Google et le droit d'auteur; "don't be evil"( Télécharger le fichier original )par Bastien Beckers Université de Liège - Master en droit 2009 |
C. ConclusionIl est clair que la création de plateformes telles que YouTube ou Google Vidéo favorise la diffusion de contenu protégés par un droit d'auteur. De plus, il est certain que Google n'ignore pas que la plupart des vidéos hébergées sur le site méconnaissent les droits des titulaires de ces oeuvres. Lorsque la directive 2000/31 du 8 juin 2000 et le Digital Millenium Copyright Act ont été adoptés, le web 2.0 n'en était qu'à ses balbutiement. Depuis lors, en 2005, avec Youtube et l'arrivée de tels sites dans l'univers d'internet, la frontière entre les simples hébergeurs de contenus et, d'autre part, les éditeurs de contenu proprement dits, est devenue très floue. Il est actuellement mal aisé de définir la nature précise de sites hybrides tels que YouTube et Google Vidéo. En effet, ce sont les internautes eux-mêmes qui mettent en ligne les vidéos qui forment le contenu de ces sites mais toutes l'infrastructure est fournie, dans le cas présent, par Google. Ce dernier a néanmoins un contrôle certain des vidéos postées par les utilisateurs de ce site, comme cela est rappelé dans la décision Flash Film. Les vidéos à caractère pornographique, pédophile ou incitant à la haine sont en effet traquées et immédiatement supprimées. Comme le clame Viacom, Google est donc en mesure de supprimer toutes les vidéos portant atteinte aux droits d'auteur89. Il y a toutefois une donnée qui n'a pas échappé a Google. La majorité des vidéos visionnées sur le site Google Vidéo ou sur YouTube sont des vidéos protégées par le droit d'auteur, mais, à n'en point douter, sans ces dernières, la fréquentation des sites diminuerait très fortement. Ces vidéos représentent un élément essentiel du succès de ces sites et il n'est donc pas dans l'intérêt de Google de supprimer automatiquement toutes les vidéos litigieuses. 87 C.J.C.E, C 236/08 à 238/08, 23 mars 2010, disponible sur: http://curia.europa.eu 88 Conclusions de l'avocat général M. M. POIARES MADURO dans les affaires C 236/08 à C 238/08, 22 septembre 2009, disponibles sur: http://curia.europa.eu 89 Viacom, http://Actualités.viacom.com/Actualités/Pages/summaryjudgmentstatement.aspx, 18 mars 2010, (dernière visite le 14 mai 2010). Par ailleurs, Google tente de faire bonne figure face aux titulaires de droits d'auteur et à mis en place un système de plainte90 qui leurs permet de signaler une atteinte à leurs droits mais l'efficacité d'un tel mécanisme reste à prouver si l'on en juge par les deux décisions françaises évoquées ci-dessus. On peut conclure que les tribunaux ont fait une application nuancée de l'exonération accordée aux hébergeurs de contenus. Ils ont en effet qualifié Google de simple hébergeur mais n'ont pas accordé l'exonération prévue par la loi française et ont soumis Google à une obligation de surveillance particulaire, en ce sens que, si une personne voit ses droit d'auteur bafoués et le notifie à Google, ce dernier doit s'assurer par la suite que la vidéo ne se retrouve plus jamais mise à disposition gratuitement sur son site. On peut donc affirmer que ces décisions sont plutôt favorables à Google même s'il n'est pas exonéré de toute obligation. En effet, Google n'est pas tenu de surveiller les milliers de vidéos postées (il y aurait actuellement 24 heures de vidéo postées chaque minute)91 par les utilisateurs, mais les éliminer lorsque le titulaire d'une vidéo protégée par le droit d'auteur se manifeste pour en exiger le retrait. On est en droit de se demander si une telle solution est judicieuse car, nous le savons, Google possède les moyens techniques de réaliser un contrôle rapide et efficace des vidéos placées sur ses sites. Les tribunaux français n'ont peut-être pas suffisamment tenu compte de cet élément en prenant des décisions qui sont en demi-teinte. Ils auraient pu condamner Google avec plus de sévérité en le soumettant à une obligation de surveillance générale. Une telle obligation n'aurait sans doute pas réglé entièrement le problème des vidéos postées sans l'autorisation de leurs créateurs, mais aurait incité Google à faire preuve de moins de laxisme face à ce phénomène. |
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