§2. OPA et comité d'entreprise
146. - A l'heure actuelle, à
l'occasion du lancement d'une offre publique, le CE est l'émanation des
salariés qui peut jouer un rôle dans la sauvegarde de
l'intérêt général.
L'article L.432-1 alinéa 467(*) stipule :
« Dès que le chef d'entreprise a connaissance du
dépôt d'une offre publique d'achat ou d'une offre publique
d'échange dont son entreprise fait l'objet, il en informe le
comité d'entreprise. Le comité invite, s'il l'estime
nécessaire, l'auteur de l'offre pour qu'il expose son projet devant
lui. »
La loi permet donc au CE de s'intéresser à la
procédure de l'OPA dont l'entreprise est la cible.
147. - Plus récemment encore, la loi
du 15 mai 200168(*)
relative aux nouvelles régulations économiques a introduit une
mesure qui donne au CE un poids plus important à l'occasion d'une
OPA.
Le dispositif semble avoir son intérêt tant
l'aspect politique voire idéologique a été discuté
et critiqué.
Comme auparavant, le CE peut faire comparaitre devant lui
l'initiateur de l'OPA en le convoquant au moins trois avant. Cette invitation
est également ouverte au comité de groupe quand l'entreprise
prise pour cible est la société dominante.
La novation apparaît dans les sanctions qui sont
assorties. En effet, en cas de non présentation devant le CE,
l'initiateur de l'offre peut se voir privé du droit de vote
attaché aux titres de la société cible, cette sanction
pouvant être étendue aux titres des sociétés
contrôlées et des sociétés contrôlantes.
148. - Ainsi, la loi NRE69(*), dans son dispositif relatif
aux offres publiques introduit un aspect coercitif pour renforcer l'information
auprès du CE qu'avait envisagé la loi du 2 août 1989. La
loi précise que le CE pourra définir le caractère hostile
ou amical de l'offre publique envisagée.
En outre, toujours dans le but de préserver
l'intérêt social, la loi impose dorénavant à
l'offrant de préciser, dans sa note d'information, ses orientations en
matière d'emploi. Cependant, la rédaction de cette mesure semble
indiquer que l'initiateur doit s'expliquer sur ses orientations sociales pour
sa société et non pas pour la société qu'il
désire absorber.
149. - Plus précisément, la
nouvelle rédaction de l'article L.432-1 du Code du travail,
prévoit qu'en cas de dépôt d'une OPA ou d'une OPE,
l'employeur doit réunir immédiatement le CE pour l'en informer.
C'est au cours de cette réunion que le CE décide ou non
d'entendre l'initiateur de l'OPA et se prononce sur le caractère de
l'OPA ou de l'OPE. Parallèlement, dans les trois jours suivant le
lancement de l'OPA, l'assaillant doit présenter au CE une note
d'information définissant les orientations en matière d'emploi de
la personne physique ou morale ayant l'offre déposé l'offre
publique.
Dans les quinze jours suivant la publication de la note, le CE
se réunit une deuxième fois pour procéder à
l'audition, s'il l'a décidé lors de la première
réunion, de l'initiateur de l'offre. Sont présents lors de
l'audition le président, les membres du CE et/ou un expert, l'auteur de
l'offre assisté s'il le veut de personnes de son choix. Celui-ci
« prend connaissance des observations éventuellement
formulées par le comité d'entreprise ». Le refus
de l'auteur de se présenter à cette convocation le prive du
bénéfice de son vote. « La sanction est toutefois
levée le lendemain du jour où l'auteur de l'offre a
été entendu par le comité d'entreprise de la
société faisant l'objet de l'offre. Il en sera de même si
le chef d'entreprise ne fait pas l'objet d'une seconde convocation dans les
quinze jours qui suivent la réunion initiale à laquelle il avait
été convoqué. Dans ce dernier cas, l'absence d'une
manifestation de volonté du comité équivaut à
rendre la sanction sans objet »70(*).
150. - Enfin, notons que la loi NRE
élargit également le rôle du CE dans le fonctionnement de
la structure sociale et en fait de plus en plus un organe incontournable
à côté des assemblées d'actionnaires.
Désormais, deux membres du CE pourront assister aux
assemblées des sociétés. Ils peuvent, s'ils le
désirent, être entendus lorsque la délibération de
l'assemblée exige l'unanimité (cas fort rare).
Le CE peut aussi demander aux juges de nommer un mandataire
chargé de convoquer l'assemblée générale71(*).
B. Défense et intérêt
social
151. - Il peut être dans
l'intérêt social de se défendre ; nous l'avons
à plusieurs reprises démontré dans cet écrit. Dans
le cas supposé où, lors d'une OPA, l'intérêt social
est en grande partie incarné par les salariés et leurs
représentants, il existe des moyens de défense, issus pour
beaucoup de la pratique, qui permettent aux salariés de soutenir les
stratégies de défense mises en place par leurs dirigeants.
Cette position s'explique notamment face à l'initiative
d'un raider dont le projet purement financier fait fi de l'emploi.
* 67 Introduit par la loi du 2
août 1989
* 68 Loi NRE du 15 mai 2001
* 69 Voir notamment :
J.-J. DAIGRE, Loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations
économiques, aspects de droit financier et de droit des
sociétés, JCP G, 20 juin 2001, n°25, p.1197 ;
J.-J. DAIGRE, Loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations
économiques, aspects de droit financier et de droit des
sociétés, JCP G, 27 juin 2001, n°26, p.1255 ; F.
TAQUET, La loi sur régulations économiques,
l'amélioration des conditions d'information des comités
d'entreprise, JCP G, 11 juillet 2001, n°28, p.1357.
* 70 F. TAQUET, La loi
sur régulations économiques, l'amélioration des conditions
d'information des comités d'entreprise, JCP G, 11 juillet 2001,
n°28, p.1357.
* 71 Il réside
toutefois un doute concernant cet aspect car s'il est écrit
« dans toutes les sociétés », la loi fait
référence plus loin aux « actionnaires ». Il
faudrait donc étendre ce pouvoir aux seuls comités d'entreprise
des sociétés par actions.
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