A.- REPERCUSSIONS SUR L'AUTONOMIE LOCALE
Si la question de l'autonomie locale est le fait de la
décentralisation territoriale, laquelle
est à l'origine du développement des
sociétés modernes, en Haïti, c'est l'inverse des choses
qu'on observe, malgré les réformes prônées par la
charte du 29 Mars 1987. Toutefois on reconnaît l'objectif visé par
les constituants de 1987 : rechercher le maximum de consensus possibles,
et prévenir les conflits entre les différents paliers.
Malheureusement, après cette longue période, l'institution locale
n'est pas encore un organisme viable. Elle n'accuse que fiasco, échec,
confusion, et double emploi. Personne ne connaît véritablement sa
place sur le terrain. Le député ou le sénateur
réclame de la décentralisation, le maire de son côté
exige plus de compétences pour entreprendre des projets de grande
envergure et chacun politise à l'extrême son action pour
établir un rapport de force politique personnelle. L'autonomie locale
reste théorique, traduite par l'absence de ressources financières
suffisantes leur permettant de fonctionner librement dans les limites
fixées par la loi. Cet état de dépendance existe aussi
entre des niveaux de collectivités différentes. A titre
d'exemple, la commune doit attendre une subvention de l'État central
pour pouvoir fonctionner, de l'autre côté, les membres des CASEC,
attendent leur salaire de la commune. C'est une forme de dépendance
hiérarchisée. Les élus locaux ne disposent pas d'une marge
de manoeuvre ou de choix réel pour résoudre les problèmes
de leurs mandants.
Quelquefois, par peur d'être limogé pour la
moindre position contraire à la politique du pouvoir central, les
élus de proximité affichent très souvent un comportement
de passivité. Dans ce cas, leur indépendance morale est
piétinée par un pouvoir central qui abuse de son pouvoir de
contrôle et gère leur avancement. Les autorités locales
sont quasiment vouées à la misère et au mépris de
leur fonction qui est si digne.
Comment peut-on arriver à l'implantation d'un ordre
nouveau, quand les agents privilégiés qui devraient actionner
cette mise en place sont marginalisés, piétinés,
minés par un État central dépourvu d'un véritable
plan national de décentralisation bien charpenté par
un ministère des collectivités territoriales et de la
décentralisation dont la création s'avère
nécessaire pour le moment. Il est quasiment impossible de
décentraliser le pays sous l'égide d'une direction des
collectivités territoriales n'ayant pas de voix
prépondérante au ministère de l'intérieur lequel
ministère devrait s'occuper de la sécurité
intérieure du pays. Aujourd'hui demandons-nous un ministère comme
celui-ci, qui se relève incapable de juguler la crise
d'insécurité interne qui a fait tant de rage au pays, peut-il
s'occuper valablement et en même temps de la décentralisation et
de la sécurité interne du pays. Alors, il y a lieu pour les
nouveaux décideurs du pays de prendre en compte ce problème et de
penser à créer un ministère des collectivités
territoriales et de la décentralisation.
1.- UNE AUTONOMIE
CONTROVERSEE
Le lexique des termes juridiques expose la notion
d'autonomie comme étant la situation d'une collectivité ou d'un
organisme disposant d'un pouvoir propre de gestion de ses recettes et de ses
dépenses, quand ils disposent des ressources propres à la
collectivité en question. En Haïti, cette notion d'espoir pour le
développement local reste théorie et voeu pieux du
législateur. Absence de capacité de gestion et de captation
autonome de ressources à l'intérieur des municipalités et
des CASEC, le manque de personnel qualifié et bien
rémunéré; font de l'autogouvernement municipal une affaire
de flou. S'il est vrai que l'objectif poursuivi par la constitution est de
permettre une prise en charge et une véritable autonomie locale, il n'en
demeure pas moins vrai qu'à cette phase de mise en route, le pouvoir
central doit subir l'épreuve de la transparence, de compétence et
renflouements financiers systématiques.
Malheureusement, le vocable développement local
en Haïti ne connaît qu'illusion et équivoque. Près de
17 ans du vote de la charte de 1987, les départements, les
communes, les sections communales se trouvent coincés par
une tutelle inappropriée, et trop étroite. Sur fond
d'uniformisation, la stricte hiérarchisation des fonctions concentrent
les compétences en quelques lieux privilégiés du
système, particulièrement à la République de
Port-au-prince.
Cet état de fait est le fruit d'une part, de
carence juridique existant dans le domaine et l'inapplication des lois
existantes et, d'autre part, d'une absence de vision claire à un plan
global de développement du pays, ajouter à un manque de
volonté pour un véritable changement de base, l'absence du sens
de responsabilité de ceux appelés à mettre en place les
structures. Les décisions ne sont pas cohérentes, très
souvent teintées d'irréalisme et d'illusion. Quand au fond de
gestion accordé par le gouvernement central, ce dernier l'utilise pour
vassaliser ou limiter la liberté d'action des collectivités
bénéficiaires
2.- UNE ADMINISTRATION LOCALE
MORIBONDE
Le processus de la décentralisation
prôné par la constitution du 29 mars 1987 se heurte dans son
application à des obstacles divers. En tout premier lieu, il faut noter
l'opposition des couches privilégiées, détentrices de la
quasi totalité des richesses nationales. La résistance des
fonctionnaires de la République de Port-au-prince quand aux implications
que supposent les changements dans l'appareil de l'État et le transfert
de compétences vers les proximités.
Ensuite, l'absence d'un projet national de
développement, rationnellement défini, accompagné d'une
stratégie de développement régional claire. Sans quoi, il
ne pourrait exister une vision qui aille au-delà de la question locale.
En outre, il faut tenir compte du refus des nouveaux acteurs à s'adapter
à la nouvelle situation politique du moment. Il y a aussi la persistance
de la culture politique dictatoriale et centralisatrice,qui réduit les
marges de manoeuvres des collectivités locales et convertit ainsi leurs
missions à une simple affaire de voirie, à l'entretien des
cimetières et des abattoirs.
Pour plus d'un, le problème est aussi du
côté des administrateurs locaux qui dans bon nombre de cas, sont
incapables de s'adapter à la nouvelle situation par défaut de
qualification, de capacité de gestion et par ignorance même de
leur mission. S'il faut parodier Du Mornay dans ses termes :
« Gérer ou encore bien gérer n'est pas l'apanage de
n'importe qui, d'autant que les administrateurs de proximité sont pour
la plupart des gens qui ne savent ni lire ni écrire. Ainsi, il est
inconcevable de voir instituer un fond de gestion sans questionner le
phénomène administratif local. Aujourd'hui la majorité des
municipalités haïtiennes vivent dans un marasme économique
sans précédent aggravé par une longue crise
post-électorale depuis mai 2000.
Partout, des voix se sont élevées pour
dénoncer cette situation intenable. Pourtant, les autorités de
l'administration centrale n'entendent nullement atténuer voire
supprimer la main mise établie sur les autorités locales par le
biais du contrôle a outrance et politique exercé sur les actes de
ces dernières. Comme a dit Lionel TINGUYT : « Parler de
tutelle à l'égard des collectivités locales,
c'est-à-dire qu'on les regarde comme des mineurs juridiquement
incapables de prendre par eux-mêmes des décisions
définitives. Seul l'accord d'une personne qui leur est
étrangère, qui est supposée avoir un jugement plus juste
sur celui de ces mineurs valide leurs décisions. Un tel traitement ne
met- il pas en danger la question d'autonomie des collectivités
territoriales? »1
B.- REPERCUSSIONS SOCIO-ECONOMIQUES
I.- ASPECTS SOCIAUX
Haïti vit aujourd'hui une situation
difficile, elle devient une société divisée, confuse et
déboussolée. Cette situation complexe due à une crise de
conscience a donné naissance à une sorte de torpeur morale. Plus
de confiance dans les institutions, la justice est domestiquée et
n'inspire que méfiance des citoyens. L'État est
décrié parce que partial. C'est une politique de clan qui
prévaut ou le collectif est remplacé par l'individuel. Haïti
devient plus pauvre qu'elle ne l'était il y a vingt (20) ans, la nation
la plus misérable du monde après la Bengladesh et
l'Éthiopie. La première République Nègre libre du
monde, quelle prétention! Les causes de ce bilan de faillite sont
nombreuses, mais la plus évidente de toutes, c'est le primat que les
gouvernants ont donné à l'idéologie et la politique sur
l'économie, au discours sur l'action, à la démagogie sur
la raison.
1.- Dumornay, Jacques, op cit p 5
Donc le panorama social est désastreux, plus de 80% de
nos compatriotes perçoivent un revenu par tête inférieur
à 100 dollars par an. Ils vivent par conséquent au-dessus du
seuil absolu de pauvreté. Quand à la nourriture, la consommation
moyenne de protéines est aussi la plus faible des caraïbes et de
l'Amérique latine. A ce titre, plus de 80% des enfants de 0 à 5
ans souffrent de la malnutrition; 30% des femmes enceintes sont
anémiques et 50% de décès enregistrés sont dus
à des maladies infectieuses. Pour ce qui est de la couverture
sanitaire, à peine la moitié de notre population des villes
dispose de conduites d'eau à domicile et quant à la
qualité de cette eau, c'est encore plus inquiétant. Près
de 90% des médecins résident à Port-au-Prince. Il n'y a
qu'un médecin pour 75.000 Habitants dans le milieu rural.
En matière d'éducation, le taux d'enfants
scolarisés est de 17%, le plus bas de toute l'Amérique latine.
On compte environ 80% d'analphabètes dans l'ensemble du pays et 90% dans
les zones rurales. Un fait inquiétant et douloureux, la moitié
de ses élèves quittent l'école au bout de la
première année. En somme, c'est une société
où l'absence des règles est devenue la règle.
a) Une société
marginalisée
Si la réforme des années quatre-vingt
(1980) a apporté certains changements, elle a toutefois ignoré ou
négligé le citoyen ou le paysan. Malgré les correctifs
apportés dans les textes relatifs à l'implantation d'un Office de
Protection Civile (OPC), selon le voeu de la Constitution de 1987, cet
office n'est connu que dans la métropole de Port-au-prince,
Cette institution sociale qui devrait prendre en compte tous les Citoyens
Haïtiens sans distinction, semble ne pas être encore à la
hauteur de sa tâche.
Cette exclusion systématique devient une entrave
à la bonne marche de la société dite égalitaire,
créant, aujourd'hui une couche ou une classe victime de la domination
à outrance d'une classe traditionnellement dominante. Les
conséquences sont aujourd'hui visibles, d'une part : l'exode rural,
la bidonvilisation, la pollution de l'air, l'insalubrité et d'autre
part, la délinquance, les enfants des rues, le banditisme. Ce sont
autant de preuves que la société Haïtienne n'est pas en
bonne santé. Cette notion de société égalitaire,
née de l'indépendance, ne tient pas en réalité. On
inventa aussi le système de
« l'arrière Pays
», en dehors de l'information, de la politique, du
bienfait de la technologie et du savoir.
Cette pratique d'assujettissement social met la
société Haïtienne en contradiction avec elle-même,
puisque le fossé économique existant entre les deux pays (moun la
vil, moun mòn) prend aujourd'hui une allure de séparation
culturelle et quasi-nationale. D'un côté, dominent le
français et le catholicisme ; tandis que le réflexe de
l'autre est le Créole et le vaudou.
b) Des institutions vassalisées
La constitution du 29 mars 1987 prévoit la
création des institutions indépendantes qui mettront en place des
structures pouvant faciliter l'établissement d'un ordre nouveau tant
recherché par le peuple Haïtien à savoir une
démocratie locale véritable.
Malheureusement, la totalité des institutions qui ont
eu la chance de voir le jour que ce soit : le CEP, l'office
de la protection Citoyenne, la cour supérieure des comptes
et du contentieux administratif, la police nationale,
ont été galvaudées dans leur noble mission. Les
résultats des élections de Mai 2000 qui prêtaient à
tant d'équivoque, de contestations et de revendications, ont
été un coup dur pour les gens de la démocratie. Les
mêmes remarques sont aussi valables pour la PNH, qui s'est
transformée en une sorte de milice politique pour laquelle les notions
de protéger et servir ne sont valables
que pour les dépositaires du pouvoir politique et économique.
Soulignons que le parlement d'alors a fait fiasco parce que les contestations
soulevées à l'occasion du scrutin y afférent l'ont
empêché de remplir dans la dignité sa noble mission
d'exercer un contre-pouvoir vis-à-vis de l'Exécutif. Bref le
bilan parait négatif.
II.- ASPECTS
ECONOMIQUES
Haïti, la première République Nègre
libre du monde vit, depuis plusieurs années, dans une situation de crise
générale de plus en plus grave. Depuis 1977, notre croissance
économique a été négative. On assiste passivement
à un déclin accéléré de l'agriculture, une
stagnation de la production industrielle, une faiblesse de plus en plus
accentuée des exportations, des distorsions de prix, une
dégradation vertigineuse de l'environnement, une montée de la
bidonvilisation particulièrement à Port-au-prince, aux
Gonaïves, au Cap-Haïtien et aux Cayes, un exode vers
l'étranger, un chômage chronique et un dépérissement
des infrastructures.
a) La Diminution des Emprunts
Les effets de la crise politique sur la vie économique
de la population englobent non seulement la peur des investisseurs
déjà installés au pays, laquelle peur a favorisé,
le déplacement des capitaux vers des pays plus favorables comme la
République Dominicaine, mais aussi, le refus des institutions
financières internationales à la coopération. Cette
absence de la bonne gouvernance a favorisé, aux Organisations Non
Gouvernementales (ONG), l'acquisition des fonds destinés à
l'Etat. Ces ONG profitent souvent du laxisme de l'appareil de l'Etat et de
l'application des lois pour s'ingérer dans les affaires locales. Pire,
encore leurs activités sont très souvent privées de
méthode et de suivi avec l'objectif unique de préparer de grands
projets pour justifier la présence d'un tas d'experts et de consultants,
installés dans de somptueux bureaux, ignorant et la
réalité du terrain et les priorités essentielles du milieu
où ils évoluent.
Haïti ne dispose pas d'un programme de soutien financier
du FMI qui malheureusement continue à s'inquiéter de la
détérioration de la situation économique, de la baisse du
revenu par habitant et de la hausse du déficit budgétaire. A
propos, depuis 1996, on n'a fait que reconduire le budget national. De plus,
la crise politique et économique déjà trop
perdurée, doublée d'un climat d'insécurité
généralisée qui freine toute tentative internationale
à un développement économique réel en Haïti.
b) Une Inflation Galopante
La crise politique sur la vie économique Haïtienne
a eu pour conséquences non seulement un déplacement de capitaux
vers des pays politiquement plus stables et plus rentables, mais elle a aussi
créé une situation de déséquilibre
économique et monétaire caractérisée par une
montée vertigineuse des prix et une diminution considérable du
pouvoir d'achat. De 1996 à 2001, le coût de la vie a
augmenté considérablement. De nos jours, il n'y a plus de bornes
au niveau du commerce parce que le rôle de stabilisation et de
réglementation conféré à l'Etat devient une simple
affaire de théorie.
En somme, la marchandise n'est pas délivrée
comme le veut la constitution du 29 mars 1987, qui a renforcé les
institutions en vue d'instaurer un état de droit par la restauration de
l'autorité de l'Etat. On assiste au contraire à une
réédition des pratiques antérieures revues sans
correction.
Cependant, il faut admettre que, malgré l'inexistence
d'un pouvoir local réel, un pas positif a été franchi avec
la charte de 1987 parce que les théories qu'elle a
préconisées ont modifié considérablement les
tendances qui existaient depuis des décennies sur l'administration
territoriale Haïtienne. L'isolement des agents locaux est, dans une
certaine mesure, interrompu. Une ambiance de compréhension et de pouvoir
entre le niveau national et le niveau local est envisagée. Dans ce cas,
peut-on dire sans réserve que la décentralisation a
échoué en Haïti, du fait qu'elle n'a pas après
dix-sept (17) ans abouti à l'instauration d'un pouvoir local
réel, visible et clairement identifiable par ses bienfaits à la
population ?
Certes ! Le tableau dressé est sombre et
préoccupant. Mais il y a encore de quoi à espérer si les
propositions et les modèles que nous allons exposer dans le chapitre
suivant sont pris en considération par les acteurs et décideurs
politiques de ce pays.
CHAPITRE
IV
VERS DE NOUVELLES APPROCHES POUR LA DECENTRALISATION
TERRITORIALES EN HAITI
Le système politique haïtien
historiquement est marqué par l'autoritarisme, l'exclusion
politique et sociale, et la centralisation du pouvoir à la
métropole de Port-au-Prince, bien que depuis 1843,
la commune soit considérée comme une entité
autonome. Ainsi, l'expression collectivités territoriales devient une
question de s'auto- administrer, c'est-à-dire, un processus de transfert
rationnel du centre vers la périphérie. Pourtant, les
modalités sont diverses, suivant la structure des états
considérés dépendamment de la culture et de la tradition
historique, en somme suivant le degré de civilisation de ce peuple.
Pour le cas d'Haïti, si l'on veut réviser
voire repenser les relations qui lient l'Etat aux collectivités
territoriales, il paraîtrait évident de considérer des
modèles tant à structures fédérales, tels : La
Belgique, le Mexique, le Brésil qu'à structures unitaires
tels : La France, la Bolivie, l'Italie et certains pays de l'Afrique,
pouvant nous servir de référence dans les prochaines
démarches à adopter pour une promotion véritable de
l'autonomie locale en Haïti.
Ainsi pour économiser du temps, nous nous
bornons à analyser un modèle à structure
fédérale, le Mexique qui loge notre continent et un autre
à structure unitaire, la France, notre ancienne métropole du
continent européen. A travers cette comparaison, il y aura lieu de
démontrer la spécificité de chacun de ces
modèles.
SECTION I.-
LE FEDERALISME ET LA DECENTRALISATION
MEXICAINE
L'Histoire a démontré au cours du XXe
siècle que démocratie et
fédéralisme allaient de pair. Ainsi, pour
Timothée Anna, spécialiste de l'histoire du Mexique, le
fédéralisme a été, pour les trois pays qui
composent l'Amérique du nord, un élément intime de leur
histoire et de leur identité spécifique.
En effet, si les Etats-Unis ont été le
premier, à inventer le système, le Mexique, en 1824, par
réalisme géographique et pour des raisons d'ordre sociale,
économique et politique, s'est constitué en Union
Fédérale.
A.- HISTOIRE DU FEDERALISME
Le fédéralisme Mexicain a surgi pratiquement en
même temps que l'aspiration à l'indépendance. En 1821, au
moment de son indépendance, le Mexique était une mosaïque de
régions. A l'époque, il n'y avait pas d'Etat national, ni
d'organisation. En 1824, soit trois (3) ans après l'indépendance,
des députés sont élus pour siéger au sein du
premier congrès; et ce fut les premières expériences
démocratiques pour le Mexique. Alors, des instructions sont
passées aux députés par leurs régions d'opter pour
un système fédéral.
Cependant les 300 années de vie coloniale avaient
enraciné une culture centraliste rigoureuse et profonde. Ce qui a
occasionné, pendant trois décennies, une succession de guerres
civiles entre les partisans du fédéralisme et ceux du
centralisme. Le résultat de ces guerres a été lourd et
dévastateur : le Mexique a subi des agressions et des invasions
étrangères. Il a perdu plus de la moitié de son territoire
national.
1.- LA CONSTITUTION MEXICAINE DE 1857
La volonté tenace des partisans du
fédéralisme a donnée naissance en 1857 à une
nouvelle constitution qui, inspirée du libéralisme, a
établi le régime démocratique, républicain et
fédéraliste. Malheureusement, l'idéal et la
théorie préconisés par cette nouvelle constitution
étaient une chose, et la pratique en était une autre. Un Etat
national fut érigé, et la vie politique des régions et des
communautés fut assujettie aux intérêts de la
république au moyen d'une dictature autoritaire et centralisée.
En pratique, le XXe siècle a
trouvé le Mexique, sans démocratie, sans liberté politique
et individuelle, donc sans capacité de décision pour les Etats et
les municipalités. Malgré tout, la revendication pour un
fédéralisme effectif, capable de créer une impulsion
à la démocratie et de réduire les inégalités
sociales, reste un voeu persistant pour le peuple mexicain.
2.- APPORT DE LA CONSTITUTION DE 1917
La révolution de 1913 - 1914 a imposé à
nouveau la démocratie et la justice sociale, tout en revendiquant les
droits politiques des Etats et des municipalités. De cette
révolution est sortie en 1917 une nouvelle constitution qui a pleinement
ratifié les principes fédéralistes. Il est
intéressant de faire constater que deux articles fondamentaux du
fédéralisme Mexicain, les articles constitutionnels 40 et 41,
ont gardé dans la constitution de 1917 leur rédaction originale
depuis la charte de 1857. L'article 40 affirme que le Mexique est un Etat
fédéral formé d'Etats libres et souverains, c'est ce qu'on
appelle selon la théorie de Tocqueville la co-souveraineté d'un
état fédéré.
L'article 41affirme « le peuple exerce sa
souveraineté au moyen des pouvoirs de l'union dans les cas de la
compétences de ceux-ci ».
L'article 115 stipule « Les Etats adopteront,
pour leur régime intérieur la forme de gouvernement
républicain, représentatif, populaire, et ayant à la base
de sa division territoriale et de son organisation politique et administrative.
La municipalité est libre. Les municipalités sont
administrées comme Haïti par un conseil municipal élu
à la suite d'un vote populaire direct à la différence que
la municipalité Mexicaine a la pleine liberté pour administrer
ses finances. La comparaison des trois articles précités nous
montre que le Mexique est défini comme un Etat fédéral et
constitue l'instance suprême de décision dans leur cadre de
compétence. Il y a coïncidence des décisions entre la
fédération et les entités fédératives
(article 40 - 115) et plus, celles-ci peuvent se donner elles-mêmes
librement leurs propres constitutions (article 41). Enfin il y a une division
de constitution (article 124).
Selon le principe de la cohabitation des états,
la constitution mexicaine de 1917 a primé le fédéralisme,
et selon la terminologie de Lowenstien, c'est une constitution a tendance
sociale, économique et politique.
Pour ERNESTO ZEDILLO PONCE DE LEON, président du
Mexique, le fédéralisme est pour le Mexique "la meilleure
organisation politique pour le développement de la justice sociale,
pour une bonne démocratie, pour une nation formée d'une grande
diversité culturelle et d'un vigoureux pluralisme politique."
B.- EPANOUISSEMENT DU PROCESSUS DE L'AUTONOMIE
LOCALE
MEXICAINE : UN EXEMPLE POSITIF
POUR HAITI.
La possibilité de décision et d'actions
autonomes accordées par les constitutions mexicaines aux entités
fédératives, états et districts, fut une question de
préoccupation dès l'indépendance de l'Etat Mexicain.
L'organisation des institutions au niveau régional de district
s'inscrit en rupture presque complète avec l'idée de
décentralisation propre à un Etat unitaire. Les régions et
districts sont en effet conçus comme de véritables entités
fédérées disposant du pouvoir législatif pour des
compétences largement définies.
Le partage des compétences entre l'Etat et les
entités fédératives a été
établi sur la base du principe d'exclusivité et s'oppose à
toute forme de principe d'organisation fondée sur la notion de
compétences concurrentes. Une autre règle est le
principe d'équipollence valeur que la loi nationale.
Ce qui veut dire qu'il n'y a pas au Mexique de hiérarchie absolue et
rigide des normes. Cette facilité donne droit aux régions et
districts Mexicains d'approuver leur propre budget et de disposer de leurs
propres recettes. Ils peuvent contracter des emprunts aussi bien internes
qu'externes.
1.- PROPOSITION POUR UNE EVENTUELLE
APPLICATION
EN HAITI DU
MODELE MEXICAIN
En général les principes et les
modalités pour renforcer l'autonomie locale sont quasiment identiques
dans différents pays, cependant la mise en oeuvre d'un modèle en
est une autre paire de manches. Car, chaque pays possède, en dehors de
sa culture et de sa civilisation, une caractéristique
particulière. De ce fait, penser à une possibilité de
promouvoir en Haïti une autonomie locale à la Mexicaine revient
d'abord á réviser les éléments particuliers qui
caractérisent l'autonomie locale Mexicaine et ensuite de faire ressortir
les avantages et inconvénients qui s'y rattachent.
Le Mexique, dès l'indépendance en 1821, optait
pour un Etat Fédéral avec des entités
fédératives autonomes, libres d'actions et de compétences.
Donc une sorte de culture de partage et de répartition du pouvoir s'est
établie dans la vie politique Mexicaine. Cette absence
d'hiérarchie rigide et absolue a facilité, non seulement une
répartition du pouvoir de façon horizontale, mais aussi une bonne
articulation de compétences entres les collectivités locales. Ce
qui pourrait dans le cas contraire créer un blocage
hiérarchisé notamment aux palliers les plus bas.
Le principe de subsidiarité de Xavier GREFFE qui veut
qu'un pallier de collectivités doit assumer le type de compétence
pour lequel il est plus compétent, pour lequel il satisfait le mieux les
besoins de la population, ce fameux principe est en application au Mexique.
L'Etat fédéral exerce sa compétence dans le domaine
de la justice, de la sécurité sociale et dans les grandes
orientations politiques de la nation.
II est à remarquer que, malgré les avantages du
modèle Mexicain, il ne sera pas trop facile de le faire appliquer en
Haïti. Tout d'abord, contrairement au Mexique, Haïti a connu
dès l'indépendance une tendance politique dictatoriale
basée sur la centralisation. Les conséquences perverses de cette
culture dictatoriale et centralisatrice ont moulé les institutions dans
toutes leurs structures et les pratiques politiques Haïtiennes. Les
couches privilégiées de ce système, notamment les grands
fonctionnaires du pouvoir central, s'opposent énergiquement quant aux
implications que supposent les changements dans l'appareil de l'Etat et le
partage harmonieux des compétences et préfèrent opter pour
une politique de transfert Apparent plutôt que d'opter pour une gestion
réelle de proximité.
Les difficultés d'application sont dues à
l'inexistence d'un projet national de décentralisation
défini. Tout processus de décentralisation défini et
raisonnable doit se situer à l'intérieur d'un plan
global et d'une stratégie de développement régional
claire dans ses composantes essentielles. Sans cette vision nationale qui
déterminerait et programmerait l'articulation entre les
différents palliers et l'Etat central etc., ce sera encore de la
démagogie, de l'émiettement et le flou
généralisé. Enfin, outre l'emprise de la culture
politique, la résistance des fonctionnaires privilégiés
et bénéficiaires du système centriste, l'absence d'un
plan national de décentralisation, la lente adaptation des nouveaux
acteurs, il y a aussi comme difficulté d'application du modèle
Mexicain en Haïti, la faiblesse des organisations de la
société civile, des organisations de base, des associations
socioprofessionnelles, des syndicats, des groupements de paysans, des
organisations populaires qui, dans toutes sociétés normales,
constituent le grade- fou et l'avant-garde des principes. Ils deviennent
eux-mêmes de plus en plus faibles, désorganisées et
centralisées à la Métropole de Port-au-prince.
La constitution Mexicaine de 1917 en ses articles 40 et 124
stipule que les entités fédératives, les
communautés, les régions constituent l'instance suprême de
décision dans leur cadre de compétence. Cette division de
compétence claire et transparente a fait de la commune et des
régions, des entités libres et autonomes qui disposent des
pouvoirs de réglementation tant en ce qui concerne l'organisation
interne des services communaux qu'en ce qui concerne les intérêts
matériels de la commune.
Quant au personnel, la commune détient la charge de
fixer le statut administratif, le cadre et les échelles de traitement.
Enfin, elle fait les ordonnances de police ayant trait à la
propreté, la salubrité, la sûreté, la paix
des rues et des édifices publiques.
Malheureusement, la délimitation des champs de
compétences en Haïti fait défaut. La constitution de 1987
qui a créé les collectivités territoriales, a prévu
aussi des lois de programmation.
qui émaneraient du parlement haïtien en vue de
fixer le rôle et les limites de chaque palliers. II est
généralement admis que les parlementaires haïtiens, ayant
failli á leur mission d'encadrer les institutions nationales en
élaborant les lois cadres ou organiques prévues par la charte, se
sont transformés en de véritables courtiers cherchant ça
et lá de l'emploi pour leurs fanatiques zélés. II en
résulte un tas de conflits dans la pratique sur le terrain surgissant
entre mairies et délégations, assemblées
délibérantes et conseils exécutifs, et même entre
certaines mairie voisines á l'exemple des mairies de Tabarre et de
Pétion Ville qui, un jour en pleine réunion avec le ministre de
l'intérieur d'alors, le sieur Henri Claude Ménard, se
lançaient des propos obscènes sans que le ministre
tutélaire aient pu les calmer. C'est la conséquence d'un
prétendu état de droit dépourvu du droit dont l'expression
officielle est la loi portant régulation des relations sociopolitiques
pour les rendre harmonieuses dans la pratique. Ce qui est gravissime, c'est
qu'aucune institution sérieuse n'a été créée
pour résoudre les conflits inter- collectivités locales.
A l'heure actuelle, il est temps de se demander
pourquoi la justice haïtienne continue-t-elle de négliger
l'instauration de l'ordre des tribunaux administratifs. La justice
haïtienne est manchote parce qu'elle n'a que l'ordre judiciaire tandis que
l'ordre administratif retrouvée dans la justice de tous les pays qui se
veulent démocratiques, lui fait défaut.
En France, par exemple, les tribunaux administratifs
connaissent des conflits ou litiges entre les institutions locales. Lorsqu'un
préfet veut annuler une décision du maire de sa juridiction (par
exemple, la révocation abusive et arbitraire d'un employé de la
mairie pour non conformité á la loi, il ne saisit pas le
ministre français de l'intérieur, mais il saisit le tribunal
administratif de son ressort.
Quand il n'y a pas de borne, il n'y a pas de limite. Donc les
rôles n'ayant été fixés par aucune loi, cette
lacune grave a créé un grand désordre dans la gestion des
affaires publiques locales. Les élus se trouvent dans un monde sans
limite, oú ils ne peuvent pas identifier leurs prérogatives ni
déterminer les limites liées à leur fonction.
La réalité Haïtienne est
d'autant plus grave qu'il n'existe actuellement et ceci depuis le gouvernement
d'Aristide/Neptune que des agents nommés par l'exécutif au niveau
des municipalités.
2.- LE FEDERALISME ET SON SYSTEME DE
FINANCEMENT.
Ainsi, pour permettre aux collectivités d'exercer
pleinement leurs compétences en tant qu'ordre du gouvernement Mexicain,
les états fédérés et les municipalités, en
1990 ont vu augmenter leur capacité de recouvrement fiscal. Dans ce
sens, les ressources budgétaires, autrefois centralisées ont
été depuis lors transférées aux
collectivités territoriales. Pour chaque état, il a
été établi des attributions bien définies.
Le progrès le plus évident et le plus
significatif du fédéralisme mexicain, c'est la reforme du
système de transfert des ressources budgétaires du gouvernement
national aux collectivités territoriales. Certains impôts comme
l'IVA et l'impôt sur les revenus sont perçus par
le gouvernement national pour raison d'efficacité, d'autres, tels ceux
applicables à la propriété sont perçus par les
gouvernements locaux. Une grille de participation aux revenus perçus par
l'Etat a été établie pour la redistribution
(Péréquation) des ressources du gouvernement national. Les
ressources additionnelles sont destinées à des programmes de
santé, d'éducation et d'infrastructures de base.
Le gouvernement national Mexicain, pour mieux répondre
à son devoir social, a respecté le principe de
péréquation. Ainsi, les régions les plus
prospères se voient obligées d'intervenir pour aider les plus
nécessiteuses. Pour y parvenir, une loi fédérale est
votée. Cette loi détermine comment doit s'effectuer la
redistribution, cette formule reconnaît non seulement la capacité
de recouvrement fiscal des états et des municipalités, mais aussi
une redistribution aux états qui présentent les plus grandes
carences. Ainsi donc, la justice sociale est assurée et
surveillée non seulement par l'Etat fédéral mais aussi
par l'Etat de proximité.
Le cas d'Haïti en matière de finances,
représente un noeud pour une véritable autonomie locale
prônée par la constitution de 1987 qui reconnaît aux C.T
l'autonomie financière. En effet, si l'autonomie financière
traduit la capacité d'une collectivité à
générer ou à disposer des ressources financières
suffisantes et à les administrer en toute liberté, en Haïti,
c'est tout le contraire, quand on connaît la structure du budget de
l'Etat et le comportement du citoyen Haïtien quand il faut payer les
impôts. On observe que les collectivités territoriales sont
presque toutes sous la tutelle financière du ministère de
l'intérieur. Les maires se plaignent d'être dépourvus de
ressources adéquates pour mener à bien les affaires de leurs
communes.
Toutefois, l'application d'un modèle de
décentralisation en Haïti se révèle difficile, vu le
particularisme qui existe dans la structure politique, sociale et culturelle
d'Haïti. Si le Mexique a eu la chance de penser à un Etat
fédéral, il a gardé aussi
dès l'indépendance son autonomie ; ce qui
n'était pas l'idéal des pionniers.
Les obstacles à surmonter sont nombreux et
divers. De plus, les collectivités territoriales haïtiennes ne
disposent pas en effet de cadres formés qui répondraient au
exigences d'une éventuelle décentralisation, sans oublier
l'emprise de la culture politique dictatoriale, la résistance des hauts
fonctionnaires somptueusement logés dans le système comme de
véritables bénéficiaires. L'étude d'un autre
modèle celui de la France qui est notre ancienne métropole, nous
permettrait d'apprécier les grandes innovations apportées par la
mise en oeuvre des nouvelles techniques de décentralisation
administrative de sa juridiction pour solliciter le verdict d'annulation par le
juge administratif.
Excepté la Cour Supérieur des Comptes et
du Contentieux Administratif, CSC/CA dont le rôle est de trancher les
conflits entre l'Etat et les Collectivités Territoriales,
l'Administration publique et ses agents, de contrôler les recettes et les
dépenses de l'Etat, de vérifier la comptabilité des
Collectivités Territoriales, il n'est prévu nulle part qu'il
existe une institution chargée de trancher les contentieux entre les
collectivités locales elles-mêmes, entre les CT et les autres
institutions locales. Par conséquent, ce vide juridique existant au
niveau des institutions locales a créé une situation de tutelle
très favorable aux hauts fonctionnaires du ministère de
l'intérieur qui sont dejá récalcitrants par rapport
á une décentralisation réelle, effective et
opérationnelle en Haïti. On ne saurait construire un etat de droit
en Haïti sans l'instauration de tribunaux administratifs seuls
compétents en matière de conflits entre les institutions
nationales et locales de droit public. Une nouvelle charte devra prendre ceci
en compte.
SECTION 2.-
AUTONOMIE DES COLLECTIVITES
TERRITORIALES FRANCAISES
Deux tendances ont traversé l'histoire de la
décentralisation Française. Les unes ont vu le regroupement des
départements en une entité plus vaste à objectif
essentiellement économique, les autres, une décentralisation
administrative comportant, d'une part, un transfert d'attributions
administratives du gouvernement central aux collectivités locales et,
d'autre part, la constitution de nouvelles collectivités.
En 1981, avec l'arrivée de la gauche au pouvoir, une
orientation nouvelle a été donnée à la politique
décentralisatrice en France. Selon le discours du ministre de
l'intérieur de l'époque, Monsieur Gaston DEFERRE, on peut, en
effet, résumer cette réforme en peu de mots : Bref, ce
processus de démocratisation postule que le pouvoir soit
attribué au plus grand nombre.
Ainsi, l'administration locale a connu une transformation
profonde ; les provinces ont bénéficié du transfert
des entreprises, et la qualité des services publics a été
évaluée. Le pari de Gaston Deferre a été donc
gagné, le système de management a régné.
A.- COUP D'OEIL HISTORIQUE SUR
L'AUTONOMIE
CENTRALISTE
FRANCAISE
A l'origine, la gestion de la décentralisation
n'était pas liée directement à la démocratie
locale. Une école a été fondée après les
idées des Jacobins qui voulaient l'établissement d'un pouvoir de
proximité. Une fois que des politiciens ont fréquenté
cette école appelée : « Ecole
Patriotique », le centralisme excessif était vite en face
de nouvelles visions et de nouvelles orientations pour les collectivités
territoriales françaises.
Pour avoir une idée claire et nette de
l'évolution de l'autonomie locale en France, il s'avère
nécessaire de considérer la période dite
révolutionnaire et celle dite contemporaine.
1.- LA PERIODE
REVOLUTIONNAIRE EN FRANCE
L'administration territoriale française est
restée pendant une longue période centralisée et complexe.
Pendant cette période, l'Etat représentait la personne morale
unique et contrôlait tous les services locaux. C'était
l'absolutisme royal. Cette forme de pouvoir centriste va être
menacée par l'idée du fédéralisme de 1793 et
combattue par les jacobins qui vont écrire dans la devise même de
la république (Liberté, Egalité, Unité) cette
tendance sera considérée par Bonaparte.
L'administration locale était confiée
à des agents nommés par le pouvoir central, donc la notion de
souveraineté populaire n'était pas de mise, l'intervention
populaire était alors réduite à la composition des listes
de confiance. Le maire pour la commune, le sous-préfet pour
l'arrondissement et un préfet dans chaque département assuraient
l'exécution des décisions royales ; et pour ce faire, le
préfet donnait des ordres au sous-préfet qui lui-même les
transmettait aux villes, bourgs et villages.
Une Note nouvelle commencera à jouer avec la loi
municipale du 14 avril 1871, qui a introduit l'élection des conseillers
au suffrage universel avec la désignation du maire et des adjoints. De
1971 à 1984, une base de l'autonomie locale a eu lieu en France. En
1940, la liberté de fonctionnement est reconnue aux communes,
départements et régions. Le général Charles de
Gaulle, dans un discours du mois de mars 1968, a fait mention de la
décentralisation comme seul moyen de fortification de la France. Depuis
lors, elle devient un élément important des objectifs de l'action
gouvernementale.
En 1973, deux réformes sont entreprises par
le président Georges Pompidou, avec son ministre de réformes
administratives en 1974, Guiscard d'Estaing Valery, sur la présidence,
un comité de développement et de décentralisation ayant
à la tête le ministre Olivier Guichard. Cette commission avait
alors pour mission de diagnostiquer et d'élaborer les grandes lignes
d'une réforme générale, progressiste et
différenciée des institutions locales. Par la suite, un projet
de loi a été voté dans lequel nous trouvons deux
recommandations importantes :
· Augmenter les marges de manoeuvre des pouvoirs locaux
en diminuant les interventions de l'Etat central.
· Redéfinir la compétence des
départements et des communes. Donc, des attributions nouvelles leur sont
ajoutées. En 1981, toute une série de mises en place sont
entreprise pour consolider les acquis de l'autonomie locale. Cependant le
processus de mise en place des structures du changement d'un Etat
centralisé à un Etat dé- centralisé, a
été long et difficile du fait que les fonctionnaires
n'étaient pas prêts pour un tel changement.
2.- RESULTATS DE LA REFORME DE
1982
En 1982, la collectivité locale française se
trouve à son point d'épanouissement, l'autonomie locale lui a
été reconnue, la tutelle administrative supprimée et le
champs de compétences considérablement élargi.
Les textes justifiant l'évolution des
collectivités locales françaises sont importants à
souligner. Notons : la loi du 2 mars 1982, la loi du 30 septembre 1982
(sur l'orientation des transports, la loi du 29 juillet 1982 (sur la
planification locale) et la loi de juillet 1994 sur l'aménagement du
territoire.
Cette réforme a été
opérationnalisée en passant de la théorie à la
pratique. Par exemple : la subsidiarité ou d'efficience,
principe qui veut qu'un pallier de collectivité doit assumer le type de
compétences pour lequel il est plus apte ; celui pour lequel il
satisfait le mieux les besoins de la population. Principe au nom duquel
aujourd'hui, les communes sont chargées de résoudre les
problèmes les plus immédiats de la population tels : les
services d'Etat civil, assainissement des rues, l'entretien des routes, des
cimetières, les incendies etc. d'un autre coté, á un
niveau plus élevée se trouve l'Etat central qui assume sa
fonction régalienne comme par exemple : la sécurité
nationale, la défense nationale, l'aménagement du territoire,
l'éducation nationale etc.
Pour atteindre un tel résultat, un grand changement a
été opéré au sein de l'Etat français. Une
lutte assez longue et sans merci contre le comportement hostile du pouvoir
centriste fut menée. Le succès de l'autonomie locale
française qui a vite compris qu'ils ne peuvent être les seuls
acteurs de l'administration d'un pays comme la France.
3.- PEUT-ON APPLIQUER EN HAITI LE MODELE DE
L'AUTONOMIE LOCALE FRACAISE
L'histoire de la France avant la révolution est
fortement marquée par l'absolutisme royal à l'instar de celui de
Louis XIV au XVIIe siècle. La culture politique centraliste
et autoritaire á elle aussi moulé la mentalité
française l'époque prérévolutionnaire. Mais,
grâce aux efforts conjugués par les philosophes des
Lumières au XVIIIe siècle, la France a réussi
progressivement á se débarrasser de sa culture politique
dictatoriale pour s'adapter peu a peu aux nouvelles exigences imposées
par les idées révolutionnaires en gestation. II en résulte
qu'une nouvelle page a été tournée en France au
XVIIIe siècle mettant fin à l'absolutisme, en ouvrant
la voie à de nouvelles perspectives pour la République
française. II a fallu deux siècles du XVIII au XIX e
siècle pour qu'un vrai état de droit, fondé sur la vraie
démocratie participative opérationnelle, soit instauré en
France. Cela va sans dire qu'il n'est jamais facile de surmonter les obstacles
légués par un héritage dictatorial. Malgré tout, la
France restait fortement centralisée jusqu'à la moitie du
XXe siècle. Ce n'est qu'en 1982 qu'une vaste réforme a
profondément touché et transformé les structures
vétustes en France faisant ainsi disparaître les vestiges du statu
quo. En comparaison, l'histoire de la politique française n'est pas
différente de celle d'Haïti. Les deux pays ont quelque chose de
commun.
II nous est loisible d'alléguer que tout espoir n'est
pas perdu pour Haïti qui, malgré sa culture politique dictatoriale
et la résistance des décideurs récalcitrants, a dejâ
consenti de grands efforts au niveau de la Constitution relativement au domaine
de la décentralisation. A cette heure tardive, Haïti devra
démontrer sa capacité á poser et á résoudre
les problèmes non encore cernés, à opérationnaliser
les grandes innovations théoriques constitutionnelles qui jusque-la sont
demeurées sans aucun suivi. Certes, les difficultés à
surmonter sont nombreuses et complexes, mais la solution pour une sortie de
crise est là.
B.- LE MANQUE DE RESSOURCES HUMAINES ET
FINANCIERES :
DEUX OBSTACLES A SURMONTER ?
Il ne peut y avoir de décentralisation réussie
dans le partage de la pénurie,quand on connaît l'etat financier et
la structure du budget de l'Etat en Haïti ; tandis que les
collectivités françaises ont toujours été
dotées d'une fiscalité directe, propre et distincte de celle de
l'Etat depuis 1917. Quatre types d'impôts alimentent la caisse des
collectivités locales françaises, ils sont pour l'essentiel
à base mobilière : impôt foncier bâti, qui
frappe les habitants tant en zone urbaine que rurale, taxe
professionnelle, impôt mixte sur les immeubles possédés par
les entreprises et inscrit en bilan.
Il est clair, à l'analyse de la problématique,
que outre, les problèmes des compétences, les articulations entre
les divers niveaux ou la conception elle-même de la
décentralisation, le flou concernant les lois sur les
collectivités territoriales doit être résolu.
Dans le modèle français, les lois sur la
décentralisation ont bel et bien défini la réorganisation
des finances publiques, en préconisant que tout transfert de
compétences devra s'accompagner de transfert financier correspondant.
La loi du 2 mars 1982 en son article 102 prévoit
l'intégralité de la compensation des accroissements de charge.
A côté des dotations générales se
trouvent ajouter des dotations particulières :
· la dotation d'équipements scolaires
versée aux régions pour la compensation des transferts
d'investissement pour les lycées.
· La dotation d'équipements scolaires
versée aux départements suivants leurs capacités d'accueil
des établissements et de la taille de la population scolarisable.
· Enfin, la dotation versée pour la formation
professionnelle et l'apprentissage.
En somme la compensation financière
s'élève en 1993 à 63.048 milliards de Francs soit environ
25% de l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités locales.
En France les ressources financières ne
manquent pas.
De son coté, Haïti devra juguler la crise de
ressources financières qui, parce que celles-ci sont insuffisantes voire
inexistantes pour certaines communes et pour l'ensemble des sections
communales, rend les collectivités territoriales totalement
dépendantes du pouvoir central. Donc, comment peut-on admettre que des
sections de communes entièrement dépourvues de ressources
financières, soient autonomes ? Quelle
décentralisation ? Quelle autonomie, pour quelle
société, si ce n'est que la démagogie ? Avant de
proclamer autonome une division territoriale, il faudrait d'abord créer
en son sein les richesses matérielles pouvant répondre
positivement à ce processus d'autonomisation. Sinon, on ne fait que
patiner en place. Dans ce même ordre d'idées, la commune
française possède, outre les taxes et impôts
prélevés sur les contribuables, un patrimoine composé
d'actifs exploitables tels que les grands bâtiments appelés HLM
dont les produits fournissent des capitaux colossaux á la commune.
Citons aussi les sites, les parcs etc....
En effet, la création des richesses matérielles
au sein des collectivités territoriales aux fins de s'alimenter en
ressources financières, est de première importance pour la survie
de l'autonomie locale de toute collectivité territoriale quelconque et
pour la réalisation d'un développement durable en Haïti. Il
ne suffit pas de multiplier les structures décentralisées pour
dire qu'on fait de la décentralisation. A cette duplication de
structures doit correspondre un accroissement de richesses donc une
augmentation de richesses financières. Haïti n'est pas encore
à ce point.
Une autre interrogation importante á souligner
est ceci : comment et où va- t-on trouver les ressources humaines
qualifiées capables de travailler á l'efficacité du
système de décentralisation prôné par
Haïti ? Est-ce parmi les maires pour la plupart analphabètes,
a titre d'exemple celui d'Aquin qui savait à peine signer son nom.?
En France, la réalité est différente. Des
conditions sont établies pour occuper certains postes de
l'Administration publique. L'obtention d'une formation à l'Ecole
Nationale d'administration (ENA) ou dans une école
spécialisée est une condition primordiale. En Côte d'Ivoire
en Afrique, il existe une ENA pour former ceux qui s'intéressent
à la gestion de l'Administration publique. Rappelons à cet effet
que les pays de l'Afrique n'ont eu leur indépendance qu' á partir
des années 1950 pour la plupart.
Après deux cents ans d'indépendance
haïtienne durant lesquels nous n'avons essuyé que déceptions
et autres calamites du même genre, Haïti accumule encore des lacunes
administratives sans précédentes : absence d'une Ecole
Nationale d'Administration chargée de former les futurs administrateurs
nationaux et locaux, inexistence d'un ordre composé de tribunaux
administratifs hiérarchisés chargés de résoudre les
litiges entre les institutions locales de droit public. En Haïti, on a
l'impression que l'obtention du Baccalauréat haïtien I et II devenu
archaïque est la solution à tous les problèmes. Bref,
l'Administration publique Haïtienne n'est pas encore
professionnalisée à cause des effets d'un clientélisme
fort et grandissant. Toute tentative de professionnalisation de
l'Administration publique aurait pour effet d'écarter toute forme de
clientélisme en mettant l'homme qu'il faut à la place qu'il faut.
Cela exigerait aux dirigeants de nommer (des maires dans le cas de nomination)
des délégués formés à l'ENA haïtienne.
A vrai dire, Haïti n'est pas encore á ce point.
C.- VERS UNE APPLICATION EN HAITI DU MODELE
FRANCAIS
DE L'AUTONOMIE LOCALE
Une étude historique comparée entre la France
et Haïti peut servir de référence pour
montrer que tous les mouvements de revendications sociales et
politiques qui ont pris
naissance en France ont produit leur écho en
Haïti. Cette dernière a toujours imité les structures
françaises. On trouve aussi ce rapprochement au niveau de l'autonomie
locale haïtienne et celle de la France.
Etant donné qu'Haïti évolue
dejâ dans les rouages d'un système de droit de la famille Romano
germanique et un système de décentralisation à la
française en améliorant le système juridique y
afférent, en inculquant aux générations présentes
et futures une nouvelle mentalité démocratique dont les valeurs
leur seront transmises par l'Education et l'information. II faut aussi penser
à reformer le système d'éducation actuel dont les valeurs
sont basées sur des préjugés sociaux : par exemple,
un comptable se croit inférieur par rapport à un ingénieur
et un médecin. D'où la nécessité d'instaurer le
baccalauréat technique permettant de revaloriser tous les métiers
tels que tailleur, ébéniste, plombier, comptable etc...., pour
lesquels l'intéressé pourra désormais obtenir son
diplôme de Bac technique comme en France. C'est alors que les CT
haïtiennes auront la chance de promouvoir leur développement de
façon durable en pourvoyant à la formation de professionnels
compétents qui serviront de main-d'oeuvre qualifiée facilitant
les investissements industriels sur leur territoire.
En effet, dans le domaine de la formation, l'Etat devra
encourager les investissements du secteur privé par le biais de
certaines subventions, tout en exerçant un contrôle sérieux
en vue d'en renforcer la qualité. Aujourd'hui, à peine si l'on
peut recenser certaines Ecoles de droit dans les départements et
d'autre Ecoles supérieures de gestion qui, travaillant sans aucun
contrôle de l'Etat, délivrent des diplômes ne correspondant
qu'à une formation de piètre. Or, l'Education est, dans toute
société, une responsabilite de l'Etat. Mais, en Haïti, on en
fait comme on veut, à la mesure de la conscience de soi. Donc,
l'échec des CT en Haïti, ce n'est pas seulement une affaire de
textes de loi désuets, confus, imprécis ou inexistants, c'est
aussi l'échec de notre système éducatif qui ne peut plus
satisfaire les exigences d'un nouveau monde globalisé. Enfin, notre
fierté de peuple libre et indépendant est à la
risée de nos anciens colons ; c'est pourquoi il faut
révolutionner tout le système haïtien en commençant
par L'Education des jeunes. Une autre école haïtienne pour une
nouvelle Haïti. Quand les collectivités territoriales auront besoin
de ressources humaines qualifiées, elles n'auront pas á faire
appel d'offre á la république de Port-au-prince.
La création d'écoles professionnelles
publiques délivrant une formation jusqu'au niveau du Bac technique
permettrait a l'Etat de récupérer les grands cerveaux parmi les
plus défavorisés de la population haïtienne et de
réduire le taux de la délinquance juvénile dont
l'insécurité grandissante est l'une des conséquences
majeures. Même le Burkina-Faso, l'un des pays les plus pauvres de
l'Afrique, en est arrivé au Bac technique. Au niveau professionnel,
l'Etat est presque absent et ses investissements ne sont pas significatifs. A
supposer que des investisseurs étrangers veuillent installer à
Aquin une grande maison de fabrication de meubles pour les exporter en France
ou les touristes de toutes parts viennent pour acheter, et que l'on ait besoin
d'une cinquantaine d'ébénistes qualifies, ou les trouvera
-t-on ? D'où les fera-t-on venir ? De la république de
Port-au-Prince ? De Santo Domingo ?
De cuba d'où le président Préval a
fait venir en Haïti même des pécheurs de poissons ? Ce
qui montre qu'Haïti est dépourvue de toutes les technologies,
étant le bastion de l'archaïsme. II faut admettre que le chemin
à parcourir est long et difficile pour arriver à
opérationnaliser le système de décentralisation
postulé par la charte de 1987.
Si l'un des problèmes majeurs de la
décentralisation haïtienne est dû à l'absence d'un
plan national de réforme, le rapport de la commission française
présidée par Olivier Guichard sur la décentralisation peut
servir de référence à une éventuelle mise en route
des collectivités territoriales. Une telle application servirait
à l'Etat haïtien d'une sorte de courroie de transmission par
laquelle des discussions pourraient être engagées avec les
autorités de proximité Haïtiennes. Ce projet de
réforme faciliterait aussi une politique d'aménagement du
territoire qui provoquerait une meilleure répartition spatiale des
activités qui aujourd'hui enclavent la capitale. De plus, les
investisseurs s'installeraient alors dans des zones soumises à un
agrément financier plus fiable.
Une fois installé, un transfert d'industrie sera fait
selon le voeu de la théorie de la décentralisation spatiale.
Alors, non seulement les zones reculées et en retard vont
connaître un élan mais aussi la question de l'exode serait
à son tour atténuée car le pauvre paysan trouvera assez de
raison pour rester dans son monde de section communale.
La bonne gouvernance sera un autre avantage de ce projet de
réforme. A ce point, les dirigeants du centre seront sensibilisés
sur l'opportunité de substituer le collectif central au particulier de
proximité. L'application d'un tel modèle permettra aussi de
résoudre le patronage politique, car seul les gens formés pour
l'administration territoriale de proximité auront accès à
l'administration publique locale. La corruption et la gabegie administratives
seront résolues. A une telle application, les élus locaux agiront
dans un champ plus libre, ceci, sans contrainte politique d'un groupe ou d'un
homme mais alors, sous celle de la loi qui deviendrait une pour tous. A ce
moment, on assistera à une gestion de proximité acceptable par
les citoyens de la proximité.
Un contrôle administratif adéquat à la
française permettra de solutionner deux problèmes majeurs. Comme
en France, un contrôle à posteriori a permis de résoudre le
problème de la corruption. Le constat est que beaucoup d'élus en
France ont de grands problèmes avec la justice sur le chef d'accusation
de corruption, et ceci, dans les grandes comme dans les petites villes. Cette
formule française permettra aux citoyens administrés d'une
commune de s'interroger sur la gestion de ses élus comme sur l'exercice
de la déconcentration ; cela facilitera, une gestion transparente
et les risques inhérents à l'exercice d'un pouvoir
totalitaire.
D'autre part, la question d'ingérence soulevée
très souvent, dans l'intervention des organisations non gouvernementales
(ONG) se résoudra, car une fois résoudre le laxisme de l'Etat
avec des lois de programmation digne de nom, alors les activités de ses
organisations seront mieux coordonnées dans une vision de partenariat et
de concertation. Une fois fait, l'Etat, les collectivités locales et
l'organisation non gouvernementale pourront selon la priorité de la
Collectivité, définir des plans et des axes de
développement économique social et culturel dans l'harmonie
politique et pour le bien-être des collectivités locales. A ce
moment, le peuple haïtien au nom duquel de grandes sommes sont
signées et décaissées sera le grand
bénéficiaire de cette cohabitation structurelle et
administrative.
Pour terminer ce travail, il convient de faire remarquer que
les relations entre l'Etat central et les collectivités territoriales
des deux models étudiés, Mexicain et Français, sont en
bonne santé et donnent de bons résultats.
1.- Les entités fédératives constituent
l'instance suprême de décision dans leur cadre de
compétence.
2.- Il y a coïncidence des décisions entre la
fédération et les entités fédératives.
3.- Les entités fédératives se
donnent elles-mêmes librement leur propre constitution, à
travers laquelle elles organisent leur structure
gouvernementale sans toutefois
contrevenir à la constitution
générale, qui constitue l'unité de l'Etat
fédéral.
4.- Une division de compétences claire et nette est
établie entre la fédération et les entités
fédératives.
Par opposition au modèle mexicain, les structures du
modèle de l'Etat français se révèlent plus
classiques et mieux coordonnées à la matière.
Il faut enfin souligner, dans les deux cas
étudiés, que les autorités locales sont libres de prendre
une décision ou de poser un acte ceci toutefois dans les limites
fixées par la loi.
Somme toute, entre ces deux modèles
Mexicain et Français, lequel faut-il
recommander ou appliquer en Haïti ? Jusque là, le lecteur a le
libre arbitre d'en prendre partie après une lecture d'analyse claire et
nette qu'il aura lui même faite de ces deux modèles. Toutefois, le
modèle de l'Etat Français se révèle plus classique
et par conséquent, pourrait être mieux applicable en
Haïti.
Conclusion Générale
Voici dans ses grandes lignes le contenu de notre travail. Les
collectivités territoriales ont été la toile de fond de
notre démarche. Elles ont été mises en question dans tous
leurs aspects théoriques. l'Etat moderne, les collectivités
territoriales ont été étudiées dans leur fondement
historique, légal, leurs traits constitutifs, leurs
caractéristiques, leur évolution et leur fonctionnement dans
l'espace Haïtien. Le travail qui précède avait pour
visée de présenter l'état problématique du local
haïtien de l'Indépendance à nos jours,
particulièrement sous le joug de la Constitution Haïtienne du 27
Mars 1987.
La notion de collectivités territoriales a
été considérée dans un cadre global, sous un double
aspect : interne et externe, suivant qu'il s'agit d'Etat à
structures unitaires ou à structures fédérales.
D'abord, sur le plan externe, pour faciliter la
compréhension de l'importance de l'autonomie locale dans une vision de
développement d'un pays, une approche documentaire été
faite pour démontrer que la gestion de proximité est la
condition sine qua non à tout Etat qui souhaite un
développement pour arriver à un développement durable.
De 1816 à nos jours, il a été question de
mettre en évidence les bonnes intentions de nos législateurs et
constitutionalistes en ce qui a trait à la promotion de l'autonomie
locale Haïtienne. Par ailleurs, prêtons l'intention
particulière accordée aux collectivités territoriales dans
la constitution du 29 Mars 1987, intention qui traduit véritablement
sans tenir compte de son réalisme, le désir des constituants de
voir l'épanouissement de l'Etat Haïtien par la formule de
Tocqueville « small is beautiful ».
La constitution Haïtienne de 1987 sur l'autonomie locale
a été questionnée dans ses objectifs de créer un
autre Etat, avec un pouvoir central affaibli. La démocratie ne peut
être valablement née en sortant d'en haut mais à travers
des cellules de la société qui apprennent à être
responsables pour construire la vie commune, donc en bas.
La charte du 29 Mars 1987 a été
étudiée comme un socle, comme source première et pivot
d'un système juridique qui a pour raison d'être, l'organisation de
l'Etat et de la vie d'un peuple. Pour accomplir véritablement cette
tâche, la loi fondamentale devrait être l'oeuvre de cerveaux
qualifiés capables de comprendre à fond la réalité
sociopolitique et culturelle du peuple pour lequel cette loi d'organisation
sociale est envisagée ; ceci à travers des textes clairs
et explicites.
Nous avons démontré dans notre travail bien
qu'il ne soit pas une panacée, que notre constitution de 1987 n'a pas
fait de bonne récolte. Elle est défaillante en soi et porteuse
d'équivoque pour une gestion efficace des collectivités
Territoriales. Elle prévoit des institutions qui devraient organiser,
contrôler et faciliter une meilleure cohésion sociopolitique et
économique du pays sans moyen de contrainte.
En effet, la Constitution de 1987 n'est pas en elle-même
le problème donc, elle n'est pas le diable qu'il faut envoyer aux
enfers. Le quotidien Haïtien, pris soit endogène, soit
exogène, montre d'autres obstacles importants à une
véritable Autonomie locale en Haïti
Depuis 1987, les collectivités Territoriales
n'étaient pas à l'ordre de priorité des
législatures qui se sont succédé. Les lois de
programmation, d'interprétation et de réglementation
prévues par la charte du 29 mars 1987 ne sont pas jusqu'à date
élaborées, donc l'oeuvre est encore inachevée. Le statut
des élus locaux n'est pas actualisé pour l'adapter à la
réalité du moment.
La fiscalité locale encore sous le joug de la loi de
1982 nécessite une réforme en profondeur ; elle constitue
les principaux enjeux monétaires pour une autonomie effective des
Collectivités Territoriales.
Il a été question, dans cette démarche,
de mettre en évidence une absence, une sorte de complicité
systématique affichée par l'Etat Haïtien en ce qui a trait
à un développement local sérieux. Ce processus n'est pas
engagé voir soutenu par les acteurs liés et responsables d'un
changement réel du pays.
Le 4 Avril 1996, une loi sur les Sections Communales
a été votée, le constat montre qu'après environ une
décennie le résultat de cette loi en terme de recette est maigre
.Une preuve palpable est le fait que les élus locaux ne cessent de
revendiquer ou réclamer un mieux -être pour leurs communes.
Si la réforme relative au fond de gestion a quelque pas
de positif, elle a oublié cependant le citoyen. Elle a introduit des
correctifs qui ne sont pas cependant à la hauteur du
problème ; car accélérer la pression fiscale sur une
population sans emploi et sans revenu est synonyme de vouloir tirer du sang
dans les cailloux.
Notre approche ne veut pas borner le problème à
une simple question d'incompatibilité entre les textes juridiques
votés durant la période à la réalité sociale
et politique du pays. Mais d'autres facteurs susceptibles de blocage au
processus de la décentralisation ont été
étudiés.
Notons par exemple : l'interférence politique qui
constitue une sorte de poison au jeu normal des relations entre le centre et la
périphérie, sans minimiser les fonctionnaires
bénéficiaires de ce système centriste de la
République de Port-au-Prince.
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