4.2.3 Le transfert de risques
Cet élément représente le pain quotidien
de la spéculation. Il s'agit d'être la contrepartie des
transactions au jour le jour, rôle principalement occupé par les
banques intervenant sur les marchés des changes. A chaque demande, il
faut un vendeur et vice-versa. En étant présente sur le
marché des changes, la spéculation permet d'apporter la
liquidité nécessaire pour concrétiser un plus grand nombre
d'opérations. Ceci permet d'amoindrir la volatilité des taux de
changes car chaque transaction trouve preneur tant dans le sens de l'achat que
de la vente10.
Le tableau des transactions réalisées sur les
marchés des changes publié par la BRI est assez éloquent
en la matière. Il détaille le volume quotidien moyen par
instrument par contrepartie.
![](La-speculation-est-elle-rentable-8.png)
10 BRENDER A., Op. cit.
Il permet de constater que le flux de transactions croissant
porte sur les contrats de swaps de court terme (98% inférieur à
un an, 73% pour moins d'une semaine) entre banques et institutions
financières pour 91% du volume quotidien. Ceci signifie que la plus
grande partie du marché des changes porte désormais
essentiellement sur des positions de couverture entre professionnels de la
finance. Ce sont des opérations de transfert de risque de court terme
contractées pour externaliser une partie des risques pris pour
satisfaire une demande client, et ainsi profiter d'une divergence d'opinions
sur les mouvements de taux. Ainsi, par cette échange de risque, les
marchés des changes peuvent maintenir leur complétude en termes
d'instruments qui bénéficient aussi d'une liquidité plus
constante permettant tous types de transaction.
De plus, cette participation au transfert des risques par la
spéculation, au niveau des fonds, relève de la propre couverture
de leurs propres portefeuilles afin de minimiser sa volatilité pour
accroître son ratio de Sharpe.
Par conséquent la spéculation sur les
marchés des changes produit des résultats instables à
court terme pouvant être plus bénéfique à plus long
terme. Elle est hétérogène en soi ne répondant pas
à un seul concept spéculatif. Les processus sont multiples mais
ne partagent que la même volatilité. Sa présence sur le
marché des changes s'explique par l'identification de faits
stylisés déterminant l'évolution des taux de change.
Si elle a tendance a plutôt marqué les
marchés par son action sur des déséquilibres
macroéconomiques, son pain quotidien reste la transaction au jour le
jour sur les marchés permettant dès lors de rendre ces derniers
plus liquides, les cours moins volatiles et favorisant le transfert de risques
entre agents. En revanche, ses effets macroéconomiques sont
contrastés au-moins à court terme.
Si la spéculation semble donc bel et bien exister de
manière relativement rentable, rien ne permet encore de juger pleinement
de l'inefficience des marchés. Il semble en revanche clair que le
processus d'ajustement des prix semble complexe. Tout s'articule autour de
l'analyse de facteurs clés influençant les prix, à
commencer par l'approche fondamentale qui consiste à anticiper les
variations d'indicateurs qui se traduiront par des mouvements de taux de
change. Or si les marchés sont efficients, l'information les concernant
doit être identiquement disponible pour tous. C'est pourquoi nous nous
intéressons à ce processus d'acquisition de l'information :
peut-il être générateur d'informations uniques et
privilégiées permettant une prise de position spéculative
?
5 EFFICIENCE DE L'INFORMATION ET INCITATION A
SPECULER
Dans cette partie, l'objectif est d'envisager s'il existe une
opportunité en termes d'avantage informationnel dont la
spéculation pourrait tirer profit. Cette analyse tente
d'appréhender s'il existe un avantage informationnel sur les
marchés et si les prix offrent dans ce cadre un point d'ancrage
pertinent à partir duquel il est possible de savoir s'il est
fondamentalement juste. Cet élément amène à
considérer comment les nouvelles informations se retranscrivent dans les
prix. Dans ce cadre, nous abordons la notion d'anticipation de mouvements
à venir que nous détaillerons d'avantage dans la troisième
partie.
5.1 Paradoxe Grossman-Stiglitz
S'il existe une
hétérogénéité des modèles, il existe
aussi une hétérogénéité des agents sur les
marchés de change comme la première partie l'a laissée
entrevoir. Sont-ils tous égaux devant les marchés financiers et
l'accès à l'information ? Eu égard à la
présence récurrente de la spéculation et de son bien
fondé, Grossman et Stiglitz ont étudié la
réalité de l'efficience informationnelle des
marchés11. Si il y a une spéculation qui
génère un rendement financier, n'est-ce pas lié à
une défaillance des marchés financiers dans leur rôle de
révélation de l'information ?
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