5.1.2.2 Accès à l'information et
efficience informative
Le postulat de départ du principe est la
capacité à accéder à l'information. Plus celuici
est coûteux, plus précise est cette information, plus grand est
l'effort de l'agent. Or en dépit d'un nombre croissant d'agents
informés, le prix n'est pas nécessairement informatif à
l'équilibre. Tout dépend du poids de chacun.
14 GROSSMAN S., «Dynamic Asset Allocation and the
Informational Efficiency of Markets», Journal of Finance, Vol. 1,
Numéro 3, Juillet 1996
En revanche, est-ce que cela n'induirait pas un
équilibre de Pareto où, en guise de prix fondamentaux, les agents
trouveraient une forme d'ophémélité à traiter
à un certains cours quel que soit l'écart vis-à-vis de sa
valeur fondamentale. Le taux de change obtenu les satisfait compte tenu de
leurs besoins subséquents à leur propre compréhension de
l'information. Cette éventualité abonde dans le sens de la
théorie de Grossman sur les phénomènes allocatifs
renforçant la notion de différence de sophistication et de
compétence entre les différents groupes d'investisseurs.
5.1.2.3 Anticipations et efficience informative
Jusqu'à présent l'avantage informationnel est
défini comme un accès supérieur à l'information. La
notion d'anticipations en tant que prédiction sur les variations d'un
cours eu égard aux informations détenues est ici mieux prise en
compte. L'objectif est de savoir si les anticipations peuvent être plus
justes permettant une efficience informationnelle à terme.
En se concentrant sur le marché des changes, Villa
(2004)15 reprend le paradoxe de Grossman-Stiglitz, il montre qu'il
n'existe pas d'informations privilégiées sur les marchés
des changes. Les anticipations sont biaisées et ne sont pas
rationnelles. Elles ne se basent que sur les conjectures concernant la
politique économique qui sera menée. Cette analyse rejoint les
conclusions d'une autre étude du CEPII conduite par Agnès
Bénassy-Quéré16 sur les modes
d'élaboration des anticipations des agents qui forment le consensus de
Londres (groupe de banques commerciales). Ces dernières sont une savante
mais instable combinaison entre les anticipations extrapolatives (se passera en
t+1 l'inverse de t), adaptatives (t induit t+1) et régressives
(modèles mathématiques fondamentaux linéaires ou non).
15 VILLA P., «Ces taux de change qui bifurquent
ou pourquoi ne peut-on pas anticiper les taux de change », CEPII, Avril
2004
16 BENASSY-QUERE, LARRIBEAU, McDONALD: « Models
of Exchange Rate Expectations: Heterogeneous Evidence from Panel Data »,
CEPII, 1999
Les prix ne peuvent donc être efficients. Devant ce
constat et eu égard à l'extrême difficulté de
prédire les taux de change, les banques préfèrent vendre
des produits de couverture à leurs clients plutôt que de leur
fournir de l'information sur les mouvements de taux de change à
venir17. Si les données fondamentales sont aisément
rendues publiques, elles sont connues ex post avec un retard. La conclusion,
sans appel, est néanmoins surprenante en raison du nombre de publication
sur les changes et leurs évolutions prévisibles (cf. annexe 2 sur
les travaux du BCA, cabinet de recherche québécois).
En revanche, ceci fait écho aux principes
d'investissement de George Soros. Spéculateur devant l'Eternel, il fonde
précisément ses stratégies sur le principe que les
marchés financiers sont chaotiques et ne réagissent qu'aux
réactions émotionnelles des agents devant le flux d'information
et la formation des prix, bougeant de situations déstabilisantes en
situations déstabilisantes18. Cette instabilité
évoquée par Villa peut au contraire alimenter une autre forme de
spéculation.
Par conséquent, il existence une incitation à
spéculer en raison de l'inefficience informationnelle des prix.
L'accès à une information privilégiée est source de
rendement supplémentaire. L'efficience ne pouvant vivre sans
l'inefficience, c'est la présence de cette dernière qui incite
à rechercher l'efficience pour maximiser son gain. Arbitrage ou
spéculation, cet avantage peut néanmoins ne pas
nécessairement induire une plus pleine efficience des marchés en
fonction de leur complétude et de leur capacité à
pleinement répartir de manière durable les risques entre les
agents.
En revanche, son application au marché des changes ne
semble pas pleinement acquise en raison de la nature des anticipations et du
coOt d'acquisition de l'information qui exige une trop grande expertise
technique et des outils innovants pour justifier dans la rentabilité sur
les marchés de cette démarche. C'est pourquoi nous nous
intéressons sur la capacité des agents à pouvoir s'ancrer
sur une notion de prix fondamentale fiable.
17 VILLA P. Op. cit
18 SOROS G., «L'Alchimie de la
Finance», Editions Valor, 1998
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