C. Le pouvoir de poser des actes juridiques
Etant un organisme administratif, la C.N.T.B. pose en principe
des actes administratifs en vertu du critère organique
prépondérant146 dans la définition desdits
actes. Mais, à côté de ces actes de nature administrative,
elle en pose d'autres de nature particulière qu'on pourrait qualifier de
quasi-juridictionnelle.
1. Les actes administratifs de la C.N.T.B.
Les actes administratifs de la C.N.T.B. se subdivisent
principalement en deux catégories: les actes unilatéraux, en
l'occurrence les décisions, et les
142 Art.7 du D.P. n°100/205 du 22 juillet 2006
précité
143 Art. 8 du D.P. n°100/196 du 24 novembre 2009
précité
144 Art. 22 de la loi n°1/17 du 04 septembre 2009
précitée
145 Voir supra, pp.45-49
146 A. BOCKEL, op. cit., p.165
contrats. Nous nous intéressons aux premiers
(c'est-à-dire les actes unilatéraux) de par leur importance dans
l'action administrative de la Commission.
a. Les actes administratifs créateurs des effets
de droit
Ce sont les actes unilatéraux ou les décisions
administratives prises par la C.N.T.B. La décision consiste
concrètement en la création, la modification ou la suppression
des prescriptions, des autorisations ou interdictions générales
ou individuelles. Par exemple, un règlement nouveau est
édicté ou un règlement existant est abrogé ou
modifié, un permis de construire est octroyé ou
retiré147.
Ainsi, la C.N.T.B. édicte notamment son
règlement d'ordre intérieur et d'autres actes de
référence pour son fonctionnement. Il s'agit également des
décisions qu'elle devait prendre au cours de son premier mandat dans
l'accomplissement des missions d'attribuer, en concertation avec les
autorités compétentes, de nouvelles terres aux sinistrés;
de les assister matériellement et techniquement à se
réinstaller ainsi que leur accorder une quelconque indemnité.
b. Les actes administratifs
déclaratifs
Ce sont les mesures que la C.N.T.B. prend et qui ne font
qu'enregistrer l'état du droit des situations de fait,
c'est-à-dire que ces mesures constatent le droit des situations
observables. Il en est ainsi notamment des actes portant mise à jour, en
concertation avec les services compétents, de l'inventaire des terres
domaniales, de l'identification de celles qui ont été
irrégulièrement attribuées148; de la
délivrance des certificats, titres ou tout autre acte constatant le
statut juridique d'un terrain appartenant à l'Etat ou à un
particulier; et de sa délimitation. De telles mesures ne sont pas
qualifiables de décisions parce qu'elles n'édictent aucune norme
qui traduirait la volonté de son auteur (contrairement aux
décisions).
147R. CHAPUS, op. cit., p.502
148 Cette compétence a été retirée
à la C.N.T.B. par la loi n°1/17 du 04 septembre 2009
précitée
2. Les actes « administratifs-juridictionnels »
ou
quasi-juridictionnels de la C.N.T.B.
C'est la dérogation au principe de définition
organique des actes administratifs qui fait intervenir la notion d'acte «
administratif juridictionnel >>149.
L'habilitation légale pour la C.N.T.B. de poser des
actes quasi- juridictionnels ressort de la loi n°1/17 du 04 septembre 2009
instituant cette structure et des textes d'application de celle-ci. Ainsi, les
articles 4 et 5 de cette loi lui assignent la mission de « connaître
>> les litiges fonciers et ceux relatifs aux autres biens qui mettent en
cause les sinistrés. Or, le verbe « connaître >>
signifie « être compétent pour juger une affaire
>>150 et est employé ici dans le sens que lui donne le
droit judiciaire privé. Et le verbe juger veut dire « examiner une
affaire en vue de lui donner une solution, en général
après une instruction et des débats >>151. Il
s'agit bien de ce genre de tâche qui est accompli par la C.N.T.B.
Autrement dit, la C.N.T.B. intervient à cet effet dans la mission de
rendre justice.
En outre, des trois termes "conflit", "litige",
"différend" utilisés en droit pour rendre justice, le terme de
conflit apparaît comme celui qui est le moins lié à la
saisine d'une juridiction, et qui a la connotation juridique la moins
forte.152 Les textes juridiques régissant la C.N.T.B. font
ressortir à maintes reprises le terme "litige", d'où il y a lieu
d'interpréter ceci comme une attribution de la fonction juridictionnelle
à cette entité administrative.
De même, le fait que ces textes prévoient un
recours contre les décisions de la même entité au Tribunal
de Grande Instance et un autre recours au Premier Vice -Président de la
République fait penser à l'existence simultanée des actes
« administratifs-juridictionnels >>, propres au premier recours, et
des actes administratifs, propres au second recours.
Rappelons qu'au départ, la délégation
provinciale faisait la facilitation pour régler à l'amiable les
litiges et que c'est en cas d'échec de la médiation que la
plénière de tous les membres de la Commission intervenait pour
trancher par décision. Aujourd'hui, la délégation,
après l'analyse des dossiers, « formule des
149 Voir supra, p. 47
150 G. CORNU, Vocabulaire juridique,
8ème éd., Paris, P.U.F., p.198
151 Idem, p.491
152 Rapport synthétique de CERCRID sur les modes
alternatifs de règlements des conflits, cité par G. WAKANA,
op. cit. , p. 2
propositions de solution qu'elle soumet aux parties et
à la Commission.153» Si elle obtient l'adhésion
des parties à ses propositions, celles-ci sont transformées en
une entente à l'amiable. Dans le cas contraire, la partie qui s'estime
lésée peut introduire un recours contre les propositions de
solutions de la délégation provinciale endéans 2 mois
auprès de la Commission. Le recours est introduit par le biais des
services de la délégation. C'est à ce moment que la
Commission nationale saisie pourra statuer sur le cas.
Nous soulignons que le fait que les décisions de la
C.N.T.B. étaient obligatoires et exécutoires154,
auparavant en vertu de son règlement sur la procédure suivie pour
résoudre les litiges au cours du premier mandat, et de l'article 19 de
la loi n°1/17 du 04 septembre 2009 en vigueur maintenant, soulève
beaucoup d'interrogations. Le fait que ces décisions de la C.N.T.B.
tirent leurs caractères obligatoire et exécutoire non pas des
privilèges de l'Administration, mais de la formule exécutoire les
rapproche des décisions de justice.
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