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Le pouvoir décisionnel des chefs religieux traditionels Dogon aux dépens des lois et règlements en vigueur

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par Amadou Sangara
Université de Bamako, Mali - Maitrise Droit Privé 2007
  

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DEUXIEME PARTIE.

La cohabitation des deux autorités : l'autorité traditionnelle et l'autorité publique.

L'expression pourrait paraître erronée voire détestable à certains. En effet, concrètement quand nous parlons du pouvoir décisionnel des chefs religieux traditionnels aux dépens des lois et règlements en vigueur, cela il ne faudrait pas le comprendre par le sens stricte des termes.

Car les décisions prises par les chefs traditionnels ne sont pas pour autant contraires aux dispositions des lois et règlements, dans la mesure où ces chefs ne rendent les décisions qu'après concertation des différents intervenants dans le système, également les décisions sont rendues au nom de toute la communauté et dans l'intérêt général de celle ci.

Ces sociétés sont des sociétés religieuses traditionnelles plusieurs fois séculaires, si d'aventure il y a une contradiction ou du moins une incompatibilité entre celles-ci et les autorités publiques, cette contradiction n'est pas pour autant manifeste et visible; même si certaines habitudes ou pratiques existantes dans ces sociétés doivent évoluer et nécessiter une certaine amélioration et un certain changement.

A défaut d'êtres uniformes ou égalitaires, ces deux catégories d'autorité doivent et cela dans l'intérêt des deux camps, cohabiter pour éviter une quelconque confrontation ou bras de fer qui peut être fatal pour notre société. Il est important de noter que depuis longtemps les autorités gouvernementales ont su respecter l'ordre dogon et ce dernier persiste.

Dans cette seconde et dernière partie de notre sujet nous soulignerons principalement le fait que la tradition dogon consolide les dispositions relatives aux citoyens (Chapitre I) et qu'une conciliation est indispensable entre tradition et modernité (Chapitre II) afin de pérenniser les acquis démocratiques.

CHAPITRE PREMIER.

La tradition dogon, consolide les dispositions relatives aux citoyens.

En société dogon, rien, n'est vraiment distraction simple. Nous pouvons dire que le profane n'existe pas ici, tout est religieux, tout a un but, tout a un sens. La tradition est la grande école de la vie, dont recouvre et concerne tous les aspects.

Elle peut paraître chaos à celui qui n'en pénètre pas le secret et dérouter l'esprit cartésien habitué à tout séparer en catégories bien définies.

En elle, en effet, spirituel et matériel ne sont pas, dissociés. Passant de l'ésotérique à l'exotérique, la tradition dogon sait se mettre à la portée des hommes, leur parler selon leur entendement et se dérouler en fonction de leurs aptitudes.

Elle est tout à la religion, à la connaissance, à la science de la nature, à l'initiation de métier, à l'histoire, au divertissement et à la récréation, tout point de détail pouvant toujours permettre de remonter jusqu'à l'unité primordiale.

Aujourd'hui dans la société Dogon l'on rencontre des chefs religieux traditionnels de plus en plus animés d'un esprit d'ouverture, toue chose qui facilite le contact, les rapports avec le monde extérieur.

Ce chapitre sera axé sur la complémentarité_ autorité traditionnelle et autorité publique (Section I) et sur l'autorité des chefs religieux dogon dans un contexte intercommunautaire démocratique (Section II.)

Section I: Complémentarité entre autorité traditionnelle et autorité publique.

Dans la société dogon, les principes sociaux, il faut le préciser sont sous le contrôle et la supervision des chefs religieux traditionnels ou du moins ces derniers veillent sur le strict respect et sur l'application correcte de ces principes.

Dans la hiérarchie des normes qui est un classement des règles juridiques dans un ordre hiérarchisé, il est clairement énoncé que les normes de droit inférieur doivent êtres conformes aux normes de droit supérieur. Par exemple la loi doit se conformer à la Constitution, qui est la norme suprême placée au sommet de la hiérarchie des normes dans un Etat.

Ainsi, la pyramide de la hiérarchie des normes se présente comme suit: Au sommet se situe la Constitution. Viennent ensuite les traités ratifiés qui n'ont une autorité supérieure à celle des lois que s'ils sont publiés et appliqués par l'autre partie.

On trouve à un troisième niveau les règlements autonomes ou d'application de la loi, les ordonnances à valeur réglementaire prises par le Gouvernement mais non encore ratifiées par le Parlement.

Au pied de l'échelon se trouvent la notion de coutume et la jurisprudence.

Pour la matière qui nous intéresse ici, la coutume est, « une règle reconnue par tous et résultant en un moment donné d'un ensemble de comportements répétés, constants et clairs7(*) ».

La coutume constitue une source du droit à condition de ne pas aller à l'encontre de la loi. Il est clair que dans le principe la coutume ne doit déroger aux lois et aux règlements, donc ne doit pas être contraire à ces derniers.

Au Mali ici il y a sans doute une multitude d'ethnies donc naturellement il y a évidemment une multitude de coutumes, distinctes les unes des autres dans leur pratique.

De là si l'Etat prenait le risque de laisser à toutes ces coutumes la liberté d'action ou la libre pratique, il s'en sortirait probablement, pas et l'unité du pays serait ou peut être menacée, car le Mali est ``Un Peuple-Un But-Une Foi'', comme le témoigne notre devise nationale.

L'Etat a bien vu de ne pas tomber dans ce piège qui dressait devant lui, en uniformisant les dispositions c'est à dire les règles de gestion de la société malienne dans son ensemble, par l'élaboration des textes applicables à tous les citoyens sans exception de coutume ou d'ethnie.

Pour autant, les lois et règlements ne doivent s'immiscer dans la pratique de la coutume qui est en quelque sorte le miroir des religions traditionnelles ou de la tradition tout simplement afin d'éviter d'éventuelles confrontations avec celle-ci.

Les lois et les règlements sont le fruit de la colonisation, en effet, dès leur indépendance dans les années 1960, les Etats francophones d'Afrique en l'occurrence le Mali, se sont doté de règles inspirées de celles françaises. C'est ainsi que la Constitution du Mali, est largement inspirée de la Constitution française du 04 octobre 1958.

En effet, pétri dans le monde des traditions et des us et coutumes, malgré (ou à cause) son contact avec l'occident, le législateur malien a produit des textes hybrides à cheval entre la tradition et la modernité. Cette situation a, par exemple pour le cas de la femme d'une part accordé d'immenses droits et faveurs à la femme jusque là considérée comme être inférieur et d'autre part, elle a consacré un anachronisme criard qui défavorisait la même femme.

La démocratie est connue et pratiquée dans la société dogon depuis fort longtemps, ce que confirme cette citation de Aimé Césaire dans *Discours sur le colonialisme*(Présence africaine), en parlant des sociétés africaines précoloniales ''S'étaient des sociétés communautaires, jamais de tout pour quelques-uns; S'étaient des sociétés pas seulement ante capitalistes, mais aussi anticapitalistes.''

Ainsi, nous pouvons affirmer que même de nos jours dans certaines zones certains de ces traits des sociétés précoloniales n'ont pas totalement disparus. Mais, malgré l'évolution rapide des habitudes et comportements, il serait impossible de faire table rase du passé sinon ça serait suicidaire culturellement parlant.

Les droits de l'Homme existent et sont respectés dans les sociétés traditionnelles, principalement dans la société Dogon depuis la nuit des temps et nous ne cesserons de le répéter, l'autorité traditionnelle incontestablement complémentaire avec celle étatique.

Ainsi, au niveau même, des autorités publiques la coordination est un des principes recommandés sinon exigés dans la prise de décisions.

Pour mieux expliquer la complémentarité entre ces tendances nous mettrons l'accent sur la coordination dans la prise de décisions dans les autorités traditionnelles comme c'est le cas au niveau des autorités étatiques (Paragraphe I) et les zones dans lesquelles il y a concordance entre elles (Paragraphe II.)

Paragraphe I: Autorités traditionnelles: coordination dans la prise de décisions.

Chez les Dogon l'organisation sociale est telle que rien n'a été négligé, la prise des décisions par les chefs religieux s'effectue dans une chronologie bien soignée et bien déterminée, aucune étape n'est brûlée, aucune erreur n'est admise.

Le hogon d'une zone pour prendre une décision importante, envoie un message, dans le sens large du terme car le message n'est pas en soi un écrit mais constitué par des signes rituels que seuls les initiés peuvent déchiffrer.

Pour transmettre un message d'un village à un autre, d'une zone à une autre, le chef religieux fait appel aux griots ou crieurs publics. Ces derniers sont les messagers, les conseillers du chef, et sont également les mobilisateurs de foule en temps de divers travaux collectifs ou encore dans les champs de bataille dans le temps. Ils embellissent l'histoire, les circonstances pour leur maître pour qu'il soit très fier du passé glorieux de ses ancêtres mais également de sa propre personnalité. Ils sont les détenteurs de l'histoire et sont souvent qualifiés de médiateurs.

Dans le passé et aujourd'hui encore, les griots sont sollicités dans la résolution des crises : raisonner des individus, des villages en conflit ou en litige. Ils sont sous l'autorité du chef religieux et sont au service de celui-ci.

La toguna ou « abri de la parole », est le lieu privilégié pour les débats et décisions importantes. Elle appartient aux hommes d'un même lignage, à l'exclusion des femmes. C'est le lieu de la parole, de la discussion des affaires du village par les ancêtres qui y passaient leur journée à y donner des conseils aux jeunes gens et à rendre des jugements.

Tous ceux-ci entrent dans le cadre de la transmission des savoirs des anciens aux jeunes qui sont les futurs représentants de la tradition.

Dans la société dogon les femmes n'entrent pas directement dans le processus du fonctionnement de la religion traditionnelle. Il est de même qu'il n'y a pas de chef religieux femme, mais leur concours est indispensable dans la pratique de la religion traditionnelle et elles jouissent d'une grande autonomie.

Chez les dogons l'organisation communautaire est une réponse de la vie sociale. C'est ainsi que chez les dogons on évite l'anarchie.

* 7 V. Lexique de politique, Dalloz 6ème édition 1992, page 132.

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