5.1.1 Présentation du modèle de
départ
Leur modèle est celui d'un équilibre en
anticipations rationnelles non révélateur. Il met en scène
des investisseurs incompétents et compétents dont les
anticipations sur les taux de change sont rationnelles, c'est-à-dire se
fondant sur les informations dont les agents disposent. Leurs transactions des
premiers génèrent un bruit sur les prix de marchés qui
résultent plus exactement d'une offre exogène aléatoire.
Chaque investisseur forme ses anticipations lui permettant de définir un
ordre à cours limité maximisant sa fonction objectif.
11 GROSSMAN S.,STIGLITZ J., « On the
impossibility of informational efficient markets », NBER, 1980
L'équilibre sur les marchés est obtenu par un
commissaire-priseur walrassien. Assimilable aux teneurs de marchés
nommés market-makers, il reçoit l'ensemble des offres et demandes
à cours limité des investisseurs et tranche sur le prix
d'équilibre qui satisfait ces ordres en limitant les écarts. Ce
modèle se décompose donc en plusieurs périodes : l'envoi
des ordres, la satisfaction de ces derniers puis retour à la
première séquence et ainsi de suite.
Les agents forment leurs anticipations à partir de
l'information privée qu'ils obtiennent par la variation des prix. Les
prix suivent une fonction linéaire combinant information privée
theta pour l'agent x, qui s'écrit :
![](La-speculation-est-elle-rentable-9.png)
Où la deuxième partie de l'addition de
l'information privée retranscrite par l'agent dans la formation de ses
anticipations. Alpha traduit l'aversion au risque : plus il est faible, plus
les agents traitent agressivement rendant les prix plus
révélateurs. Plus l'information acquise est précise, plus
le prix est révélateur. Donc lorsque alpha est égal
à 0, le marché est en plein équilibre, les prix sont
pleinement révélateurs.
De par la présence de deux groupes d'agents
compétents et incompétents, plus l'information des agents
incompétents est bruitée, c'est-à-dire de moindre
qualité, moins l'efficience est grande. Plus on tend vers cet
état, plus grande est l'incitation à s'informer. Or quel est le
gain à s'informer lorsque Lambda --la proportion d'informés- est
égal à 0, lorsque le bruit de l'offre est faible ou en face d'un
coOt d'acquisition de l'information trop faible ? Il n'existe pas
d'équilibre Nash-bayésien en ce sens que personne ne tire un
profit au détriment des autres en s'étant informés. La
situation est celle d'un équilibre où personne ne s'informe donc
avec des prix.
Ainsi, lorsque Lambda est égal à 0, les prix ne
reflètent plus aucune information : il n'y a pas de bruit, donc pas de
raison d'échanger pour redistribuer le risque. Lorsqu'en revanche Lambda
est supérieur à 0, le prix tend vers l'efficience forte
révélant quasiment toute l'information des informés,
ôtant toute incitation d'acquisition d'information car le coOt de ce
processus ne serait pas compensé par le gain obtenu sur le
marché.
C'est pourquoi, si un équilibre existe et est
pleinement révélateur, les prix ne sont plus informatifs car
personne ne souhaite supporter le coOt d'acquisition de l'information. Les
marchés financiers ne peuvent donc être pleinement efficients.
C'est ainsi que s'est défini le paradoxe Grossman-Stiglitz.
Il existe donc une disparité entre les agents
autorisant la spéculation. Il faut qu'il y ait une action sur les prix
au moyen de cette dernière pour que les prix de marchés soient
suivis. C'est une condamnation radicale de l'efficience des marchés car
si cette dernière existe vraiment, il n'y a plus d'efficience a
posteriori car personne ne recherchera l'information dont la retranscription
dans les prix est nécessaire à la condition des prix. Donc
l'efficience ne peut exister qu'à partir d'une situation inefficiente.
Mais est-ce la responsabilité de la spéculation ou de l'arbitrage
? Sans répondre d'emblée à cette question (voir la
troisième partie), ce paradoxe met en avant une incitation claire
à s'informer pour tirer un meilleur profit de ses paris.
|