du Gouvernement en
matière de développement tout en assurant sa cohérence
avec les stratégies sectorielles. Lors de la révision du CSLP en
2003, le gouvernement burkinabé a décidé d'impliquer plus
activement au projet les différentes régions du pays. Treize CSLP
spécifiques aux besoins de chacune des régions administratives
ont ainsi été développés en juin 2005.
Les quatre piliers du CSLP, communs à toutes les
régions du pays, sont ;
§ activer la croissance à grande échelle;
§ promouvoir l'accès aux services sociaux
basiques;
§ augmenter le nombre d'activités
génératrices d'emploi et de revenu ; et
§ promouvoir la bonne gouvernance.
Un programme d'actions prioritaires articulé autour des
quatre piliers a été mis en place pour rendre le CSLP
opérationnel. On compte parmi les principales actions et objectifs :
Un programme d'actions prioritaires articulé autour des
quatre piliers a été mis en place pour rendre le CSLP
opérationnel. On compte parmi les principales actions et objectifs :
§ l'augmentation de la production agricole et la
sécurité alimentaire;
§ la promotion du secteur minier ;
§ la promotion de la production de fruits et
légumes;
§ l'accès à l'éducation;
§ l'amélioration de l'accès au
crédit ;
§ la réorganisation et le renforcement du
système judiciaire; et
§ la bonne gouvernance économique et la lutte
contre la corruption.
Le rôle et le besoin d'investissements privés
pour améliorer les infrastructures sont aussi prévus par le CSLP.
La poursuite du processus de privatisation, dans lequel les investisseurs
étrangers ont un rôle important à jouer, fait aussi partie
des objectifs du Gouvernement pour augmenter la compétitivité et
réduire ainsi les coûts des facteurs de production. Le CSLP ne
définit cependant pas de stratégie spécifique des IED, que
ce soit en matière de promotion, d'attraction ou de maximisation
d'impact.
2) Prospective «Burkina
2025»
En 1994, le Gouvernement burkinabé a commandité
la réalisation d'une étude prospective en vue de mieux orienter
les programmes pour le développement à moyen et long terme. Le
conseil national de prospective et de planification stratégique,
créé par décret en 1997, a remis une étude
complète en 2005. Selon l'étude «Burkina 2025»,
d'importantes faiblesses persistent dans l'économie burkinabé en
dépit des réformes des années 1990, comme la faiblesse des
ressources humaines, le manque de ressources naturelles, la faiblesse de
l'épargne et de l'investissement ainsi que la fraude et la
corruption.
Les principales faiblesses identifiées au niveau
sectoriel sont le secteur agricole encore très traditionnel, l'industrie
peu compétitive, les échanges commerciaux rendus difficiles par
l'enclavement et le faible taux de pénétration des nouvelles
technologies de l'information et de la communication. Parmi les
opportunités, l'étude signale la confiance renouvelée des
bailleurs de fond, l'impact des conférences régionales et
internationales ayant lieu au Burkina Faso, et les effets de
l'intégration économique sur les ressources humaines et le
développement des nouvelles technologies de l'information. Les
principales menaces identifiées sont la persistance des conflits dans
les pays voisins, la dépendance envers l'aide publique au
développement, la dépendance envers les cours mondiaux des
marchandises, le risque de délocalisation vers d'autres pays de la
sous-région dû aux coûts des facteurs de production ainsi
que la dégradation de l'écosystème.
Bien que la prospective « Burkina 2025 » offre une
analyse intéressante des capacités et du potentiel du Burkina
Faso, elle manque d'opérationnalité et ne présente pas de
mesures concrètes et spécifiques à mettre en place dans
les différents secteurs clés. En outre, bien que l'étude
souligne l'importance des investissements pour exploiter les forces et
opportunités du pays et pour les transformer en progrès
économique et social, elle n'aborde pas le rôle spécifique
que les IED pourraient jouer pour atteindre ces objectifs.
3) Projet d'appui à la
compétitivité et au développement de
l'entreprise
L'importance que le Gouvernement accorde au
développement du secteur privé se reflète dans la lettre
de politique pour le développement du secteur privé de 2002.
Cette lettre est une déclaration d'intentions sur les réformes
que le gouvernement veut adopter, en ligne avec la stratégie de
réduction de la pauvreté. Parmi ces réformes, on peut
signaler la libéralisation de l'économie avec l'ouverture de
plusieurs secteurs aux investissements privés tels que le secteur
minier, les télécommunications, l'énergie et le secteur
financier. La lettre prévoit aussi l'amélioration du cadre
réglementaire, juridique et fiscal des affaires ainsi que des mesures
pour le développement industriel et de l'artisanat.
En soutien de cette lettre et à partir d'une
étude sur la compétitivité et la croissance
économique, le Gouvernement a lancé le Projet d'appui à la
compétitivité et au développement de l'entreprise (PACDE)
en 2003 avec l'appui de la Banque mondiale. Le PACDE, qui a principalement un
rôle d'appui, agit sur deux aspects : (1) la mise en oeuvre des
différentes réformes ; et (2) le soutien au secteur privé
pour qu'il puisse bénéficier de ces réformes. Le PACDE
soutient différents ministères dans l'accomplissement des
objectifs annoncés dans la lettre de politique pour le
développement du secteur privé, principalement en les aidant
à trouver et financer les expertises requises. Le projet avait
été conçu pour une période initiale de quatre ans,
mais une prolongation de deux ans est prévue en vue de terminer la mise
en place des mesures et réformes initialement prévues.
III- TENDANCES DES IED
1) Volume et performance des
IED
Le Burkina Faso est resté en marge des flux d'IED
mondiaux jusqu'aux années 1980. Ce n'est qu'à partir du milieu
des années 1990, avec le lancement du processus de libéralisation
économique et le début du programme de privatisation, que les IED
ont entamé une tendance à la hausse (figure 5). Bien que fort
irrégulière, cette tendance s'est affirmée et
accélérée au cours des dernières années, en
particulier suite aux investissements dans le secteur minier. Dans l'industrie
et les services, la petite taille du marché domestique, les faiblesses
en matière d'infrastructures physiques et de capital humain,
l'enclavement, le coût élevé des facteurs, et les
faiblesses du cadre réglementaire constituent encore des freins
importants aux IED.
Figure 5 : Flux d'IED au
Burkina Faso, 1980-2007
Source : CNUCED, base de données
FDI/TNC
Les flux d'IED ont atteint en moyenne seulement $1,8 millions
par an entre 1980 et 1991, une période durant laquelle le Burkina Faso a
axé sa politique de développement économique
principalement sur la promotion des entreprises publiques, y compris dans les
activités purement commerciales. Durant cette période, l'Etat
était le principal investisseur dans les secteurs clés de
l'économie. En 1991, l'Etat était le principal ou unique
actionnaire dans 41 établissements publics à caractère
industriel ou commercial, 43 sociétés d'économie mixte,
deux entreprises publiques à caractère professionnel, et deux
sociétés d'Etat.
Le programme d'ajustement structurel de 1991 a lancé le
processus de libéralisation de l'économie et l'ouverture au
secteur privé. Il a aussi été à la base d'un
désengagement de l'Etat des activités à caractère
purement commercial au travers d'un programme de privatisations. Un total de 59
entreprises publiques a été identifié en plusieurs phases
pour être privatisées (ou liquidées) à partir de
1992. Une première vague d'opérations entre 1992 et 2001 a vu la
privatisation ou la liquidation de 37 entreprises. Brakina (brasserie) a
été cédée au groupe familial français
Castel, la CIMAT (cimenterie) vendue à la société suisse
Umar Holderbank et la SOSUCO (sucrerie) reprise par le groupe Agha Khan.
Les privatisations ont donc favorisé une augmentation
des flux d'IED dès le début des années 1990. La
libéralisation de l'économie, les réformes structurelles
et réglementaires, et la dévaluation du franc CFA en 1994 ont
également contribué à dynamiser les investissements
étrangers, y compris les investissements de petite taille par des
entrepreneurs étrangers et des PME. Malgré tout, les flux sont
restés irréguliers et dépendants d'opérations
ponctuelles telles les privatisations ou l'attribution de licences de
téléphonie mobile à des sociétés
étrangères. Le pic d'IED de 2000 peut ainsi être
expliqué par la vente de licences téléphoniques - et les
investissements d'infrastructures associés - à Celtel ($11
millions) et Telecel ($8 millions).
En moyenne, les flux d'IED sont donc passés de $1,8
millions par an en 1980-1991 à $10,2 millions par an en 1992-2001. La
Commission de la privatisation estime par ailleurs que les entreprises
privatisées ont reçu des injections de capital (hors coût
de privatisation) de CFA 35,3 milliards ($84,7 millions) entre 1995 et 2000,
principalement pour l'extension et le renouvellement de l'outil de
production.
Bien que le processus de privatisation ait connu un certain
ralentissement au début des années 2000, les flux d'IED ont
continué sur une phase croissante, pour atteindre $25,2 millions par an
en moyenne sur la période 2002-2006. Le renouveau des investissements
miniers, principalement dans la recherche et l'exploitation de gisements d'or,
expliquent une part importante de cette tendance à la hausse.
L'investissement étranger dans le secteur minier est en effet en pleine
expansion ces dernières années, suite à l'ouverture du
secteur aux investisseurs privés et à l'adoption d'un cadre
réglementaire attractif. Plus de 300 permis de prospection et de
recherche ont été attribués depuis la fin des
années 1990, et cinq entreprises étrangères sont soit
passées en phase d'exploitation, soit sur le point de commencer la
production.
En plus des IED dans le secteur minier, la poursuite du
processus de réformes structurelles a également suscité un
certain regain d'intérêt de la part d'investisseurs et
entrepreneurs étrangers. De plus, la cession de 34 pour cent des parts
de la SOFITEX au groupe français Dagris a permis une entrée
significative de capitaux en 2004.
En 2007, les flux d'IED ont atteint un pic exceptionnel de
$600 millions. Celui-ci s'explique en partie par la cession de 51 pour cent du
capital de l'ONATEL à Maroc Telecom pour CFA 144 milliards ($345
millions). L'opération couvre aussi bien la téléphonie
fixe (environ 100 000 abonnés) que la téléphonie mobile
(environ 400 000 clients au travers de la filiale Telmob). Si ce flux d'IED est
ponctuel, le pic de 2007 s'explique aussi par une forte augmentation des
investissements miniers. Plusieurs sociétés minières ont
en effet réalisé d'importants investissements pour passer en
phase d'exploitation en 2007 et 2008 suite à du travail d'exploration
initié au début des années 2000. Cette augmentation des
IED miniers devrait être durable étant donné les gisements
aurifères découverts ces dernières années et les
mises en exploitation programmée.
En dépit de la tendance à la hausse des IED au
cours de la décennie passée, le Burkina Faso reste toujours
largement derrière ses voisins et les PMA en termes de performance
relative. Les flux d'IED par habitant ont quadruplé de $0,4 par an en
moyenne en 1986-1990 à $1,6 en 2001-2006, mais ce niveau reste bien
inférieur à la moyenne de $11,4 par an dans les PMA, ou d'environ
$5 par an au Bénin ou au Sénégal. De même, les flux
d'IED par millier de dollars de PIB sont plus de trois fois inférieurs
au Burkina Faso que dans les pays de l'UEMOA, avec $4,7 par an en moyenne en
2001-2006. Cette tendance a bien entendu été renversée
partiellement suite au flux exceptionnel de 2007.
Il apparaît également que le Burkina Faso n'a pas
été en mesure jusqu'à présent d'attirer les
investissements étrangers à la recherche d'une implantation sur
le marché de l'UEMOA. Bien qu'il représente 12 pour cent du PIB
régional et 15,3 pour cent de la population de la zone, le Burkina Faso
n'a réussi à attirer que 3 pour cent en moyenne des IED de
l'ensemble des pays de l'UEMOA durant la période 1980-2006. Ce handicap
en termes d'attractivité par rapport aux pays de la zone semble
cependant se retrouver chez les autres pays enclavés, même si le
Mali est parvenu à attirer des investissements étrangers
importants à partir du milieu des années 1990, essentiellement
dans le secteur minier. Des perspectives d'investissements miniers importants
s'ouvrent également à présent au Burkina Faso.
Figure 6: Flux d'IED au
Burkina Faso et autres pays enclavés de la zone franc,
1980-2007
Source : CNUCED, base de données
FDI/TNC.
2) Distribution par secteur
et origine des IED
Etant donné son enclavement, la faiblesse de ses
infrastructures physiques et humaines, et le coût élevé des
facteurs, le Burkina Faso attire principalement des investisseurs
étrangers dont l'objectif est d'approvisionner le marché local.
En dehors du secteur minier et du coton, les entreprises
étrangères orientées vers l'exportation sont
extrêmement rares. Ceci explique également la taille relativement
modeste de la majorité des investissements étrangers au Burkina
Faso.
Dans les années 1990 et le début des
années 2000, les IED ont été relativement
diversifiés, dans la mesure où les investisseurs étrangers
ont participé au processus de privatisation qui a touché
l'ensemble des principaux secteurs productifs de l'économie. Des IED ont
ainsi été effectués au cours du programme de privatisation
dans le secteur agro-alimentaire (brasserie, sucre), la petite industrie
(cimenterie) et la finance, entre autres. Les plus grands flux d'investissement
ont cependant eu lieu dans le secteur du coton et des
télécommunications, avec l'attribution de deux licences de
téléphonie mobile et la cession de 51 pour cent des parts de
l'ONATEL. On peut ainsi estimer que le secteur des
télécommunications, y compris la privatisation de l'ONATEL,
représente environ 55 pour cent des entrées totales d'IED sur la
période 1992-2007.
Tableau 1 : Flux comparatifs
d'IED pour certains pays ou régions, 1991-2007
Le secteur minier représente depuis quelques
années le principal pôle d'attraction des investissements
étrangers, hors télécommunications. Le renouveau des
activités de prospection, de recherche et d'exploitation est en partie
dû à des investisseurs nationaux, mais l'impulsion principale dans
l'activité minière industrielle a été donnée
par des sociétés « juniors » d'Afrique du Sud,
d'Australie et du Canada principalement. A l'heure actuelle, aucune des «
majors » n'est présente au Burkina Faso. Selon les chiffres du
Groupement professionnel des miniers du Burkina, l'investissement (national et
étranger) dans le secteur minier a atteint CFA 150 milliards ($360
millions) sur les 15 dernières années.
Sept principales sociétés « juniors »
sont actuellement en phase avancée de recherche, de préparation
à l'exploitation ou en phase d'exploitation. High River Gold Mines est
passé en phase d'exploitation sur la mine de Taparko fin 2007,
après un investissement total de $71 millions. Etruscan Resources a
lancé l'exploitation de la mine d'or de Youga en mai 2008, après
un investissement total de $70 millions. Plus tard dans l'année, SEMAFO
et Cluff Gold ont commencé l'exploitation des mines d'or de Mana et
Kalsaka. Iamgold, qui a finalisé l'acquisition de Orezone Resources
début 2009, devrait dépenser environ $350 millions pour le
développement de la mine d'or Essakane, dont $220 millions en 2009.
En outre, Wega Mining prévoit de lancer la production
sur sa mine d'or d'Inata mi-2009. Le développement des autres minerais a
été plus affecté par la crise économique et
financière mondiale. Blackthorn Resources a ainsi mis le
développement du gisement de zinc de Perkoa en suspens jusqu'à
nouvel ordre suite à la baisse des cours mondiaux.
Depuis le début du programme d'ajustement structurel et
la libéralisation de l'économie, les petits investisseurs
représentent une autre source non négligeable de capital,
d'emploi et de création de valeur ajoutée. Bien que les montants
investis soient nettement inférieurs à ceux du secteur des
télécommunications et des mines, ces investissements sont
importants pour la diversification et le développement de
l'économie burkinabé. Ils touchent principalement la petite
industrie et les services, y compris l'agro-alimentaire, la distribution, la
restauration, l'hôtellerie et les services professionnels. Ce type
d'investissements étrangers émane dans de nombreux cas
d'entrepreneurs individuels ou de petites et moyennes entreprises de la
région.
Ainsi, 214 autorisations d'exercer la profession de
commerçant ont été attribuées à des
personnes morales (103 autorisations) et physiques (111 autorisations)
étrangères en 2007, pour un montant total d'investissement de CFA
12,6 milliards ($30,2 millions). L'Afrique représente 117 autorisations,
l'Europe 46, et l'Asie 45. A l'heure actuelle, la Chine n'est pas une source
significative d'investissements au Burkina Faso, contrairement à la
tendance qui prévaut dans beaucoup de pays d'Afrique.
La France a traditionnellement représenté une
source majeure d'investissements. Au cours des dernières années,
les pays source d'investissement se sont cependant diversifiés. Suite
à la privatisation de l'ONATEL, le Maroc représente environ 40
pour cent des flux d'IED au cours des 15 dernières années.
L'actionnariat de Celtel et de Telecel est lui aussi du Moyen-Orient et
d'Afrique. De même, l'Afrique du Sud, l'Australie et le Canada sont
devenus des pays source importants suite aux investissements miniers. En termes
de nombre de projets plus que de pourcentage du capital investi, les pays de la
région représentent également une source importante
d'investissement étranger au Burkina Faso.
3) Impact des
IED
Bien que les flux d'IED aient été relativement
modestes au cours des dernières décennies, l'impact de
l'investissement étranger est allé croissant au fur et à
mesure de la libéralisation de l'économie burkinabé. Alors
que les IED représentaient en moyenne seulement 0,6 pour cent de la
formation intérieure brute de capital fixe (FIBCF) dans les
années 1980, cette part a augmenté immédiatement
après le début du programme de réformes
économiques. La part des IED dans la FIBCF a évolué de
manière irrégulière depuis le début des
années 1990. Le niveau a oscillé entre 1 et 4 pour cent entre
1993 et 2006, et il s'est établi à 2,2 pour cent en moyenne en
2002-2006. Le pic d'IED de 2007 a ensuite poussé la part des IED dans la
FIBCF à près de 40 pour cent. Si ce taux n'est pas durable, la
part des IED dans l'investissement domestique devrait malgré tout rester
plus élevée dans les années à venir suite aux
investissements miniers.
Malgré que les données statistiques ne soient
pas disponibles pour établir un lien direct entre la relative bonne
tenue de la croissance économique depuis le milieu des années
1990 et les IED, il est probable que l'augmentation progressive des flux
investissements étrangers ait contribué à stimuler
l'activité économique et à stabiliser le niveau de
croissance. De même, le Burkina Faso ne collecte pas de données
sur la création d'emplois par les entreprises à capitaux
étrangers. Si le nombre d'emplois dans le secteur formel est très
limité, il n'en reste pas moins que des entreprises à capitaux
étrangers sont parmi les plus gros employeurs
du secteur privé formel.
La brasserie Brakina dispose d'environ 450 employés
permanents et génère un grand nombre d'emplois indirects dans la
filière boisson, ce qui en fait le premier employeur privé du
Burkina Faso. De plus, la direction indique que la société
mère Castel désire mettre en place un programme d'investissement
et de réinvestissement des bénéfices d'environ CFA 15
milliards ($36 millions) sur trois ans, après avoir investi CFA 6
milliards ($14.4 millions) en 2007. Le groupe Celtel (devenu Airtel en novembre
2010), quant à lui, emploie 317 personnes à temps plein. La
majorité de ces employés sont du personnel semi-qualifié
ou qualifié. Le personnel a une moyenne d'âge de moins de 30 ans,
et le salaire de base d'un commercial est de plus de CFA 200 000 par mois. Ceci
représente plus de sept fois le salaire minimum, et pratiquement le
double du salaire d'un fonctionnaire.
Bon nombre d'autres grands employeurs du secteur formel sont
également des entreprises à capitaux étrangers, tels que
l'assureur AGF et les banques BICIA-B et SGBB, la cimenterie CIMAT et la
sucrerie SOSUCO. Les sociétés minières, quant à
elles, fournissent relativement peu d'emplois permanents durant les phases de
prospection et de recherche. Par contre, elles deviennent de gros employeurs
une fois passées en phase d'exploitation, d'autant plus qu'elles
travaillent 24h/24h sur base de roulement. Les sociétés
minières vont donc devenir d'importants pourvoyeurs d'emplois - en zones
rurales qui plus est - dans les années à
venir suite au passage progressif aux phases d'exploitation.
Etruscan Resources prévoit de créer 350 emplois à temps
plein sur la mine de Youga, alors que High River Gold Mines prévoit 300
emplois sur la mine de Taparko. Le développement de l'emploi en zone
rurale est particulièrement important, à plus forte mesure dans
un pays où l'essentiel des investissements sont concentrés sur
deux villes.
Les entreprises étrangères sont également
parmi les plus actives en matière de formation et de transfert de
compétences. AGF exige une formation annuelle de tous ses
employés dans des domaines variés tels que la sensibilité
commerciale et les aspects techniques des produits d'assurances. Un certain
nombre de collaborateurs sont également envoyés dans les centres
de formation AGF à l'étranger. Celtel offre des cours de
formation en partenariat avec des partenaires tels que Ericsson et Nokia. Dans
le secteur hôtelier, le groupe Accor gère l'hôtel Mercure
Silmande en contrat de gestion et a contribué à la formation de
l'ensemble du personnel. Des formateurs du groupe Accor se sont rendus au
Burkina Faso dès le début du contrat de gestion, et un nombre
restreint d'expatriés continue d'assurer des tâches de gestion et
de formation du personnel. Jusqu'à fin 2008, le groupe Accor
gérait également l'hôtel Sofitel Ouaga 2000.
La Lybian Arab African Investment Company, propriétaire
de l'hôtel, a ensuite transféré la gestion de celui-ci
à la société Laico Hotels and Resorts Management Company
basée en Tunisie.
La contribution des IED au développement de la
technologie et des méthodes de production du Burkina Faso a
été limitée jusqu'à présent. L'impact le
plus important dans ce domaine tient probablement au développement du
secteur des télécommunications. L'attribution de licences de
téléphonie mobile en 2000 et la privatisation de l'ONATEL fin
2006 ont amené un développement rapide des services de
télécommunications, une hausse de la qualité et de la
diversité des services, et une baisse des prix au travers d'une
concurrence accrue.
La concurrence dans le secteur a également permis de
faire baisser le coût des communications téléphoniques. Le
prix d'un appel local fixe-fixe a baissé de CFA 142 par minute en 2000
à CFA 25 en 2008, en dessous du tarif fixé en Côte d'Ivoire
ou au Mali. Sur le réseau mobile, un appel mobile-mobile coûte
entre FCFA 1 et FCFA 1,5 par seconde en 2010. Cette tarification à la
seconde est appliquée par tous les opérateurs à fin
octobre 2010. La palette de services offerts dans le domaine des
télécommunications s'est également enrichie avec
l'installation d'un réseau de fibres optiques entre le Burkina Faso, la
Côte d'Ivoire, le Mali et le Togo. Ceci a permis une amélioration
de la largeur de bande pour la transmission de données et la connexion
au réseau optique mondial, via la Côte d'Ivoire.
Le Burkina Faso n'a pas été en mesure
jusqu'à présent d'attirer les IED orientés vers la
production de biens ou services destinés à l'exportation. On ne
peut donc pas dire que l'investissement étranger ait été
en mesure d'aider le Burkina Faso à surmonter ses handicaps structurels
pour participer plus activement au commerce mondial. Dans les années
à venir, les exportations d'or devraient cependant augmenter fortement
suite au passage en phase d'exploitation de plusieurs mines
développées par des investisseurs étrangers.
Le développement du secteur minier ces dernières
années est en effet dû en grande partie à des investisseurs
étrangers, qui ont apporté leurs connaissances techniques autant
que le capital nécessaire aux opérations de prospection, de
recherche et d'exploitation. Le secteur est encore dans sa phase initiale de
développement et le potentiel est important. Une exploitation des
ressources minières rationnelle et respectueuse de l'environnement est
susceptible de contribuer au développement économique et social
du Burkina Faso.
Les principaux bénéfices que le pays peut
espérer retirer de l'exploitation de ses ressources minières sont
: (1) une augmentation des recettes fiscales ; (2) la création d'emplois
directs et indirects, en particulier en milieu rural ; (3) le
développement des infrastructures et des industries associées au
secteur minier ; et (4) une augmentation des recettes d'exportation. Le Burkina
Faso devra cependant également être particulièrement
attentif à l'impact sur l'environnement et les communautés
locales.
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