B. Les pouvoirs juridiques de la C.N.T.B.
1. Les compétences de la C.N.T.B.
a. La compétence matérielle
La compétence rationne materiae de la Commission
s'étend aux litiges relatifs à toutes les terres et à tous
les autres biens détruits ou volés du fait de la
guerre139. Relèvent de cette compétence notamment les
litiges concernant les
137 B.O.B. n°7/2006, pp.922 -924
138 Voir le Projet de loi portant modification de certaines
dispositions de la loi du 04 mai 2006 portant missions, composition,
organisation et fonctionnement de la Commission Nationale des Terres et autres
Biens, Exposé des motifs, p.1
139 Art. 2 al.2 et 4 de la loi n°1/17 du 04 septembre 2009
précitée
terres urbaines ou rurales; les immeubles par nature, par
incorporation, et par destination; les meubles meublant, les effets de
commerce, les assurances, etc. En principe donc, la C.N.T.B. a une
compétence matérielle englobant tous les droits mobiliers et
immobiliers dont l'exercice a été entravé à cause
de la guerre.
Cependant, chemin faisant, la C.N.T.B. s'est rendue compte que
la nature variée et le nombre élevé des biens relevant de
sa compétence matérielle compliquent énormément sa
tâche140. Elle a dès lors décidé de
soumettre la question au pouvoir créateur pour qu'il arrête les
critères, le plancher ou le plafond de la valeur des biens recevables en
cause.
b. La compétence personnelle
La compétence ratione personae de la Commission est
circonscrite aux sinistrés tels que la loi les définit. Il s'agit
de toute personne physique ou morale qui aurait été
spoliée de ses biens du fait des événements tragiques qu'a
connus le pays141. Sont donc exclus de la compétence de la
Commission les nombreux litiges relatifs aux biens qui ne concernent pas les
sinistrés.
En revanche, l'on remarquera l'extension de la
compétence de la C.N.T.B. et de la C.N.R.S. par rapport aux Commissions
antérieures qui ne s'intéressaient qu'aux rapatriés.
c. Les autres types de compétences
La compétence ratione temporis de la Commission
remonte de l'Indépendance du Burundi. Quid de la compétence
ratione loci ? Un sinistré burundais se trouvant en dehors du territoire
burundais peut saisir la Commission sans difficultés pour un bien se
trouvant au Burundi. Mais si le bien en cause se trouve à
l'étranger et si la personne en cause est un étranger, la
tâche devient compliquée car cette situation exige la mise en
oeuvre du droit international privé.
d. Les questions préjudicielles
La loi tranche la question de litispendance en disposant que
les litiges relatifs aux terres et autres biens des sinistrés pendants
devant les juridictions de droit commun, même s'ils rentrent dans le
champ de compétence de la C.N.T.B.,
140 Voir C.N.T.B., Rapport du 2ème
trimestre 2008, p. 7 et C.N.T.B., Rapport du 3ème
trimestre 2008, p. 23
141 Article 2 al.1 de la loi n°1/17 du 04 septembre 2009
précitée
sont irrecevables devant celle-ci. En effet, la saisine de la
Commission n'entraîne pas dessaisine de la juridiction compétente.
En revanche, auparavant, dès qu'un litige était soumis à
une juridiction de droit commun, la Commission était automatiquement
dessaisie142. Le D.P. n°100/196 du 24 novembre 2009
précité, quant à lui, indique que « les affaires
déjà en instance devant les cours et tribunaux suivront la
procédure telle qu'elle est prévue par le code de l'organisation
et de la compétence judiciaires »143.
Mais la question de la connexité n'est résolue
par aucun texte régissant la C.N.T.B. A notre sens, la même
solution donnée à la litispendance qui consiste au
dessaisissement de la C.N.T.B. au profit de la juridiction de droit commun
devrait s'appliquer d'autant plus que seule celle-ci a compétence pour
connaître les affaires pénales.
La C.N.T.B. dispose de pouvoirs d'enquête les plus
étendus. Ni le secret professionnel, ni le secret bancaire ne peuvent
lui être opposables. La loi érige en infraction le refus de livrer
à la Commission les documents demandés et l'obstruction à
ses travaux. Les sanctions vont de deux mois à deux ans de servitude
pénale et d'une amende de dix à cinquante mille francs ou l'une
de ces peines seulement144.
Le fonctionnement de la C.N.T.B. la rapproche beaucoup des
organismes juridictionnels145. Néanmoins, elle reste une
administration de mission ayant pour finalité la justice douce et
transitionnelle.
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