SECTION 3: MODES DE REPARATION.
La réparation d un dommage moral peut se faire en nature
ou par équivalent ; elle peut être aussi symbolique.
§ 1. La réparation en
nature.
Réparer en nature, c est reconstituer la valeur
détruite115. A SOHIER affirme que cette réparation est
impossible en cas d atteinte à l intégrité physique, en
cas de dommage moral. L opinion de SOHIER traduit certes, la difficulté
d évaluation du dommage moral, mais notre jurisprudence a cependant
admis que ce mode de réparation était possible.
En effet, en cas d injures ou de diffamation, la
réparation se réalise par la publication du jugement statuant sur
le cas116. Si la réparation du dommage en nature est
impossible, elle peut être en toute autre mode de réparation. La
victime peut refuser cette réparation.
115 SOHIER, A; Droit civil du Congo-Belge, Bruxelles,
Maison Larcier, , 1956, P. 438.
116 Cour d Appel de Léo, 23 mars 1944, RJCB, 1954, P. 198,
Elis 13 mars 1926, Kat II, P. 164, District de Léo, 19 mai 1928, RJCB,
1931, P. 302.
Quand il existe deux moyens de remplacer la victime dans une
situation identique à celle qu elle avait avant le fait dommageable, il
n y a aucun intérêt légitime d imposer le plus
onéreux au défendeur.
Le montant du dommage dépend uniquement de l
étendue du dommage, le degré de la faute est sans importance.
Bref, la réparation en nature du dommage moral est
possible. Elle se réalise le plus souvent en cas d imputations
dommageables par la publication du jugement statuant sur la condamnation aux
dommages-intérêts.
§ 2. La réparation par
équivalent.
Il s agit ici de l allocation d une somme d argent en vue de
compenser le préjudice subi. C est le mode le plus courant en
matière de réparation du dommage moral117.
Ainsi le juge devra évaluer le préjudice et
fixer l indemnité de manière à « rétablir
aussi exactement que possible l équilibre détruit par le dommage
et remplacer la victime aux dépens du responsable du préjudice
dans la situation où elle se serait trouvée si l acte dommageable
n avait pas eu lieu ».
L appréciation du montant du dommage se fait « ex
aequo et bono ». Ces dommages-intérêts peuvent être
réduits et proportionnés aux possibilités
financières du redevable.
Il semble que selon la coutume « le tribunal ne statue
pas sur le montant des dommages intérêts : les parties doivent se
mettre d accord sur le montant . Si le préjudicié ne
déclarait pas satisfaction la réparation offerte par l auteur du
dommage, il peut y avoir lieu à nouvelle instance118.
§ 3. La réparation
symbolique
117 Boma, 8 déc. 1914, Jur. Col. 1925, P. 283, Elis 19
janv. 1946, RJCB, P.20 ; Cour d Appel d Elis. 11 janv. 1946, P.20 ;
Cour d Appel d Elis, 29 sept. 1924.
118 PINDI-MBENSA KIFU : Etude comparative de la
responsabilité civile coutumière et de droit écrit au
Zaïre : Dissertation, UNAZA, 1972, P.46, cité par KALONGO
MBIKAYI, Op. Cit. P. 153 154.
La réparation symbolique peut être «
comparée » dans sa première acception à la
réparation par équivalent. On s imaginerait alors dans ce cas un
tribunal accorder un likuta symbolique pour réparation du dommage moral
subi par la victime d un fait dommageable. Comme dans la réparation par
équivalent, ici encore c est au moyen de l argent que l on veut panser
les blessures subies par la victime.
Cependant dans sa seconde acception, la réparation
symbolique ou rituelle apparaît comme un mode de réparation propre
au droit coutumier. Comme nous l avons vu précédemment, il existe
en droit coutumier une série d actes dommageables qui lui sont propres.
Nous citerons à titre d exemple l inceste ou la violation de certains
rites commémoratifs des morts. La réparation de ce genre de
dommages est symbolique ou rituelle.
Nous aurons également ce que KALONGO appelle « la
réparation spontanée du coupable lui-même ». En effet,
« la peur de la vengeance automatique de la force invisible des
trépassés pousse souvent les auteurs de certains dommages
à se révéler et à faire des sacrifices aux morts
pour implorer leur pardon et avant même toute action de la victime.
De tout ce que nous venons d examiner nous pouvons dire que la
réparation en nature et par équivalent se rencontrent dans le
cadre du dommage moral. Mais si le droit écrit ne connaît
essentiellement que ces deux modes, le droit coutumier nous en fournit un
troisième qui reste rituel, attestant ainsi du caractère
sacré des droits coutumiers. « Le mode de réparation en
droit écrit, remarque KALONGO s écarte de beaucoup de ces
pratiques ; c est un droit essentiellement laïc qui ignore toutes les
réparations rituelles ou tous autres procédés imaginaires
qui ne peuvent permettre une réparation appréciable en argent ou
en nature119. »
119 : KALONGO MBIKAYI,op.cit, P. 81.
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