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L'administration de mission en droit burundais: cas de la Commission Nationale des Terres et autres Biens (C. N. T. B. )

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par Emmanuel NIYOMWUNGERE
Université du Burundi - Licence 2010
  

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B. Les rapports entre l'Administration de mission et les institutions administratives connexes

Nous avons choisi de comparer l'Administration de mission avec l'Administration de gestion, l'établissement public et l'Autorité Administrative Indépendante, du fait que ces derniers lui sont très proches.

1. Les rapports avec l'Administration de gestion

E. PISANI, à qui on doit la découverte de la notion d'Administration de mission, a initié l'habitude de définir cette dernière en l'opposant à l'Administration traditionnelle de gestion. Celle-ci se présente, en effet, comme assurant le fonctionnement des services publics dans le cadre des règles de droit administratif et financier classiques.

Par contre, l'Administration de mission est chargée de monter un projet d'intérêt général et de coordonner son exécution en bénéficiant d'un régime juridique plus souple, dérogatoire du droit commun pour l'efficacité de son action.

Il faut reconnaître, cependant, que cette opposition est tempérée. En effet, l'Administration traditionnelle, dans sa tâche principale de gestion, recourt nécessairement à la coordination. De même, l'Administration de mission, dans son rôle principal de coordination, recourt à la gestion pour éviter d'agir dans l'abstrait et de devenir un fantôme.

2. Les rapports avec l'établissement public

L'établissement public est toute personne publique autre que les collectivités territoriales, soumise au principe de la spécialité et qui assure la gestion d'un service public ou d'une activité incombant à l'Administration suivant les règles variables en fonction de la nature de cette activité, mais comptant un minimum de sujétions et de prérogatives de droit public36.

L'Administration de mission présente beaucoup de similitudes avec l'établissement public. Les deux institutions sont en fait toutes des personnes publiques chargées d'un service public. Et puis, tous les deux procèdent de la répartition fonctionnelle des missions de l'Etat. De même, elles ont en commun la spécialité de leurs objets respectifs, contrairement aux autres personnes publiques qui ont des objets généraux consistant en la satisfaction des besoins

36 G. CORNU, Vocabulaire juridique, 8ème éd., Paris, P.U.F., 2000, pp. 349 --350

collectifs de la population. La spécialité de l'objet envisagée ici en ce qui concerne l'Administration de mission est celle qui est définie par rapport à l'objectif visé et non par rapport au temps. L'établissement public se rapproche particulièrement de l'administration de mission décentralisée qui, comme lui, est dotée de la personnalité morale mais soumise au contrôle de l'autorité de tutelle. D'ailleurs, les administrations de mission décentralisées sont assimilables aux établissements publics dans la mesure où elles font partie de ce que l'on appelle « des personnes morales de droit public innomées [qui] se sont ajoutées aux établissements publics traditionnels »37.

S'agissant des règles juridiques applicables, l'Administration de mission s'éloigne un peu de l'ancien établissement public à caractère industriel et commercial (E.P.I.C.), devenu aujourd'hui la société publique, dont le fonctionnement est régi par le droit privé pour se rapprocher davantage de l'établissement public à caractère administratif (E.P.A.) soumis au régime du droit public. Les deux institutions administratives se distinguent également par leur objet et leur organisation. L'Administration de mission a pour objet de concevoir, de mettre en oeuvre et coordonner une politique gouvernementale déterminée.

L'établissement public lui, a pour objet la gestion d'un service public économique, social, scientifique ou d'enseignement. L'Administration de mission a un organe de décision à caractère collégial et un secrétariat exécutif ou une autre structure administrative qui lui sert de support technique. L'établissement public est, de son côté, doté d'un Conseil d'administration et d'un organe de direction. Il faut noter enfin que les établissements publics ont un cadre légal général38 alors que les administrations de mission n'en ont pas encore.

3. Les rapports avef1lip 'RoriRé1p GP HARIERIM-1 Indépendante (A.A.I.)

Les Autorités Administratives Indépendantes sont des instances de régulation dont la création est soustraite aux influences politiques comme aux intérêts économiques et professionnels. Elles se situent toujours en dehors de la hiérarchie pyramidale de l'Administration. Elles sont qualifiées de « nouvelles magistratures » car elles rappellent les organismes juridictionnels, et leurs

37 R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 286

38 Tous les établissements publics sont soumis au régime du D.-L. n°1/23 du 26 juillet 1988, B.O.B. n°10/88 pp.220-226, mais les anciens E.P.I.C. sont dorénavant régis par la loi n°1/002 du 06 mars1996 portant Code des Sociétés privées et publiques B.O.B. n°3/96 pp.95-141

membres sont des « sages »39. La formule d'A. A.I. et celle d'Administration de mission ont tellement de similitudes dans leurs modalités d'application qu'elles engendrent une crise d'identité sur le plan institutionnel.

a. La crise d'identité des institutions administratives nouvelles

Les A.A.I. et les Administrations de mission présentent tellement de ressemblances qu'à un certain moment, on peut s'imaginer que toute démarche de différenciation est vouée à l'échec. L'insuffisance de critères précis de distinction peut entraîner une controverse de classification de certains organismes administratifs dans l'une ou l'autre catégorie juridique. Ainsi, en France, Jean DONNEDIEU de VABRES range la Commission des Opérations de Bourse (C.O.B.) parmi les administrations de mission40 alors que d'autres auteurs la classent parmi les A.A.I.41

Au Burundi, le législateur ne commence à se prononcer sur la nature juridique des institutions administratives nouvelles que très récemment à l'occasion de la loi n°1/18 du 25 septembre 2007 portant missions, composition, organisation et fonctionnement du Conseil National de la Communication

(C .N .C.)42. Il ressort de l'article 1 alinéa 2 de cette loi que le C.N.C. est une A.A.I., mais la Constitution du 18 mars 2005 le classe parmi les conseils43.

Mais, d'autres institutions administratives telles que la C.E.N.I., le Comité de pilotage tripartite en charge des consultations nationales sur la Justice Transitionnelle au Burundi, les commissions tripartites de rapatriement, les commissions de facilitation ou de mise en application des accords de cessez-lefeu, le Conseil Supérieur de la Magistrature, etc. suscitent une question de classification juridique qui n'est pas résolue de manière nette.

Le problème est d'autant plus posé que les missions de régulation et de coordination s'imbriquent dans certaines de ces structures. La recherche de solution à ce problème nous conduit à deux hypothèses :

39 G. DUPUIS et alii, 8ème éd., Droit administratif, Paris, Armand Colin, p.192

40 Voir « La C.O.B., une administration de mission », in Revue Administrative, 1980, p.237 cité par C. DEBBASCH., op. cit., p.446

41 G. DUPUIS et alii, op. cit., p.187

42 Voir B.O.B. n°9/2007, pp. 1599-1603

43 Les dispositions de la Constitution relatives au C.N.C. figurent à son Titre XII intitulé « Des conseils nationaux », (articles 268-288)

- ou bien A.A.I. et Administration de mission sont de nature différente mais la combinaison dans leur emploi peut conduire à la création de structures administratives hybrides ou mixtes ;

- ou bien la différence qui existe entre A.A.I. et Administration de mission n'est pas de nature mais de degré44.

b. Essai de distinction

On peut trouver, nonobstant la difficulté de l'exercice, des traits spécifiques permettant de distinguer A.A.I. et Administration de mission.

Il y a d'abord l'absence de la mobilité chez les A.A.I. Ensuite, celles-ci fonctionnent à la manière plus d'une juridiction que d'une administration. En d'autres termes, les A.A.I. se réfèrent dans leur fonctionnement aux règles juridiques relevant plus du droit judiciaire que du droit administratif. C'est notamment les règles relatives à la garantie d'impartialité et d'indépendance, aux pouvoirs d'enquête plus étendus, aux délibérations ou à la prise de décision, etc.

En outre, certaines administrations de mission sont présidées par les autorités de l'Administration centrale ou bien soumises au contrôle tutélaire de ces dernières, mais cela n'est jamais le cas chez les A.A.I. vis-à-vis de toutes les autorités politiques et administratives de l'Etat. Contrairement aux administrations de mission dont la marge d'autonomie peut être réduite, les A .A.I. ne peuvent pas voir la leur diminuée sans que cela ne soit dommageable à l'efficacité de leur action. Une A .A.I. peut être incarnée par une seule personnalité (l'Ombudsman par exemple) mais une administration de mission est toujours dirigée par un collège de membres.

Enfin, les deux types d'administration diffèrent, au moins en théorie, dans leurs méthodes et dans leurs finalités. Les administrations de mission procèdent d'une large coordination des intervenants, dans la conception et la mise en oeuvre d'une politique gouvernementale complexe. Par contre, les A .A.I. procèdent d'une large participation des opérateurs dans un domaine précis d'activités pour que la régulation de ce dernier se réalise dans la plus grande indépendance et la plus grande impartialité.

La notion d'Administration de mission est comprise davantage lorsqu'elle est complétée par l'étude de son fondement socio-politique et juridique.

44 Par exemple le degré d'indépendance, de régulation et de coordination

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore