Titre2 : LA MISE EN OEUVRE DE LA
RESPONSABILITE MEDICALE FONDEE
SUR LA FAUTE
Pour que la responsabilité puisse être
engagée il faut d'abord l'existence d'une faute, un préjudice et
un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
Généralement le préjudice est avéré, dans un
certain nombre de cas la faute est démontrée, mais l'existence de
l'un comme de l'autre ne suffit pas à entrainer la responsabilité
du médecin ; pour se faire il faut que l'inexécution de
l'obligation de moyens soit à l'origine du dommage, lequel consiste en
des préjudices de nature économique à caractère
patrimonial et extra patrimonial. C'est pour cette raison que nous examinerons
dans cette partie la nécessité d'un préjudice et d'un lien
de causalité(Chap1) pour étudier ensuite les
différentes formes de responsabilités médicales
(Chap2).
Chap1 : La nécessité d'un
préjudice et
d'un lien de causalité
Avant la mise en oeuvre de la responsabilité il faut
que soit établi en premier lieu que c'est bien l'intervention du
médecin qui a causé le préjudice et non qu'il trouve sa
source dans l'état du malade. Ainsi nous examinerons tour à tour
l'exigence d'un préjudice causé par la
faute(Sect1) pour étudier ensuite la
nécessité d'un lien de causalité entre la faute et le
préjudice(Sect2).
Sect1 : L'exigence d'un préjudice causé par
la faute
Lorsqu'un patient a un antécédent de nature
à favoriser une complication, la question qu'on se pose en cas
d'accident est de savoir, si cet antécédent à contribuer
au dommage ou si le médecin a commis une faute ne l'en ayant pas pris en
considération. Les quelques rares arrêts dans lesquels se pose
cette question doivent être interprétés avec beaucoup de
prudence. Dès lors dans le cadre de l'étude de cette partie nous
verrons d'abord la relation entre le
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La notion de faute médicale en droit de la
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préjudice et la faute(Pag1) ensuite
l'avènement de la perte de chance de guérison et de
survie(Pag2).
Pag1 : La nécessité d'un lien entre la
faute et le préjudice
D'une manière générale, les atteintes
objectives subies par le patient ne font pas l'objet de discussion dans la
mesure ou elles sont avérées, le préjudice est un dommage
matériel ou moral subi par une personne du fait du tiers. Le
préjudice invoqué dans la responsabilité médicale
est généralement constitué par un préjudice
corporel. Ce préjudice invoqué doit présenter plusieurs
caractères pour être pris un compte. Il doit résulter de la
faute, le responsable n'est pas tenu de réparer un préjudice qui
ne serait pas la conséquence des manquements du médecin. Le
préjudice doit être non pas direct mais actuel et certain. Le
caractère d'actualité exigé n'empêche pas la
réparation d'un préjudice futur si ce dernier peut être
certain, par exemple en cas de séquelles prévisibles d'un
accident mais s'oppose à la réparation d'un préjudice
éventuel. Le préjudice réparable doit être
légitimé c'est à dire protégé par la loi. La
question de la légitimité du préjudice a été
controversée dans l'affaire Perruche,
indépendamment de la question de la causalité, la Cour de
Cassation ayant admis pour la première fois l'indemnisation d'un enfant
né handicapé, par suite de la rubéole contracté par
sa mère durant la grossesse47. Cette jurisprudence admettant
le préjudice de naissance a suscité un profond émoi dans
la société eu égard à ses conséquences, en
particulier la possibilité pour un enfant né avec un handicap, de
se plaindre de ne pas été avorté et le législateur
est intervenu pour mettre fin à cette controverse dans la loi sur les
droits des malades et la qualité du système de santé du 4
mars 200248. L'article 1 de la loi interdit de se prévaloir
« d'un préjudice du seul fait de sa naissance ». Mais cette
disposition concernant le handicap congénital n'empêche pas qu'une
personne née avec un handicap causé directement par une faute
médicale puisse demander réparation de son préjudice
conformément au droit de la responsabilité comme l'indique la
loi. Il précisé que les parents peuvent demander
réparation de leur seul préjudice, un préjudice moral les
charges particulières à l' handicap relève de la
solidarité nationale. Lorsqu'un médecin bute sur un
élément insoupçonné alors que son geste est
justifié par la nécessité de sauver le malade et qu'il n'a
commis aucune maladresse, les juges ont pu considérés que c'est
l'état du malade qui a
47 Aff Perruche JCP2000 G Memeteau ;F Terré le
prix de la vie JCP 200 actu n° 50
48 J M de Forges,Handicap congénital,le
dispositif ani-perruche,RDSS2002 p 465
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La notion de faute médicale en droit de la
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entrainé l'accident. Lorsqu'aucun lien entre l'un et
l'autre n'a pu être établi, la responsabilité du
médecin n'est pas établie.
Pag2 : L'influence de l'état du malade sur
l'analyse de la causalité
Lorsqu'un patient à des antécédents de
nature à favoriser une complication, la question se pose de savoir en
cas d'accident, si cet antécédent a contribué au dommage
ou si le médecin a commis une faute en ne l'ayant pas pris en
considération, les quelques rares décisions dans lesquelles se
pose cette question doivent être interprétées avec beaucoup
de prudence car les qualifications par les juges du fond n'ont pas
été critiquées par la cour de cassation ce qui implique
qu'elles ont été correctement appréciées. Toutefois
il est possible de mettre en évidence quelques points
intéressants. De même la démonstration en est faite, une
malformation peut constituer un facteur d'aggravation du dommage sans en
être seul la cause. La mauvaise santé du patient peut jouer comme
une cause totalement ou partiellement exonératoire. Mais elle ne doit
pas servir à excuser les cas ou précisément le dommage est
lié au fait que le médecin n'est pas tenu compte de cet
état pour adapter ses soins. Aussi les sont-ils en droit d'estimer que
« par son omission de s'informer complètement de la pathologie
particulière » de son client « il avait exposé celui-ci
au risque, qui s'est réalisé, inhérent à son
état » et ont- ils légalement justifié leur
décision quant à l'existence d'un lien de causalité entre
la faute et le dommage. Dans une telle hypothèse le terrain particulier
au malade n'exonère pas le médecin ; tout au contraire le fait de
n'avoir pas respecté ses obligations générales, ni pris en
considération les considérations particulières du patient
constituent deux causes, la seconde engageant la responsabilité du
praticien au même titre que la première. La charge de la preuve de
la faute médicale pèse en principe sur la victime qui demande
réparation de son dommage, conformément à l'art 1315 al 1
c. civ. Or cette preuve est particulièrement difficile en matière
médicale et chirurgicale, alors que le malade est endormi au moment des
faits, que l'équipe médicale demeure solidaire et que les experts
médicaux eux même, sont à tord ou à raison souvent
soupçonnés d'une certaine indulgence confraternelle dans
l'appréciation des faits qu'ils ont objectivement constatés;
d'oü la pertinence de l'obligation de mettre en place un dossier
médical. Il est certain que de très nombreuses victimes
d'accidents thérapeutiques se heurtent à cette difficulté
de la preuve. Aussi les magistrats sont tentés d'aider les victimes, en
admettant une présomption de faute dés lors que le dommage ne
semble s'expliquer que par la commission d'une faute. La faute incluse ou
présomption de faute est utilisée en
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La notion de faute médicale en droit de la
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droit civil qu'en droit administratif, elle se justifie quand
il y'a anormalité du dommage, et qu'un acte de soins courant et de
caractère bénin provoque des troubles d'une gravité
inexplicable. Les moyens de preuve d'un comportement fautif varient selon la
nature des fautes. La faute médicale technique suppose
nécessairement l'intervention d'un expert pour établir les
données de la science au moment de l'acte dommageable et les
circonstances de ce dernier. La faute d'humanisme peut être
apprécié par le juge sans recours à l'expert et elle peut
en outre se prouver par tous moyens
Ce qui apparait en filigrane dans cette analyse, c'est
l'idée que pour exécuter correctement son obligation de soins
consciencieux et attentifs, le médecin doit prendre en
considération l'état propre du patient; il doit donc
procéder à tous les examens utiles pour l'apprécier
correctement et en tenir compte. Ce n'est donc que dans l'hypothèse ou,
malgré une estimation de cet état conduite conformément
aux règles de l'art, le médecin achoppe sur quelques choses
d'imprévisible, que cette particularité
insoupçonnée peut être la cause du dommage.
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