1.1. 2 L'école des besoins de base
Comme le mot l'indique, c'est une approche basée
essentiellement sur des considérations non monétaires
appelées besoins de base. Il faut entendre par besoins de base, les
commodités qui remplissent les besoins physiologiques et de
sécurité d'un individu. Lorsque les différentes
commodités sont utilisées simultanément, cette approche
est qualifiée de multidimensionnelle. De façon pratique,
l'approche non monétaire multidimensionnelle suppose agréger la
pauvreté en construisant via une technique de l'analyse factorielle
[Asselin (2002), Bry (1995)], un indicateur composite de bien-être avec
un ensemble de données14 qui seraient censées indiquer
toutes à la fois le niveau de bien-être du sujet
considéré. Ainsi, pour ce courant, le pauvre est une personne
privée d'un minimum de confort de base jugé
élémentaire ou préalable à l'atteinte d'une
certaine qualité de vie ; il s'agit de l'accès : à la
nourriture, à l'eau potable, au logement, aux soins de santé,
à l'éducation de base, aux aménagements sanitaires, au
service de transport public, etc.
13 La théorie microéconomique appelle cette
attitude de `'comportement rationnel ou comportement « maximisateur »
du consommateur.
14 Commodités ou besoins de base.
L'inconvénient de cette façon de traiter la
pauvreté réside dans le fait que les commodités sont
à l'évidence une satisfaction variable en fonction des tranches
d'âges et du sexe des individus. Par exemple, l'éducation scolaire
peut être utile pour une personne de 15 ans alors qu'elle ne l'est pas
pour un enfant de 2 ans.
1.1.3 L'école des capacités
L'école des capacités insiste sur les moyens
humains, c'est-à-dire les habiletés humaines dont disposent les
sujets pour convertir leurs ressources en satisfaction (Serge Matchinidé
et alii, 2006). C'est encore ici une option non monétaire de la
pauvreté. Sen, chef de file de cette considération, assimile le
bien-être aux droits susceptibles de fournir des informations sur des
dimensions fondamentales pour les individus, laissées en marge par le
concept d'utilité. Vue comme telle, l'approche par les capacités
concerne les droits positifs des sujets en essayant via le concept de
«fonctionnements», de transposer ces droits dans un espace plus
aisément mesurable. Selon Sen (1992), les consommateurs désirent
les biens pour leur valeur instrumentale, et non pour leur utilité
directe. Et dans la mesure où les biens peuvent être
représentés comme des blocs de
«caractéristiques» ou d'«attributs», il est
concevable d'exprimer les comportements individuels en termes
d'exécution d'une fonction de production spécifique, permettant
de transformer les caractéristiques incorporées dans les biens en
satisfaction des besoins.
En conséquence, cette conceptualisation implique que
l'utilité n'est pas une variable objective, mais le sous-produit d'un
processus15. Notons que cette approche de la pauvreté en
termes de «facultés», contestant l'idée que la ligne de
pauvreté puisse être représentée par un point de la
fonction de dépenses des consommateurs, a d'importantes
conséquences au niveau empirique. En effet, contrairement aux mesures de
la pauvreté en termes de besoins de base, de ressources ou de revenus
réels, l'insuffisance des facultés élémentaires
nécessaires pour atteindre certains minima acceptables d'un ensemble de
besoins de base, peut être, en principe, directement
appréhendée. A cet égard, chaque sujet est
caractérisé par un ensemble d'attributs : être nourri,
vêtu, logé, éduqué, soigné, etc. ; et la
pauvreté est spécifiée dans une perspective
multidimensionnelle, indépendamment de toute référence
à des hypothèses spécifiques plus ou moins
vérifiées, liées au comportement de consommation. Ainsi,
cette option analytique suggère une supériorité de la
méthode directe, comparativement à celle indirecte du revenu ou
des dépenses. Le plus grand mérite de cette école qui
vient en
15 L'option analytique du Rapport Mondial sur le
Développement Humain 2000 du PNUD s'inscrit dans cette perspective.
complément de l'école des besoins de base, est
d'avoir reçu une résonance propice du PNUD qui publie
désormais (et depuis 1990) une série d'indicateurs composites de
grande renommée internationale servant de comparaison des profils de
pauvreté des différents pays ; parmi lesquels nous pouvons citer
l'IDH et l'IPH16. Le chapitre 2 présente davantage de
détails d'élaboration de ces indices ainsi que leurs valeurs dans
certains pays du monde.
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